Chapitre 6 Anatomie fonctionnelle du système nerveux 1. Formation embryonnaire 2. Les ventricules cérébraux 3. Les protections du système nerveux central 3.1 Les méninges 3.2 Le liquide céphalorachidien 3.3 La barrière hématoencéphalique 4. La moelle épinière et l’arc réflexe 5. Le tronc cérébral 5.1 La matière blanche 5.2 La matière grise 6. Le diencéphale 6.1 Le thalamus 6.2 L’hypothalamus 7. Le télencéphale (le cerveau) 7.1 Le cortex 7.2 La matière blanche 7.3 Les noyaux gris centraux 7.4 La latéralisation du cerveau 8. Le cervelet 9. L’éveil et le sommeil 10. Le système nerveux autonome Chapitre 6 Objectifs À la fin de ce chapitre, vous serez en mesure de : 1. Décrire les grandes divisions du système nerveux. 2. Expliquer comment se forme le liquide céphalo-rachidien et comment il se déplace. 3. Décrire les structures protégeant le système nerveux central. 4. Expliquer en quoi consiste la barrière hémato-encéphalique. 5. Définir : ponction lombaire et épidurale. 6. Décrire la structure de la moelle épinière. 7. Expliquer et décrire le circuit nerveux responsable de l’arc réflexe. 8. Énoncer les structures formant le tronc cérébral. 9. Énoncer les fonctions remplies par le tronc cérébral. 10. Énoncer les structures du diencéphale. 11. Expliquer la fonction du thalamus et de l’hypothalamus. 12. Décrire la répartition de la matière blanche et de la matière grise au niveau du télencéphale. 13. Expliquer les fonctions du télencéphale. 14. Énoncer la fonction principale des noyaux gris centraux. 15. Décrire les différences observées entre l’hémisphère droit et le gauche. 16. Expliquer le mode de fonctionnement du cervelet. 17. Énoncer les caractéristiques principales du sommeil lent et du sommeil paradoxal. 18. Discuter de la fonction du sommeil et du rêve. 19. Décrire l’anatomie du système nerveux autonome. Préciser les neurotransmetteurs qui interviennent au niveau des organes innervés. 20. Énoncer, pour les principaux organes, les effets respectifs de l’activité du système sympathique et du système parasympathique. 6-2 1. Formation embryonnaire du système nerveux Gouttière neurale Le système nerveux se forme au début de la troisième semaine de vie embryonnaire. L’embryon ressemble alors à un petit disque allongé mesurant moins de 2 mm de longueur. À ce stade de développement, il n’est formé que de trois couches de cellules : l’endoderme, le mésoderme et l’ectoderme. La majorité des organes internes (les viscères) se forment à partir de l’endoderme ; le mésoderme donnera naissance aux os du squelette et aux muscles ; l’ectoderme se développera pour former le système nerveux et la peau. Le système nerveux se forme par un repli d’une zone du dos appelée plaque neurale. La plaque neurale se replie vers l’intérieur et forme une gouttière qui finit par se refermer formant ainsi un tube, le tube neural. C’est à partir de ce tube que se formeront toutes les structures du système nerveux. Plaque neurale 19 jours Ectoderme Crête neurale Gouttière neurale 20 jours 22 jours 26 jours Tube neural Vers la quatrième semaine de gestation, la partie antérieure du tube neural s’épaissit localement et forme trois renflements distincts appelés, d’avant en arrière, le cerveau antérieur (ou prosencéphale, le cerveau moyen (ou mésencéphale) et le cerveau postérieur (ou rhombencéphale). Le reste du tube formera la moelle épinière. Tube neural Î cerveau antérieur (prosencéphale) Î cerveau moyen (mésencéphale) Î cerveau postérieur (rhombencéphale Chapitre 6 Cerveau antérieur (prosencéphale) Cerveau moyen (mésencéphale) Cerveau postérieur (rhombencéphale) Tube neural Télencéphale (cerveau) Télencéphale (cerveau) Mésencéphale Mésencéphale Myélencéphale Métencéphale Diencéphale Diencéphale Métencéphale Bulbe rachidien Myélencéphale Moelle épinière Télencéphale (cerveau) Diencéphale • Mésencéphale Métencéphale Myélencéphale Le cerveau antérieur (ou prosencéphale) Le cerveau antérieur se différencie en deux parties distinctes. La partie la plus avant forme le télencéphale qui se divise longitudinalement en deux masses latérales qui formeront les deux hémisphères cérébraux. Chez les animaux supérieurs, particulièrement chez l’humain, le télencéphale prend des proportions énormes. Il devient si gros, qu’il finit par recouvrir, en se repliant vers l’arrière, presque tout l’encéphale. À la naissance, presque toute la cavité crânienne est occupée par le télencéphale (les deux hémisphères cérébraux). C’est cette partie de l’encéphale qu’on appelle le cerveau. Le reste du cerveau antérieur forme le diencéphale. Cette partie se différencie en trois structures : le thalamus, l’hypothalamus et l’épithalamus. 6-4 Gilles Bourbonnais Cerveau antérieur : • Télencéphale (cerveau) • Diencéphale Ne confondez pas « cerveau » et « encéphale ». L’encéphale comprend toute la matière nerveuse enfermée dans la boîte crânienne alors que le cerveau ne comprend que les hémisphères cérébraux. Remarquez que le cerveau constitue tout de même plus de 80 % de la masse de l’encéphale. Anatomie fonctionnelle du système nerveux • Le cerveau médian (ou mésencéphale) : Cette partie de l’encéphale ne se modifie que très peu au cours du reste du développement embryonnaire. • Le cerveau postérieur (ou rhombencéphale) : Le cerveau se différencie en deux structures : le métencéphale et le myélencéphale. La partie ventrale du métencéphale s’épaissit et forme une structure renflée appelée pont (ou encore protubérance annulaire). La partie dorsale du métencéphale se développe en une grosse structure ayant l’apparence d’un chou-fleur : le cervelet. Le myélencéphale, pour sa part, formera une structure renflée et allongée, le bulbe rachidien. Le reste du tube neural formera la moelle épinière. Le mésencéphale, le pont et le bulbe rachidien forment ce qu’on appelle le tronc cérébral. Cerveau = hémisphères cérébraux Tronc cérébral = mésencéphale + pont + bulbe rachidien • Cerveau antérieur (prosencéphale) → Télencéphale →Cerveau → Diencéphale →Thalamus → Hypothalamus → Épiphyse • Cerveau moyen (mésencéphale) → Mésencéphale • Cerveau postérieur (rhombencéphale) → Métencéphale → Myélencéphale → Pont → Cervelet → Bulbe rachidien 6-5 Chapitre 6 Cerveau (hémisphère gauche) Derrière de la tête Devant de la tête Cervelet Pont Bulbe rachidien Encéphale Vue externe Moelle épinière Hémisphère gauche Hémisphère droit Hémisphère droit Hémisphère gauche Nerfs crâniens Pont Cervelet Bulbe rachidien Encéphale Vue du dessous Encéphale Vue du dessus Corps calleux Épiphyse Gilles Bourbonnais, Corel 8 Cerveau (hémisphère droit) Thalamus Mésencéphale Hypothalamus Pont Cervelet Bulbe rachidien Moelle épinière Encéphale Vue en coupe 6-6 Moelle Anatomie fonctionnelle du système nerveux 2. Les ventricules cérébraux Le tube nerveux à l’origine du système nerveux est « creux ». Au cours du développement embryonnaire, la cavité de la partie antérieure s’élargit par endroits et forme quatre cavités appelées « ventricules cérébraux ». 2 1 3 4 • • • Ventricules 1 et 2 : Dans les hémisphères cérébraux; Ventricule 3 : Dans le diencéphale Ventricule 4 : Sous le cervelet Les ventricules 1 et deux communiquent par de petits conduits avec le troisième ventricule. Un long conduit, l’aqueduc de Sylvius traverse le mésencéphale et fait communiquer le troisième ventricule avec le quatrième situé sous le cervelet. Enfin, du quatrième ventricule, un long et mince conduit, le canal de l’épendyme, se continue sur toute la longueur de la moelle épinière. Ces cavités contiennent un liquide clair, le liquide céphalorachidien. Ventricules latéraux (1 et 2) Troisième ventricule Quatrième ventricule Aqueduc de Sylvius Les ventricules cérébraux Le liquide céphalo-rachidien se forme à partir de structures spéciales tapissant le plafond des ventricules : les plexus choroïdes. Ces plexus sont riches en petits vaisseaux sanguins qui laissent continuellement filtrer à travers leurs parois une partie du liquide formant le sang. Des cellules spéciales recouvrant ces petits vais 6-7 Chapitre 6 seaux sanguins filtrent le liquide et ne laissent passer dans les ventricules que l’eau et certaines substances chimiques bien précises. C’est ainsi que se forme continuellement le liquide céphalorachidien emplissant toutes les cavités de l’encéphale. Au niveau du quatrième ventricule, trois petits conduits permettent au liquide de s’écouler à la surface de l’encéphale et de la moelle épinière où il sera réabsorbé par le sang qui irrigue les méninges (voir page suivante). Une obstruction de l’un des canaux permettant la circulation du liquide céphalo-rachidien peut causer l’hydrocéphalie. Si la chose se produit avant la naissance, alors que les os du crâne ne sont pas encore soudés entre eux, la pression du liquide qui s’accumule dans les ventricules fera grossir anormalement la tête en comprimant le tissu nerveux sur la boîte crânienne. L’enfant peut alors souffrir de séquelles plus ou moins graves (cela va d’aucune séquelle à un coma profond et irréversible). 