institut France Euskadi Dossier de presse Juin 2006 Ces régions qui vont sauver l’industrie européenne L’exemple du Pays Basque espagnol (Euskadi) Contact presse Xavière Bourbonnaud Tél 01 45 80 28 10 / 06 67 05 75 79 [email protected] Sommaire I - Le miracle économique basque des années 90 : la grande reconversion industrielle A) La gestion de la crise économique La place prépondérante de l’industrie La double épreuve des années 1980 La reconversion industrielle réussie p.4 p.5 B) La nouvelle industrie basque p.8 Le moteur de l’économie régionale La machine-outil, troisième de l’Union européenne L’industrie automobile en pleine croissance Une industrie aéronautique créée ex nihilo II – Le défi d’aujourd’hui : rester une des dix plus grandes régions industrielles d’Europe A) Les poids lourds régionaux de l’industrie européenne Les dix régions industrialisées les plus dynamiques La liste qui bouscule quelques idées reçues L’équilibre nord-sud inattendu Des résultats confirmés par les derniers chiffres Eurostat B) Des régions qui cachent des points communs Le faux problème de la taille La question de l’atout frontalier Des secteurs porteurs Des taux de chômage parmi les plus bas d’Europe III – Le plan pour demain : Euskadi 2015 p.12 p.13 p.15 p.20 A) Le développement de l’innovation p.22 Un rattrapage spectaculaire Des efforts à poursuivre Se rapprocher le plus possible de l’agenda de Lisbonne B) Le renforcement de l’internationalisation p.26 Une région ouverte Des marges de progression importantes Favoriser la croissance et la coopération des PME IV – Une constante : la priorité donnée aux PME p.29 A) Les clusters p.30 L’instrument clé de la compétitivité des régions Des politiques de clusters plus ou moins structurées L’exemple de la Haute-Autriche L’exemple d’Euskadi B) Les agences régionales de développement p.35 L’outil de gouvernance de toutes les régions performantes Des compétences plus ou moins étendues La SPRI, bras armé de la politique industrielle basque Conclusion p.39 Annexes p.40 - Les régions industrielles les plus dynamiques d’Europe : fiches signalétiques - Extraits des déclarations du Président du Gouvernement basque et du Ministre de l’industrie à l’occasion du lancement d’Euskadi 2015 2 La communauté autonome du Pays Basque espagnol (Euskadi) Présentation Le Pays Basque espagnol est l’une des 17 régions ou « Communautés autonomes » de l’Etat espagnol. Situé au nord de l’Espagne, sur le versant ouest des Pyrénées et le long du Golfe de Gascogne, ce territoire regroupe 2,1 millions d’habitants au sein de trois territoires historiques : la Biscaye, l’Alava et la Guipuzcoa. La capitale administrative d’Euskadi est Vitoria ; la principale agglomération est celle de Bilbao (1 million d’habitants). Depuis 1979, le système institutionnel dit « d’autogouvernement » du Pays Basque espagnol s’organise autour d’organes communs (un parlement et un gouvernement) et d’organes propres à chacune des trois provinces. Par rapport aux autres Communautés autonomes espagnoles, les compétences propres du Pays Basque sont particulièrement larges en matière de politique économique. Elles lui permettent de légiférer dans des domaines aussi étendus que l’industrie, le commerce, les transports, les équipements publics, le tourisme… Pour exercer ces compétences, Euskadi détermine, perçoit et gère librement la totalité des impôts auxquels sont assujettis les Basques espagnols et les sociétés implantées sur son territoire. Cette autonomie financière est issue de l’Accord Economique (Concierto Económico) signé avec l’Espagne en 1981 qui scelle des relations fiscales d’ordre quasi-confédéral entre le Pays Basque espagnol et le gouvernement central. Seule obligation en contrepartie : le Pays Basque est tenu de financer sa quote-part des charges générales de l’Etat espagnol (pour l’essentiel : la défense et la représentation diplomatique). Aujourd’hui, cette contribution représente environ 8 % des ressources financières de la région. L'Institut France-Euskadi (IFE) Créé à Paris en 1997 et signataire d'une convention avec la Communauté Autonome du Pays Basque, l'Institut France-Euskadi (IFE) est une association dont l'objectif est de faire connaître le Pays Basque et de favoriser la coopération économique entre le Pays Basque espagnol et la France. L'Institut France-Euskadi est présidé par Jean-Philippe Larramendy. 3 Introduction Après avoir surmonté une crise économique sans précédent dans les années 80, le Pays Basque espagnol fait aujourd’hui partie des dix régions à la fois les plus industrielles et les plus prospères d’Europe, aux côtés notamment de la Lombardie et du Bade-Wurtemberg. Face au nouveau défi que constitue la montée en puissance de l’industrie chinoise et indienne, la région s’est fixée pour objectif de maintenir sa position dans le peloton de tête des grandes régions industrielles d’Europe en faisant de l’internationalisation et de l’innovation ses deux priorités dans le cadre de sa stratégie de compétitivité « Euskadi 2015 ». Comme l’a exprimé la ministre du Gouvernement basque pour l’industrie : « notre volonté de conserver à notre région une vocation industrielle reste intacte. Notre objectif est clair : Euskadi est une grande région industrielle d’Europe et entend le rester ». Comme les autres grandes régions industrielles européennes, le Pays Basque est convaincu du rôle moteur que l’industrie doit continuer à jouer dans l’économie. Plus encore, à une époque marquée par l’affaiblissement des politiques économiques nationales, ces régions mobilisent des ressources importantes et des outils spécifiquement adaptés à l’échelon local pour mettre en œuvre leurs stratégies industrielles. C’est particulièrement vrai en Euskadi où ce volontarisme s’exprime à travers des outils tels que les clusters ou l’agence régionale de développement. L’exemple du Pays Basque espagnol illustre parfaitement la tendance actuelle caractérisée par une concentration territoriale des PMI autour de centres de formation et de recherche, la montée en puissance des pouvoirs économiques régionaux et des politiques économiques très innovantes. 4 I – Le miracle économique basque : la grande reconversion industrielle des années 90 Territoire sinistré par la crise industrielle pendant les années 80, le Pays Basque espagnol est devenu en moins de quinze ans une des régions les plus dynamiques d’Europe. Ce « miracle économique basque » est notamment le fruit de la politique industrielle menée par la région qui a permis non seulement de sauver l’industrie traditionnelle mais de la rendre moderne et très compétitive. Comme l’a expliqué Ana Agirre, Ministre du Gouvernement basque pour l’industrie à l’occasion de l’élaboration de la stratégie de compétitivité « Euskadi 2015 », le Pays Basque espagnol a refusé « le caractère inéluctable de ce que l’on avait coutume d’appeler l’ère post industrielle et fait le choix de reconvertir ses industries traditionnelles. Avec une conviction simple qui a guidé la région tout au long des années 90 : il n’existe pas d’industrie obsolète mais seulement des entreprises obsolètes. » Une politique qui a porté ses fruits puisque l’industrie est aujourd’hui le principal moteur du développement économique du Pays Basque espagnol. 5 A) La gestion de la crise économique La crise des années 80 a laissé des traces dans de nombreuses régions industrielles d’Europe qui, selon les cas, ont décidé de liquider leur industrie ou n’ont jamais réussi à retrouver la voie de la compétitivité et du dynamisme. Quelques régions ont réussi à surmonter la crise en faisant le choix de l’industrie. C’est le cas du Pays Basque espagnol, où le tissu industriel a pu être reconverti et diversifié grâce à une politique volontariste originale orchestrée autour de clusters. La place prépondérante de l’industrie Le dynamisme industriel du Pays Basque espagnol a véritablement commencé au milieu du XIXème siècle : à cette époque, l’exploitation des nombreux gisements miniers permet à la région de développer une industrie du fer et de l’acier. Rapidement, une industrie moderne et à grande échelle se met en place. Entre 1861 et 1898, la production de minerai de fer est multipliée par 100. En 1880, Euskadi s’impose comme la première région productive d’Espagne. Parallèlement, la modernisation du port de Bilbao et la construction de liaisons routières avec les principales mines ouvrent la voie au commerce international. Dès les années 1860, une loi sur la libéralisation du commerce permet à la région de vendre librement son fer en Espagne. Un autre texte, autorisant l’ouverture de l’industrie basque aux capitaux étrangers, permet la création de nombreuses sociétés regroupant des entrepreneurs basques et des investisseurs britanniques et américains. Des liens commerciaux particulièrement forts se nouent avec la Grande-Bretagne, qui importe alors 70% de la production de fer basque. Pour faciliter ce commerce extérieur et gérer les flux de capitaux internationaux, la Banque de Bilbao est créée en 1857 ; elle fusionnera en 1988 avec la Banque de Biscaye. Cette période voit aussi la naissance de deux institutions majeures pour l’essor de l’industrie : la Bourse de Bilbao et la Chambre de commerce, d’industrie et de navigation de Bilbao, la première chambre consulaire d’Espagne. Au début du XXème siècle, de nouvelles industries se développent et prospèrent – papier, chimie, machines-outils, bien d’équipement – jusqu’en 1936, où éclate la guerre civile. L’opposition aux troupes franquistes puis la dictature plongent la région dans une crise politique mais aussi économique. La main d’oeuvre qualifiée s’exile, la production diminue 6 fortement en raison de l’embargo visant l’Espagne. Au début des années 1970, l’industrie, sur laquelle repose l’ensemble de l’économie basque, est très fragilisée. La double épreuve des années 1980 En 1975, Franco meurt : quarante années de dictature prennent fin. L’Espagne sort de son isolement politique et économique et se trouve simultanément confrontée à la crise énergétique et sidérurgique mondiale et à la concurrence internationale. Le Pays Basque espagnol subit de plein fouet ces deux épreuves, à plus forte raison à partir de l’adhésion de l’Espagne à la CEE en 1986. Ces bouleversements successifs vont aggraver le marasme économique dans lequel se trouve la région depuis plusieurs années. En 1980, le taux de croissance du PIB est négatif. Les faillites en cascade accusent du démantèlement l’industrie basque. Entre 1975 et 1986, 150 000 postes sont supprimés dans le seul secteur de l’industrie, ce qui représenterait l’équivalent en France de 4,5 millions d’emplois en moins de dix ans. Tout au long de cette décennie, le taux de chômage oscille autour de 20%. La reconversion industrielle réussie En 1991, face à la situation économique dramatique, le gouvernement basque fait le choix de sauver son industrie traditionnelle. Le pari est osé à un moment où partout en Europe, y compris dans le reste de l’Espagne, le secteur de l’acier est sinistré. Rappelons qu’en France, à cette période, la sidérurgie est l’une des branches les plus touchées par les délocalisations, avec la construction navale et le textile. Entre 1974 et 1990, l’industrie sidérurgique française a ainsi vu son effectif passer de 160 000 à 60 000 salariés. Malgré ce contexte, le Gouvernement basque reste convaincu que l’industrie de l’acier a la capacité de devenir un pilier du redressement industriel et économique. Au moment où la France ferme sa sidérurgie, le Pays basque fait appel à un professeur de Harvard pour moderniser son industrie Pour y parvenir, le Gouvernement décide de faire appel aux services d’un consultant américain spécialisé en stratégie d’entreprise. La mission confiée à Michael Porter, Professeur à Harvard Business School, est d’élaborer une stratégie de compétitivité globale à long terme pour le Pays Basque espagnol, à l’image d’un business model conçu pour une entreprise. 