Marie Antoinette (personnage historique) Chers amis du 21ème siècle, Cela n’a pas toujours été facile d’être une Reine de France d’origine étrangère ! Il faut dire que mon mariage avec Louis XVI était un arrangement politique et que je m’intéressais assez peu aux affaires du pays. Pourtant, au moment où je suis devenue reine, j’avais écrit à ma mère, l’impératrice MarieThérèse : « Même si Dieu avait décrété que je naîtrais pour occuper un jour le rang que j’occupe aujourd’hui, je ne peux que m’émerveiller de ce don de la Providence grâce auquel, moi, la plus jeune de vos enfants, j’ai été choisie pour devenir reine d’un des meilleurs royaumes d’Europe. ». Malheureusement, je connaissais mal l’art de gouverner, je préférais les jeux et les distractions. Très vite, on m’a surnommée « Madame Déficit »… On a tout dit de moi, des vérités, mais aussi beaucoup de mensonges, et je n’ai pas eu l’occasion de me défendre et de rétablir la vérité. Aujourd’hui, je compte sur vous pour écrire mon histoire. Je vous demande donc de rédiger mon journal intime pour que je puisse faire entendre ma version de l’Histoire. Surtout, soyez fidèles au déroulement des événements et tâchez de comprendre comment j’ai vécu la Révolution française…. Archiduchesse Maria Antonia Josepha Johanna, fille de Marie-Thérèse de Habsbourg, impératrice du Saint Empire romain des nations germaniques et de feu l’empereur François de Lorraine, dite Marie- Antoinette, reine de France Post Scriptum : Pour vous guider, je vous indique les dates que vous devrez retenir pour rédiger mon journal intime : ce sont les moments les plus décisifs de la Révolution française. - fin 1788- début 1789 - 5 mai 1789 - 14 juillet 1789 - été 1789 - 5 août 1789 - 26 août 1789 - 14 juillet 1790 - 10 août 1792 - 22 septembre 1792 - 21 janvier 1793 Cahier de doléance, Le 21 Janvier 1789, à Versailles Depuis quelques temps, Versailles est très agité. Chaque jour, des centaines de cahiers de doléances arrivent dans les bureaux du palais. Je me souviens de la discussion qui a mené Louis à cette décision, malgré l'opposition de ses ministres et conseillers. Il avait convié un de ses amis à un dîner auquel j'assistais. L'ami et ministre, Mr de Necker, avait abordé le sujet de la sorte : " Le peuple est en crise, la mort est dans tous les esprits et j'ai bien peur que cela n'empire ... - Voyons, mon ami, ne dramatisez pas ! avait tenté de le rassurer Louis. Tout cela n'est dû qu'aux mauvaises récoltes. Bientôt, ce ne sera plus qu'un mauvais souvenir. - Sire, vous n'y pensez pas ! Si vous ne faites rien, le peuple va se révolter ! Tôt ou tard surviendra l'explosion !! s'était emporté Necker. - Très bien, que diriez-vous de créer à nouveau les cahiers de doléances que mes ancêtres avaient inventés, dans toutes les contrées, toutes les villes et tous les villages ? Ainsi tout citoyen pourra s'exprimer et formuler ses plaintes. Ceci calmera les esprits et reposera la France jusqu'à ce que je trouve une solution pour le peuple, avait exposé Louis. - Merci, Sire, vous ne le regretterez pas ! avait déclaré Necker." Voilà comment tout avait commencé. Je puis vous l'avouer maintenant, j'éprouvais quelque réticence à ce propos. Je fus peu enthousiaste mais de toutes façons, donner mon avis n'aurait servi à rien car dans ce royaume qu'est la France, personne ne me prête oreille attentive et tous pensent à la cour que le but de ma vie n'est que jeux et loisirs. 8 mai 1789 Cet après-midi, j’allai rendre visite à la marquise de Beaumont pour ma partie de cartes habituelle. Tout en jouant, nous bavardions de choses et d'autres. C'est ainsi que j'appris que son mari, Monsieur le marquis de Beaumont, avait participé trois jours auparavant à l'ouverture des états généraux supervisés par le roi. Celui-ci s'était répandu en paroles inutiles. La moitié des députés s'était assoupis, tandis que d'autres bavardaient paisiblement avec leur voisin. Monsieur le Marquis dit s'y être ennuyé à mourir. Il est étrange que je ne l'aie pas vu, puisque j'étais évidemment présente. Mais il y avait tant de monde ... c'eût été difficile de retrouver une connaissance parmi toute cette foule. Pour ma part, je dois vous dire que je n'ai pas trouvé cette réunion très intéressante, moi non plus ! En