6-8 Le système nerveux central est recouvert des méninges, trois membranes richement vascularisées. Le système nerveux central contient environ 150 ml de liquide céphalorachidien. Le liquide est produit par les plexus choroïdes au même rythme qu’il est réabsorbé au niveau des méninges. Comme les plexus choroïdes produisent environ un litre de liquide par jour, tout le liquide est donc renouvelé en approximativement trois à quatre heures. Anatomie fonctionnelle du système nerveux 3. Les protections du système nerveux central L’encéphale est protégé par une boîte osseuse, la boîte crânienne, par des membranes, les méninges et par un coussin liquide formé du liquide céphalo-rachidien. Il est également protégé des substances chimiques nocives et des variations de la composition chimique du sang par ce qu’on appelle la barrière hématoencéphalique. 3.1. Les méninges La méningite, l’inflammation des méninges, est le plus souvent causée par une infection virale ou bactérienne. Cette infection peut dégénérer en encéphalite, l’infection de l’encéphale. Les méninges contiennent de nombreux récepteurs nerveux responsables de la douleur. La céphalée (le mal de tête) est une douleur provenant des méninges et non de l’encéphale qui, lui, ne contient aucun récepteur de la douleur. Les méninges (de mênigx = recouvrir) sont constituées de trois membranes fibreuses superposées recouvrant l’encéphale et la moelle épinière : la dure-mère, l’arachnoïde et la pie-mère. • La dure-mère, accolée à la boîte crânienne, est épaisse et fibreuse. Elle a une consistance semblable à celle du cuir. • L’arachnoïde, fine et élastique est située entre la dure-mère et la pie-mère. Elle est séparée de la troisième méninge, la piemère, par un espace appelé espace sous-arachnoïdien. • La pie-mère est intimement accolée à l’encéphale. Elle en suit tous les contours, pénétrant dans les moindres replis de la surface. 3.2. Le liquide céphalo-rachidien L’encéphale perd 47 % de son poids grâce au liquide céphalo-rachidien. Le liquide céphalo-rachidien présent dans l’espace sousarachnoïdien constitue un coussin liquide protégeant l’encéphale et la moelle épinière contre les coups et autres traumatismes. De plus, l’encéphale « flotte » dans le liquide qui l’entoure, ce qui l’empêche de s’écraser sous son propre poids. Le liquide céphalo-rachidien permet également l’élimination des déchets rejetés par les cellules du système nerveux. 6-9 Chapitre 6 3.3. La barrière hémato-encéphalique Comme toutes les cellules, les neurones baignent dans un liquide, le liquide interstitiel, qui se forme à partir du sang au niveau des plus petits vaisseaux sanguins (les capillaires). Cependant, les capillaires sanguins du SNC sont beaucoup plus étanches que les autres capillaires du corps. Ils agissent comme un puissant filtre ne laissant passer dans le liquide interstitiel des neurones que certaines substances bien précises. Liquide interstitiel La paroi des capillaires sanguins n’est formée que d’une seule couche de cellules aplaties. Ces cellules ne sont pas jointes les unes aux autres sur tout leur pourtour. Il y a, entre les cellules, de petits espaces vides par où les substances du sang peuvent passer dans le liquide interstitiel. Les cellules formant les capillaires de l’encéphale sont beaucoup mieux jointes entre elles. Il n’y a pas de ces petits espaces vides que l’on trouve dans les autres capillaires. Cellule Capillaire sanguin L’eau, les éléments nutritifs comme le glucose ou les acides aminés et certains électrolytes traversent aisément la paroi de ces capillaires alors que les déchets du sang, les protéines, certaines toxines et la plupart des médicaments ne peuvent la traverser. Cette barrière entre le sang et le liquide interstitiel permet de maintenir stable la composition chimique du liquide interstitiel du système nerveux central malgré les modifications chimiques qui pourraient se produire dans le sang. Puisque la moindre modification de l’environnement chimique des neurones peut en perturber le fonctionnement, il est essentiel que le liquide interstitiel dans lequel ils baignent soit le plus stable possible. C’est cette perméabilité très sélective des capillaires de l’encéphale que l’on appelle la barrière hémato-encéphalique. En médecine, la barrière hémato-encéphalique peut être nuisible en empêchant certains médicaments de parvenir aux cellules de l’encéphale. C’est le cas, par exemple, lors du traitement de certains cancers. Les médicaments anticancéreux ne peuvent franchir la barrière et atteindre la ou les tumeurs cérébrales. 6-10 Cependant, deux petites structures de l’encéphale ne sont pas pourvues de cette barrière. Les capillaires qu’on y trouve sont aussi perméables que ceux du reste du corps. C’est le cas du centre du vomissement, un petit centre nerveux du tronc cérébral déclenchant la nausée et le vomissement lorsqu’il est soumis à des substances toxiques amenées par le sang. C’est également le cas de l’hypothalamus, un petit centre nerveux qui, comme nous le verrons plus loin, intervient dans de nombreuses fonctions liées au maintien de l’homéostasie de tout l’organisme. Pour effectuer correctement leurs fonctions respectives, ces centres nerveux doivent pouvoir être informés en tout temps des substances chimiques présentes dans le sang. C’est pourquoi il n’y a pas de barrière hémato-encéphalique à leur niveau. Anatomie fonctionnelle du système nerveux Ponction lombaire eut prélever, à l’aide d’une grande aiguille introduite entre deux vertèbres du dos, un peu du liquide céphalo-rachidien de l’espace sousarachnoïdien (5 à 10 ml, en général). Cette opération, appelée ponction lombaire, permet de diagnostiquer d’éventuelles infections des méninges (méningite) ou de l’encéphale (encéphalite). On peut aussi l’utiliser pour injecter un liquide opaque aux rayons X, ce qui permet d’effectuer une radiographie du canal rachidien (myélographie). Après le retrait de l’aiguille, le liquide céphalo-rachidien peut continuer à s’écouler au point où la ponction a été effectuée. Cette perte de liquide provoque de violents maux de tête qui obligent le patient à demeurer allongé de 8 à 24 heures après le prélèvement. Les maux de tête sont causés par l’étirement des méninges sous le poids de l’encéphale (rappelez-vous, l’encéphale « flotte » dans le liquide céphalo-rachidien, si on retire une partie de celui-ci, l’encéphale « s’écrase » sous son propre poids). Épidurale Ne confondez surtout pas, comme le font souvent les journalistes, moelle épinière et moelle osseuse. La moelle osseuse ne fait pas partie du système nerveux. Sa fonction principale est d’élaborer les différentes cellules sanguines. On peut faire des greffes de moelle osseuse (en cas de leucémie, par exemple) mais on ne peut pas du tout faire de greffe de moelle épinière (comme on peut parfois le lire dans les journaux). Notez, sur la figure ci-dessous, la cavité épidurale, cette cavité emplie de tissu graisseux richement vascularisé formant un coussin protecteur entre les vertèbres et la dure-mère de la moelle épinière. La technique couramment utilisée en anesthésie qu’on appelle une « épidurale » consiste à injecter un anesthésique dans cet espace. Cette technique est couramment utilisée pour atténuer les douleurs lors de l’accouchement. L’anesthésiste introduit avec une grosse seringue un fin cathéter jusque dans l’espace épidural. Par ce cathéter qui est laissé en place tout au long de l’intervention, il peut injecter la quantité d’anesthésique nécessaire pour atténuer la douleur. 6-11 Chapitre 6 4. La moelle épinière et l’arc réflexe Les vertèbres superposées forment un canal osseux protecteur, le canal rachidien, dans lequel passe la moelle épinière. Celle-ci est également protégée par les trois méninges et le coussin de liquide céphalo-rachidien situé dans l’espace sous-arachnoïdien ainsi que par une couche de matière graisseuse emplissant l’espace épidural (ou cavité épidurale), c’est-à-dire l’espace entre la dure-mère et les vertèbres. La moelle épinière mesure environ 42 cm de longueur par 1,8 cm de largeur. Elle est formée de matière blanche entourant une zone centrale de matière grise. • Matière blanche : formée de fibres myélinisées Î fibres « ascendantes » : fibres acheminant les influx sensitifs vers l’encéphale (les influx « montent » vers l’encéphale) ; Î fibres « descendantes » : fibres provenant de l’encéphale et acheminant des influx moteurs vers les fibres motrices des nerfs rachidiens (les influx « descendent » de l’encéphale vers les muscles); La moelle épinière constitue donc une voie importante de communication entre l’encéphale et presque tout le corps (sauf la tête qui est surtout innervée par les nerfs crâniens). • Matière grise : formée de corps cellulaires de neurones et de leurs prolongements non myélinisés ainsi que de cellules gliales. Sur une coupe de moelle épinière, la matière grise au centre a une forme ressemblant vaguement à un papillon aux ailes déployées. L’extrémité des ailes est appelée « corne » : cornes postérieures pour les extrémités du côté dorsal de la moelle et cornes antérieures pour les extrémités de la portion ventrale. 