INFORMATIQUE ET DEVELOPPEMENT INTELLECTUEL Vous avez remarqué que le thème central de notre colloque est: informatique et Développement Intellectuel. Développement et non pas déficience, bien que LOGICOM soit déjà connue pour ses travaux en direction des handicapés moteurs et mentaux ! Ceci dans un souci d'une véritable intégration. Nos recherches ne concernent pas que les personnes handicapées. Elles ont un retentissement à tous les niveaux de l'éducation et de la rééducation. A preuve, l'intérêt suscité auprès des instituteurs qui viennent nous voir de plus en plus nombreux depuis quelques temps. Mais également, afin de mettre en avant la conviction profonde qui est la nôtre, que le développement intellectuel, pour tous les être humains quels qu'ils soient, de n'importe quelle race, de n'importe quelle culture, handicapé ou non, passe par les mêmes étapes et les mêmes stades. Des chercheurs comme Piaget et plus récemment Paour, l'affirment et la pratique sur le terrain le confirme. J'ai constaté moi-même, avec des adultes polyhandicapés, que des évolutions sont toujours possibles et lorsqu'on a le bonheur d'y participer, l'on remarque qu'elles se réalisent en respectant approximativement, les mêmes étapes bien que, dans certains cas l’on remarque des cheminements spécifiques. Il n'y a donc rien d'étonnant à ce que des travaux entrepris, préalablement, pour des personnes présentant des déficiences, puissent servir à des enfants qui suivent le cursus scolaire normal. La recherche théorique, dans les deux cas est la même, bien qu'il faille tenir compte de particularités spécifiques, et que l'adaptation des programmes et logiciels est bien plus simple dans le sens : handicapés- non handicapés, que l'inverse. Avant d'aller plus loin dans les travaux de notre colloque, il serait bon de préciser quelle est cette forme d’intelligence que nous cherchons à développer ? Il en existe plusieurs définitions. Celle que nous retiendrons avec Piaget, Feuerstein, lonescu, n'est pas statique : C'est la capacité d’utiliser sa propre expérience dans des situations des circonstances et des lieux nouveaux ainsi que la capacité de résoudre de nouveaux problèmes . Il ne s'agit pas seulement d'acquérir de nouvelles connaissances ou de nouveaux comportements mais de pouvoir maintenir ces acquisitions dans le temps, de les généraliser à des situations de plus en plus variées. Cela rejoint la préoccupation d'un grand nombre d'entre nous qui savent bien qu'il ne suffit pas de faire apprendre quelque chose aux personnes dont nous nous occupons, mais qu'il faut également leur apprendre à s’adapter à des situations qui ne reproduisent pas exactement celles qu’ils ont apprises ! --- >Le professeur Dague nous parlera plus longuement, dans le carrefour qu’il animera cet après-midi, de la méthode Feuerstein, qui vise précisément ce genre d'apprentissage. Mais me direz-vous, peut-on encore espérer apprendre quand le poids du handicap, des facteurs génétiques, de l'hérédité, sont là ? Nous disons, avec Piaget, que, si les facteurs héréditaires jouent un rôle dans le développement de l'intelligence : Ils ne font que déterminer des possibilités mais le, développement n'a rien d'automatique. C'est le vécu du sujet qui sera déterminant, les relations qu'il vivra , les stimulations qu'il recevra, les apprentissages qu'il fera. Nous pouvons donc agir sur l'environnement lequel on suspecte une déficience intellectuelle sera l'intervention meilleur sera le résultat ! carence en stimulations aura pour conséquences, retard. de l'enfant pour et, plus précoce Inversement, la l'accentuation du Des interventions sont donc possibles et utiles à tous âges (également pour les personnes âgées) mais il est particulièrement urgent de mettre en place des structures, des moyens, des programmes (y compris informatiques) de stimulation précoce. C'est pour cela que le champ d'intervention de Logicom débute, à 12 mois de capacités cognitives, et s'échelonne jusqu'à 12 ans (stade des opérations formelles). > Me Kamila Eimerl, Chercheur à Paris V11I, nous parlera, tout à l'heure, plus longuement de l'intérêt de l'intervention informatique, dans cette perspective et ,elle animera un carrefour cet après-midi, particulièrement centré sur les premiers apprentissages de lecture avec l'ordinateur. Cette affirmation de la modificabilité cognitive ne signifie pas que l'on va gommer l'existence du handicap. Les déficients intellectuels suivent bien les mêmes stades que les autres mais leur développement est plus lent et reste souvent inachevé. Et surtout, ils ont plus de mal que les non handicapés de même niveau mental à mobiliser efficacement leurs outils cognitifs. Pour les aider à surmonter cette difficulté, il faut les inciter à utiliser leurs connaissances dans des contextes variés, parfois déroutants par rapport à leurs façons de faire habituelle et comportant également une certaine complexité, c'est à dire qui ne se contentent pas de répéter les choses d'une manière toujours identique. La réalisation des programmes informatiques devra tenir