fait, je ne me sens pas concernée par toutes ces histoires politiques. Et puis, l'ouverture des Etats généraux ne s'est pas déroulée comme les représentants du Tiers-état le pensaient. En effet le roi ne parla point des cahiers de doléances ni d'éventuelles améliorations pour le Tiers état, qui de toute façon n'en a strictement pas besoin, je trouve. Ils se plaignent tant, et pour pas grand-chose, de plus ! Dès que Louis avait commencé à parler d'un nouvel impôt afin de financer une guerre, une rumeur s'était répandue parmi les rangs du Tiers-état. Certains (quels odieux personnages !) avaient même osé siffler et huer le roi ! Mais heureusement celui-ci s'était empressé de rétablir l'ordre à l'aide des gardes. 14 Juillet 1789 Aujourd'hui, la Cour est telle qu'hier : remplie de profiteurs à qui personne ne peut faire confiance. Ma matinée se passa doucement, partagée entre les moments agréables passés avec ma vieille amie Mme de Campan qui me fit la lecture d'un ouvrage de Voltaire et une promenade dans les jardins avec mes dames de compagnie. Le soleil d'été nous permet d'admirer la nature dès que ses premiers rayons apparaissent et je pus ce matin découvrir le plus bel endroit au monde. En effet, une jeune demoiselle qui était arrivée depuis peu au palais et à laquelle je m'étais attachée nous emmena dans un endroit qui m'était jusqu’alors inconnu, où les roses recouvrent les murs et embaument l'air de leur parfum sucré. Peu après cette balade matinale, mes fidèles amies m'expliquèrent les manigances de cette dame qui essayait en fait de s'attirer mes faveurs. Après s'être fait engrossée par un comte, elle avait essayé de revenir chez son mari : mais celuici, apprenant la nouvelle, l'avait répudiée et jetée dehors. Mais n'en parlons plus car dès demain je serai sûre de ne plus la revoir de toute ma vie. Pour terminer, en milieu d'après-midi, un messager arriva à la Cour, signalant que le petit peuple de Paris assiégeait la Bastille et allait sûrement l'envahir dans peu de temps. Apparemment, les Parisiens avaient mis à feu et à sang les Invalides juste avant, mais les conseillers du roi ne s'inquiètent pas de ces interventions non prévues ; on dit même que le roi aurait souri d'amusement en apprenant la nouvelle. Pour l'instant, je ne m'inquiète pas et j'attendrai de voir ce qu'il en retourne plus tard, les nouvelles vont vite à Versailles! 23 Juillet 1789 Finalement, la prise de la Bastille a été plus importante qu'il n'y paraissait : les gardes ont été obligés de tirer sur le peuple de Paris, qui est tout de même parvenu à s'infiltrer dans la forteresse. Les hommes et les femmes accouraient par centaines, que dis-je, par milliers, se précipitaient dans tous les sens, braillant et criant sans cesse. Quelques dizaines se sont faits tuer par les soldats. Il faut dire qu'ils l'avaient bien mérité : ils se sont emparés des armes et de la poudre gardés à la Bastille ! Et puis, quelques morts parmi tant de gens, cela ne change pas grand-chose. Oh, ne croyez pas que cela ne m'affecte guère : je trouve tout de même cet incident bien regrettable. Mais si seulement le Tiers état nous laissait en paix, il n'y aurait pas tous ces soucis ! Qui plus est, nous avons appris il y a quelques jours que le Tiers état pillait et incendiait les châteaux de leurs seigneurs ainsi que les registres sur lesquels étaient inscrits les droits et privilèges. Ils prétendent vouloir obtenir les mêmes droits que les nobles ! Allons donc ! Il ne manquait plus que cela ! Croient-ils vraiment que c'est en pillant les demeures de leurs maîtres qu'ils parviendront à leurs fins ?! Bientôt, ils voudront attenter à la vie du roi... peut-être même à la mienne ! Cette idée me fait frissonner d'effroi ! Mais non, je suis certaine qu'ils n'oseront pas s'en prendre à nous ... ils sont certainement trop lâches, et puis, comment pourraient-ils nous approcher ? Versailles est si bien gardé ! Non, vraiment, c'est impossible. Il faut que j'arrête de marquer toutes ces inepties ! Cela me perturbe et me fait peur inutilement. Il faudra tout de même que j'en touche deux mots à mon mari : nous devrions tenter d'instaurer un dialogue pacifiste avec le petit peuple, qu'ils arrêtent enfin de nous harceler ! Cela vaudra mieux pour tout le