6-12 Une lésion grave ou une section de la moelle épinière au niveau du dos peut causer la paraplégie, la perte de motricité (paralysie) et de sensibilité (paresthésie) des membres inférieurs. Une lésion grave au niveau du cou peut provoquer la quadriplégie, la perte de motricité et de sensibilité des membres supérieurs, du tronc et des membres inférieurs. Il y a toujours danger grave de lésion à la moelle épinière lorsqu’il y a fracture des vertèbres. Les fragments d’os peuvent alors endommager la moelle. C’est pourquoi il est toujours important, avant de déplacer un blessé, d’immobiliser son dos lorsque l’on soupçonne qu’il pourrait y avoir fracture d’une vertèbre. Anatomie fonctionnelle du système nerveux La moelle épinière DOS Matière blanche Nerf rachidien Matière grise Racine dorsale du nerf rachidien Corne postérieure Corne antérieure Racine ventrale du nerf rachidien Vertèbre VENTRE Espace DOS sous-arachnoïdien Espace épidural Gilles Bourbonnais, Corel 8 Nerf rachidien VENTRE 6-13 Chapitre 6 31 paires de nerfs rachidiens émergent. de la moelle épinière. Ces nerfs sont formés de fibres motrices et de fibres sensitives. Les nerfs rachidiens se divisent en deux lorsqu’ils parviennent à la moelle épinière. Une branche, la racine postérieure, se dirige alors vers la partie dorsale de la moelle et l’autre, la racine antérieure, vers la partie ventrale. La branche dorsale est formée des fibres sensitives du nerf alors que la branche ventrale est formée des fibres motrices. Plexus cervical Plexus brachial Nerfs intercostaux Plexus lombaire Racine postérieure Ganglion spinal Plexus sacré Queue de cheval Racine antérieure Nerfs cervicaux C1 à C8 Nerfs thoraciques T1 à T12 Nerfs lombaires L1 à L5 Nerfs sacrés S1 à S5 Nerf coccygien Nerf rachidien Certains comportements simples involontaires sont élaborés au niveau de la moelle épinière. Seule la moelle épinière intervient dans l’élaboration de ces réflexes spinaux, les centres supérieurs n’interviennent presque pas. Réflexe = comportement simple et involontaire en réponse à un stimulus particulier. Ex. Retrait de la main suite à un stimulus douloureux. Ce comportement est involontaire et invariable. Tous les neurones qui programment ce geste réflexe sont situés dans la moelle épinière (voir figure à la page suivante). Trois neurones différents, c’est tout ce qu’il faut pour programmer ce comportement d’évitement. L’influx passe du neurone sensitif au neurone d’association qui le transmet au neurone moteur qui l’achemine au muscle qui se contracte. Le parcours complet de l’influx nerveux forme un arc de cercle, d’où le nom « d’arc réflexe » que l’on donne à ce circuit. 6-14 Remarquez qu’un seul neurone moteur ne peut suffire à provoquer un mouvement complet du bras. En réalité, lors du stimulus, ce n’est pas un mais bien des dizaines de neurones sensitifs qui sont stimulés. Ceux-ci font synapse avec plusieurs neurones d’associations qui font à leur tour synapse avec plusieurs neurones moteurs. Enfin, chaque neurone moteur fait synapse avec des centaines de cellules musculaires. Anatomie fonctionnelle du système nerveux Neurone sensitif L’arc réflexe Stimulus Corps cellulaire Neurone d’association Neurone sensitif du neurone sensitif Ganglion rachidien Racine dorsale Récepteur Nerf rachidien Muscle fléchisseur Racine ventrale Substance grise Neurone moteur Substance blanche Nerf rachidien Gilles Bourbonnais Neurone moteur Racine dorsale du nerf rachidien Ganglion rachidien Muscle Racine ventrale du nerf rachidien Réponse 6-15 Chapitre 6 Ce réflexe ne fait intervenir aucun neurone des centres supérieurs. Tout se passe dans la moelle épinière. Les centres supérieurs seront tout de même informés de ce qui s’est passé. En effet, au niveau de la matière grise de la moelle, des branches de l’axone du neurone sensitif font synapse avec des neurones dont l’axone remonte sur toute la longueur de la moelle jusque dans l’encéphale. L’encéphale sera donc informé de ce qui s’est passé. Une multitude de réflexes semblables nous permettent de nous maintenir en équilibre et de ne pas tomber. Lorsqu’on penche d’un côté, certains muscles sont étirés et des récepteurs nerveux qui y sont associés envoient alors des influx vers la moelle épinière. Ces influx seront relayés à des neurones moteurs qui rétablissent rapidement la posture en contractant les muscles nécessaires pour redresser la posture. Certains réflexes n’impliquent que deux neurones (un neurone sensitif faisant synapse sur un neurone moteur) alors que d’autres impliquent un grand nombre de neurones d’associations. Exemple : Pouvez-vous deviner le but de ce réflexe? Récepteur (nocicepteur) Neurone sensitif Muscle fléchisseur de la jambe Muscle extenseur Neurone inhibiteur Neurone excitateur 6-16 Muscle extenseur Muscle fléchisseur Anatomie fonctionnelle du système nerveux 5. Le tronc cérébral Le tronc cérébral est formé : • • • du bulbe rachidien du pont (ou protubérance annulaire) du mésencéphale. C’est au niveau du tronc cérébral que prennent naissance la plupart des nerfs crâniens. Thalamus Corps calleux Épiphyse Commissure interthalamique Hypothalamus Hypophyse Mésencéphale Pont (protubérance annulaire) Bulbe rachidien Cervelet Moelle épinière Le tronc cérébral est surtout formé de matière blanche, donc de fibres nerveuses myélinisées. On retrouve aussi, noyé dans cette matière blanche, de petits amas de matière grise appelés « noyaux ». Les noyaux ne sont visibles que si on pratique des coupes dans le tronc cérébral. De l’extérieur, on ne peut voir que la matière blanche. 6-17 Chapitre 6 5.1. La matière blanche du tronc cérébral : La substance blanche du tronc est formée de faisceaux de fibres myélinisées reliant les centres nerveux supérieurs placés au-dessus du tronc à la moelle épinière. • • fibres descendantes : fibres relayant des influx moteurs provenant du cerveau vers les neurones moteurs de la moelle épinière. fibres ascendantes : fibres relayant au cerveau des influx provenant des neurones sensitifs. Des faisceaux de substance blanche relient également le tronc cérébral au cervelet placé juste au-dessus. Ces faisceaux communiquant avec le cervelet sont appelés « pédoncules cérébelleux ». 5.2. Les noyaux du tronc cérébral : Les petits noyaux de matière grise du tronc cérébral remplissent des fonctions variées : • Relais entre les centres supérieurs de l’encéphale et la moelle épinière : Ces noyaux sont formés de synapses reliant des neurones des centres supérieurs à des neurones de la moelle épinière ou à des neurones des nerfs crâniens. • Centre cardio-vasculaire : Les circuits de neurones de ces noyaux règlent la fréquence et la force des battements cardiaques ainsi que le diamètre des vaisseaux sanguins. Le centre cardio-vasculaire est lui-même contrôlé par des influx provenant du diencéphale (de l’hypothalamus pour être plus précis, nous en reparlerons). • Centres respiratoires : Ces noyaux sont responsables des mouvements respiratoires. Ils contrôlent la fréquence respiratoire et l’amplitude de chaque respiration. Toute atteinte grave à ces noyaux provoque l’arrêt respiratoire. 