Université de Tlemcen

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Université de Tlemcen
Faculté des Sciences Economiques et de Gestion
M. CHERIF Chakib
Maître de conférence : Faculté des Sciences Economiques et de Gestion
Fax : 213 7 21 26 97
Tel. : 07 21 30 74
Titre de la communication : Intégration, coopération régionale et insertion dans
l’économie mondiale.
Depuis la fin de la décennie 80 et surtout après l’effondrement du bloc socialiste, le
monde a connu des changements profonds et rapides.
Ces changements, qui s’orientent vers la mondialisation de l’économie (1) et donc vers
une nouvelle division du travail, provoquent bien des interrogations emportant l’enthousiasme
des uns et l’inquiétudes des autres.
Sur le plan économique, ce changement qui se caractérise par une plus grande
multinationalisation de la production s’est accompagné d’une concentration régionale des
marchés qui s’est opérée dans le respect des règles du G.A.T.T et aujourd’hui de l’O.M.C.
La constitution de vastes zones régionales d’échanges est venue structurer le
commerce mondial autour de trois zones, à savoir l’APEC (Forum de l’Amérique, de l’Asie et
du pacifique non compris les U.S.A. – Canada – Mexique – Inde et le Pakistan),l’ALENA
(U.S.A. – Canada – Mexique ) et l’Europe.
La dynamique de ce type d’intégration régionale s’explique d’une part par la volonté
des pays de constituer des marchés vastes susceptible d’offrir de nouveaux débouchés aux
entreprises des pays membres, et d’autre part par les effets bénéfiques en termes de croissance
dont nul ne vient contester le bien fondé.
En face de ces ensembles et surtout Européen cimentée par une monnaie unique et
dont les perspectives affichées de façon plus au moins explicite sont de parvenir à une union
politique, le Maghreb qui occupe une partie importante de la façade occidentale sud de la
méditerranée, ne doit pas ignorer les impacts directs et indirects de ce processus.
1
M. Abed. El. Djabri : « La mondialisation », intervention ; IMA à Paris en 1998. Repris par le quotient.
2
Divisés jusqu’ici par des querelles politiques et idéologiques et possédant des
économies totalement extraverties et dépendantes, les pays du Maghreb se trouvent confronter
à de nouveaux problèmes liés à la logique de la mondialisation et des blocs régionaux.
Comment dans ces conditions défavorables affronter les défis de la concurrence et
réussir les conditions d’une intégration à l’économie mondiale dans sa forme nouvelle.
La création d’une Z.L.E. qui englobe les pays de la Méditerranée occidentale (Maroc –
Algérie – Tunisie) au sud et (Espagne – Portugal – France – Italie) au nord comme étape
transitoire vers la constitution d’une économie régionale intégrée constitue un pari
formidable, d’autant plus que la conférence de Barcelone fin décembre 1995 sur la Z.L.E.
Euro-Méditerranée et intrazone Méditerranée (Méditerranée occidentale) dont les lignes ont
été tracées à la réunion du Parlement Européen de Cannes en juin 1995 s’inscrivent dans le
cadre stratégique de déploiement de l’Europe dans son flanc sud et donc favorable à la
constitution d’un tel espace.
Ce processus offre au Maghreb une occasion historique de point de vue de sa propre
intégration et d’une intégration future à l’économie mondiale dans de meilleurs conditions qui
ne se pose plus en termes de choix mais de nécessité.
Il est donc fondamental pour les responsables Maghrébins de comprendre la carte
géographique qui se met en place dans le cadre de ce nouveau système (horizon 2000–2020)
afin d’inscrire leurs actions concrètes au sein d’un environnement évolutif, d’autant plus que
pour les pays du Maghreb ; la zone de libre échange avec l’Europe occidentale et surtout
l’Europe du sud est leur espace naturel comme en témoigne leurs échanges commerciaux que
nous verrons plus loin.
J’aborderais ce thème en deux parties interdépendantes.
1- Les fondements de l’économie mondialisée.
2- Z L E, Régionalisation et les conditions de sa réussite
Cette articulation s’explique par le fait que l’on ne peut isoler l’espace Maghrébin
d’une manière particulière et l’espace Méditerranéen dans sa partie occidentale d’une manière
générale des mutations économiques mondiales.