monde. Mais je sais que c'est perdu d'avance : ils exploseront, comme avec les cahiers de doléances ... c'est d'ailleurs à cause de ceux-là que tout a commencé... je l'avais bien dit, cette idée ne me plaisait pas ! Enfin, n'y pensons plus. Je vais me divertir avec mes dames de compagnie. Rien de tel qu'une partie de cartes pour oublier ses soucis ! Versailles, le 1er Août 1789 Mme de Grovilliers a amené aujourd'hui un poney à la petite ************ (sa fille) ! Ma toute petite a rougi de joie en le voyant et a passé l'après-midi avec son nouvel animal de compagnie ... Quelle joie elle m'a fait en étant si heureuse, dans son élément ! Elle m'a rappelé l'enfant que j'étais, passionnée par la race chevaline, quand je passais des heures à les observer. Ce temps est bien loin maintenant ! La menace des paysans français s'est encore fait ressentir. Depuis une semaine toute la cour parle et le roi ne fait rien ! Bientôt je le sens, la sécurité des membres royaux sera en danger ! Je vous laisse sur ces paroles car le roi vient me rendre visite aujourd'hui et je dois me préparer. Peut-être aurai-je l'occasion de lui toucher deux mots à propos de cette situation fâcheuse. 6 août 1789 Je n’ai pas eu besoin de parler au roi pour demander un dialogue pacifique avec le petit peuple : les députés de l’assemblée nationale constituante ont décidé d’abolir les privilèges ! Ils disent ainsi calmer les esprits ; cela empêchera les paysans de brûler les châteaux des seigneurs… et les seigneurs avec ! Grâce à ce changement, le tiers état a ce qu’il souhaitait. Espérons que le calme durera et que tous nos problèmes seront finis ! Cependant, j’ai un peu peur qu’ils ne se croient aussi puissants que nous et qu’ils ne continuent les dégâts… Vous les connaissez : on leur donne la main, ils nous prennent le bras ! Enfin, je pense que cela se passera bien. Chacun aura la paix, c’est mieux ainsi ! Versailles, le 3 septembre 1789 La politique, encore et toujours la politique ! Quel ennui mortel tout de même ! Il y a une semaine qu'une nouvelle déclaration a été instaurée, toujours par les mêmes bourgeois de Paris qui veulent nous prendre le pouvoir ! Qu'ils sont odieux avec leurs idées farfelues, ils s'imaginent que leur "assemblée nationale constituante" pourra un jour remplacer le roi ... J'espère que ce moment-ci n'arrivera jamais car cela signifierait ma perte et même, à l'insu de ces vils bourgeois, la perte du pays luimême ! La république : un bien grand mot pour une chose si idiote ! Mais bon, de toute façon jamais la république ne verra le jour... J'ai envoyé une lettre à ma mère pour lui exposer la situation et j'attends impatiemment sa réponse : je suis sûre qu'elle pourra m'aider car elle seule connaît toujours les solutions aux problèmes de politique ! L'Autriche me manque tellement, avec ses paysages de verdure ! Bien sûr, ici, il y a les jardins, mais ce ne sont pas les mêmes que ceux de ma demeure d'enfance ... et le palais de Schönbrunn où tout semblait si simple ! Ce qui me manque le plus, finalement, ce sont la danse et la musique autrichiennes, tellement plus raffinées que celles de France ! Mais il ne faut pas que je cède à la mélancolie, je dois poursuivre mon chemin en évitant les obstacles et les personnages mal intentionnés désirant me voir partir de ce royaume et laisser le trône à une autre ! Je me sens d'ores et déjà un peu revigorée à cette pensée ! Je vais aller voir Alex, il saura me parler et ôter toute nostalgie de mon coeur ... Versailles, le 16 juillet 1790 Il y a longtemps que je n'ai pas écrit ... C'est que, ici, rien n'a été important depuis le 5 octobre de l'année précédente. Les journées s'écoulaient lentement, tristement, ennuyeuses. Mais il y a deux jours est enfin survenu quelque chose ! Versailles, le 15 août 1792 L’horreur est au goût du jour : il y a moins d’une semaine que le château des Tuileries a été pris d’assaut par des sans-culottes, aidés des gardes nationaux ; les mêmes gardes chargés de nous protéger, le roi et sa famille ! Nous ne pouvons plus compter sur personne, les gardes rejoignent le peuple et la garde personnelle de Louis ne me semble que peu sûre. Mais au moins, elle est formée de nobles dont on sait qu’ils ne se retourneront pas contre nous. Ils veulent