6-18 La plupart des fibres reliant le cerveau à la moelle épinière se croisent au niveau du tronc cérébral (celles qui ne se croisent pas à ce niveau le font au niveau de la moelle épinière). Le cerveau droit est donc relié au côté gauche du corps et le gauche au côté droit du corps. Anatomie fonctionnelle du système nerveux Certains de ces noyaux contrôlent également les réflexes respiratoires comme la toux, l’éternuement et le hoquet. Plusieurs médicaments contre la toux agissent en inhibant les neurones du centre de la toux. À très forte dose, ces médicaments peuvent même provoquer un arrêt respiratoire. C’est ce qui peut se produire, par exemple, si un enfant avale une bouteille complète de sirop contre la toux. • Centres de la déglutition et du vomissement : Les différents mouvements nécessaires pour déglutir sont programmés par le centre de la déglutition. Le centre du vomissement peut être activé lorsque ses neurones entrent en contact avec des substances toxiques du sang ou lorsqu’il est stimulé par des influx des centres supérieurs (la vue de quelque chose de dégoûtant, par exemple, peut provoquer cette stimulation). • Noyaux du système modulateur diffus : Le système modulateur diffus est formé de noyaux constitués de neurones caractérisés par de longs axones pouvant se diviser en des dizaines, voire des centaines de milliers de terminaisons faisant synapse sur un très grand nombre de neurones du cerveau dont ils « modulent » le fonctionnement. Ces synapses ont une structure telle, qu’une partie importante du neurotransmetteur relâché diffuse dans le milieu interstitiel et atteint ainsi d’autres neurones que celui sur lequel se fait la synapse. Le système modulateur diffus agit un peu comme les boutons contrôlant le volume, les basses et les aigus sur un appareil radio. Quelques-uns de ces noyaux situés dans le tronc cérébral, forment ce qu’on appelle le système réticulaire activateur (ou SRA). L’axone de certains des neurones de ce système peut se diviser en au-delà de 250,000 branches atteignant presque toutes les régions du cerveau. Certains de ces neurones relâchent de la noradrénaline alors que d’autres relâchent de la sérotonine, deux neurotransmetteurs auxquels sont sensibles un grand nombre de neurones du cerveau. L’activité de ces noyaux peut donc faire varier de façon importante l’activité de tout le cerveau. La destruction de ces noyaux provoque un coma profond, sans eux le cerveau « s’éteint ». Inversement, une augmentation de leur 6-19 Chapitre 6 activité se manifeste par une augmentation de l’attention et de la vigilance. Un autre de ces noyaux, la substance noire (ou locus niger) est formé de neurones à dopamine jouant un rôle important dans le contrôle des centres nerveux responsables des mouvements. D’autres noyaux formés également de neurones à dopamine jouent un rôle important dans le contrôle des centres nerveux responsables des émotions. Plusieurs drogues, comme la cocaïne ou les amphétamines, agissent sur ces noyaux. Les noyaux du tronc cérébral : • • • • • 6-20 Relais (synapses) Centre cardio-vasculaire Centres respiratoires Déglutition et vomissement Systèmes modulateurs diffus Anatomie fonctionnelle du système nerveux 6. Le diencéphale Le diencéphale est situé immédiatement au-dessus du tronc cérébral, sous le cerveau qui le recouvre complètement. Les trois principales structures qui le constituent sont : le thalamus, l’hypothalamus et l’épithalamus. Circadien, de circa = autour et diem = le jour L’épithalamus est formé d’une petite glande appelée épiphyse (ou glande pinéale). L’épiphyse sécrète une hormone, la mélatonine, qui jouerait un rôle important dans le cycle. Le thalamus est un important relais de l’information entre les organes des sens et le cerveau. Cerveau L’hypothalamus, comme nous le verrons, joue un rôle prépondérant dans la régulation du fonctionnement des organes internes et dans le maintien de l’homéostasie. Thalamus 6.1. Le thalamus Oeil Oreille Peau Le thalamus constitue environ 80% de la masse du diencéphale. Il est formé de deux masses ovoïdes d’environ 3 cm de longueur reliées entre elles par un petit faisceau de fibres, la commissure interthalamique. Le thalamus est surtout formé de matière grise regroupée en de nombreux petits noyaux (les noyaux thalamiques). On considère le thalamus comme la porte d’entrée du cerveau. En effet, pratiquement toutes les fibres nerveuses ascendantes (transportant les influx sensitifs) font synapse, au niveau du thalamus, avec les neurones qui acheminent ces informations vers les zones du cerveau chargées de les traiter. Le thalamus est donc un important centre de relais. Mais plus qu’un simple relais, il effectue aussi certaines tâches. Les informations qui parviennent au thalamus sont triées, regroupées et acheminées vers les zones appropriées du cerveau. Il permet également d’apprécier (assez vaguement toutefois) la valeur agréable ou désagréable des sensations qui y parviennent. Un individu à qui on enlèverait tout le cerveau en laissant le thalamus intact pourrait ressentir vaguement la douleur et le plaisir, mais il ne pourrait avoir connaissance de la nature des sensations perçues et de l’endroit du corps d’où elles proviennent. 6-21 Chapitre 6 Cerveau (hémisphère gauche) Commissure interthalamique Épiphyse Thalamus Hypothalamus Hypophyse Pont Bulbe rachidien Cerveau (hémisphère gauche) Ventricules Gilles Bourbonnais Thalamus 6-22 Cerveau (hémisphère droit) Hypothalamus Anatomie fonctionnelle du système nerveux 6.2. L’hypothalamus De la taille d’une olive, cette structure tient son nom du fait qu’elle est située immédiatement sous le thalamus (hypo = dessous). Une petite tige, la tige de l’hypophyse, la relie à une des plus importantes glandes endocrines de l’organisme, l’hypophyse. L’hypothalamus est formé d’environ une douzaine de noyaux de matière grise remplissant de nombreuses fonctions reliées au maintien de l’homéostasie de l’ensemble de l’organisme : 1. Régulation du fonctionnement de la plupart des organes du corps : L’hypothalamus est le chef d’orchestre de ce qu’on appelle le système nerveux autonome (ou SNA). Ce système est formé d’un ensemble de fibres nerveuses innervant la plupart des organes végétatifs, c’est-à-dire les organes qui sont hors de portée de notre volonté comme, par exemple, le cœur, les vaisseaux sanguins, les intestins, etc. En cas d’urgence, par exemple, c’est l’hypothalamus qui, via les fibres nerveuses du SNA, sera responsable de l’augmentation de la fréquence cardiaque, de la dilatation de la pupille de l’œil, du ralentissement du système digestif, etc. 2. Rôle dans les émotions : L’hypothalamus joue un rôle dans l’élaboration des émotions comme la peur, le chagrin, l’agressivité, la joie, etc. En effet, certains noyaux de l’hypothalamus appartiennent au système limbique, un ensemble de structures nerveuses responsables de la genèse des émotions. Notez bien que l’hypothalamus n’est pas, à lui seul, la source des réactions émotionnelles, il ne constitue qu’une structure, parmi plusieurs autres du système limbique, intervenant dans l’élaboration des émotions, nous en reparlerons. Cependant, c’est l’hypothalamus qui, via le système nerveux autonome, déclenche les réponses physiques aux émotions comme, par exemple, les palpitations cardiaques liées à la peur ou à la colère. 6-23 Chapitre 6 3. Contrôle de la température corporelle : Certains neurones de l’hypothalamus détectent les moindres variations de température du sang et organisent la réponse appropriée afin de ramener la température à sa valeur normale. Si la température est trop élevée, l’hypothalamus réagira en activant les mécanismes nécessaires pour la faire baisser (transpiration, dilatation des vaisseaux sanguins de la peau). Inversement, si la température est trop basse, l’hypothalamus réagira en activant les mécanismes responsables des frissons (l’activité musculaire produit de la chaleur), de la «chair de poule » et de la constriction (le resserrement) des vaisseaux sanguins de la peau (le diamètre des vaisseaux diminue et le sang se retire de la peau où il se refroidit trop pour se concentrer dans les zones les plus chaudes au centre de l’organisme). La « chair de poule » correspond à un mécanisme qui, chez les animaux à fourrure, provoque le redressement des poils. Ce mécanisme permet d’augmenter l’épaisseur de la fourrure et donc d’en augmenter les qualités isolantes. Au cours de l’évolution, les humains ont perdu leur fourrure (il ne nous reste que les cheveux et quelques poils épars). Cependant, le mécanisme de redressement des poils est toujours présent même s’il n’a plus aucune utilité pour lutter contre le froid. Dans certaines circonstances, en réponse à une infection par exemple, l’hypothalamus peut « décider » de faire monter la température du corps, on devient fiévreux. Ce mécanisme permet d’augmenter l’activité du système immunitaire tout en réduisant le taux de reproduction de certains microbes sensibles à toute élévation de température au-delà de la température normale du corps. 4. Régulation de l’appétit : C’est l’hypothalamus qui, en réponse à de nombreux signaux variés, comme par exemple le taux de glucose sanguin, la vue ou simplement l’évocation d’aliments appétissants ou le taux de certaines hormones, déclenche la sensation de faim. De même, c’est l’hypothalamus qui, en réponse à d’autres signaux, est responsable de la sensation de satiété. On ne connaît pas encore tous les signaux auxquels l’hypothalamus est sensible dans sa fonction de régulation de l’appétit. 