Aussi en parlant de régionalisation ; cela signifie mouvement d’interdépendance des
économies d’une région en vue de donner naissance à un espace économique intégré sur la
3
base d’une coopération entre les pays membres et non pas sur leurs confrontations.() par une
politique d’intégration réfléchie qui défend leurs intérêts économiques dans cet espace.
I-
Les fondements de l’économie mondialisée
La notion de globalisation est certes encore assez vague, mais si elle demeure
dans la trajectoire implacable de libéralisme ; la mondialisation n’est pas une simple étape du
commerce transnational ; elle est l’expression d’une réalité en construction ayant ses propres
caractéristiques et développant ses propres stratégies.
Loin d’être une simple notion à la mode, la Mondialisation traduit toute la logique
historique du commerce international et annonce un espace économique planétaire triomphant
des barrières douanières et tarifaires et réduisant la vanité protectionniste des frontières
traditionnelles.
Il est possible globalement de ramener son émergence au concours de trois facteurs :
1. Un facteur géopolitique avec l’effondrement du monde bipolaire.
2. Un facteur technologique avec l’explosion des moyens de communication et
d’information reflété par le développement d’Internet et du multimédia qui permet le
traitement de l’information en temps réel.
3. Un facteur organisationnel avec l’accélération à la faveur des accords du G.A.T.T et
aujourd’hui de la mise sur pied de l’O.M.C.(2)
Elle se manifeste par le développement des échanges de biens et services, de diffusion
de connaissance scientifiques et technologiques et par l’homogénéisation des comportements
de consommations particulièrement des jeunes générations (même style d’habillement, même
slogans, mêmes séries télévisées, mêmes chansons …).
Aussi cette globalisation se manifeste
surtout par le développement des
multinationales et la multinationalisation des appareils productifs ainsi que la formation des
vastes marchés régionaux.
Robert Reich
(3)
; Professeur à Harvard, Ex-Secrétaire d’Etat Américain au travail
illustre bien cette situation de multinationalisation en écrivant :

P. Michel Matheu et J.P Benghori : Quelle régionalisation pour les politiques de soutien à la technologie.
Revue d’économie industrielle. Numéro spécial 1983.
2
Jacques Adda : La mondialisation de l’économie
- Genèse collection Approche
- Casbah – éditions – Alger 98.
3
Robert Reich : L’économie mondialisée. Dunod. Paris 1993.
4
« Depuis 1991, Mazda, produit des véhicules Ford dans le Michigan (U.S.A) et les exporte
sous cette marque au japon. En même temps, Nissan conçoit des camions dont elle fabrique
les pièces en Californie, en assure le montage par Ford dans l’Ohio. Le produit est
commercialisé au Japon et aux U.S.A aussi bien par Nissan que par Ford ».
Et Robert Reich s’interroge qui est Ford ? Mazda et Nissan ?
Ainsi les trois firmes sont intégrées dans le marché international, et donc se substitue à la
configuration passée (Entreprise mère – filiale), l’entreprise considérée comme réseau
d’éléments complémentaires et intégrés par une logique dont les deux leviers sont
productivité et rentabilité.
Ne relevant d’aucun pays, ayant un caractère supranational, les firmes investissent,
produisent sous traitent et vendent leurs produits, leurs méthodes de marketing, le savoir faire
sous forme d’usines, de points de vente et publicité dans le monde entier. C’est-à-dire « le lieu
effectif où s’affrontent l’offre et la demande, le lieu effectif où se constitue l’accumulation du
capital ».(1)
Dans l’économie globale (mondialisée) ni le capital, ni le travail, ni les matières
premières, ne constituent le facteur déterminant en soi.
L’important est la combinaison optimale des facteurs de production. Pour
établir cette liaison, la firme fait fi des frontières en exploitant au maximum
l’information.
Au fur et à mesure que les coûts de transport baissent avec le développement
technologique et avec la révolution de la Bureautique, , la télématique et la
centralisation des banques de données (informatiques) les marchés s’ouvriront et le
fondement de la réussite sera le groupe (fusion et intégration entre entreprise) et non la
compétition individuelle.
