Corporation de conservation du boisé de Johnville C.P. 87 Succursale Lennoxville Sherbrooke, Qc J1M 1Z3 Tél : (819) 569-9388 Fax : (819) 563-3705 www.parc-johnville.qc.ca Règlement d’un conflit d’usage du sol : une opportunité pour la conservation et la restauration d’une tourbière - Bref résumé La Corporation de conservation du boisé de Johnville (CCBJ) est gestionnaire du Parc écoforestier de Johnville, un terrain de 180 ha boisé et renfermant une tourbière ombrotrophe, que possède la Ville de Sherbrooke, mais qui est situé dans la municipalité voisine, la Ville de Cookshire-Eaton (en Estrie). Le ruisseau Racey, qui passe dans le Parc, a été creusé et redressé en 1978-1979 par le ministère de l’Agriculture, à la demande des bureaux de délégués de Sherbrooke et de Compton qui en ont déterminé les dimensions par règlement municipal. Le voisin du Parc, qui possède une partie de la tourbière de Johnville située en amont de la partie située dans le Parc, voulait mettre sa partie de la tourbière en culture maraîchère. Pour cela, il a aménagé un important réseau de drainage mais il était dans l’impossibilité d’évacuer ses eaux autrement que dans le ruisseau Racey. Pour y arriver, il demandait que le ruisseau soit remis en état tel qu’il était après les travaux de 1978-1979. Pour cela, le voisin s’est adressé à la MRC du Haut-Saint-François, qui a juridiction sur le ruisseau, pour faire appliquer le règlement municipal s’appliquant au ruisseau. Cependant, la CCBJ et la Ville de Sherbrooke se sont opposées aux travaux, motivées par leur objectif de conservation de la tourbière. Dans ces conditions, la MRC du Haut-SaintFrançois a refusé d’appliquer le règlement avant qu’une étude des impacts sur l’environnement ne soit faite. Refusant de produire une étude des impacts, le voisin a choisi de s’adresser à la Cour supérieure pour forcer la MRC du Haut-Saint-François à effectuer les travaux requis dans le ruisseau. Ayant réalisé, au fil de ses démarches juridiques, que des dispositions du schéma d’aménagement de la MRC du Haut-Saint-François désignant une partie de sa terre comme Territoire d’intérêt écologique l’empêchaient de la mettre en culture malgré le fait qu’elle soit située en zone verte, le voisin contestait aussi le schéma d’aménagement, lequel avait pourtant été adopté avant qu’il ne fasse l’acquisition de sa propriété. Par ailleurs, un recours avait également été déposé par le voisin devant la Commission de protection du territoire agricole pour invalider l’autorisation qui avait été donnée à la Corporation de conservation du boisé de Johnville de déroger à l’usage agricole pour aménager des sentiers. Cette requête a été rejetée par la CPTAQ et le voisin en avait appelé de cette décision devant le Tribunal administratif du Québec. Enfin, la Ville de Sherbrooke, en tant que propriétaire du Parc, avait également intenté une poursuite auprès du vendeur pour obtenir une condamnation pour les dommages effectués sur son terrain (creusage du ruisseau Racey et déboisement sur les rives de ce dernier). Devant l’impasse juridique, les coûts élevés des honoraires payés par chaque partie et les délais pour obtenir un jugement des tribunaux, l’ensemble des parties a convenu de procéder à une conférence de règlement à l’amiable devant un juge médiateur. Cette conférence de règlement s’est caractérisée par : • Des concessions réciproques de toutes les parties mises en cause; • L’acquisition d’une partie du terrain voisin (43,82 ha) incluant une servitude d’inondation (une partie du terrain résiduel voisin peut être inondé de façon naturelle) et une clause sur le drainage des terrains résiduels qui demeuraient la propriété du vendeur; • Le règlement complet et définitif de tous les litiges les opposant. Les étapes qui ont été réalisées suite à la signature de la promesse d’achat, en juin 2006, ont été les suivantes : • • • • • • • • • Évaluation du terrain par un évaluateur agréé Inventaire de la flore sur le terrain à acquérir Évaluation du potentiel de restauration de la tourbière dégradée suite au creusage de canaux de drainage Demande de subvention au MDDEP dans le cadre de son Programme de conservation du patrimoine naturel en milieu privé – volet 2 Demande d’aliénation à la CPTAQ Description technique par un arpenteur Négociation pour l’ajout d’une clause sur le drainage : le vendeur exigeait qu’une clause soit ajoutée pour s’assurer que le résiduel de terrain qu’il lui reste ne soit pas inondé Finalisation de l’acte de vente Finalisation de l’acte de servitude d’inondation Le projet d’acquisition du terrain, qui s’est conclu en octobre 2007, a coûté environ 375 000 $ (évaluation foncière, coût d’achat, taxes, arpentage, avocats, gestion, notaire, intérêts, etc) et les partenaires financiers ont été le MDDEP, dans le cadre de son Programme de conservation du patrimoine naturel en milieu privé – volet 2 (145 973 $), la MRC du Haut-Saint-François (71 400 $), la Ville de Sherbrooke (38 155 $), la Ville de Cookshire-Eaton (35 700 $), l’Université de Sherbrooke (19 613 $) et l’Université Bishop’s (9 806 $). Cette acquisition permettra de préserver une section additionnelle de la tourbière de Johnville soit 25 % de sa superficie estimée. Ce faisant, presque l’ensemble de cette tourbière, qui constitue un écosystème rare pour la région, sera protégé. En plus d’une végétation typique aux tourbières, ce terrain abrite deux espèces végétales susceptibles d’être désignées menacées ou vulnérables, soit la platanthère à gorge frangée et la wolffie de Colombie, ainsi que des portions boisées en régénération, dont une cédrière humide. La propriété comprend également une portion de tourbière anciennement exploitée dont la protection et le rétablissement des conditions hydrologiques favoriseront la restauration de la végétation. Les objectifs de conservation retenus spécifiquement pour le terrain acquis, limitrophe au Parc écoforestier de Johnville, sont : • • • D’offrir une zone tampon pour protéger la partie de la tourbière de Johnville qui est dans un très bon état de conservation; De restaurer et de maintenir les processus écologiques de la tourbière ombrotrophe et favoriser le rétablissement d’une flore et d’une faune typiques de ces milieux; De protéger et de conserver l’ensemble des milieux humides acquis et ce, à perpétuité. Des objectifs de gestion ont également été fixés, soit : • • • • D’inclure le terrain dans l’affectation « conservation » du Parc écoforestier de Johnville; De demander le statut de réserve naturelle en milieu privé (catégorie UICN III : Monument naturel / Élément naturel marquant); De permettre la réalisation de recherches scientifiques; De manière ponctuelle, d’offrir sur place des activités d’éducation et de sensibilisation pour le grand public.