5. Régulation de la soif L’hypothalamus possède des neurones, appelés « osmorécepteurs » très sensibles à toute augmentation de la concentration en soluté du sang. Ceux-ci sont « excités » dès qu’ils perdent de l’eau par osmose, chose qui ne manquera pas de se produire si leur milieu interstitiel devient plus concentré en soluté que leur milieu intérieur. L’activation de ces osmoré 6-24 Il y a quelques années, on a découvert dans l’hypothalamus deux petits centres nerveux situés tout près l’un de l’autre. Le premier déclenche la faim lorsqu’il s’active et le second, au contraire, déclenche la sensation de satiété lorsqu’il devient à son tour actif. Si on enlève à un animal son centre de la satiété, celui-ci, souffrant d’une faim jamais assouvie, ne s’arrête plus de manger. Anatomie fonctionnelle du système nerveux cepteurs résulte en une sensation de plus en plus désagréable de soif qui vous poussera à chercher à boire afin de rétablir votre homéostasie. L’hypothalamus agira également sur de nombreux organes, toujours via le système nerveux autonome, afin de minimiser au maximum les pertes d’eau. Il y aura, entre autres, modification du fonctionnement des reins afin de minimiser le plus possible la production d’urine, baisse de la transpiration et de la sécrétion des glandes salivaires. Comme vous pouvez le constater, l’hypothalamus, malgré sa taille réduite (à peu près la taille d’une olive) contrôle à peu près toutes les fonctions nerveuses reliées au maintien de l’homéostasie. Elle constitue en quelque sorte le « cerveau » de notre monde intérieur. Remarquez également comment les fonctions qu’elle accomplit sont toutes reliées entre elles. À heures fixes (horloge interne), nous avons faim (régulation de l’appétit), nos systèmes digestif et hormonal s’activent même si nous n’avons pas encore commencé à manger (gargouillis d’estomac témoignant de l’activité du système nerveux autonome). La satisfaction de cette faim déclenche une sensation de plaisir (émotions). Par contre, un décalage horaire ou une forte émotion peuvent couper l’appétit et faire oublier la soif. La fièvre (régulation de la température) est toujours associée à une perte d’appétit et à l’augmentation de la soif. 6. Horloge interne : C’est cette « horloge » qui déclenche le sommeil le soir et l’éveil le matin (ou le contraire pour les travailleurs de nuit) ou encore qui déclenche l’appétit lorsque l’heure du repas approche. Il est bien démontré que cette horloge interne modifiant notre métabolisme selon l’heure du jour est située dans l’hypothalamus. 7. Contrôle des sécrétions hormonales : L’hypothalamus est directement relié à l’hypophyse, une petite glande contrôlant l’activité de la plupart des autres glandes endocrines de l’organisme. Tout le fonctionnement de l’hypophyse est contrôlé par l’hypothalamus. Si l’hypophyse est le grand patron de la plupart des glandes endocrines du corps, l’hypothalamus, lui, est le grand patron de l’hypophyse. 6-25 Chapitre 6 Un petit truc pour retenir toutes ces fonctions de l’hypothalamus, retenez la petite histoire suivante : Émotions Je tombe en amour, quel plaisir, mais j’ai un peu peur. Appétit Je l’invite au restaurant ; je mange, mais je n’ai pas vraiment faim. Soif On continue à boire du vin même si on n’a plus soif. Système nerveux autonome Mon cœur bat à tout rompre quand je l’invite à la maison … Horloge interne … à minuit on se retrouve au lit et on n’a pas du tout sommeil ! Température interne J’ai chaud, mais qu’est-ce que j’ai chaud!! Sécrétions hormonales Ah les hormones, qu’est-ce que ça ne nous fait pas faire ! 6-26 Anatomie fonctionnelle du système nerveux 7. Le télencéphale (le cerveau) Le cerveau constitue 83 % de la masse de tout l’encéphale. Le télencéphale (ou cerveau) constitue la plus grosse structure de l’encéphale qu’il recouvre presque complètement. Il est formé de deux masses, les hémisphères cérébraux, reliées l’une à l’autre par un pont de matière blanche, le corps calleux Comme nous l’avons vu, les fibres nerveuses permettant au cerveau de communiquer avec tout le corps se croisent au niveau de la moelle épinière ou du tronc cérébral. C’est pourquoi chaque hémisphère est associé au côté du corps qui lui est opposé. L’hémisphère droit, par exemple, reçoit les informations et contrôle les mouvements du côté gauche du corps. Le télencéphale est formé d’une mince couche de matière grise de quelques millimètres d’épaisseur, le cortex, recouvrant de la matière blanche. On peut observer, disséminées dans la matière blanche, de grosses masses de matière grise, les noyaux gris centraux. 7.1. Le cortex Un cinquième lobe, l’insula, n’est pas visible de l’extérieur car il est situé en profondeur, tout au fond du sillon séparant le lobe temporal du reste du cerveau. Le cortex est une mince couche de matière grise (2 à 3 mm d’épaisseur ) dont la surface équivaut à peu près à celle d’une taie d’oreiller. Cette énorme surface se replie à l’intérieur de la boîte crânienne formant ainsi des plis, les sillons, et des bosses, les circonvolutions (ou gyri). Certains plis plus profonds, les fissures (ou scissures) constituent de bons repères anatomiques. La plus profonde des fissures, la fissure longitudinale, sépare l’hémisphère gauche du droit. Sur chacun des hémisphères, les sillons les plus marqués divisent la surface du cortex en grandes zones appelées lobes : lobes frontal, pariétal, occipital et temporal. C’est au niveau du cortex que se déroule toute l’activité consciente de l’encéphale. Ce sont les neurones du cortex qui nous permettent de percevoir, d’analyser et de mémoriser les sensations perçues par les organes des sens. C’est également au niveau du cortex que sont décidés et programmés les mouvements volontaires. C’est enfin au niveau du cortex que se déroulent les activités supérieures comme la pensée, le raisonnement, le jugement et l’imagination. 6-27 Chapitre 6 Substance blanche Fissure longitudinale Circonvolution Sillon Ventricules Corps calleux Cortex Insula Thalamus Noyaux gris centraux Hypothalamus A Hémisphère droit Hémisphère gauche Lobe pariétal Lobe frontal Gilles Bourbonnais Lobe occipital Nerf olfactif Lobe temporal Pont B Bulbe rachidien A. Coupe de l’encéphale montrant les structures du cerveau B. Lobes du cortex (hémisphère gauche) 6-28 Cervelet Anatomie fonctionnelle du système nerveux Au point de vue fonctionnel, on peut diviser le cortex en différentes zones assurant chacune des fonctions spécifiques. • Aires motrices Ces aires, situées surtout au niveau des lobes frontaux, élaborent et contrôlent les mouvements musculaires. • Aires sensitives Ces aires reçoivent et analysent les informations sensorielles. Il y en a plusieurs réparties dans les différents lobes. Le lobe occipital, par exemple, contient toutes les zones de perception et d’analyse des informations visuelles provenant des yeux. Une autre aire, dans le lobe temporal, reçoit les informations olfactives. Une aire importante du lobe pariétal reçoit toutes les informations sensorielles provenant des récepteurs nerveux de la peau. • Aires d’association Ces zones, très étendues chez les humains, ne sont pas directement reliées à des fonctions motrices ou sensorielles. Elles communiquent avec toutes les autres zones du cortex. Ce sont ces zones qui seraient responsables des fonctions supérieures (intelligence, raisonnement, imagination, etc.). Situées surtout dans les lobes frontaux et pariétaux, elles n’ont pas de délimitation précise. Aire sensitive somesthésique Aire motrice Aire motrice du langage Aire visuelle Aires motrices Aires sensitives Aires non spécifiques Gilles Bourbonnais Aire auditive Aire olfactive (sous le lobe temporal) 6-29 Chapitre 6 7.2. La matière blanche La matière blanche du cerveau est formée de fibres (axones) myélinisées reliant différentes composantes du système nerveux. On peut diviser ce vaste réseau de communication en trois catégories : • Fibres d’association Ce sont les fibres nerveuses reliant entre elles les différentes zones du cortex. L’information visuelle perçue et analysée par les lobes occipitaux peut, par ces fibres, être transmise aux lobes frontaux qui compareront ces informations avec d’autres sensations provenant d’autres régions et avec les informations mémorisées. • Fibres commissurales Ce sont les fibres reliant l’hémisphère gauche à l’hémisphère droit. Presque toutes les fibres commissurales sont comprises dans un gros faisceau de fibres appelé « corps calleux ». • Fibres de projection Ces fibres acheminent l’information sensorielle provenant des structures inférieures de l’encéphale vers le cortex et les informations motrices élaborées dans le cortex vers les muscles (via le tronc cérébral et la moelle épinière). Fibres commissurales (corps calleux) Gilles Bourbonnais Fibres d’association 6-30 Fibres de projection Anatomie fonctionnelle du système nerveux Utilisons-nous vraiment seulement 10 % de notre cerveau ? On l’entend souvent dire ! Mais rien n’est plus faux. Cette croyance voulant qu’on n’utilise que 10 % de nos capacités mentales remonte probablement au début du siècle. À cette époque, seules certaines petites zones du cerveau avaient été étudiées (environ 10 % justement !). On ignorait quelles étaient les fonctions de presque tout le reste. Mais ce n’est pas parce qu’on ignore la fonction d’une structure qu’il faille conclure que celle-ci n’a pas de fonction ! Toutes les recherches effectuées au cours de ce siècle ont bien montré que toutes les parties du cerveau participent à son activité. Il n’y a pas de zones « inutilisées ». Si certains sont plus intelligents ou plus habiles dans certains modes de raisonnement que d’autres, ce n’est certes pas parce qu’ils utilisent des structures cérébrales que d’autres n’utilisent pas. Rien dans les observations faites sur le cerveau ne permet de tirer une telle conclusion. 