Sur le plan des échanges ; les grands traits et l’avenir de l’économie mondiale
se situent au sein du triangle APEC (Forum de l’Amérique, de l’Asie, et du Pacifique),
de l’ALENA (zone de libre échange, USA, Canada, Mexique) devant être étendue à
l’ensemble du continent americain et de l’Europe dont l’extension est prévue
jusqu’aux portes de la Russie.
Il est utile de mesurer le poids de ces grands espaces économiques.

APEC : (non compris les USA – Canada – Mexique – Inde et Pakistan), elle constitue en
moyenne 20% environ de la PIB mondiale avec 1,71, dont la Chine représente 1,17
milliard. Cette zone concentre 13,50% de commerce mondiale extra régional et 12% intra
régional, soit 25,5% . La production brute par tête d’habitant est d’environ 10.360$, mais
avec de grandes disparités.
1
Abdesselam Ali-Rached : Les assauts furieux de la mondialisation. El-Watan. 6 et 7/12/1999.
5

L’ALENA : Cette zone totalise en moyenne 28% de la P.I.B intérieure mondiale avec
10,50 % du commerce extra régionale et 5,1% du commerce intra régionale soit 15,6%
pour une population de 370.106 habitants.
Le B.N.P par tête est de 23.000 au U.S.A, 20.690 au Canada et 3.540 au Mexique.

L’Europe :
Avec ses 370.106 habitants, l’Europe représente environ 32% de la PIB mondiale.
12,7% du commerce extra régionale, 33,4 % du commerce intra régionale, soit au total
46,1% du commerce mondial arrivant en tête avant l’APEC et démontrant sans aucune
contestation du fait du faible volume de la population, qu’elle constitue l’espace
économique le plus riche de monde, ce qui contraste avec le PNB / tête d’habitant qui est
de 14.200$ ; mais qui cache des disparités importantes entre certains pays membres
(prédominance de l’Allemagne et la France au dépend des pays comme l’Italie, Portugal,
Espagne).
Pour rester le continent le plus riche du monde, une étude réalisée par le centre
d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII) publiée en 1992 sur
l’économie mondiale horizon 1990-2000 et au-delà, montre d’une manière claire la
nécessité pour l’Europe d’une croissance soutenue de plus de 4,5% par la mise en place :
1. de nouvelles capacités de financement.
2. par une réadaptation de son appareil productif tenant compte de l’évolution
technologique dans un monde tripolaire.
3. Aussi la même étude recommande l’accélération de la construction Européenne et
l’élargissement de cet espace à d’autres régions pour faire face au poids grandissant de
l’APEC et de l’ALENA sur le plan de la production et de l’échange international.
En effet, la création de l’Euro comme monnaie unique et d’une banque centrale unique
ainsi que la volonté d’intégrer au nord de nombreux pays de l’ex-bloc socialiste (Pologne –
Hongrie – Tchéquie …) et au sud les pays du Maghreb (Maroc – Tunisie – Algérie) rentre
dans le cadre de ce processus et nous fait penser que cet espace en voie de constitution, sera à
l’avenir un des réseaux les plus puissants du monde.
La politique méditerranéenne rénovée initiée par l’UE avec son volet financier
(1)
confirme la volonté européenne de faire évaluer les rapports avec le Maghreb dans un cadre
1
L’aide financière accordée aux pays tiers méditerranéens pour 1992-1996 s’élève à 4405 millions d’écus. Le
monde. 12/03/1992
1
6
communautaire. Cette orientation se veut une réponse à un contexte nouveau caractérisé par
une libéralisation accrue des échanges dans le cadre d’une économie de plus en plus
mondialisée et des tendances à la régionalisation. Et surtout, des préoccupations
exclusivement d’ordre securitaire. Il s’agit d’agir contre les risques d’instabilité régionale que
constituent les trafics en tout genre, et notamment les drogues, les pressions migratoires en
provenance du sud nés des déséquilibres économiques entre les rives de la méditerranée.