7 La stratégie préconisée par M. Porter consiste à moderniser et à internationaliser l’industrie basque grâce à la création et à la systématisation d’un outil pivot : les « clusters »1. Neuf secteurs industriels sont identifiés conjointement avec le Gouvernement basque pour être organisés en clusters et c’est sur l’industrie sidérurgique que cette stratégie va être prioritairement appliquée. La stratégie élaborée et mise en œuvre de concert, au sein du cluster de l’acier, par les pouvoirs publics et les entreprises, consiste à reconvertir entièrement le secteur en misant à fond sur l’innovation. Elle se fonde sur la conviction exprimée par le ministre de l’industrie : « il n’y a pas d’industrie obsolète, il n’y a que des entreprises obsolètes ». Aujourd’hui, force est de constater que le pari est largement gagné. L’industrie de l’acier figure parmi les fleurons de l’économie basque. Elle représente 40% de la production Une conviction : il n’y a pas d’industrie obsolète, seulement des entreprises obsolètes espagnole et 90 % pour les aciers spéciaux. Cette reconversion des industries traditionnelles impulsée par les dirigeants basques au cours des années 1990 a été menée parallèlement à une diversification du tissu industriel. Cette double ambition a permis au Pays Basque de rester la référence de l’Espagne dans des domaines traditionnels (sidérurgie, métallurgie, machine-outil…), tout en développant de façon très importante des secteurs à plus haut contenu technologique. Tirant parti de ses savoir-faire initiaux, Euskadi a pu acquérir en une dizaine d’années des positions significatives dans les industries électrotechnique, aéronautique ou encore automobile. La meilleure preuve de la réussite de cette stratégie de diversification peut être observée dans les parts de marché actuelles de l’industrie basque au sein de l’industrie espagnole : un tiers de la production de composants automobile, 40% de l’électronique professionnel, 20% de l’aéronautique ou encore 40% de l’électroménager. Les clusters, ou pôles de compétitivité, sont des réseaux d’entreprises spécialisées dans des industries de la même branche ou complémentaires, d’organismes de recherche et de formation ainsi que d’institutions publiques situés sur un même territoire. 1 8 B) La nouvelle industrie basque Grâce au succès de la politique menée à partir du début des années 90, non seulement la tradition industrielle du Pays Basque espagnol a été maintenue, mais la région s’est imposée comme une vraie puissance industrielle européenne avec notamment trois secteurs phares : la machine-outil, l’automobile et l’aéronautique. Le moteur de l’économie régionale L’importance de l’industrie basque espagnole s’exprime d’abord en terme d’emploi : 37,9% des actifs travaillent dans l’industrie, ce qui place le Pays Basque espagnol parmi les régions les plus industrialisées d’Europe (voir tableau p.15). Rappelons que la moyenne européenne est de 28,8% et la moyenne française de 25,4% seulement. Sur un plan national, avec seulement 5% de la population espagnole, Euskadi contribue à hauteur de 9% à la production industrielle totale du pays. Autre indicateur : le poids du secteur industriel dans l’économie basque espagnole. L’industrie contribue à L’industrie basque fournit 38% des emplois et 32% du PIB de la région hauteur de 32% du PIB, un chiffre du même ordre que ceux enregistrés par les autres grandes régions industrielles d’Europe, comme la Lombardie (35%), le Bade-Wurtemberg (33%) ou encore la Bavière (30,3%). A l’inverse l’Alsace apparaît en retrait, avec une industrie qui mobilise 35,2% de ses actifs mais qui contribue seulement à un quart de son PIB. Non seulement l’industrie pèse lourd dans l’économie basque, mais le secteur est très dynamique. En 2005, le Pays Basque espagnol a connu une croissance soutenue : +3,7%, soit deux points au-dessus de la moyenne européenne de 1,6%. Au cours de cette même année, et en dépit d’un contexte européen dit de désindustrialisation, l’indice de production industrielle a progressé de 4%. La plupart des grands secteurs ont connu une augmentation de leur activité entre 2004 et 2005, dans des proportions toutefois inégales : l’énergie (+21,7%), les biens d’équipement (+12,8%), les biens de consommation (+12,8%) et les biens intermédiaires (+5,1%). 9 Les derniers indicateurs de croissance enregistrés au Pays Basque sont très favorables : +4,3% au premier trimestre 2006, contre une moyenne nationale de +3,5% et une moyenne européenne de +2,2%. La machine-outil, troisième de l’Union européenne après l’Allemagne et l’Italie Menacée de disparaître il y a quinze ans, la machine-outil basque espagnole connaît une renaissance spectaculaire. Fragilisée par 40 années de franquisme, laminée par une crise sans précédent à la fin des années 80, la production basque de machines-outils est aujourd’hui la troisième plus importante de l’Union européenne, après l’Allemagne et l’Italie. La production basque représente à elle seule 80 % de la production espagnole de machinesoutils, 82 % des exportations nationales et mobilise 78 % de l’emploi total du secteur. Avec 2000 modèles différents, elle couvre l’intégralité des besoins technologiques et productifs des clients. Depuis plus de dix ans, le secteur de la machine-outil basque espagnol exporte en moyenne 56 % de sa production, en direction de 120 pays différents. Il faut 80% des machines-outils espagnoles sont produites au Pays Basque souligner que ses deux premiers clients (l’Allemagne avec 21,7% des exportations et l’Italie avec 12%) sont aussi deux leaders sur le marché européen de la machine-outil, dotés d’un fort niveau d’innovation. Le renouveau du secteur s’accompagne d’efforts particuliers en R&D (5% du chiffre d’affaires annuel) et s’appuie sur un haut niveau technologique puisque 76% des équipements sont dotés de modes de contrôles numériques avancés. Autant de caractéristiques qui séduisent aujourd’hui des clients aussi exigeants que l’industrie mondiale de l’automobile et de l’aéronautique. 50% de la production de machines-outils est ainsi destinée à l’industrie automobile, avec des clients tels que BMW, Peugeot-Citroën, Daimler Chrysler, Ford, General Motors, Renault, Nissan… En ce qui concerne l’industrie aéronautique, les clients du secteur basque de la machine-outil sont Airbus, Boeing, General Electric… 10 L’industrie automobile en pleine croissance La reconversion des industries traditionnelles impulsée par les dirigeants basques au cours des années 1990 a été menée parallèlement à une diversification du tissu industriel vers des secteurs à plus haut contenu technologique, au premier rang desquels l’automobile. Dans ce domaine, les compétences développées par les entreprises basques concernent tout autant la sous-traitance que les produits finis. Aujourd’hui, 30% des composants automobiles espagnols sont produits au Pays Basque espagnol. Le secteur est en pleine croissance en Euskadi, affichant en 2003 une augmentation de 5,5% de son chiffre d’affaires. A l’image du tissu entrepreneurial local, l’industrie des composants automobiles est constituée majoritairement par de petites et moyennes entreprises : 68% d’entre elles comptent moins de 100 salariés. A l’instar du dynamisme général des PME d’Euskadi à l’international, les entreprises du secteur sont particulièrement performantes sur les marchés étrangers : 63 % de leur production est destinée à l’export. La performance de l’industrie automobile basque ne se limite pas à ses activités de soustraitance. Le Pays Basque compte deux sites de production et d’assemblage de produits finis. L’usine implantée en 1980 par Mercedes-Benz (Daimler Chrysler) près de la capitale administrative Vitoria emploie 3 500 personnes et produit 85 000 véhicules par an. Parmi les entreprises basques espagnoles figure un fleuron de l’industrie automobile : le constructeur de cars Irizar. Leader en Espagne avec 39 % des parts de marché, Irizar est, en volume, le deuxième constructeur de cars en Europe. Créée au Pays Basque espagnol, cette entreprise spécialisée dans la carrosserie et le montage d’autocars de luxe dispose aujourd’hui d’une présence commerciale dans 65 pays et compte plus de 2 600 salariés. Une industrie aéronautique créée ex nihilo Totalement inexistante au début des années 90, l’industrie aéronautique basque est née de son organisation en cluster. Aujourd’hui, ce pôle de compétitivité regroupe l’essentiel des entreprises du secteur c’est-à-dire les trois leaders locaux (l’ingénierie Sener, le motoriste ITP et l’équipementier Gamesa) et de nombreuses PME. 11 En une décennie, les résultats obtenus sont indiscutables. L’industrie aéronautique basque représente aujourd’hui 20% de la production espagnole totale. Elle poursuit son développement en dépit de la crise mondiale qui touche le secteur : en 2003, son chiffre d’affaires a augmenté de 10% et l’emploi du secteur a connu la même progression. Quant aux dépenses en R&D, elles ont augmenté de 90% au cours de la même année, fruit de la politique d’innovation favorisée par le cluster. Aujourd’hui le secteur affiche un niveau d’innovation record : 21% du chiffre L’aéronautique basque réinvestit chaque année 21% de son chiffre d’affaires dans l’innovation d’affaires investi chaque année en R&D. L’aéronautique basque a su mener des stratégies de développement international ambitieuses. Aujourd’hui 82% du chiffre d’affaires du secteur est réalisé à l’exportation. Les entreprises basques interviennent dans de nombreux projets internationaux de l’aéronautique civile et de l’aérospatiale : élaboration de plusieurs familles d’Airbus, et notamment l’A380, production de moteurs Boeing 777. Leurs compétences complémentaires leur permettent d’intervenir à chaque étape du processus de production et s’illustrent notamment dans le design, l’élaboration et la fabrication de composants et de moteurs. 12 II – Le défi d’aujourd’hui : rester une des dix plus grandes régions industrielles d’Europe Comme le constate Ana Agirre, Ministre du Gouvernement basque pour l’industrie « on assiste, en parallèle de la mondialisation, à une réorganisation de l’industrie mondiale au sein des grands ensembles que sont l’ALENA, le Mercosur, l’Asean ou encore l’Union européenne. Et, au sein de ces grands ensembles, à la montée en puissance de quelques grandes régions industrielles ». En Europe, le Pays Basque espagnol fait partie de celles-ci : la Communauté autonome a conquis sa place parmi les toutes premières régions industrielles du continent, des territoires très dynamiques qui mêlent à la fois un fort niveau d’industrialisation et un haut niveau de richesse. Aujourd’hui, face aux nouveaux défis de l’industrie européenne, l’ambition du Pays Basque est claire : conserver sa place dans le peloton de tête des dix régions industrielles les plus performantes du continent. 