7.3. Les noyaux gris centraux Les noyaux gris centraux sont des amas de matière grise enfouis dans la matière blanche du cerveau. Les deux plus importants, appelés corps striés, sont le noyau caudé et le noyau lenticulaire. Corps striés Noyau caudé Noyau lenticulaire Thalamus Queue du noyau caudé Amygdale (noyau amygdalien) Les noyaux gris centraux jouent un rôle important dans le contrôle des mouvements élaborés par le cortex. 6-31 Chapitre 6 7.4. La latéralisation du cerveau Chacun des deux hémisphères cérébraux est relié au côté du corps qui lui est opposé. Le cerveau droit reçoit les sensations et contrôle les mouvements du côté gauche et vice-versa pour le cerveau gauche. Nous ne sommes pas conscients de cette latéralisation puisque toutes les informations perçues par un hémisphère sont communiquées, par les fibres commissurales, particulièrement par le corps calleux, à l’autre hémisphère. Le cerveau droit est constamment informé de ce que perçoit le gauche et vice-versa. On pourrait croire que les deux hémisphères sont parfaitement symétriques l’un de l’autre, ce qui n’est pas le cas. On a noté plusieurs différences entre le cerveau gauche et le cerveau droit. • Motricité : Chez un droitier (90% des gens sont droitiers), les aires motrices de l’hémisphère gauche sont plus développées que les aires correspondantes de l’hémisphère droit. Cette domination des habiletés manuelles d’une main sur l’autre, ou plus précisément d’un hémisphère sur l’autre, est une propriété unique au cerveau humain, on ne l’observe pas chez les animaux. • Langage Dès le XIXe siècle, le Français Paul Broca avait établi que chez la majorité des gens, l’aire corticale responsable de l’élaboration du langage, l’aire motrice du langage n’existe que dans l’hémisphère gauche. Des lésions graves à cette aire corticale provoquent l’aphasie de Broca, un problème d’élocution caractérisé par une grande difficulté à parler. La personne peut devenir complètement muette ou, si elle arrive à parler, elle ne le fait qu’avec beaucoup de difficultés. Le cerveau gauche peut parler, mais pas le droit. Les centres nerveux responsables de la compréhension du langage sont également limités à l’hémisphère gauche (aire auditive primaire et aire auditive d’association). 6-32 Anatomie fonctionnelle du système nerveux Imaginez l’expérience suivante, on place dans votre main gauche un objet que vous ne pouvez voir. On vous demande de dire quel est cet objet. Quel cerveau a identifié l’objet ? Lequel l’a nommé ? Si on refait ce même test avec une personne dont le corps calleux a été sectionné, que devrait-on observer ? L’expérience a souvent été tentée avec des patients ayant subi cette opération. Afin de régler certains problèmes grave d’épilepsie, il est en effet parfois nécessaire de sectionner chirurgicalement le corps calleux réunissant les deux hémisphères Et si on demande à la personne d’écrire la réponse avec sa main gauche ? • Mode de pensée : Le cerveau gauche excelle dans les tâches demandant un raisonnement mathématique, séquentiel, logique. Lors d’une partie d’échec, c’est surtout le cerveau gauche qui travaille (si j’avance mon pion, alors il va déplacer son fou en b4, alors, je pourrai déplacer mon cavalier en c6 ce qui l’obligera à déplacer sa reine….). 6-33 Chapitre 6 L’autre hémisphère, le droit, a une vision plus globale du monde. Il excelle dans la perception des images complexes, dans l’évaluation de la position des objets dans un espace à trois dimensions (évaluer la trajectoire d’une balle de tennis qui vient d’être frappée, par exemple). On n’analyse pas une image point par point comme le ferait un ordinateur, nous en avons plutôt une perception globale. Le cerveau droit raisonne peu, il est plutôt intuitif. C’est lui, par exemple, qui domine notre pensée lorsque nous contemplons un tableau ou apprécions un morceau de musique. C’est d’ailleurs lui qui possède les centres nerveux permettant de reconnaître un visage (nous reconnaissons les gens qui nous entourent par une perception globale de tout leur visage et non par une fine analyse logique des caractéristiques de leur nez, de leurs yeux et des autres composantes de leur visage). L’hémisphère droit serait également plus émotif, plus sensible que l’intellectuel de gauche. Cerveau gauche • • • • Contrôle du côté droit • Habileté manuelle • Langage parlé et écrit Raisonnement logique, mathémati- • que • • Cerveau droit Contrôle du côté gauche Perception de l’espace et des formes Intuition Reconnaissance des visages Sensibilité musicale et artistique Chez plusieurs gauchers, les deux cerveaux sont inversés, c’est le droit qui parle et qui raisonne et c’est le gauche qui est visuel et intuitif. 6-34 Anatomie fonctionnelle du système nerveux 8. Le cervelet Cervelet Le cervelet représente environ 11 % de la masse cérébrale. Il contient cependant près de 50 % des neurones de tout l’encéphale. Comme le cerveau, il est formé d’un mince cortex de matière grise fortement plissé recouvrant des faisceaux de fibres formant de la matière blanche. Même s’il joue un rôle très important dans la motricité volontaire, son activité demeure au niveau de l’inconscient. Le cervelet reçoit des informations en provenance du cortex le prévenant des mouvements que celui-ci désire effectuer. Il reçoit également des informations des organes des sens l’informant de la position du corps dans l’espace et de la position de chacune des parties du corps. Ces informations permettent au cervelet de coordonner et synchroniser les mouvements qui seront effectués. Sans lui, les gestes seraient brusques et erratiques et on perdrait l’équilibre. Le travail du cervelet est essentiel au maintien de l’équilibre et de la posture. Cortex Arbre de vie (substance blanche) Le cervelet joue également un rôle essentiel dans l’élaboration des mouvements complexes appris (comme, par exemple, faire de la bicyclette, lancer une balle courbe, effectuer un service au tennis ou, plus simplement, se gratter le bout du nez). Cortex Cortex moteur sensitif Tout au long de l’action, le cervelet intervient afin de corriger les mouvements en cours en fonction du geste qui a été décidé par le cortex. Cervelet Chez les personnes souffrant de lésions au cervelet, les gestes sont brusques, saccadés et manquent de précision. Muscles Organes des sens 6-35 Chapitre 6 9. L’éveil et le sommeil Au cours d’une journée ordinaire, nous expérimentons deux types de comportements très différents : l’éveil et le sommeil. L’alternance veille-sommeil se fait normalement suivant un cycle de 24 heures, le rythme circadien (de « circa », autour et « die » le jour). Ce cycle est sous le contrôle de l’hypothalamus. Celui-ci agit sur un réseau de noyaux gris du tronc cérébral appelé « système réticulaire activateur » ou SRA. Comme nous l’avons vu au module précédent, les neurones de ces noyaux gris agissent en stimulant continuellement un très grand nombre de neurones des centres supérieurs. Le SRA est responsable de l’état d’éveil du cerveau. Lorsque le SRA diminue son activité, il entraîne une baisse générale de l’activité du cerveau et on plonge finalement dans le sommeil. Les études effectuées sur le sommeil ont démontré qu’il existe en fait deux types de sommeil très différents l’un de l’autre, le sommeil lent et le sommeil paradoxal. Au cours d’une nuit normale, nous passons de l’un à l’autre selon un cycle d’environ 90 minutes. Caractéristiques du sommeil lent : • Baisse générale de l’activité du cerveau (la consommation d’oxygène baisse et les fréquences générales de décharge des neurones sont à leur plus bas niveau de la journée) • Électroencéphalogramme (EEG) caractérisé par des ondes delta. • Perte de sensibilité : les expériences démontrent que la plupart des informations sensorielles n’atteignent alors même pas le cortex. • Baisse générale du métabolisme : baisse de température et de la consommation d’énergie, baisse des fréquences respiratoire et cardiaque, tension musculaire réduite (mais on peut parfois observer des mouvements). Si on réveille un dormeur en sommeil lent, celui-ci déclare généralement ne se souvenir de rien sinon