La déclaration finale de la conférence Euro-Méditerranéenne organisée à Barcelone les
27/28/11/95, qui s’articule autour de trois (03) types d’accords : Politique-sécurité,
coopération culturelle-technologique et scientifique et enfin économique avec la création de la
zone de libre échange dans la perspective de la construction d’une région économique
intégrée confirme l’importance de cette espace pour les deux rives méditerranéenne.
Face à ces bouleversements (grande multinationalisation – formation d’espaces
régionaux) il est suicidaire pour chaque pays du Maghreb pris individuellement de faire
cavalier seul ; car c’est l’antonomie du développement en ce début du 21ème siècle.
Aussi, l’intégration forcée dans l’économie mondiale n’est certainement pas la
solution appropriée du point de vue de la dynamique de développement de ces pays pour deux
raisons :
1- d’abord de façon générale, on trouve dans ces pays une série de caractéristiques des
systèmes productifs des pays en développement structurellement faibles.
Une extrême dépendance des activités productives à l’égard de la rente dont l’Algérie
est le parfait exemple. Dépendance extérieure en particulier en matières de technologie et de
biens d’équipements, le faible degré d’intégration malgré les protections, dépendance
financière, …
2- Ensuite et plus spécifiquement, il y’a lieu de relever les niveaux faibles de productivités et
l’importance de la sous-traitance pour les pays exportateurs comme la Tunisie et le
Maroc.(2)
En effet, une partie importante sinon la majorité des entreprises surtout industrielles
fonctionnent selon un modèle dans lequel on joue plus sur les bas salaires que sur la
productivité. Dans tous les pays du Maghreb surtout exportateur comme le Maroc et la
Tunisie au lieu de réussir à enclencher une dynamique de croissance de la productivité
2
Jacque de Bandt : Quelle industrie, quelle invention dans l’économie mondiale pour les pays du Maghreb.
Revue de l’association des économistes Marocains.
7
entraînant les salaires ; on a maintenu et on maintient toujours plutôt des salaires relativement
bas pour compenser les productivités faibles.
Aussi, le niveau de qualité/prix des produits, par exemple du textile et de l industrie
agro-alimentaire dans ces pays a permis à un moment donné d’assurer une assez bonne
insertion dans les échanges internationaux. Mais ce n’est plus le cas ; car l’offre de tels
produits banals et de qualité moyenne est surabondante à des prix toujours plus bas, grâce à
des niveaux de salaire en devise toujours plus bas dans les pays les plus pauvres, comme le
montre le tableau n° 1.
Tableau n° 1 : Coût de délocalisation.
Prix de revient total d’un chemisier en polyster.
Nature des coûts
Structures du coût de revient
Indonésie
en FF
Coût Production Moyen de Production
comparatifs
46,8
%
Maroc
en FF
%
France
en FF
%
83,0
56,4
86,9
81,5
100
8,3
4,5
6,9
0
0
1,8
0,6
0,9
0
0
6
3,38
9,8
0
0
100
64,9
100
81,5
100
Charge salariale
Transport et autres
Coûts spécifiques Coût des défauts (non maîtrise 4,68
technologique)
Coûts financier (retard de 1,02
livraison, risque de change,
frais financiers,…)
Autres coûts supplémentaires 3,4
(stock de sécurité, …)
Prix de revient total
55,9
Différentiel de coût
Source : P. Beckouche (1993). p. 91.
L’intégration des entreprises de ces pays dans l’économie mondiale par l’ouverture des
marchés, avec des niveaux de productivité faible, les mettraient en difficulté, et leurs
capacités d’ajustement se dégradant, elles sont éliminées.
Certes ces entreprises peuvent évidemment résister à titre immédiat, en baissant les
prix (réduction des marges) ensuite en baissant certains éléments de coût en particulier les
charges salariales (soit directement, soit par la dévaluation). Mais les limites de ce schéma
8
sont évidentes, car la réduction des marges dégrade les résultats et affecte automatiquement
les ressources déjà insuffisantes et toute adaptation sur le dos des salariés, affecte
automatiquement les pouvoirs d’achats des travailleurs déjà bas ce qui provoquera des
revendications et entraînera des conflits sociaux qui seront une source d’instabilité
sociale supplémentaire. Situation qui affaiblira d’avantage les pays Maghrébin dans la
concurrence internationale.