compte de ces diverses exigences et devra faire la part des choses entre la nécessaire répétition et l'introduction progressive d'éléments nouveaux, de variantes qui permettent à la personne déficiente la généralisation de l'expérience et des connaissances acquises. --- > C'est ce que nous essaierons de vous montrer Monsieur Vallete, responsable informatique de l'URAPEI de la région RhônesAlpes, et moi-même dans le carrefour intitulé « Animer un atelier informatique et quels programmes pour quels utilisateurs ? » Avant de se lancer dans un programme de développement intellectuel, il est bon de, faire l'état des lieux : Où en est la personne à qui l'on s'adresse, quelles sont ses difficultés spécifiques, ses efficiences instrumentales ? Pour cela, il faut passer par des évaluations. Nous sommes familiers de l'évaluation que l'on peut faire par l'intermédiaire des tests de QI (le quotient intellectuel). Elle est insuffisante dans le cas qui nous intéresse puisqu'il s'agit de mettre à jour les points forts et les défaillances mais aussi d'évaluer les capacités d'apprentissage et les stratégies de compréhension mises en oeuvre. Pour nous donner une idée de ce qu'il est possible de faire dans ce domaine, nous avons demandé au professeur Khomsi, auteur de plusieurs tests, de nous faire état de ses travaux sur l'évaluation des stratégies de compréhension de la lecture. Il interviendra dans le carrefour (C), cet après-midi. Lorsque nous intervenons dans des institutions pour aider à la mise en place d'un atelier informatique ou communication, nous rencontrons diverses réactions. Environ, 1/3 des participants est enthousiaste, 1/3 est réservé et attentiste et 1/3 a peur ou est opposé. Parmi ces derniers, certains déclarent "ça n'est pas avec vos machines qu'on peut faire progresser les enfants". Ils mettent souvent en avant que l'enfant est d'abord un être affectif, que son inconscient prime sur tout autre aspect et que ses difficultés intellectuelles sont subordonnées aux blocages de ses affects. La croyance que le retard intellectuel ne serait dû qu'à des blocages affectifs paraît, aujourd'hui bien désuète et est abandonnée presque par tous. Par contre, ce qui est certain c'est qu'on ne peut séparer ces deux aspects cognitifs et affectifs. "Il n'existe aucune conduite, si intellectuelle soit-elle, qui ne comporte, à titre de mobiles des facteurs affectifs. Et réciproquement, il n'y a pas d'états affectifs sans intervention de perceptions ou de compréhensions qui en constituent la structure cognitive." Qui a écrit cela ? On aurait très bien pu le trouver sans la plume de Freud mais c'est Piaget qui en est l'auteur. Et il continue en précisant que :" La conduite est une, même si les structures (cognitives) n'expliquent pas son énergétique (affective) et même si son énergétique n'explique pas ses structures. Les deux aspects affectifs et cognitifs sont à la fois inséparables et irréductibles." Certains psychanalystes l'ont bien compris : Spitz et GouinDecarie, par exemple, qui ont intégrés les travaux de Piaget dans leurs propres recherches. Ce lien entre l'affectif et le cognitif est largement pris en considération à Logicom et fait l'objet d'une partie de la formation donnée dans les stages psychopédagogiques. Nous avons demandé à l'équipe de Madame Yerles de nous en apporter un témoignage vivant et de nous faire part de ce renouveau de confiance en soi que suscite l'emploi de l'ordinateur auprès de jeunes en échec scolaire dans les quartiers défavorisés où l'ordinobus vient stationner. L'informatique peut apporter un concours particulièrement précieux au développement intellectuel de toutes personnes handicapées ou non. Mais pour cela, il faut créer de nombreux programmes adaptés aux besoins de l'éducation et de la rééducation. Plusieurs possibilités nouvelles semblent s'ouvrir. L'utilisation des systèmes experts par exemple, qui pourraient aboutir à la création de programmes informatiques qui seraient des "Tuteurs intelligents", c'est à dire qui pourraient assister l'élève comme le ferait un éducateur, en analysant ses réussites et ses erreurs et en le guidant vers de nouveaux exercices ou des explications adaptées. Nous avons demandé à Madame Sayettat, professeur à L’ENSM d'intervenir sur cette question et de nous expliquer les perspectives offertes par les systèmes experts et leurs limites. Logicom apporte également sa contribution à cette recherche d'outils de création informatique simples et conviviaux. C'est Monsieur Riou, responsable du développement informatique à Logicom qui nous présentera le langage IMAGIQUE: un nouveau moyen déprogrammation multimédia à l'usage des non professionnels de l'informatique. Nous vous présenterons également une maquette du carnet parlant qui devrait devenir bientôt un magnifique auxiliaire de paroles, léger et portable pour les IMC, aphasiques et quelques autres handicapés. Les -moyens d'entrer en relation avec l'ordinateur, les contacteurs seront évoqués dans le carrefour (B) de cet aprèsmidi,animé par Monsieur Jacques Labarre et Monsieur Riou.