Pourquoi enseigner les arts en général et plus spécifiquement aux élèves ayant des besoins particuliers? Travail présenté à Suzanne Blouin dans le cadre du cours MEA8050-010 « Enseignement des arts aux élèves ayant des besoins particuliers » Session automne 2013 par TOM ANSUINI 7 octobre 2013 Introduction Dans cet essai, je vais discuter des raisons qui, pour moi, justifient l’enseignement des arts, en particulier la musique. Premièrement, je vais parler des avantages que cela peut apporter sur les plans culturel, affectif et intellectuel. Je vais également expliquer ce qu’enseigner la musique représente pour moi et pour quoi j’en ai fait une carrière. Deuxièmement, je vais parler des avantages que la musique peut apporter aux élèves ayant des besoins particuliers et des troubles d’apprentissage. Je vais proposer, à travers des exemples et des faits vécus, des outils pédagogiques pour aider ces élèves à développer leurs connaissances de façons motivantes et valorisantes. En conclusion, je présenterais une courte synthèse des moyens que je prends pour motiver et pour valoriser mes élèves, quelle que soit leur capacité individuelle. Pourquoi enseigner les arts? Selon moi, les arts permettent à une personne de mieux découvrir qui elle est en lien avec la culture et avec la société. Les arts permettent de développer l’estime de soi, la sensibilité aux autres (culturelle et sociale) et la créativité intellectuelle toutes des qualités essentielles pour créer un être équilibré qui est bien dans sa peau. C’est à travers les arts qu’une personne peut vivre des expériences enrichissantes et valorisantes et c’est par ces expériences vécues qu’elle pourra atteindre ses objectifs de vie avec plus de confiance. Enseigner la musique, pour moi, est un moyen de donner ces expériences à des jeunes qui n’ont pas toujours la confiance nécessaire pour croire en eux-mêmes et qui, souvent, limitent leur propre potentiel simplement parce qu’ils ne se croient pas être assez bons pour réussir une tâche. C’est pour cette raison que j’essaie toujours de mettre mes élèves dans des situations valorisantes qui leur permettent ainsi de développer leur confiance. Je suis passionné par l’idée de permettre à l’élève de démolir les barrières qui l’empêchent de s’assumer et de voir ce qu’il est capable d’accomplir .Lorsque j’étais jeune, au secondaire, je ne pensais pas avoir de valeur; je n’étais pas populaire, les enseignants me disaient que j’étais nul et je le croyais. Je jouais de la musique, mais cela n’était pas valorisé par mes enseignants. Ce n’est qu’en suivant des cours avec un enseignant en particulier à l’âge de 16 ans que j’ai commencé à comprendre à quel point j’adorais la musique, mais encore plus important, que j’étais intelligent! Cet enseignant a su valider mes efforts et a su me mettre dans des situations valorisantes qui m’ont aidé à connaitre mes forces et à motiver davantage mes efforts. En bref, il m’a inspiré à devenir un enseignant, mais pas juste n’importe lequel enseignant, mais un enseignant qui saurait donner cette même confiance et ce même sens de valeur à ses élèves. C’est pour cette raison que jusqu’à ce jour, je ne sélectionne pas celles qui font partie de mes orchestres et celles qui peuvent être dans mes spectacles. Toutes mes élèves ont la chance de développer qui elles sont par l’apprentissage de la musique et elles ont toutes la même opportunité de vivre des expériences positives par cet apprentissage. Je ne leur impose rien. Je leur propose des outils qui leur permettront d’apprendre ce qu’elles aiment par des moyens motivants. Je n’enseigne pas pour créer des grandes musiciennes, mais plutôt pour créer des jeunes femmes confiantes et bien dans leur peau. La musique et les élèves ayant des besoins particuliers Avant de continuer, j’aimerais préciser que je n’enseigne pas dans un milieu comportant des cas graves d’élèves avec des besoins particuliers. Cela ne veut pas dire que toutes mes élèves ont la même capacité physique ou mentale pour apprendre la musique. Je préfère ne pas porter attention aux catégorisations, à moins que ça soit un problème social (ne peut pas travailler avec les autres), mais même dans ce cas, j’essaye de ne pas mettre d’étiquettes sur l’élève par rapport aux activités que je propose en classe. Je crois sincèrement que toutes les élèves sont capables de vivre des expériences positives à travers la musique. Il ne suffit que de trouver la façon de les intéresser et de les motiver. Il faut être capable de leur montrer des choses présentées de différentes façons et de pouvoir ensuite identifier celle qui convient le mieux à chaque élève selon ses capacités. Lorsque j’étais au secondaire, j’étais un de ces élèves qui ne comprenait pas bien les choses. Ce n’était pas parce que je n’avais pas la capacité de les comprendre, mais plutôt parce qu’elles ne m’étaient pas présentées