13 A) Les poids lourds régionaux de l’industrie européenne Selon une idée largement répandue, le dynamisme des pays développés va de paire avec l’avènement d’une économie de services. En Europe, c’est incontestablement vrai pour les régions capitales. Mais il existe aussi des régions qui prouvent qu’une économie européenne peut aujourd’hui concilier l’industrie, la productivité, les hauts revenus et l’emploi. Les dix régions industrialisées les plus dynamiques Aujourd’hui, le Pays Basque fait partie des dix régions dont le niveau d’industrialisation et le niveau de richesse sont les plus élevés d’Europe. Dans ce peloton de tête, on trouve une autre région espagnole, la Catalogne mais aussi la Bavière et le Bade-Wurtemberg en Allemagne, l’Alsace en France, la Lombardie, le Piémont et l’Emilie-Romagne en Italie et enfin deux régions autrichiennes : la Haute-Autriche et le Vorarlberg. Bavière Taux d’emploi industriel (moy UE25=28,2%) 35,3% PIB par habitant (moy UE25=100) 126,2 Bade-Wurtemberg 39,9% 124,8 Pays Basque 37,9% 117,8 Catalogne 38,5% 113,3 Alsace 35,2% 113,6 Lombardie 40,1% 141,8 Piémont 38,1% 125 Emilie-Romagne 35,6% 136,3 Haute-Autriche 35,3% 115 Vorarlberg 40,4% 127,8 Région Indicateurs : Taux d’emploi dans le secteur de l’industrie par rapport à l’emploi total ; parités de pouvoir d’achat par habitant par rapport à la moyenne UE25=100. Année 2002. Source : Eurostat. Troisième rapport sur la cohésion économique et sociale. La liste qui bouscule quelques idées reçues La liste des dix premières régions industrielles montre qu’aujourd’hui, en Europe, la performance industrielle n’est pas l’apanage des grands pays membres, loin s’en faut. Grand absent : le Royaume-Uni qui a bel et bien tourné la page de son histoire industrielle. Le taux d’emploi industriel national y est même inférieur à la moyenne de l’Union 14 européenne (24,3% contre 28,2%). Seule la région des West Midlands affiche un taux supérieur (30,9%) mais le niveau de richesse y est à peine plus élevé que la moyenne européenne. Autre grand pays européen, la France n’est pas absente du classement. Mais elle ne parvient à maintenir sa place que grâce aux résultats de l’Alsace qui s’impose comme L’Alsace s’impose comme la première région industrielle française une région prospère et fortement industrialisée (35,2%) par rapport à la moyenne française (25,4%). Contrairement à une idée reçue, Rhône-Alpes n’est donc pas le fer de lance français en matière d’industrie. Si l’on observe les niveaux d’industrialisation, c’est la Franche-Comté qui affiche – et de loin – le plus fort taux d’emploi industriel en France (38,5% contre une moyenne nationale de 25,4%), immédiatement suivie par l’Alsace. Mais la Franche-Comté n’a pas sa place dans le classement des régions industrielles les plus dynamiques en raison de son niveau de richesse : son PIB par habitant (99,6) est non seulement très inférieur à la moyenne française (112,9), mais il se situe en dessous de la moyenne européenne (100). Autre résultat qui peut paraître surprenant : contrairement à sa réputation, la Catalogne n’est pas la région la plus prospère d’Espagne. Son PIB par habitant est significativement inférieur à celui enregistré par le Pays Basque. Les derniers chiffres de l’INE (équivalent espagnol de l’INSEE) pour 2005 révèlent que cet écart s’est encore creusé : Euskadi est aujourd’hui la deuxième région la plus riche d’Espagne, juste derrière la région capitale, la Communauté de Madrid. L’équilibre nord-sud inattendu Autre surprise réservée par la composition de la liste des dix régions industrielles performantes d’Europe : leur répartition géographique. Alors qu’on aurait pu s’attendre à une certaine concentration au nord du continent, ces territoires sont répartis de manière plutôt équilibrée : cinq en Europe du nord et cinq en Europe du sud. Au sud, l’Espagne conserve comme on l’a vu sa vocation industrielle grâce au dynamisme du Pays Basque et la Catalogne. Quant à l’Italie septentrionale, elle s’impose comme une des premières puissances industrielles d’Europe en réunissant des champions comme la Lombardie, le Piémont et l’Emilie-Romagne. C’est ainsi le seul pays d’Europe à rassembler trois régions leaders en terme d’industrialisation et de richesse. 15 De même, alors qu’on aurait pu imaginer un positionnement vers l’est et les nouveaux entrants de l’Union européenne, l’Europe de l’ouest apparaît encore clairement comme le moteur de l’industrie européenne. Des résultats confirmés par les derniers chiffres Eurostat Eurostat, l’organisme statistique européen, vient de publier les derniers chiffres disponibles concernant le PIB par habitant en Europe1. Ils confirment pour 2003 le classement établi ici mais introduisent deux tendances. L’Alsace enregistre la plus forte perte de vitesse avec un PIB par habitant qui baisse de 6,4% entre 2002 et 2003, signe que la seule région française figurant parmi les dix champions industriels européens peine à conserver sa place. A l’inverse, trois régions du classement confortent leur position avec des fortes progressions de leur PIB par PIB par habitant 2003 : Euskadi est une des trois régions qui progressent habitant entre 2002 et 2003 : la Bavière (+2%), le Pays Basque (+3%) et la Catalogne (+4,1%). B) Des régions qui cachent des points communs Dresser le portrait-type d’une des dix plus grandes régions industrielles d’Europe est un exercice impossible, tant ces territoires sont divers. Pourtant, quelques traits communs peuvent se retrouver parmi les régions les plus performantes : le positionnement frontalier, la spécialisation sur certains secteurs et, surtout, des résultats records en terme d’emploi. Le faux problème de la taille Les dix régions d’Europe les plus industrielles et les plus dynamiques sont très disparates sur un plan physique et sociodémographique, preuve que la superficie d’une région ou son poids démographique est sans rapport avec sa performance industrielle ou économique. Eurostat a publié le 18 mai 2006 le PIB/habitant des régions de l’UE25 pour l’année 2003. Les chiffres concernant le taux d’emploi industriel ne sont disponibles que pour 2002. 1 16 Avec une population de près de 10 millions d’habitants et une superficie de plus de 30 000 km2, le Bade-Wurtemberg a des dimensions de l’ordre de celles de la Belgique. A l’opposé, l’Alsace avec moins de 2 millions d’habitants, tout comme le Pays Basque espagnol avec 2,1 millions d’habitants concentrés sur seulement 7 200 km2, présentent une taille beaucoup plus réduite comparable à celle de la Lettonie ou de la Slovénie. Autre certitude : le fait d’être une région capitale n’a aucune incidence sur la performance industrielle. Toutes les régions sélectionnées ici ont développé à la fois leur industrie et leur dynamisme économique loin des capitales administratives. C’est particulièrement remarquable pour l’Alsace qui a su affirmer son dynamisme industriel dans un pays européen très centralisé. La question de l’atout frontalier La position géographique présente un point commun qui pourrait constituer davantage qu’une simple coïncidence. Les dix régions industrielles les plus performantes sont toutes sans exception des régions frontalières, si on y inclut l’Emilie-Romagne et sa large façade maritime sur la mer Adriatique. Est-ce à dire que la situation frontalière favorise l’esprit d’ouverture, de compétition et donc la performance économique ? Cette position stratégique pour les échanges commerciaux at-elle contribué au dynamisme de certaines régions, comme l’Alsace ? On peut penser que la proximité d’autres champions industriels favorise l’essor des régions en observant le continuum territorial qui se dessine ainsi 5 des 10 champions industriels partagent des frontières au centre de l’Europe clairement autour de la Suisse, regroupant la moitié des régions composant l’échantillon : l’Alsace, le Bade-Wurtemberg, la Bavière, la HauteAutriche et le Vorarlberg y partagent des frontières. Mais ce facteur n’est à l’évidence pas suffisant. Pour ne citer qu’un exemple en France, la région Aquitaine a un niveau d’industrialisation faible par rapport à son voisin basque (22,7% contre 37,9%). 17 Des secteurs porteurs Parmi les principaux secteurs des dix grandes régions industrielles d’Europe, plusieurs recoupements peuvent être faits, dessinant ce que pourraient être les spécialisations de l’Europe industrielle d’aujourd’hui. Premier secteur commun aux dix régions de l’échantillon sans exception : l’automobile. Les régions se répartissent naturellement les rôles de constructeurs et de sous-traitants mais les grandes marques de l’automobile européenne s’y concentrent : Daimler-Chrysler et Porsche dans le Bade-Wurtemberg, BMW en Bavière, Fiat dans le Piémont, Peugeot-PSA en Alsace… Le Pays Basque espagnol accueille quant à lui à Vitoria une des principales unités européennes de production de Mercedes, sans oublier le basque Irizar, deuxième constructeur d’autocars en Europe. A côté de l’automobile, les régions industrielles les plus dynamiques ont toutes développé des compétences en aéronautique ou en électrique/électronique. L’industrie aéronautique est ainsi présente au Pays Basque espagnol, en Lombardie, dans le Piémont (spécialisé L’automobile, l’aéronautique et l’électrique/électronique : les trois spécialités de l’Europe industrielle dans l’aérospatial) et en Bavière. Les industries électriques et électroniques se retrouvent au Pays Basque, en Alsace, en Lombardie, en Bavière. Force est aussi de constater que la métallurgie est encore vivace en Europe : elle est figure parmi les principaux secteurs du Pays Basque espagnol (90% des aciers spéciaux espagnols y sont produits), de la Lombardie, de la Bavière et de la Haute-Autriche. Précisions enfin que la Lombardie et l’Emilie Romagne affichent encore une forte spécialisation en textile, même si la concurrence de la Chine cause à ces régions des difficultés dans ce secteur. Des taux de chômage parmi les plus bas d’Europe A une époque où règne la peur des délocalisations, être une région industrielle en Europe peut paraître incompatible, voire contradictoire, avec un haut niveau d’emploi. Et pourtant. Les dix régions industrielles les plus performantes d’Europe se démarquent toutes par des taux de chômage remarquablement bas. Chacune affiche un chiffre non 18 seulement inférieur à la moyenne européenne, mais très inférieur aux moyennes de leurs pays respectifs. Evolution des taux de chômage 1992 2003 Moyenne UE 8,9 9,2 Allemagne 6,3 9,9 2,7 5,8 Bavière 2,8 6,2 Espagne 17,5 11,5 Pays Basque 18,6 8,8 Catalogne 12,8 10 France 9,8 9,3 Alsace 5,4 7 Italie 11,21 8,7 Lombardie 6 3,6 Piémont 8,2 4,8 Emilie-Romagne 6,5 3 Autriche nc 4,2 Haute-Autriche nc 3,3 Vorarlberg nc 4 BadeWurtemberg Taux de chômage en % de la population active. Source : Eurostat 1 Italie : chiffres 1994. Deux grands groupes se dessinent. Tout d’abord les régions du Sud de l’Europe, italiennes et espagnoles, qui connaissent depuis dix ans une embellie constante du marché de l’emploi (si l’on excepte la légère augmentation du chômage en Catalogne en 2003). Parmi ces régions, c’est incontestablement le Pays Basque espagnol qui affiche les résultats les plus spectaculaires quand on sait que la région avait connu des pics à 23% entre dans les années 90. En 2002, le taux de chômage a diminué de moitié par rapport à 1992. Les derniers chiffres disponibles confirment cette tendance puisqu’un plancher record a été atteint en 2005 avec Au Pays Basque, le taux de chômage a baissé de manière spectaculaire, passant de 23% en 1995 à 5,7% en 2005 un taux de chômage de 5,7%. Des performances encore plus remarquables lorsqu’on les met en perspective avec le marché de l’emploi espagnol. Rappelons que dans les années 80, le taux de chômage en 19 Espagne oscillait autour de 20%, voire 25%. Si le pays a réussi un rattrapage très important, celui réalisé par le Pays Basque espagnol est exceptionnel : le taux de chômage de la région connaît une baisse constante depuis 1995 et se situe depuis 2000 deux à trois points en deçà de la moyenne espagnole. En ce qui concerne les régions industrielles situées en Europe du nord, qu’il s’agisse de l’Alsace ou des deux Länder allemands, elles affichent toujours des performances enviables en matière d’emploi par rapport aux moyennes de leurs pays. Mais le taux de chômage y suit les tendances nationales : il est en augmentation depuis 2001. Dans le Bade-Wurtemberg par exemple, le taux de chômage a été multiplié par 2,37 depuis 1992. Il reste toutefois encore très inférieur à la moyenne allemande. 20 III – Le plan pour demain : « Euskadi 2015 » Le choix du Pays Basque espagnol pour l’avenir est clair : maintenir sa position dans le peloton de tête des dix premières régions industrielles d’Europe. Pour y parvenir et affronter la concurrence internationale, la région a une réponse : le renforcement des capacités d’innovation et d’internationalisation des PME. Ces deux priorités guident l’ensemble de la stratégie de compétitivité bâtie par la région pour les années à venir et intitulée « Euskadi 2015 ». 