de quelques vagues pensées. Parfois, mais c’est rare, la personne peut rapporter avoir rêvé. 6-36 Anatomie fonctionnelle du système nerveux Sommeil paradoxal 4 3 2 1 Première nuit 1 2 4 3 5 6 7 8 4 3 2 1 Deuxième nuit Stades du sommeil 1 2 4 3 5 6 7 8 4 3 2 1 Troisième nuit 1 2 4 3 5 6 7 8 Nombre d’heures de sommeil 16 Durée du sommeil (heures par jour) 14 Paradoxal (REM) 12 10 8 Lent 6 4 2 0 1 2 3 5 10 20 35 60 90 Âge 6-37 Chapitre 6 On divise le sommeil lent en quatre stades. Le stade 1 correspond à l’endormissement. Le dormeur est alors facile à éveiller. Puis, le sommeil devient de plus en plus profond. Dans les minutes qui suivent, le dormeur passe aux stades 2, 3 et 4. Puis, le sommeil semble ensuite régresser, le dormeur revient au stade 3, puis au 2 et au 1. C’est à ce moment, environ une heure après s’être endormi, que le cerveau modifie radicalement son activité. Le dormeur entre en sommeil paradoxal. Caractéristiques du sommeil paradoxal : • Intense activité du cerveau : le cerveau est aussi actif (parfois plus) qu’à l’éveil; sa consommation en oxygène peut même être supérieure à celle pendant un effort intellectuel. • Ondes alpha et bêta (caractéristiques de l’état éveillé): il n’y a presque pas de différence entre l’EEG d’une personne éveillée et celui d’une personne en sommeil paradoxal. • Rêve : 90 à 95 % des personnes que l’on réveille dans cette phase du sommeil rapportent avoir rêvé. • Mouvements rapides des yeux : ceux-ci sont agités de rapides mouvements saccadés tout au long du sommeil paradoxal (on ignore pourquoi, cela n’a rien à voir avec le contenu des rêves). Le sommeil paradoxal est souvent appelé sommeil « REM » (Rapid Eyes Movements). • Perte du tonus musculaire : de puissants influx inhibiteurs paralysent complètement tout le système moteur (sauf au niveau des yeux). • Augmentation des rythmes cardiaque et respiratoire. • Érection du pénis et du clitoris (sans qu’il n’y ait aucun rapport avec le contenu érotique des rêves). La durée du sommeil paradoxal peut varier de 5 à 50 minutes. Puis le dormeur retombe en sommeil lent (stades 2, 3 et 4). À nouveau, il 6-38 Selon le spécialiste du sommeil William Dement, le sommeil lent, c’est un cerveau ralenti dans un corps mobile alors que le sommeil paradoxal, c’est un cerveau actif, halluciné, dans un corps paralysé. Anatomie fonctionnelle du système nerveux revient aux stades 3, 2 et 1 et le cycle recommence. Ce cycle dans les phases de sommeil a une durée d’environ 90 minutes. Au cours de la nuit, nous sommes plus souvent en sommeil lent qu’en sommeil paradoxal (environ 75% de lent pour 25% de paradoxal). Le sommeil lent est également plus important au début de la nuit qu’à la fin. Dans la seconde partie de la nuit, les phases de sommeil paradoxal sont plus longues et plus fréquentes alors que le sommeil lent a tendance à devenir moins profond. En vieillissant, la durée totale de sommeil et la durée du sommeil paradoxal tendent à diminuer. Plus on est jeune, plus on dort et plus on rêve (puisque le sommeil paradoxal semble bien être une phase de rêve). Le bébé naissant, par exemple, dort près de seize heures par jour. La moitié de son sommeil se déroule en phase paradoxale. Chez l’adulte, la nuit de sommeil est en moyenne de huit heures, six heures de sommeil lent et deux heures de sommeil paradoxal. On ignore actuellement pourquoi certaines personnes ont besoin de plus de sommeil que d’autres (chez les adultes, les besoins en sommeil peuvent varier de quatre à dix heures par jour selon la personne). Même si on étudie le sommeil depuis des années, on ignore toujours pourquoi on dort et pourquoi on rêve. 6-39 Chapitre 6 On s’entend généralement pour dire que le sommeil correspond à une phase de récupération, mais récupération de quoi ? Il ne s’agit pas d’une récupération physique puisque le métabolisme général du corps est à peu près le même à l’éveil (au repos) que pendant le sommeil. Vous pouvez demeurer couché, immobile dans votre lit toute une nuit, vous ne dépenserez pas alors bien plus d’énergie que si vous dormiez, mais si vous ne dormez pas, vous serez une loque le lendemain. On ignore pourquoi, mais il semble bien que la baisse d’activité du cerveau caractéristique du sommeil lent soit essentielle à son bon fonctionnement. Le cerveau se reposerait pendant le sommeil lent. Mais pourquoi doit-il se reposer ? Pourquoi certains animaux comme les chevaux peuvent-ils se contenter de deux heures de sommeil par jour alors que d’autres comme les chats en ont besoin de seize ? De même pour le rêve, pourquoi rêvons-nous ? Ici, il ne s’agit certainement pas de récupération puisque le cerveau est encore plus actif pendant cette phase de sommeil que pendant l’éveil. Tous les mammifères et beaucoup d’oiseaux ont des phases de sommeil paradoxal (et donc de rêve). On sait également que si une personne est privée de sommeil paradoxal pendant une nuit, la nuit suivante, les phases de sommeil paradoxal seront plus fréquentes et plus longues, comme si le cerveau cherchait à rattraper le sommeil paradoxal qu’il a manqué. Cette phase de sommeil doit donc jouer un rôle important dans le fonctionnement du cerveau. Mais quel rôle ? On l’ignore. Certains croient que le cerveau aurait besoin de cette période de sommeil pour réorganiser sa mémoire, pour faire le tri de ce qui doit être retenu et de ce qui peut être oublié. C’est pourquoi les enfants rêveraient plus que les adultes. Mais alors, pourquoi le bébé de quelques jours rêverait-il autant ? Des études semblent même démontrer que dans l’utérus, le fœtus rêverait à peu près continuellement (rêver à quoi ? On se le demande). 6-40 Anatomie fonctionnelle du système nerveux 10. Le système nerveux autonome Le système nerveux autonome (ou SNA) est formé de l’ensemble des fibres nerveuses contrôlant les fonctions végétatives (organes involontaires). L’hypothalamus, comme nous l’avons vu, constitue le « cerveau » du monde intérieur. Elle agit sur presque tous les organes par l’intermédiaire des fibres du SNA. Le système nerveux autonome se divise en deux composantes : • • système sympathique système parasympathique. L’action du système sympathique sur un organe donné est toujours contraire à celle du système parasympathique sur ce même organe. Les influx sympathiques, par exemple, augmentent la fréquence des battements cardiaques alors que les influx parasympathiques la ralentissent. La plupart des organes reçoivent des terminaisons nerveuses provenant des deux systèmes. Le coeur, par exemple, est innervé par des fibres sympathiques et aussi par des fibres parasympathiques. En pratique, les deux systèmes envoient continuellement des impulsions nerveuses à l'organe qu'ils contrôlent. Cependant, en certaines circonstances, un système peut devenir beaucoup plus actif que l'autre. 6-41 Chapitre 6 Les fibres du système nerveux autonome sont toujours formées de deux neurones. Un premier neurone dont le corps cellulaire est situé dans le système nerveux central fait synapse sur un second neurone dont l’axone se rend jusqu’à l’organe innervé. • Système nerveux sympathique : le premier neurone est court et il fait synapse avec le second, beaucoup plus long, au niveau d’un petit ganglion généralement situé près de la moelle épinière (l’ensemble de ces ganglions forme ce qu’on appelle la chaîne ganglionnaire sympathique). • Système nerveux parasympathique : le premier neurone est très long et il fait synapse au niveau d’un petit ganglion avec le second, beaucoup plus court. Le ganglion où se fait la synapse est généralement situé dans l’organe innervé. Le neurotransmetteur relâché par le second neurone n’est pas le même pour chacun des systèmes : • Système nerveux sympathique : noradrénaline (c’est un neurotransmetteur qui a sensiblement les mêmes effets que l’adrénaline). • Système nerveux parasympathique : acétylcholine L’effet de chacun de ces neurotransmetteurs sur l’organe où il est sécrété est variable selon le type de récepteur sur lequel il se fixe. La noradrénaline, par exemple, a un effet stimulant sur les cellules cardiaques mais un effet inhibiteur sur les cellules musculaires de l’intestin. SNC Parasympathique Acétylcholine Organe Sympathique 6-42 Noradrénaline Anatomie fonctionnelle du système nerveux Toutes les fibres du système sympathique proviennent de la région centrale de moelle épinière. Elles voyagent jusqu’aux organes qu’elles innervent principalement par les nerfs rachidiens dans lesquels on retrouve aussi les fibres sensitives somatiques et les fibres motrices innervant les muscles. Les fibres parasympathiques proviennent pour la plupart de l’encéphale. Elles font partie des fibres formant certains nerfs crâniens, principalement le nerf vague, le dixième des douze nerfs crâniens. Certaines fibres proviennent également de la portion terminale de la moelle épinière. Normalement, dans l’organisme, les deux systèmes sont actifs, l’un annulant en quelque sorte, les effets de l’autre. En situation de repos, le système parasympathique domine légèrement le système sympathique. Par contre, en cas d’urgence, de danger ou de stress intense, le système sympathique devient très actif par rapport au parasympathique. Le système sympathique a pour but de préparer l’organisme à affronter un danger. Il agit en augmentant l’activité des organes pouvant fournir rapidement de l’énergie aux cellules musculaires (cœur, poumons, etc.) et en réduisant l’activité de tous les autres organes qui ne sont pas nécessaires dans l’immédiat. Notez que certains organes ne sont pas innervés par les fibres parasympathiques. C’est le cas, entre autres, des reins, du foie et de la plupart des vaisseaux sanguins qui ne reçoivent qu’une innervation sympathique. Inversement, le système sympathique est actif au repos, quand rien ne menace l’organisme. Il réduit l’activité des organes liés aux dépenses d’énergie et active les organes nécessaires à l’entretien et à la réparation de l’organisme (organes digestifs, organes de l’élimination des déchets, etc.). 