d’une manière motivante ou intéressante. Nous n’apprenons pas tous de la même façon. C’est pour cette raison que je développe mon propre matériel didactique (logiciels pédagogiques et arrangements musicaux) par ordinateur. Je mets la priorité sur l’expérience ludique vécue et sur ce qui intéresse l’élève. La stimulation émotive et sensorielle joue, selon moi, un énorme rôle dans le développement des habiletés cognitives de l’élève, quelles que soient ses limitations physiques ou mentales. Je pourrais en écrire longtemps sur cette philosophie pédagogique (enseignement pas les jeux vidéos), mais cela sortirait du contexte de cet essai. Par contre, il est important de souligner qu’un élève ayant des besoins particuliers profitera bien plus d’une expérience d’apprentissage ludique, ensemble avec les autres élèves, que d’une expérience dans laquelle il est traité comme un élève « spécial ». Dans mes cours, je n’arrive pas à distinguer les élèves qui sont suivis par l’orthopédagogue des autres élèves qui ne le sont pas tout simplement parce que chaque élève peut développer et explorer ses habiletés musicales par le moyen qui lui convient le mieux à travers mes logiciels pédagogiques. Je m’assure qu’une même notion est vue dans différents logiciels, permettant ainsi à l’élève de « découvrir », par elle-même, celui qui lui présente l’explication qu’elle comprend le mieux. Ce type d’enseignement différencié permet à l’élève d’étudier, de travailler et d’avancer à son propre rythme en partant de ce qu’elle a déjà comme connaissances et habiletés. De plus, l’élève peut plus facilement assimiler la matière à travers les jeux dans lesquels les notions sont présentées. Cette méthode d’enseigner favorise fortement les élèves qui ont des besoins particuliers par son approche ludique et visuelle. Je soutiens ces arguments en me référant à une activité que nous avons faite en classe lors du cours du 30 septembre. L’activité nous a mis dans une situation où l’on ne comprenait pas les consignes parlées, mais nous comprenions les gestes visuels que l’enseignante faisait. Dans cette expérience, notre intelligence n’était pas le problème; il y avait simplement un blocage qui nous empêchait de comprendre les instructions parlées. Cela est souvent le cas avec des élèves qui ont des difficultés d’apprentissage. Ce n’est pas par un manque d’intelligence qu’ils ne comprennent pas, mais plutôt parce qu’ils n’arrivent pas à comprendre des instructions dans le format actuel. Avec des outils visuels et interactifs, comme avec les logiciels que j’ai développés, l’élève en difficulté est guidé et stimulé par des animations, des couleurs et des sons et, par la suite, peut comprendre les informations de différentes façons. Cette forme de stimulation alternative et variée lui permet de voir, d’entendre et d’observer ce qu’il doit faire, lui permettant ainsi de mieux comprendre et de se sentir plus motivé et confiant dans ses capacités. En conclusion Durant mes 22 ans d’enseignement, j’ai souvent eu des élèves très forts et également des élèves très faibles. À certains moments, j’ai même eu des élèves avec des déficiences intellectuelles que je ne pourrais malheureusement pas vous préciser en termes scientifiques. Par contre, dans tous les cas, j’ai toujours appliqué la même philosophie de base et je me suis toujours posé la même question : qu’est-ce que cet élève aime? En considérant la réponse à cette question, je prépare les activités et le matériel didactique en fonction de cela. J’intègre les notions musicales dans des activités et des jeux amusants, je prépare des arrangements musicaux en lien avec ses gouts et je continue à développer mes plans de cours selon la direction que l’élève veut suivre. Je reste toujours à l’écoute de l’élève en observant ce qui l’intéresse le plus et ce qui l’intéresse le moins et j’adapte ma pédagogie autour de cela. Je trouve des façons de passer le contenu pédagogique par des moyens motivants et agréables pour l’élève et en même temps, en incluant des liens avec des repères culturels que je juge importants et essentiels. Cette tâche n’est, évidemment, pas facile et demande beaucoup de temps et beaucoup de créativité de ma part, mais les résultats me permettent de dire que je ne vois pas de ligne qui sépare les élèves en difficulté des élèves réguliers dans mes cours. La seule chose que je vois est la satisfaction manifestée par les élèves qui entrent dans mes cours en première secondaire, avec de la faible estime de soi et des expériences négatives vécues, et qui s’assument, développent leur confiance et réalisent qu’elles peuvent réussir à travers les outils, les expériences et les spectacles que je leur propose dans les quatre années qui suivent. C’est ça qui inspire ma passion pour l’enseignement et qui me donne le gout et l’énergie de continuer cette méthode pédagogique pour le 21e siècle.