21 La méthode d’élaboration d’Euskadi 2015 : la force du consensus « Euskadi 2015 » est une initiative du gouvernement basque mais son élaboration est le fruit d’une concertation entre l’ensemble des acteurs économiques et sociaux du Pays Basque espagnol. Pendant un an, une centaine de personnes issues de l’administration, de l’entreprise, de la recherche, de la politique ou encore de la société civile s’est réunie pour aboutir à ce qui est aujourd’hui un diagnostic partagé et un projet commun de l’ensemble des représentants de la société basque. Au final, leurs contributions ont dessiné le modèle de compétitivité de la région pour les dix années à venir. Pour chacune des 250 réunions de travail qui se sont tenues, les règles étaient identiques : préparation minutieuse, absence de médiatisation et adoption de décisions définitives. Les réunions ont commencé en 2004 à l’initiative du Ministère de l’industrie, du commerce et du tourisme. Elles ont permis de définir les principaux enjeux de la région d’ici 2015 et d’identifier les axes d’action qui pourront permettre d’y répondre. Une dernière étape a consisté à présenter ces conclusions aux différentes administrations qui seront chargées de les mettre en œuvre afin de s’assurer de leur efficience. Euskadi 2015 fixe un cadre général qui sera décliné en cinq plans d’action quadriennaux : - Plan Science, technologie et innovation - Plan Euskadi société de l’information - Plan Euskadi société entrepreneuriale - Plan Compétitivité et commerce - Plan Compétitivité et tourisme Un premier plan opérationnel issu de cette concertation, intitulé « Plan Compétitivité d’entreprise et Innovation sociale 2006-2009 », vient d’être lancé par le Gouvernement basque. Il a été validé par les trois diputaciones (les exécutifs des trois provinces du Pays Basque), les organisations patronales, les syndicats majoritaires, l’ensemble des clusters, l’ensemble des partis politiques disposant d’une représentation au Parlement basque, les Chambres de Commerce et des caisses d’épargne de la région (Kutxa, BBK et Vital). 22 A) Le développement de l’innovation Accusant au début des années 90 un retard important dans le domaine de la R&D, Euskadi a réalisé des progrès considérables. Pour poursuivre ces efforts et devenir l’une des régions les plus innovantes d’Europe, le plan de compétitivité Euskadi 2015 a fixé des objectifs précis très ambitieux. Un rattrapage spectaculaire Les efforts réalisés par Euskadi pour développer son innovation et les résultats obtenus sont à bien des égards impressionnants. Le Pays Basque a ainsi multiplié par 23 ses investissements en R&D au cours des 23 dernières années. D’une recherche-développement quasi nulle en 1995, au sortir de la crise économique, Euskadi a réussi en une Euskadi a multiplié par 23 ses investissements en R&D au cours des 23 dernières années décennie non seulement à largement dépasser le niveau de l’Espagne mais à se rapprocher de la moyenne européenne qui est aujourd’hui de 1,9% du PIB. 1995 1998 2001 2003 2004 Euskadi 0,5% 1,14% 1,34% 1,48% 1,54% Espagne 0,81% 0,89% 0,95% 1,03% 1,07% Evolution du taux de R&D en % du PIB. Sources : OCDE, Eustat Avec 1,54% de son PIB consacré à la recherche-développement en 2004, le Pays Basque se situe aujourd’hui, à titre de comparaison internationale, entre l’Irlande (1,43%) et la Norvège (1,7%). Un chiffre qui place Euskadi au rang de troisième Communauté autonome la plus innovante d’Espagne : largement au-dessus de la Catalogne qui, avec 1,1%, plafonne au niveau de la moyenne espagnol et derrière la Communauté de Madrid (1,76%) qui, comme toutes les régions capitales est dotée de nombreux sièges sociaux qui concentrent une grande partie de la recherche du pays. 23 Ce rattrapage est d’autant plus remarquable que l’innovation est une compétence qui n’a pas encore été transférée par Madrid, contrairement à ce que prévoit le statut d’autonomie. Le Pays Basque espagnol est ainsi la seule Communauté autonome espagnole qui finance seule sa R&D sur ses ressources propres, tout en continuant de verser à l’Etat espagnol une contribution au financement de la politique nationale d’innovation. Le premier atout d’Euskadi en matière d’innovation est incontestablement la vitalité de l’investissement privé. Un point fort que l’on retrouve chez la plupart des grandes régions industrielles d’Europe, à l’exception notable de l’Alsace où le secteur public reste un moteur très important de la recherche. Au Pays Basque, la recherche privée représente 77,6% de la R&D totale générée dans la région. Un chiffre qui dépasse de très loin la moyenne européenne (65,2%) et qui place Euskadi parmi les toutes premières régions d’Europe, loin devant la Catalogne par exemple, qui affiche dix points de moins dans ce domaine. Le Pays Basque reste en revanche en dessous des résultats records affichés par la Bavière et du Bade-Wurtemberg, où 80% de la R&D est issue des entreprises. Quant à l’Alsace, elle figure non seulement au bas du classement mais très en deçà de la moyenne européenne avec seulement 50% de sa recherche issue Au Pays Basque, les trois quarts des investissement en recherche sont privés du secteur privé, suivant en cela une caractéristique très française. Des efforts à poursuivre La première marge de progression d’Euskadi concerne son niveau d’investissement global en recherche-développement. Si la région innove davantage que la Catalogne et la Lombardie, elle accuse encore du retard par rapport à d’autres grandes régions industrielles européennes comme le Piémont, la Bavière ou encore le Bade-Wurtemberg. 24 EmilieRomagne 1% Catalogne Lombardie Vorarlberg Euskadi 1,11% Piémont 1,7% HauteAutriche 1,71% 1,2% 1,34% UE 25 Bavière 1,93% 3% 1,34% Alsace 1,38% BadeWürtemberg 3,9% Taux de R&D en % du PIB. Source : Eurostat. Année 2001(sauf Italie et Autriche : 2002) Mais la priorité d’Euskadi en matière d’innovation concerne sans doute le nombre de dépôts de brevets par million d’habitants : dans ce domaine, le Pays Basque se situe en dessous de la moyenne européenne et donc loin des autres régions leaders. Ce mauvais résultat a des explications. Il trouve notamment son origine dans l’histoire économique récente de la région et dans les spécificités du tissu industriel basque. Il y a encore 25 ans, au sortir de la dictature franquiste, il n’existait quasiment pas d’activité de recherche en Espagne. Ainsi, au Pays Basque espagnol, aucune université n’était implantée dans la région et les investissements en R&D étaient proches de zéro. En outre, si l’on prend l’exemple de la France, la La R&D basque revient de loin : au début des années 80, il n’existait aucune structure de recherche dans la région majorité des déposants de brevets sont des grandes entreprises. Or, le tissu industriel basque est composé presque exclusivement de petites entreprises et micro-entreprises. Enfin, la recherche en Euskadi est essentiellement tournée vers les applications industrielles : une activité qui se prête moins à la certification que la recherche fondamentale. Pour toutes ces raisons, il n’existe pas encore réellement au Pays Basque espagnol de « culture du brevet ». Se rapprocher le plus possible de l’agenda de Lisbonne Pour renforcer ses atouts et combler les retards que la région peut encore enregistrer, le gouvernement basque a décidé de lancer une politique d’innovation ambitieuse qui constitue, avec l’internationalisation, l’un des deux axes de la stratégie de Compétitivité « Euskadi 2015 ». 25 Comme l’explique Juan José Duque, sous-directeur général de la SPRI (agence pour la promotion de l’industrie) chargé de l’innovation et du développement de la coopération : « Euskadi doit renforcer son positionnement sur la production à haute valeur ajoutée. Aujourd’hui, ses premiers concurrents se trouvent dans l’Europe des 15 : les pays scandinaves, l’Allemagne, la France et l’Italie. Mais nous devons aussi nous préparer, à court terme, à la concurrence croissante de la Tchéquie, de la Slovénie et des pays baltes qui vont eux aussi développer leur innovation ». L’idée générale consiste à se rapprocher le plus possible, d’ici 2010, des objectifs de l’agenda de Lisbonne. Les objectifs d’Euskadi en matière d’innovation Situation Objectif Objectif 2003 2010 Lisbonne 1,48% 2,25% 3% Entreprises 1,17% 1,73% 2,30% Universités 0,26% 0,41% 0,55% Secteur public 0,04% 0,11% 0,15% 3,9% 5% 6% 98 140 141 Investissement global en R&D (en % PIB) Dépenses des entreprises en R&D (en % du C.A) Dépenses en R&D par chercheur (en milliers €) Source : Gouvernement basque Aujourd’hui, l’activité de recherche en Euskadi est surtout centrée sur le développement et les applications industrielles. Dans les années qui viennent, un effort sera porté sur la recherche fondamentale, notamment avec les universités, sur certains créneaux spécifiques comme la physique et la biologie. D’ici 2009, le Gouvernement basque a prévu une augmentation du nombre de chercheurs de 20%. Parallèlement, un programme quadriennal a été lancé en 2005 pour favoriser le retour des « cerveaux » basques partis à l’étranger et attirer des chercheurs étrangers sur le territoire de la Communauté autonome. 26 Toujours dans le cadre de la stratégie « Euskadi 2015 », le Gouvernement a décidé, d’améliorer la productivité de la recherche basque. Pour y parvenir, il a prévu d’améliorer la formation et la qualification, d’accroître le nombre de docteurs et d’établir des liens de collaboration plus forts avec l’Université et l’espace européen de recherche. En ce qui concerne les demandes de dépôts de brevets, le Gouvernement a fixé un objectif précis : leur nombre doit doubler d’ici 2009. B) Le renforcement de l’internationalisation Forte d’une tradition de commerce international, l’économie basque dispose aujourd’hui d’un niveau d’ouverture comparable à celui des autres grandes régions industrielles d’Europe. Certains efforts peuvent tout de même être accomplis pour maintenir et accroître la place de la région sur l’échiquier de la concurrence internationale : une anticipation nécessaire, mise en application par la stratégie Euskadi 2015. Une région ouverte Le Pays Basque s’appuie sur une longue tradition de commerce international. Depuis le XVIIIème siècle, sa situation géographique favorise le développement des échanges commerciaux maritimes avec l’Europe et l’Amérique. A partir de la révolution industrielle, les échanges internationaux connaissent un développement spectaculaire qui perdurera jusqu’à la guerre civile. Aujourd’hui, le niveau d’ouverture atteint par l’économie basque montre qu’Euskadi a su surmonter les quarante années de dictature franquiste et l’isolement international dont toute l’Espagne a fait l’objet pendant cette période. En 2003, le taux d’exportation du Pays Basque (30,6%) dépasse légèrement la moyenne espagnole (30%) et de très loin la moyenne française (21,5%). Au niveau des grandes régions industrielles, il reste encore en deçà des records atteints par le Bade-Wurtemberg (35,7%). Au Pays Basque, de nombreux secteurs industriels réalisent la plus grande partie de leur chiffre d’affaires grâce à l’export. Parmi les secteurs les plus exportateurs figurent 27 notamment l’aéronautique (86% de la production exportée), les biens d’équipements (72%), les composants automobiles (63%), ou encore les machines-outils (58%). Des marges de progression importantes Aujourd’hui, les pays de l’Union européenne absorbent près de 70% des exportations basques. La France est le premier partenaire commercial du Pays Basque espagnol, avec 20,5% des exportations, suivie d’assez loin par l’Allemagne (14,5%). On trouve ensuite les Etats-Unis (6,6%), l’Amérique Latine (6,43%) et les pays industrialisés d’Asie (2%, dont le Japon 1%). En comparant la structure de ces exportations à celle du Bade-Wurtemberg, on constate que le Pays Basque espagnol peut encore diversifier ses débouchés, notamment en développant ses relations avec les marchés émergents à fort potentiel. Ainsi, le Land de Stuttgart destine lui aussi la majorité de ses exportations (58%) à l’Union européenne. Mais 12% sont destinées aux Etats-Unis, plus de 3% à la Chine et 2,3% au Japon. Cette diversification, avec un accent particulier mis sur des pays stratégiques, fait partie des priorités d’Euskadi 2015. Autre spécificité basque prise en compte par Euskadi 2015 pour l’internationalisation des entreprises : la structure du tissu industriel, avec une domination très nette des microentreprises (moins de 10 salariés) et petites entreprises (entre 10 et 50 salariés) par rapport à la moyenne européenne. D’autres régions européennes comme le Bade-Wurtemberg et la Lombardie présentent une proportion beaucoup plus élevée de moyennes et de grandes entreprises. Favoriser la croissance et la coopération des PME La vision générale d’Euskadi 2015 repose sur une conviction : une politique protectionniste est inefficace, voire contreproductive face au durcissement de la concurrence internationale. A l’inverse, les entreprises doivent être encouragées à tirer parti des opportunités de la mondialisation en multipliant les implantations à l’étranger et en renforçant La priorité : faire en sorte que les TPE et PME puissent s’imposer sur les marchés étrangers leur compétitivité. 