simplement trouver un moyens de récupérer leurs anciens privilèges et nourrissent une haine insatiable envers les paysans et les moins que rien ! De plus, La Fayette a disparu, laissant le désordre des républicains gouverner dans les rangs militaires. Je crois que la France ne présente plus beaucoup d’espoir pour moi et les enfants et la seule issue est désormais l’Autriche : je place toutes mes espérances en elle. Ma famille s’est manifestée il y a quelques semaines en envoyant une déclaration. Ils veulent nous aider à rétablir la monarchie et sont en route pour marcher sur Paris ! J’espère de tout mon cœur que la solution sera là et rapidement car les choses commencent à prendre une tournure affreuse. Je ne veux plus qu’une seule mort soit causée à cause de cette rébellion stupide ! 24 septembre 1792 Ça y est, la république est proclamée. Le roi a été emmené hier et les fous furieux de l’Assemblée détiennent maintenant les pleins pouvoirs et n’hésiteront pas à en abuser ! Je sais qu’ils sont de plus en plus montés contre nous et veulent nous faire payer le temps où les « tyrans » gouvernaient la France ! Les politiciens en question ne sont pas différents des anciens monarques, tous asservis de pouvoir, n’ayant pour seul but que de gouverner ce vert et riche pays français. Je ne serais pas étonnée si un de ces « républicains » qui veulent l’égalité pour tous prenaient les rênes du royaume tôt ou tard. Malheureusement je ne serai plus de ce monde pour assister à ce retournement. L’Assemblée veut ma mort, ainsi que celle du roi. Il faut tuer l’Autrichienne ! Celle qui a provoqué la venue des troupes de Brunswick ! Celles-ci d’ailleurs n’ont pas pu dépasser la frontière, l’espoir que j’avais était vain. Personne ne viendra me sauver, ni les Autrichiens, ni les Français et encore moins les autres pays ! La seule chose que je puisse espérer est que mes enfants n’aient pas le même destin qu’auront bientôt leurs parents, qu’ils connaissent la joie d’avoir une famille et de connaître la tranquillité de la vieillesse. Je suis désemparée, je ne veux pas mourir ! Pas maintenant ! Pas pour cela ! Pourquoi les choses se sont-elles passées ainsi ? Tout allait si bien au début, mais le rêve s’est transformé en cauchemar et je m’aperçois maintenant seulement que les fantômes de mes nuits sont devenus réalité… 21 janvier 1793, prison de … L’heure est grave. Mon mari, Louis XVI, roi de France, va être exécuté d’une minute à l’autre. Mes larmes ne cessent de couler, mes sanglots me coupent la respiration. Cela signifie la fin, la fin pour tout. Surtout pour moi ! Si le roi meurt demain, alors qu’en est-il de la Reine, détestée et autrichienne de surcroît ?! Surtout après la défaite des troupes de mon pays il y a quelques mois. L’ambiance était devenue très tendue pour la famille royale, ou comme il nous surnomment « le couard et l’Autrichienne » ! Car pour eux le roi n’avait plus aucune autorité, ni autorité. C’est pourquoi ils ont tout simplement décidé de nous mettre en prison et de nous guillotiner ensuite ! Mais qu’avons-nous fait ? Selon eux, rien justement. Ils voulaient peut-être que le roi empêche les émeutes depuis le début, qu’il rétablisse la paix ? Si seulement cela avait été possible ! Mais nul homme n’eût pu changer quoi que ce fut à tous ces problèmes : ils étaient trop nombreux contre nous et nous jugeaient ; ils ne souhaitaient plus un arrangement mais la guerre pour nous détrôner ! Et moi dans tout cela, je suis innocente ! Tout ce que j’ai fait, c’est de naître fille de l’Impératrice d’Autriche ! Ce n’est pas non plus de ma faute si on m’a marié au futur roi de France, soit disant pour « renforcer les liens entre nos pays ». Voilà le résultat : on m’insulte, on me déteste à cause de ma nationalité ! On va même jusqu’à imaginer des rumeurs ignobles sur les relations que j’entretiens avec mon fils… C’est contre la nature d’insinuer de telles choses ! Rien que le fait de l’écrire me fait rougir d’humiliation et d’indignation ! Si quelqu’un me voyait dans cet état, tout le monde aurait tôt fait de se moquer de moi… Mais maintenant je me fiche des moqueries : je sais que je n’ai rien à me reprocher. Quoi que l’on dise, quoi que l’on ait insinué, je demeure convaincue d’être une dfemme innocente.