En ce qui concerne, la sous-traitance ; on sait l’importance qu’elle a pris dans
l’économie du Maroc et de la Tunisie.
La sous-traitance avait évidemment l’énorme avantage - une fois de plus dans des
circonstances données - d’une part, de ne pas devoir prendre en charge la fonction de
conception de produit et, d’autre part, d’assurer des débouchés somme toute facile.
Elle a cependant deux types d’inconvénients graves, d’une part, de ne pas avoir fait les
apprentissages de fonctions de conception et donc dépendante puisque ne maîtrisant qu’une
partie des fonctions de production, et, d’autre part, d’être à la merci des conditions imposées
par les donneurs d’ordre, lorsque ceux-ci se mettent dans des circonstances actuelles à vouloir
profiter des offres surabondantes à bas prix de la main d’œuvre qui se multiplient de plus en
plus dans le cadre de la globalisation.
Compte tenu d’une part des conditions actuelles du fonctionnement de l’économie
mondiale, caractérisée par une plus grande multinationalisation de la production, la formation
de groupements régionaux et une grande concurrence et, d’autre part, par le faible niveau du
développement des économies du Maghreb en général et de leurs entreprises en particulier,
l’option de l’intégration à outrance dans l économie mondiale n’est pas, à titre immédiat, la
solution adéquate pour ces pays.
Ceci nous conduit au deuxième point.
II-
ZLE dans la perspective d’une régionalisation :
La meilleure chance pour le développement des pays maghrébins semble être de miser
sur la création d’une zone de libre échange avec les pays Européens du sud (France–Portugal–
Italie–Espagne), comme une première étape à la constitution d’une économie régionale
intégrée. Le couple ZLE et régionalisation s’articule parfaitement dans la mesure ou une zone
de libre échange apparaît une condition nécessaire de départ à l’accord d’intégration
régionale. En effet, pour mieux comprendre cette relation il est important de définir le concept
de Z.L.E et les étapes par lesquelles il faut passer pour arriver à une intégration régionale.
9
Une Z.L.E est définie comme une zone géographique délimitée par le territoire des pays
membres, à l’intérieure de laquelle les taxes douanières sont supprimées (Couet et Weber,
1995).(1) Celle-ci est une première étape d’un long processus en vue d’une intégration
économique à un ensemble régional (cas UE/PTM, ALENA, …). A la Z.L.E succède l’union
douanière qui est une Z.L.E assortie d’un tarif douanier extérieur commun. Cas des pays
membres de la communauté européenne réalisée en 1968 ou le cas de l’UE avec la Turquie.
Le marché commun se définit comme une union douanière assortie de politiques commune
mise en place par les pays membres (cas de SME en Europe) … puis le marché commun qui
est l’étape ultime d’un processus « d’intégration régionale » qui se définit par un marché
constitué par plusieurs pays entre lesquels il y’a suppression des frontières et une libre
circulation des marchandises, des capitaux et des personnes (cas du marché unique européen
en 1993).
Chronologie d’un processus d’intégration régionale
Accords bilatéraux ou multilatéraux

Zone de libre échange

Union douanière

Marché commun

Marché unique (intégration régionale)
Ainsi définie, la Z.L.E se présente comme un territoire d’échanges où l’enjeu est le
démantèlement progressive des barrières tarifaires et non tarifaires (sur 12 ans dans le cas de
l’accord entre U.E et la Tunisie et le Maroc).
La Z.L.E est un des quatre volets de l’accord d’association signé entre l’U.E et la Tunisie et le
Maroc ; dont on peut synthétiser globalement l’objet :
1- un volet politique et sécuritaire.
2- Un volet social et culturel.
1
10
3- Un volet commercial (Z.L.E).
4- Un volet économique (Partenariat-I.D.E).
Ce n’est pas le lieu ici de discuter et de développer le schéma de cette zone de libre
échange. Je me contenterai uniquement de quelques remarques qui puissent faciliter son
développement que je pense à la fois faisable et viable.
1- La proximité géographique et culturelle des deux rives.
D’abord sur le plan géographique, une largeur maximum d’un millier de kilomètres
compte non tenu des îles qui ne dépasse pas divers endroits quelques centaines, voir
même quelques dizaines de kilomètres sépare le Maghreb de cette Europe Latine.