28 Dans cette perspective, le premier objectif d’Euskadi 2015 est de donner une capacité d’intervention internationale aux micro-entreprises et petites entreprises basques. Cet objectif passe d’abord par des aides financières destinées à favoriser la croissance interne et externe des entreprises : le Pays Basque va ainsi renforcer ses instruments de financement, au premier rang desquels le capital-risque géré par son agence régionale de développement. La région va également créer un cadre fiscal plus favorable aux fusions d’entreprises. Mais le vrai enjeu réside dans le développement de la coopération entre les PME. C’est l’objectif d’Euskadi 2015 qui veut donner les moyens aux multiples petites entreprises basques d’atteindre la taille critique nécessaire pour accéder à des opportunités qui leur seraient interdites de manière isolée. Dans ce domaine, le Pays Basque a décidé de continuer de miser sur la politique des clusters qui a largement fait ses preuves depuis 1991. Euskadi 2015 prévoit ainsi de renforcer ce dispositif pour développer encore toutes les formes de coopération : entre les entreprises mais aussi entre celles-ci et les organismes de recherche. Euskadi 2015 prévoit en outre la mise en œuvre d’un programme global de soutien à l’internationalisation des entreprises basques. Le plan met en place un dispositif de soutien à la fois des entreprises qui se lancent sur les marchés étrangers et de celles qui souhaitent consolider leur activité internationale. Pour les inciter à se tourner vers l’étranger, Euskadi 2015 prévoit de former les entrepreneurs basques sur les opportunités et les menaces de l’ouverture extérieure, sur les méthodes de gestion internationale et notamment de la gestion des salariés expatriés. Une action sélective dans certains pays considérés comme stratégiques – la Chine, la République Tchèque par exemple – est par ailleurs programmée. 29 IV – Une constante : la priorité donnée aux PME Comme les autres grandes régions industrielles d’Europe, Euskadi va continuer de miser sur ses PME pour conserver son dynamisme. Ainsi que l’a expliqué la Ministre basque de l’industrie Ana Agirre , « la stratégie d’Euskadi s’appuie sur un cercle vertueux où la région donne les moyens aux PME d’être plus compétitives et où le dynamisme des PME renforce l’attractivité de la région. Face à la concurrence internationale croissante, notre politique régionale doit rester un instrument décisif de la compétitivité de ces PME en favorisant et en permettant la coopération. » Pour y parvenir, la région va utiliser deux instruments qui paraissent aujourd’hui indissociables d’une politique industrielle efficace à l’échelle régionale : les clusters qui orchestrent la coopération entre les PME ; et les agences régionales de développement qui, à travers leur partenariat avec les entreprises, mettent en œuvre au quotidien la politique industrielle. 30 A) Les clusters Les clusters (ou pôles de compétitivité) se sont progressivement imposés comme l’outil de gestion publique le mieux adapté aux politiques régionales. Si la plupart des régions dynamiques y ont aujourd’hui recours, leurs approches restent très diverses. Le Pays Basque espagnol offre, avec la Haute-Autriche, l’exemple d’une politique de clusters parmi les plus structurées d’Europe. L’instrument clé de la compétitivité des régions Lorsque l’on observe les instruments de politique économique utilisés par les régions les plus performantes d’Europe, un constat s’impose : le cluster s’est incontestablement imposé comme l’unité économique clé des politiques régionales. Dans toutes les régions qui mènent une politique de clusters, la finalité est la même : augmenter la compétitivité des entreprises et donc celle du territoire. Ces politiques se fondent sur un cercle vertueux où l’intensification des interactions entre les entreprises d’une même filière, les centres de recherche et les universités entraîne une augmentation de la productivité des PME et donc de leur compétitivité. Au-delà de la théorie économique, des succès comme celui de la Silicon Valley en Californie ou plus récemment la Finlande, ont montré l’efficacité des La plupart des régions industrielles performantes sont dotées de clusters modèles de développement fondés sur des clusters et inspiré de ce fait de nombreux dirigeants locaux européens. A tel point que, depuis le début des années 90, les régions d’Europe les plus performantes ont toutes mis en place une politique de clusters. Un constat confirmé par l’Agence pour la diffusion de l’innovation technologique (Adit) dans un récent rapport sur le management stratégique des régions d’Europe les plus avancées1 : « la politique d’animation industrielle est désormais basée, dans la plupart des régions, sur la notion de cluster ou de grappe d’entreprises ». 1 Le management stratégique des régions en Europe. Une étude comparative par Jean-Claude Prager. Adit, mai 2005 31 Au vu de cette expérience européenne, la création récente en France de pôles de compétitivité constitue une exception. Tout d’abord, elle intervient une dizaine, voire une quinzaine d’années après nos voisins européens. Mais surtout, les pôles de compétitivité français constituent l’unique exemple d’une politique de clusters impulsée, gérée et financée au niveau national et non régional. De ce fait – et c’est une différence par rapport aux autres clusters européens – l’objectif poursuivi par les pôles de compétitivité français est autant l’aménagement du territoire que l’augmentation de la compétitivité. Des politiques de clusters plus ou moins structurées Si l’outil cluster est aujourd’hui utilisé par la totalité des régions européennes avancées, les approches retenues par les exécutifs régionaux et les moyens mobilisés sont très variables. En Lombardie, les clusters – ou « districts » en l’occurrence – se sont construits de manière largement spontanée, au fil des années voire des siècles. Aujourd’hui, 16 districts sont officiellement identifiés en Lombardie, parmi lesquels le textile, le bois, la mécanique ou la soie. Leur fonctionnement reste largement informel et les autorités régionales n’y interviennent en aucune façon. Leurs relations avec les districts industriels se limitent à des subventions ciblées sur des projets d’innovation. Dans d’autres régions, les clusters sont conçus et utilisés uniquement comme des instruments assez souples pour inciter les entreprises à coopérer. C’est par exemple ce qui s’est produit en Catalogne où, au début des années 90, près d’une centaine de microclusters ont été identifiés et invités à se structurer, parmi lesquels des secteurs comme les machines agricoles, la joaillerie, le cuir ou encore l’ameublement. Dans les faits, cette initiative s’est limitée à la mise en place d’une concertation très légère entre les entreprises concernées et l’exécutif régional et à la promotion d’investissements étrangers. D’ailleurs, la plupart des clusters catalans ont disparu d’eux-mêmes quelques années après leur création. Autre cas de figure : l’adoption d’une politique de clusters plus structurée et plus systématique mais qui reste pragmatique. C’est le cas de la Bavière, où l’approche est spécifique pour chaque secteur. Plusieurs programmes ont été lancés par le Land dans les années 90 comme « Bayern Online » dans le secteur des TIC, « Baika » dans le secteur automobile, « Software Offensive » pour le développement de logiciels ou encore. Dans tous les cas, l’objectif consiste à favoriser la mise en réseau de l’ensemble des acteurs et leurs synergies. Mais la durée du programme, les objectifs, les parties prenantes et les moyens diffèrent en fonction de la situation de chaque secteur. 32 Une dernière catégorie de régions a décidé de faire des clusters les outils pivots de leur politique industrielle. Dans ce cas, la stratégie est très structurée : le nombre, les missions, les budgets et les objectifs de chaque cluster sont déterminés avec précision par les autorités régionales et leur action fait l’objet d’évaluations régulières. Deux régions très différentes affichent des expériences similaires dans ce domaine et jugées comme exemplaires par les observateurs : il s’agit de la Haute-Autriche et du Pays Basque espagnol. L’exemple de la Haute-Autriche Dans cette région, la plus industrielle d’Autriche et l’une des plus performantes d’Europe, la politique de clusters est extrêmement structurée. Comme le souligne l’Adit, « la politique de clusters de la Haute-Autriche est considérée comme exemplaire à l’échelle internationale. Le programme concerne 1500 entreprises représentant 240 000 emplois, soit la quasi-totalité de l’emploi industriel du Land ». Huit secteurs ont été identifiés par le gouvernement du Land et organisés en clusters à partir de 1998 : l’automobile, le bois, la plasturgie, les industries agro alimentaires, la technologie diesel, la santé, la mécatronique et les énergies respectueuses de l’environnement. Chaque cluster regroupe les entreprises du secteur concerné (31% sont situées dans d’autres Länder autrichiens pour favoriser la coopération interrégionale), les centres de recherche et les établissements d’enseignement supérieur du Land. La région de HauteAutriche soutient financièrement les projets de coopération : dès qu’un projet réunit trois entreprises dont au moins une PME, il reçoit une subvention de 25% plafonnée à 37 000 € par partenaire. Le cluster est financé conjointement par le Land, l’Union Européenne et les entreprises elles-mêmes : les PME versent une cotisation de 550 euros par an, les grandes entreprises versent le double. Les services proposés par chaque cluster sont nombreux et assurés par des structures légères composées de 4 à 6 personnes. Ils concernent l’information des membres (accès à une banque de données, newsletter…), la formation (ateliers, échanges d’information…), le lancement et le suivi de projets de coopération entre entreprises, organismes scientifiques et universités (par exemple, le soutien pour la participation à des programmes de recherche internationaux), l’internationalisation (par exemple, l’organisation de voyages d’étude) et enfin la promotion de l’image de la région. 