6-43 Chapitre 6 Système sympathique Système parasympathique Constriction de la pupille Nerf crânien III Dilatation de la pupille Nerf crânien VII Oeil Inhibition de la salivation Nerf crânien IX Glande salivaire Stimulation de la production de salive Dilatation des bronches Constriction des bronches Poumons Augmentation de la fréquence cardiaque Baisse de la fréquence cardiaque Stimulation de la Coeur production de glucose Nerf crânien X (nerf vague) Stimulation de la digestion Foie Sécrétion d’adrénaline Glandes surrénales sécrétion Stimulation de la digestion et des contractions musculaires Intestins Relaxation de la vessie Stimulation de l’orgasme 6-44 Pancréas Stimulation de la Inhibition de la digestion Gilles Bourbonnais Chaîne sympathique Estomac Vessie Stimulation de la contraction de la vessie Stimulation de l’activité sexuelle Organes reproducteurs Anatomie fonctionnelle du système nerveux Tout le système nerveux autonome est sous le contrôle de l’hypothalamus, une structure très primitive de notre encéphale. L’hypothalamus peut réagir à des informations inconscientes qui lui parviennent par le sang ou par la voie nerveuse et, également, à des informations provenant des centres supérieurs conscients (le cortex). Suite à une baisse de pression sanguine dans le système circulatoire, l’hypothalamus activera automatiquement le système sympathique afin d’accélérer le cœur et resserrer les vaisseaux sanguins, ce qui aura pour effet de rétablir la pression. Dans cet exemple, l’hypothalamus réagit automatiquement à des informations provenant de l’intérieur de l’organisme. Mais l’hypothalamus peut également réagir à des informations conscientes provenant du cortex. Imaginez, par exemple, qu’un policier vous arrête pour excès de vitesse. Il s’approche de votre voiture, votre cœur bat plus vite, signe que votre système sympathique est plus actif. Que se passe-t-il ? Le cortex analyse la situation, vous êtes conscient que vous rouliez trop vite et que la note risque d’être salée. Vous êtes inquiet (c’est vraiment pas le temps d’avoir une contravention!). L’hypothalamus perçoit votre inquiétude comme un signal de danger et il active le sympathique même si la chose est inutile. En effet, face à cette situation, vous n’allez quand même pas attaquer le policier ou vous enfuir à toutes jambes, il est donc inutile de préparer l’organisme à une grande dépense d’énergie. Mais l’hypothalamus est une structure primitive. Il ne comprend que deux choses, ou bien il y a danger et alors il faut activer le sympathique ou tout va bien et il active alors le parasympathique. L’hypothalamus n’est pas assez intelligent pour comprendre ce qui se passe. 6-45 Chapitre 6 Effets du système nerveux autonome sur les organes Sympathique Cœur Glandes salivaires Œil Glandes surrénales Poumons Système digestif Foie Reins Vaisseaux sanguins Organes génitaux 6-46 Parasympathique Vocabulaire Acétylcholine Neurotransmetteur relâché par les fibres parasympathiques. Arachnoïde Méninge située entre la dure-mère et la pie-mère. Cerveau Nom donné au télencéphale. Le cerveau est formé des deux hémisphères cérébraux. Corps calleux Faisceau de fibres commissurales reliant les deux hémisphères. Cortex Couche de matière grise recouvrant le télencéphale. Diencéphale Partie du cerveau antérieur juste à l’arrière du télencéphale. Le diencéphale comprend le thalamus, l’hypothalamus et l’épithalamus. Dure-mère Première des trois méninges (en partant de l’extérieur) recouvrant le SNC. EEG Électroencéphalogramme. Enregistrement de l’activité électrique du cortex. Épidurale Technique d’anesthésie consistant à injecter un anesthésique dans l’espace épidural. Épiphyse Petite glande faisant partie de l’épithalamus. Elle sécrète une hormone appelée mélatonine. Fibres rales commissu- Fibres nerveuses permettant la communication entre les deux hémisphères. Fibres de projec- Fibres nerveuses reliant le cortex aux zones inférieures du SNC. tion Hydrocéphalie Anomalie causée par une accumulation de liquide céphalorachidien dans les ventricules cérébraux. Hypothalamus Structure du diencéphale jouant un rôle important dans le contrôle de l’activité du milieu intérieur. Liquide céphalo- Liquide sécrété par les plexus choroïdes des ventricules cérébraux. Le liquide s’écoule à la surface du SNC où il est absorbé rachidien par le sang. Noradrénaline Neurotransmetteur relâché par les fibres sympathiques. Noyaux gris cen- Amas de matière grise dans la matière blanche du télencéphale. traux Chapitre 6 Pie-mère Méninge mince intimement accolée au SNC. Plaque neurale Zone du dos de l’embryon à l’origine de la formation de la gouttière neurale puis du tube neural. Plexus choroïde Tissu tapissant les ventricules cérébraux. C’est ce tissu qui élabore le liquide céphalo-rachidien. Ponction lombaire Technique consistant à prélever un échantillon de liquide céphalorachidien au niveau de l'espace sous-arachnoïdien. SRA Système réticulaire activateur. Ensemble de neurones du tronc cérébral stimulant de vastes zones du télencéphale. Télencéphale Partie la plus avant du cerveau antérieur. Le télencéphale est formé des deux hémisphères cérébraux. Thalamus Structure du diencéphale. Le thalamus est un important centre de relais entre les parties supérieures et inférieures du SNC. Tronc cérébral Structure formée du mésencéphale, du pont et du bulbe rachidien. Tube neural Tube se formant à partir de la gouttière neurale de l’embryon. Le tube neural est à l’origine de tout le système nerveux. Ventricule cérébral Cavité emplie de liquide dans l’encéphale. 6-48 Anatomie fonctionnelle du système nerveux Questions de révision 1. Quelles protections de l’encéphale un chirurgien doit-il sectionner afin d’atteindre la surface du cortex ? 2. Décrivez le parcours du liquide céphalo-rachidien. 3. Quelle différence faites-vous entre une ponction lombaire et une épidurale? 4. Soit les structures suivantes du système nerveux : Moelle épinière Tronc cérébral Cervelet Corps calleux Thalamus Hypothalamus Cortex Noyaux gris centraux Ventricule Épiphyse Laquelle : a. Est responsable de la perception consciente des sensations ? b. Est responsable de la faim ? c. Est un important centre de relais entre les parties supérieures et inférieures du système nerveux. d. Est une cavité remplie d’un liquide clair ? e. Est responsable des mouvements volontaires ? f. Joue un rôle important dans la coordination des mouvements élaborés par le cerveau ? g. Est formé de fibres nerveuses reliant l’hémisphère droit à l’hémisphère gauche ? h. Est responsable du contrôle de la température interne ? i. Est une petite glande sécrétant une hormone appelée mélatonine ? j. Est responsable de la toux et des éternuements ? k. Est responsable du réflexe rotulien (le réflexe qui fait se redresser la jambe quand on frappe le tendon sous la rotule) ? 6-49 Chapitre 6 5. Une blessure a pour effet de sectionner les fibres parasympathiques innervant le coeur. Quel sera l'effet sur le rythme cardiaque? 6. Lorsqu'on se blesse au pied, en marchant sur un clou par exemple, la jambe blessée se plie immédiatement alors que l'autre jambe se raidit pour supporter le poids du corps. Pouvez-vous dessiner les neurones impliqués dans ce réflexe? Récepteur du pied Muscle fléchisseur de la jambe Muscle extenseur de la jambe 7. En se levant le matin, votre conjoint vous affirme qu'il n'a pas rêvé. Est-ce possible? 8. Freud supposait que le rêve servait de soupape permettant d'évacuer les frustrations acquises par l'éducation. Quelle observation est en totale contradiction avec cette hypothèse? 6-50