Ensuite sur le plan culturelle, la majeur partie du Maghreb porte l’empreinte d’un
longue et profonde pénétration latine. L’homogénéité linguistique, la présence des
ruines Romaines qui font partie du patrimoine culturel et des ruines Arabo-Islamique
sont autant de caractéristique de cette proximité culturelle.
2- La dimension économique : L’importance des échanges avec ces quatre pays (75%
des importations Maghrébines en provenance de la Communauté se concentrent
sur ces quatre pays et 68 % de leurs exportations se font vers ces pays).(1)
3- La dimension sociale : Une autre forme d’interpénétration est l’immigration sudnord qu’il est impossible d’occulter. En effet, en plus de la proximité géoculturelle et de l’interpénétration économique, la dimension humaine est très
importante comme on témoigne la présence significative de la communauté
Maghrébine dans les quatre pays de l’Europe Latine estimée à plus de cinq
millions d’habitants. Sur ce plan, le Maghreb a donc un rapport quasi-naturel avec
le monde de la méditerranée occidentale, un rapport d’un autre nature que celui qui
l’entretient avec d’autres aires y compris le monde arabe avec lequel ce rapport est
d’ordre essentiellement symbolique. Même si les conditions actuelles ne sont pas
favorables à son évolution et à son acceptation, cette immigration est considérée
comme un facteur de rapprochement entre les deux rives et donc un atout
supplémentaire pour la construction de cet ensemble régional Maghrebo-Latin.
4- Enfin, la signature de l’accord d’association entre la Tunisie, le Maroc et
prochainement l’Algérie avec l’U.E est un atout qui peut faciliter et accélérer la
constitution de cette zone de libre échange.(1)
1
1
L’économiste Maghrébin : n° 164.166 et 172 - année 1996
Liberté économique du 14 au 21/ 1999.
11
Tableau 2 : Indicateurs relatifs aux échanges et aux mouvements de capitaux.
Importation de l’U.E *
Exportation de l’U.E *
IDE **
Aides **
Algérie
62,2
63,4
5
350
Maroc
61,4
56,5
417
1904
Tunisie
80
43,2
250
680
* en % du total 1996.
** en millions de dollars U.S.
L’espace formé au niveau du bassin Méditerranéen occidentale est susceptible d’offrir
aux quatre pays Européens, non seulement un marché de plus de 75 millions de
consommateurs mais aussi des possibilités de délocalisation plus rentable.
Aussi l’impact sur les pays Maghrébins sera positif ; puisque cet espace est de nature à
créer des conditions favorables au développement du partenariat et de l’investissement. En
effet, l’existence d’une Z.L.E est un signal majeurs aux investisseurs potentiels, puisque de
tels accords augmentent la confiance des firmes étrangères candidates en minimisant les
risques politiques, sociaux et financiers décriés par les sociétés d’assurances comme la
(CoFace- Sace,…) tout particulièrement lorsqu’il s’agit d’investissement dans les pays en
développement.
Aussi, la création et la réussite de la zone de libre échange dépend d’un certain
nombres de conditions.
1. De fortes motivations et volontés des acteurs individuellement et collectivement, une forte
mobilisation de ressources et efforts et de fortes coordinations et convergences des
politiques économiques. Cela voudra dire qu’il y’a lieu de dépasser le nationalisme
chauviniste étroit des pays Maghrébins et l’esprit néocolonial et dominateur chez les
Européens.
Accords d’association Euro - Maghrébins.