33 La politique de clusters de la Haute-Autriche présente une autre spécificité liée à son fort niveau de structuration : elle fait l’objet d’évaluations régulières par un cabinet d’experts indépendants. Des points forts ont ainsi été identifiés (l’augmentation du nombre de projets coopératifs, l’innovation) mais aussi des points faibles comme la promotion de l’image de la région. Au final, une augmentation de la performance générale des entreprises membres des clusters a été constatée par rapport aux autres entreprises. L’exemple d’Euskadi Autre région européenne en pointe dans sa politique des clusters : le Pays Basque qui, d’après l’Adit, est « une des régions européennes dans lesquelles la politique des clusters est la plus Créés dès 1991, les clusters basques font figure de pionniers en Europe structurée ». Effectivement, l’exemple basque espagnol présente plusieurs caractéristiques intéressantes. D’abord, Euskadi fait figure de pionnier dans ce domaine en Europe. La mise en place de clusters a débuté dès 1991 au Pays Basque et plutôt à la fin des années 90 dans les autres régions (1998 pour la Haute-Autriche, 1999 pour la Bavière…). Ensuite, les clusters basques sont le fruit d’une réflexion politique avancée, appuyée sur une expertise extérieure. En 1990, la volonté politique du gouvernement basque était claire : sauver l’industrie alors en pleine restructuration. Pour les aider à définir les grandes orientations de la politique industrielle, les pouvoirs publics basques ont fait appel à un consultant américain spécialiste en stratégie d’entreprise : le célèbre professeur d’Harvard Michael Porter. Ce travail conjoint a permis d’identifier onze clusters (l’électroménager, l’automobile, la machine-outil, les industries portuaires, l’environnement, l’énergie, la connaissance, l’électronique/informatique/télécoms, l’aéronautique, le papier, la construction navale) suivis plus récemment par le transport logistique en 2004 et l’audiovisuel en 2005. Autre signe du niveau de sophistication du dispositif basque : le mode de fonctionnement des clusters. Statutairement, ceux-ci sont obligés de concentrer leurs projets sur trois domaines jugés stratégiques pour la compétitivité des entreprises et de la région : le développement de l’innovation, l’internationalisation et l’amélioration de la qualité. Ce dernier volet est une spécificité du Pays Basque : la région s’est fixée comme priorité d’augmenter le niveau de qualité de sa production notamment en multipliant les normes de certification. Les dirigeants y voient le moyen de se doter d’un atout concurrentiel décisif par rapport à la 34 concurrence asiatique. Notamment grâce aux clusters, la région a déjà parcouru un chemin important dans ce domaine, avec, en 2003, un ratio de 15,2 (certificats/milliard d’euros de PIB), contre par exemple seulement 5,2 pour son voisin industriel la Navarre. Comme en Haute-Autriche, le système basque repose sur le volontariat et la responsabilisation des entreprises. Le financement public des clusters se limite à des subventions plafonnées par décret : au maximum, 60% des dépenses de fonctionnement et 50% des dépenses d’investissement, sous réserve que le montant total ne dépasse pas un certain seuil. Au total, les structures étant extrêmement légères (2 à 6 personnes) et l’essentiel des investissements pris en charge par les entreprises, le coût est modique pour le gouvernement basque : environ 3 millions d’euros par an. Autre spécificité des clusters basques : le rôle de catalyseur joué par les pouvoirs publics qui donnent l’impulsion à la coopération des acteurs puis veillent à son efficacité. Dans chaque cluster siège un membre de la Direction de la qualité et de l’innovation du Ministère de l’industrie, identifié selon une matrice de compétences. Chacun de ces fonctionnaires dispose ainsi d’une spécialisation à la fois verticale (sur un ou deux secteurs) et horizontale (sur un axe stratégique : qualité, R&D, internationalisation). Il participe activement à l’ensemble des réunions mais ne dispose pas de droit de vote, la décision appartenant en dernier lieu aux entreprises. Un système d’évaluation précis sur l’état d’avancement des projets a par ailleurs été mis en place. Tous les quatre ans, chaque cluster doit définir un plan stratégique, décliné en programmes d’actions annuels. Ces programmes doivent inclure une analyse de la situation du secteur, un calendrier précis et un budget. Ils sont Les 13 clusters basques génèrent 45% du PIB du Pays Basque régulièrement contrôlés par les fonctionnaires du ministère de l’industrie. Au final, la meilleure preuve de l’efficacité du modèle basque est sa longévité : 15 ans après leur création, les clusters existent toujours et sont les bras armés de la politique sectorielle de la région. Autre signe de la prééminence acquise par ces acteurs dans l’économie régionale : ils génèrent aujourd’hui 45% du PIB basque espagnol. Forts de cette réussite, les pouvoirs publics basques ont décidé de continuer à miser sur les clusters en leur attribuant un rôle central dans le nouveau volet de la stratégie de compétitivité de la région. Parallèlement aux orientations transversales que sont le 35 développement de l’innovation et l’internationalisation, « Euskadi 2015 » confie ainsi l’ensemble de la politique sectorielle aux clusters. B) Les agences régionales de développement A côté des clusters, un autre instrument de gestion publique, interlocuteur privilégié des PME, semble faire l’unanimité chez les régions européennes dynamiques : l’agence de développement régional. Là encore les solutions adoptées par les régions diffèrent dans leurs modalités. Et là encore, le Pays Basque espagnol offre un exemple à la fois pionnier et original. L’outil de gouvernance de toutes les régions performantes Une fois la région retenue comme l’échelon le plus pertinent, quel est l’outil mieux adapté pour piloter une politique de développement régionale ? En observant les régions les plus performantes d’Europe, un acteur incontournable se dégage : l’agence locale de développement. C’est d’ailleurs le constat fait par l’Adit après l’analyse comparative d’une vingtaine de régions avancées du point de vue du management public et du développement économique : « le dispositif le plus couramment adopté pour gérer tout ou partie des fonctions économiques est celui de l’agence régionale de développement ». La conclusion est la même si l’on observe le mode de gouvernance des dix régions industrielles les plus dynamiques d’Europe. Le Piémont avec Investimenti Torino Piemonte, la région de Stuttgart avec Wirtschaftsförderung, la Bavière avec Bayern Innovativ GmbH, la Haute-Autriche avec Technologie und Marketing Gesellschaft ou encore le Pays Basque espagnol avec la Sociedad para la Promocion y Reconversion Industrial (SPRI)… la plupart ont créé une agence de développement économique. Dans les régions dotées d’un tel dispositif, les autorités élues conservent évidemment le pilotage de la politique industrielle mais elles délèguent tout ou partie de sa mise en œuvre à une ou plusieurs agences dont la gestion est autonome. Elles sont dotées d’un budget, de missions clairement définies et les pouvoirs publics se chargent de contrôler leur action. 36 Des compétences plus ou moins étendues Si toutes les régions performantes ont fait le choix de l’agence, les solutions diffèrent selon les cas, qu’il s’agisse du statut choisi (fondation au Piémont, société de droit privé en Bavière, société publique en Euskadi…) ou surtout des compétences qui lui sont attribuées. Dans le cas du Piémont, l’agence ITP est dotée d’un rôle consultatif important mais ses compétences opérationnelles se limitent à la promotion des investissements étrangers. Elle associe un grand nombre de partenaires publics et privés (région, provinces, villes, chambres de commerces, associations de PMI…) et joue essentiellement un rôle de concertation. Celui-ci a été décisif pour orienter la politique régionale au moment des restructurations de la fin des années 90 et pour favoriser l’internationalisation d’une industrie jusqu’alors peu exportatrice. De manière générale, l’arbitrage pour les régions se situe entre d’une part une agence transversale, chargée de l’ensemble de la mise en œuvre de la politique économique et, d’autre part, une agence dont les missions sont volontairement restreintes à la politique d’innovation. Ce dernier choix a été celui de régions très performantes comme la Haute-Autriche ou la Bavière. Créée en 1994 par le gouvernement bavarois, Bayern Innovativ est chargée de coordonner les actions favorisant l’innovation, les transferts technologiques et les programmes de coopération entre la recherche et l’industrie. Il s’agit d’une société de droit privé, dotée d’une autonomie de gestion et placée sous la tutelle du ministre de l’économie bavarois. Son périmètre d’action limité à l’innovation explique son budget relativement modeste – 8,7 millions d’euros, dont 44% proviennent du Land, le reste des ressources propres issues des services aux entreprises. Elle emploie une quarantaine de cadres expérimentés dans les domaines scientifiques et industriels. Bayern Innovativ affiche comme spécificité de fonctionner en matrice. Elle centre son action sur 10 technologies identifiées comme étant d’avenir (biotechnologies, laser, chimie, TIC…) appliquées aux 10 branches industrielles les plus porteuses du Land (construction, automobile, matériel électrique, mécanique…). L’agence a pour mission de développer les interfaces : chaque intersection au sein de la matrice correspond à une ou plusieurs actions mise en place par l’agence. 37 Parmi les dix régions industrielles les plus performantes d’Europe, certaines ont fait un choix différent de la Bavière et confié la totalité de l’exécution de leur politique économique à une agence. Ce choix suppose bien évidemment des moyens budgétaires plus importants, une structure plus conséquente et une délégation de compétences plus large que lorsque l’activité de l’agence est centrée sur l’innovation. C’est par exemple le cas de l’agence allemande Wirtschaftsförderung au Bade-Wurtemberg, chargée de la mise en oeuvre de la stratégie économique de la région et de sa gestion opérationnelle. La SPRI, bras armé de la politique industrielle basque Dans le domaine des agences régionales de développement, le Pays Basque espagnol fait là encore figure de pionnier. La SPRI a été créée en 1981, soit 10 ans avant l’agence de Haute-Autriche et L’agence de développement basque s’appuie sur des moyens considérables : 170 personnes et un budget de 32,5 millions € 14 ans avant celle de la Bavière et du BadeWurtemberg. Société publique, gérée par le Ministère de l’Industrie, la SPRI compte parmi ses actionnaires les trois caisses d’épargne basques. Ses missions sont très étendues puisqu’elle est chargée de la gestion de la politique d‘innovation et du développement industriel. Ses moyens sont à la mesure des compétences qui lui sont déléguées. La SPRI dispose ainsi d’un budget de 32,5 millions d’euros, dont 30% sont issus de ressources publiques. L’agence est animée par une équipe de 170 personnes, constituée essentiellement de cadres de haut niveau. Signe du rôle stratégique accordé par le gouvernement à la SPRI : l’internationalisation et l’innovation sont les deux priorités stratégiques du Pays Basque espagnol pour 2015 ; ce sont aussi les deux missions principales de la SPRI. Pour favoriser la conquête des marchés étrangers et améliorer la compétitivité des PME basques, la SPRI dispose d’un réseau externe de permanents implantés dans une vingtaine de pays. A la demande des PME et sous contrat, ils apportent leur contribution pour l’exécution de projets d’internationalisation. En 2004, plus du tiers de ces projets ont 38 concerné les pays d’Europe centrale et de l’Est et 25% l’Asie. Les services fournis répondent à deux demandes principales des PME : la recherche de partenaires commerciaux et le conseil et l’information préalables. En 2004, 16 projets d’implantations extérieures ont été approuvés, représentant un investissement total de 38 millions d’euros. La SPRI constitue également le fer de lance du gouvernement pour la mise en œuvre de sa politique d’innovation. L’agence est chargée de l’exécution de l’ensemble des projets d’évaluation et de soutien de l’innovation technologique : gestion des aides à la R&D, évaluation de projets d’infrastructures scientifiques, participation aux comités L’ensemble de la politique