Partenaire
Conclusion des
négociations
Signature de l’accord
Entrée en vigueur
Tunisie
Maroc
Algérie
Juin 1995
Novembre 1995
Négociation en cours
Juillet 1995
Février 1996
-
Mars 2000
//
-
12
2. De la volonté politique réelle des pays européens d’aider les pays Maghrébins à faire face
dans une première phase aux coûts économiques et sociaux () de la zone de libre échange,
par la mise en place d’un certain nombre de mesures telles que :
a) Allègement du fardeau de la dette ou sa transformation en investissement direct. Ce
processus est possible puisque le Maroc bénéficie de ce traitement dans le cadre de ses
relations privilégiées avec la France. Toutes les expériences le montrent, les effets de
la ZLE sont quasiment nuls, voir même catastrophiques sur le développement
économique et social en cas d’absence d’investissement : or la méditerranée (et a
fortiori le Maghreb) est la région qui attire le moins de capitaux dans le monde. Entre
1982-1992 ; elle a accueilli 6,7% du total des investissements en direction des pays en
développement et seulement 1,3% des flux mondiaux. (Voir tableau 3)
Un effort supplémentaire de l’UE doit se faire surtout en direction de l’Algérie qui
bénéficie d’investissements étrangers hors hydrocarbures très faible, en raison du fait
qu’elle soit classer dans la catégorie « Risque élevé ».
Sur près de 2 milliards de $ d’engagement hors hydrocarbures fin 1991 par la France,
l’Italie et l’Espagne, il n’a été investi qu’entre 100 et 150 millions à la fin de 1999.(2)
Tableau 3 : IDE au Maghreb par rapport à l’ensemble de la méditerranée en 1996.
Pays
I.D.E
En million $ U.S
%
Algérie
50
0,14
Maroc
417
11,8
Tunisie
250
7,13
Égypte
1000
28,5
Source : Béraud. 2000.
b) Une aide publique conséquente au développement à la mesure des ambitions de la
région surtout au niveau des infrastructures de base, télécommunication, éducation,
formation, recherche, santé, logements, environnement, eau … etc.
3. Mise en place de mécanismes objectifs de compensation de la détérioration des termes de
l’échange, nées des pertes fiscales dues au démantèlement tarifaires.(1)

Aït-Amara : « Le Maghreb et la zone de libre échange Euro - méditerranéenne » revues recherches
internationales n° 51 /1998/
2
1
Rapport de la banque d’Algérie. 1999
Rapport du FMI sur la zone de libre échange Tunisie – Euro : 1998
13
En effet ; parmi les risque prévisibles dus au démantèlement tarifaire, il y’a lieu de voir un
nombre important d’entreprise et autres activités dans les pays maghrébins éprouver des
difficultés et même de les voir disparaître, si des dispositions ne sont pas prises.
Avec les pays du Maghreb, l’Union Européenne impose des restrictions importantes qui
désavantagent considérablement ces partenaires. En effet, ces accords excluent du système
d’échange les produits agricoles et de la pêche et surtout la circulation des personnes, ce
qui constitue un frein considérable aux échanges liés à la formation et la culture, aux
transfert technologiques dont le Maghreb a grandement besoin.
Quel intérêt pour le Maghreb d’accepter ce type de conditions désavantageuses et qui sont
en plus, en contradiction avec le principe de libre échange comme la zone en porte le titre.
Ce n’est pas le moindre des paradoxes dans un monde de libéralisation globale et où les
pays les moins développés sont appelés à démanteler de façon unilatérale leur système de
protection tarifaire.
Étalé jusqu’en 2010, le démantèlement tarifaire (plus de 35% pour les pays du Maghreb et
seulement 14% pour Mexique) va entraîner un certain nombre de désiquilibre macroéconomique et financiers : Déficit de la balance commerciale, déficit budgétaire,
dévaluation, etc. Selon B. Khadra, les diminutions des recettes douanières risque
d’entraîner une baisse des recette budgétaires (10% du total et 3% du PIB au Maroc et
18% et 6% en Tunisie) qui va pousser les Etats à augmenter ses recettes fiscales
internes.(2) dans le même cadre, l’auteur estime que le démantèlement tarifaires sans
compensation conséquente entraînera à terme la disparition de 30 à 40% des segments de
l’appareil de production dans les trois pays du Maghreb. L’argument avancé par les
experts de l’U.E d’une dynamisation bénéfique des économies Maghrébines comme cela a
été le cas avec les pays d’Europe du sud est un leurre si. des compensations conséquentes
ne seront pas débloquées pour les PTM.
Les différences de développement sont trop importantes et aucune comparaison n’est
possible car les écarts de PIB en parité de pouvoir d’achat (PPA) sont sans commune
mesure entre pays du sud et les pays du Maghreb.
Tableau 4 : PIB/Hab en Parité de pouvoir d’achat en %.