industrielle, d’innovation et d’internationalisation est géré par la SPRI de développement technologique des 13 clusters basques, pilotage du Plan Biobask 2010 pour le développement des biotechnologies etc. C’est également la SPRI qui gère les trois parcs technologiques basques et les 8 centres technologiques. Mentionnons enfin que la Commission européenne a désigné la SPRI comme Centre de Liaison pour l’Innovation (IRC) : c’est donc elle qui pilote l’ensemble des participations du Pays Basque espagnol dans les programmes de recherche européens, aux côtés d’autres agences comme Bayern Innovativ. Les compétences de la SPRI s’étendent à d’autres domaines du développement économique régional. L’agence est ainsi chargée de favoriser la création d’entreprises et d’emplois, tout en assurant une diversification du tissu économique vers des secteurs à plus forte valeur ajoutée. A titre d’exemple, en 2004, l’agence a soutenu 117 projets de création d’entreprises. Dans le secteur industriel, 74 projets à caractère innovants ont été soutenus, représentant la création de 1016 emplois dans les trois prochaines années. La SPRI assure également la mise en œuvre de l’ensemble des projets du plan gouvernemental « Euskadi dans la société de l’information », qui consiste à encourager l’utilisation des TIC par tous les acteurs de la société basque : micro-entreprises, PME, citoyens, associations, administration… Plus inattendu : la SPRI est le principal acteur du capital-risque au Pays Basque espagnol. Elle a mis en place un dispositif complet dans ce domaine, composé de 7 fonds spécialisés (amorçage, capital-développement et retournement, TIC, projets stratégiques du gouvernement…). Au 31 décembre 2004, pour un capital de 147 millions €, le portefeuille de la SPRI représentait 66 participations. C’est cette implication de la SPRI dans le capital 39 risque qui a par exemple contribué à la création ex nihilo de secteurs considérés comme porteurs pour l’économie basque : l’aéronautique il y a dix ans ; les biotechnologies aujourd’hui. Si la SPRI est amenée à conserver son rôle central dans la politique économique régionale, la gouvernance du Pays Basque est en train d’évoluer. Au vu de l’importance stratégique accordée par la région au développement de l’innovation de le cadre de sa stratégie Euskadi 2015, le Président du gouvernement basque vient d’annoncer la création en 2006 d’une Agence Basque pour l’Innovation chargée de développer la R&D, les TIC et la qualité. Conclusion Hier encore méconnu du public français, le miracle économique basque suscite aujourd’hui de notre côté des Pyrénées un grand intérêt et une certaine admiration. Il y a bien sûr des caractéristiques propres au Pays Basque espagnol qui ont contribué à cette réussite, comme par exemple la capacité des entreprises, des partenaires sociaux et des pouvoirs publics à engager une véritable coopération. Car c’est bien la mobilisation de toutes les parties prenantes qui a permis à la région de connaître un développement aussi rapide – en quinze ans – et aussi intégral – dans le domaine industriel, économique, social et culturel. Mais il y a aussi en Euskadi des initiatives et des approches qui peuvent être intéressantes pour d’autres territoires industriels européens. Parmi celles-ci : la priorité réservée par la politique industrielle aux PME qui représentent, comme ailleurs en Europe, 99% du tissu économique. Pour le Pays Basque espagnol, c’est en misant sur la plus grande capacité d’adaptation de ces entreprises aux mutations, sur leur plus fort attachement au territoire et sur leur coopération que les régions industrielles européennes pourront faire de la mondialisation non pas un risque, mais une opportunité. . 40 ANNEXES 41 Les régions industrielles les plus dynamiques d’Europe Fiches signalétiques L’Alsace Superficie : 8,2 milliers de km2 Nombre d’habitants : 1,73 million Ville principale : Strasbourg Poids de l’industrie dans l’économie : 25% du PIB Les performances de l'industrie alsacienne sont nettement supérieures à la moyenne française hors Ile-de-France, que ce soit au niveau de la productivité par salarié, de l'effort d'investissement ou du taux d'exportation. La production industrielle y est diversifiée mais quatre secteurs représentent ensemble plus de la moitié de la valeur ajoutée produite par le secteur industriel : l’automobile (Peugeot et General Motors sont les deux premiers employeurs industriels de la région), les équipements électriques et électroniques et la plasturgie. Du fait de sa position frontalière, l’Alsace compte de nombreux établissements à participation étrangère : cela concerne 46% de l’emploi industriel contre une moyenne de 32% pour la France. L’industrie alsacienne exporte près de 40% de sa production et se positionne ces dernières années sur des secteurs comme la plasturgie, la pharmacie et les biotechnologies. L’Alsace constitue aujourd’hui un pôle de compétitivité interrégional avec la Franche-Comté sur les métiers de l’automobile, une alliance logique entre ces deux régions à forte tradition industrielle. Son taux de dépense en R&D s’élève à 1,38% du PIB. Le Bade-Wurtemberg Superficie : 35,7 milliers de km2 Nombre d’habitants : 10,6 millions Ville principale : Stuttgart Poids de l’industrie dans l’économie : 33% du PIB Première région industrielle d’Allemagne, le Bade-Wurtemberg est aussi la quatrième plus riche du pays. Le Land a construit son dynamisme économique sur des spécialisations traditionnelles comme la construction mécanique (22% des emplois), l’automobile (15,4%) et les produits métalliques (9%). Il accueille notamment le siège social d’entreprises internationales comme Daimler-Chrysler, Porsche ou encore Bosch. Depuis plusieurs années, le Bade-Wurtemberg développe des positions sur des nouvelles branches comme le multimédia, les logiciels ou encore les biotechnologies. Ses investissements en R&D figurent parmi les plus élevés d’Europe (3,9% du PIB) et un quart des investissements allemands en recherche sont issus d’entreprises du Bade-Wurtemberg. Le Land compte notamment 14 instituts Max-Planck et 15 établissements de la société Fraunhofer. 42 La Bavière Superficie : 70,5 milliers de km2 Nombre d’habitants : 12,3 millions Ville principale : Munich Poids de l’industrie dans l’économie : 30,3% du PIB La Bavière se place au second rang des Länder les plus industrialisés d’Allemagne, juste derrière le Bade-Wurtemberg. L’industrie manufacturière bavaroise emploie 1,16 millions de personnes, soit 27,5% de la main d’œuvre allemande. Un des principaux secteurs est l’automobile avec BMW et Audi notamment qui emploie 18,2% des actifs et représente 27,3% des ventes industrielles. Si l’on y ajoute les industries électriques et mécaniques, ces trois secteurs pèsent pour près des deux tiers de la production industrielle. Le Land de Bavière se caractérise par un très fort niveau d’innovation, avec un taux de R&D de 3% du PIB et un taux de dépôts de brevets qui dépasse de moitié la moyenne allemande. La Catalogne Superficie : 32,1 milliers de km2 Nombre d’habitants : 6,34 millions Ville principale : Barcelone Poids de l’industrie dans l’économie : 38,5% de la population active Le dynamisme de l’industrie catalane se fonde sur une main d’œuvre industrielle abondante et sur sa position géographique attractive au sein de l’Europe et du bassin méditerranéen. Si le tissu industriel de la Catalogne est très divers, il compte trois secteurs clés au premier rang desquels l’automobile avec la présence de Seat et de Nissan ainsi que de nombreuses entreprises de composants. La chimie emploie 60 000 personnes et le textile plus de 100 000. Récemment, la région s’est spécialisée sur des secteurs à plus fortes compétences technologiques comme les logiciels éducatifs où elle occupe aujourd’hui une position de leader en Europe. Le niveau de R&D représente 1,11% du PIB. L’Emilie Romagne Superficie : 22,1 milliers de km2 Nombre d’habitants : 4 millions Ville principale : Bologne Poids de l’industrie dans l’économie : 26,1% du PIB Située au sud de la Lombardie et de la Vénétie et disposant d’une large ouverture sur l’Adriatique, l’Emilie-Romagne tire parti de sa position sur l’axe autoroutier et ferroviaire rejoignant le nord et le sud de l’Italie. Elle est aujourd’hui la deuxième région la plus prospère du pays, juste derrière la Lombardie. La région de Bologne présente une spécialisation très forte dans le textile. Elle s’est notamment spécialisée dans la bonneterie – elle est le premier producteur mondial dans ce domaine - et la confection de vêtements et de lingerie. Parmi les autres industries traditionnelles concentrées autour de la voie romaine « Emilia » qui rejoint Bologne et Modène, on compte aussi la céramique, l’agroalimentaire avec des entreprises comme Parmalat ou Barilla et la mécanique. D’autres secteurs ont émergé ces dernières années comme la robotique et la biomédecine. Ce qui devrait faire décoller le niveau de R&D qui s’établit à 1% du PIB. Les principaux produits exportés appartiennent aux secteurs de la mécanique (53%), des minerais non métallifères (13%) et de la confection (10%). 43 Le Pays Basque espagnol (Euskadi) Superficie : 7,2 milliers de km2 Nombre d’habitants : 2,1 millions Capitale administrative : Vitoria-Gasteiz Agglomération principale : Bilbao Poids de l’industrie dans l’économie : 32,4% du PIB Région aux très fortes traditions industrielles, le Pays Basque espagnol (ou Euskadi) compte 300 000 emplois industriels sur ses 900 000 actifs. Les secteurs dominants sont les aciers spéciaux – 90% de la production espagnole est issue du Pays Basque – la machine-outil (80% de la production espagnole), la forge par estampage (75%), l’automobile (30%) ou encore l’aéronautique (20%). Il faut également citer l’électroménager avec une des plus importantes entreprises européennes du secteur Fagor. L’industrie est très dynamique en Euskadi : la région a affiché en 2005 une augmentation de 4% de son indice de production industrielle. Si le Pays Basque est la troisième région innovante d’Espagne (derrière la Navarre et la région de Madrid), elle accuse encore un retard significatif en matière d’innovation. La région investit 1,34% de son PIB en R&D. La Haute-Autriche Superficie : 11,9 milliers de km2 Nombre d’habitants : 1,37 millions Ville principale : Linz Poids de l’industrie dans l’économie : 60% du PIB Troisième land autrichien en termes de population, la Haute-Autriche est la deuxième région la plus dynamique du pays, juste derrière celle de Vienne. C’est aussi le Land le plus industrialisé d’Autriche : la production manufacturière y emploie un tiers des actifs. Les 8 secteurs de l’industrie haute-autrichienne considérés comme stratégiques sont organisés en clusters : automobile, moteurs, plasturgie, bois, agroalimentaire, santé, mécatronique, et « éco-énergies ». Le dynamisme industriel de la Haute-Autriche a entraîné une forte augmentation du taux d’emploi au cours des trente dernières années (+50% contre une moyenne nationale de +30%). La région autrichienne affiche ainsi aujourd’hui des résultats records en matière d’emploi avec un taux de chômage fin 2004 de seulement 3,7% (contre une moyenne nationale de 4,9%). Le niveau d’investissement en R&D est également intéressant puisqu’il atteint 1,71%. 44 La Lombardie Superficie : 23,8 milliers de km2 Nombre d’habitants : 9,1 millions Ville principale : Milan Poids de l’industrie dans l’économie : 35% du PIB Première zone commerciale et industrielle du pays, la Lombardie est la région la plus peuplée d'Italie et l'une des plus urbanisées. C’est non seulement une des régions les plus dynamiques du pays (elle contribue à hauteur de 20% au PIB national) mais aussi l’une des plus performantes d’Europe puisque ses 760 000 sociétés génèrent 3,7% du PIB européen. La Lombardie se caractérise par un tissu industriel extrêmement diversifié et une très forte concentration de moyennes et surtout de petites entreprises. Les 16 districts industriels officiellement recensés représentent quelque 60 000 emplois. Au premier rang des industries lombardes figurent les secteurs du textile et de la soie, suivis par l’industrie automobile. On peut citer comme grand groupe Pirelli en matière de pneumatique. La métallurgie et la chimie se sont également développées dans la région de Milan. Le niveau de dépense en R&D est établi à 1,2% du PIB. Le Piémont Superficie : 25,4 milliers de km2 Nombre d’habitants : 4,2 millions Ville principale : Turin Poids de l’industrie dans l’économie : 35% du PIB Dotée d’une très forte tradition industrielle, le Piémont est le berceau de l’industrie automobile italienne. La présence de Fiat est bien évidemment prédominante dans l’histoire et dans la structure industrielle de la région, de même que les difficultés rencontrées par l’entreprise ces dernières années. Au cours des années 90, les effectifs de Fiat à Turin ont chuté de 60 000 à 20 000 salariés. Pour autant, l’industrie piémontaise conserve son dynamisme. La filière automobile reste forte, notamment grâce aux 25 districts industriels qui emploient 180 000 personnes. La région affiche également des positions intéressantes dans le secteur du textile, de l’orfèvrerie ou encore de la robinetterie. Récemment, les secteurs des sciences de la vie, de la logistique ou encore de l’automatisation se sont développés. Avec 1,7% du PIB investi en R&D, la puissance d’innovation de la région reste inférieure à la moyenne européenne mais affiche comme atout la vitalité de l’investissement privé. Le Vorarlberg Superficie : 2,6 milliers de km2 Nombre d’habitants : 350 000 Ville principale : Brégence Poids de l’industrie dans l’économie : 39,7% du PIB régional Situé à l’extrême ouest de l’Autriche, niché entre la Suisse et l’Allemagne, le Vorarlberg est une région traditionnellement industrielle qui compte encore aujourd’hui le tiers de ses actifs dans le secteur industriel. Les industries agro-alimentaires, textiles et électroniques sont largement dominantes puisqu’elles représentent 80% du PIB industriel du Land. Le Vorarlberg a également de bons résultats dans le secteur de l’énergie et de l’approvisionnement en eau. Indépendamment de ces industries traditionnelles, le Vorarlberg a identifié cinq secteurs à fort potentiel sur lesquels il compte se positionner fortement, parmi 45 lesquels figurent les microtechnologies, l’emballage alimentaire et les transports. Pour y parvenir, ces secteurs ont été organisés en clusters. Le Land ne comptant aucun établissement universitaire de recherche, 96% de sa R&D provient de l’industrie (pour 4% seulement issus du secteur public) soit le chiffre le plus élevé de toute l’Autriche. Le niveau de R&D a été mesuré à 1,34% du PIB. 46 Lancement de la stratégie de compétitivité Euskadi 2015 Extraits de l’intervention de Juan Jose Ibarretxe, Président du Gouvernement Basque « Aussi réelle et impressionnante soit-elle, l’émergence de la Chine et de l’Inde ne constitue qu’un nouveau chapitre de l’histoire de l’industrie. Une histoire marquée par des conquêtes et des dominations. Une histoire jalonnée de nouvelles concurrences et de remises en cause des positions acquises. Une histoire ponctuée de désengagements mais aussi pleine de sursauts et de reconquêtes. Bref, une histoire où rien n’est joué si l’on sait se remettre en cause et faire preuve de la volonté nécessaire. Euskadi est la preuve de cette absence de fatalité.» Extraits de l’intervention d’Ana Agirre Zurutuza, Ministre du Gouvernement basque pour l’industrie, le commerce et le tourisme « Il faut se rappeler que, voici vingt ans, notre région a affronté une crise sans précédent qui aurait tout aussi bien pu se solder par la fin de notre industrie. Tel n’a pas été le cas. Refusant le caractère inéluctable de ce que l’on avait coutume d’appeler l’ère post industrielle, nous avons fait le choix en Euskadi de conserver notre industrie traditionnelle et, pour cela, de la reconvertir entièrement. Avec une conviction simple qui nous a guidé tout au long des années 90 : il n’existe pas d’industrie obsolète mais seulement des entreprises obsolètes. En misant sur l’innovation et en prenant des décisions parfois douloureuses, nous avons réussi à moderniser notre industrie traditionnelle et à conquérir des positions très avancées dans des secteurs comme la production d’acier, la machine-outil, l’automobile ou encore l’électroménager. C’est également ainsi que nous avons pu diversifier notre tissu industriel, toujours en nous fondant sur nos savoir-faire traditionnels, mais en nous positionnant sur des secteurs porteurs à haute valeur ajoutée comme par exemple l’aéronautique. Politique industrielle : quand les régions prennent la relève des Etats On assiste avec la mondialisation à une réorganisation de l’industrie mondiale au sein des grands ensembles que sont l’ALENA, le Mercosur, l’Asean ou encore l’Union européenne. Et, au sein de ces grands ensembles, à la montée en puissance de quelques grandes régions industrielles. 47 Cette nouvelle réalité illustre une évidence : les Etats ne sont pas systématiquement l’échelon le plus pertinent pour mener des politiques industrielles efficaces. Ils ne disposent pas toujours de la proximité indispensable avec les PME, ni des moyens financiers suffisants pour soutenir des secteurs entiers. Mais surtout, les Etats ne constituent plus le cadre le mieux adapté pour répondre aux enjeux de la mondialisation. Bien souvent, ils sont trop grands pour agir efficacement au niveau des régions et favoriser les synergies au sein des territoires. Et bien souvent aussi, ils sont trop petits face à des enjeux comme la lutte contre les délocalisations, qui se jouent de plus en plus au niveau européen. L’affirmation de régions industrielles modernes et performantes est indissociable de cette évolution ; elle doit aussi beaucoup à la mise en œuvre de stratégies régionales volontaristes. En Europe, c’est le cas notamment d’une dizaine de régions européennes qui parviennent aujourd’hui à concilier une forte industrialisation et un haut niveau de richesse, des régions parmi lesquelles on trouve Euskadi, la Catalogne, le Bade-Wurtemberg, la Bavière, l’Alsace, la Lombardie ou encore la Haute-Autriche. Ces champions de l’industrie européenne sont bien sûr très divers mais ils partagent des caractéristiques communes. Comme des spécialisations sectorielles : c’est en grande partie grâce à ces régions que l’Europe détient et maintient ses positions avancées sur l’automobile, les industries électriques ou encore l’électronique. Autre point commun de ces régions industrielles dynamiques : des taux de chômage très bas qui démontrent s’il le fallait que, sur notre continent, industrie et emploi peuvent aller de paire. C’est notre conviction en Euskadi, une conviction appuyée par les chiffres puisque nous avons enregistré un taux de chômage de 5,7% en 2005. La stratégie de compétitivité de la Communauté autonome : Euskadi 2015 Aujourd’hui, le principal défi d’Euskadi est le même que pour les autres grandes régions industrielles d’Europe : c’est bien sûr la concurrence asiatique. Face à ce défi, comme face à tous ceux que nous avons du affronter par le passé, notre volonté est qu’Euskadi reste une grande région industrielle d’Europe. Pour y parvenir, notre région a bâti une stratégie de compétitivité nommée « Euskadi 2015 ». Cette stratégie est l’expression collective et déterminée de tous les acteurs publics et privés d’Euskadi : elle est le fruit d’une large concertation lancée par le gouvernement en 2004, qui 48 nous a permis de dresser un diagnostic et de définir des objectifs partagés aussi bien par les différents partis politiques que par le monde économique ou encore la société civile. Pour donner à Euskadi tous les moyens de conserver sa place parmi les dix plus grandes régions industrielles d’Europe, Euskadi 2015 s’articule autour de deux priorités d’action. La première, c’est l’innovation. Euskadi doit poursuivre ses efforts dans ce domaine pour devenir, à moyen terme, une des régions les plus innovantes d’Europe. Pour y parvenir, nous pourrons notamment nous appuyer sur la vitalité de la recherche privée dans notre région et sur le fonctionnement en réseau des PME avec les centres de recherche et les universités. La deuxième priorité, c’est l’internationalisation. La mondialisation peut être une formidable source d’opportunités pour Euskadi. Les entreprises basques doivent être en mesure de davantage s’implanter dans les pays stratégiques et de se saisir de parts de marchés. Elles doivent aussi être en mesure d’être plus compétitives face à la concurrence internationale et de développer encore leurs exportations. Les PME au centre des stratégies industrielles régionales Face au défi commun de la mondialisation, la plupart des grandes régions industrielles d’Europe ont adopté une démarche similaire. Chacune a bien sûr adapté sa politique aux spécificités de son territoire, de son tissu industriel et de son histoire. Mais presque toutes visent des objectifs communs et utilisent des outils de gouvernance proches. Comme les autres grandes régions industrielles, Euskadi place les PME au cœur de sa stratégie de compétitivité. D’abord parce que les PME dominent, ici comme ailleurs, le tissu industriel. Et parce que, ici plus qu’ailleurs, elles sont et resteront le moteur de l’industrie. Ensuite parce que là où les grandes entreprises et les « champions nationaux » sont les interlocuteurs privilégiés des Etats, les PME sont les partenaires naturels des pouvoirs publics régionaux. Enfin, parce que la stratégie d’Euskadi s’appuie sur un cercle vertueux où la région donne les moyens aux PME d’être plus compétitives et où le dynamisme des PME renforce l’attractivité de la région. 49 Face à la concurrence internationale croissante, notre politique régionale doit rester un instrument décisif de la compétitivité de ces PME en favorisant et en permettant la coopération. C’est dans ce but que, comme d’autres régions – et même avant elles – Euskadi a créé des clusters qui sont à la fois le lieu privilégié de la coopération économique et technologique des PME et le socle de la politique industrielle régionale. Au sein des treize clusters basques, les entreprises, quelle que soit leur taille, montrent qu’il est possible de mutualiser leurs investissements en R&D pour mener des projets communs ou pour financer des centres de recherche sectoriels. Grâce à cette collaboration, elles affichent un niveau d’innovation qui serait hors de leur portée si elles restaient isolées. Et qui leur permet d’être compétitives sur le marché international. La région n’est pas simplement le lieu de la coopération entre les petites et moyennes entreprises. C’est aussi le territoire naturel de la coopération entre ces entreprises et les structures de recherche et de formation. En Euskadi, les centres de recherche publics et privés, les universités et les PME fonctionnent en réseau très serré et travaillent quotidiennement ensemble. Les rapports étant plus étroits entre l’industrie et la recherche, les circuits de décision étant plus courts, l’industrie basque est très réactive par rapport au marché et les innovations sont rapidement commercialisables. Comme d’autres régions aussi – et cette fois encore avant elles – Euskadi s’est doté d’une agence de développement local, dont les compétences et les moyens sont particulièrement larges. Elle constitue l’interlocuteur unique des PME à travers un partenariat public-privé qui a fait ses preuves. Comme d’autres régions enfin, Euskadi s’est fixé comme priorité le développement de l’innovation, notamment dans la perspective d’atteindre les objectifs de Lisbonne. C’est en ce sens que nous venons de créer une agence pour l’innovation qui est appelée à devenir, elle aussi, un des principaux outils de notre gouvernance économique. » 50 institut France Euskadi 16 avenue de Friedland 75008 Paris www.france-euskadi.org [email protected] 51