1970
1980
1994
les effets négatifs pour la Tunisie de l’abolition de D.D sur les produits d’origine U.E sont estimés à la fin de la
période, en 2008 à 1425, 15 MD tunisiens.
2
B. Khadra : « Partenariat Euro-Méditerranéen ». L’Harmattan 1997.
14
Algérie
25
25
19
Maroc
21
23
21
Tunisie
23
29
30
Grèce
49
56
51
Espagne
72
72
77
Portugal
53
59
68
Source : I. Bensidoun et A. Chevallier : « Le pari de l’ouverture
Euro-Méditerranéen ». Economica, 1996. p. 39
4. Une autre condition aussi importante, consiste en l’exigence d’une stratégie de
restructuration par la mise en place d’une spécialisation régionale en fonction des
avantages comparatives de chaque pays et tenant compte des intérêts et des spécificités
de chacun et de la mise à niveau des entreprises maghrébines moyennant l’incorporation
ou l’adjonction de technologie et de méthode de management moderne.
Pour que les effets de la ZLE soient réellement positifs, il ne faut pas enfermer les
économies des pays Maghrébines dans des spécialités peu porteuses mais de favoriser des
filières dynamiques et entraînantes. Le problème des économies Maghrébines ne se pose
pas en termes d’ouverture puisque le degré d’insertion de la plupart de ces économies est
même plus élevé que le Mexique. Ce qui caractérise le Maghreb c’est une spécialisation
dans des segments sans grand avenir : Textile, produits agricoles, phosphate pour le
Maroc et la Tunisie et dans les hydrocarbures pour l’Algérie.
5. Le libre échange et le partenariat ne signifie pas la croissance et le développement s’il
n’est pas accompagné de reforme radicale et profonde. N’oublions pas que les quatre pays
européens sont liés avec l’OMC par un accord vu que l’UE est membre de cette
organisation. Donc il est urgent pour l’ensemble des pays maghrébins et surtout l’Algérie
de parachever les réformes engagées (Privatisation, réforme bancaire, fiscale, etc.) .Mais
comme le note J,ould Aoudia, le faible degré d’industrialisation de la société, l’importance
de l’économie non officielle sur tout en Algérie et au Maroc et l’opposition de puissants
intérêts rendent difficile la mise en œuvre de ces réformes.
La question se pose alors de la capacité du système politique et de l’Etat à conduire ces
mutations nécessaires.(1)
Conclusion :
J. Ould Aoudia : « Les enjeux économiques de la nouvelle politique méditerranéenne de l’Europe ». Revue
Monde Arabe-Maghreb- ??. n° 153.
1
15
Il n’est pas possible, pour les pays du Maghreb, de rentrer de plein pied, dés
maintenant dans cette « économie mondialisée » en raison de leurs retards
considérables.
Aussi, il ne sera pas possible non plus d’y accéder à terme sans une préparation
systématique.
La constitution d’une zone de libre échange en Méditerranée occidentale
comme une première étape à la construction d’un espace économique régional intégré
peut constituer une étape transitoire pour les pays du Maghreb pour leur intégration
dans l’économie mondiale, non sans heurts majeurs, mais avec moindres coûts
économiques et sociaux. La ZLE constitue une condition nécessaire mais insuffisante
pour garantir un afflux systématique des investissements. Il faut conjuguer au libre
échange, des politiques économiques internes appropriées, faute de quoi, le pari de
l’ouverture économique des pays Maghrébin se transformera en un enjeu à hauts
risque.
Ce schéma est sans doute le seul qui peut permettre de pousser à l’avant la
croissance dans las pays maghrébins, à relever le niveau de compétitivité de leurs
entreprises, de bénéficier d’investissements européens directs, de satisfaire les besoins
essentielles de leurs populations et à réaliser leur intégration tant recherchée mais
jamais réalisée. C’est ainsi que je vois, pour les années à venir, les possibilités de
développement économique des pays maghrébin, du moins dans les grandes lignes,
dans un monde qui se caractérise de plus en plus par l’interdépendance.(2)
2
Abde Mebtoul : « Relations Euro-Maghreb ». quotidien d’Oran. 28/12/1998.
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