Cours d`Europe Orientale

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Cours d’Europe Orientale
Trois concepts importants sur l’URSS : la puissance (Aron), l’empire (Duverger) et les
frontières mouvantes ainsi que le totalitarisme (Arendt).
L’URSS est perçue comme puissante par l’Occident. Mythe du plan, victoire sur
Hitler, domaines d’excellence comme la bombe A (génial !) ou la conquête de l’espace.
L’immensité du bloc est-elle un avantage ou un handicap ? Pour Soljenitsyne, il s’agit
d’un handicap. Processus de « colonialisme à l’envers ». Les fondements de ce système sont
plus ou moins totalement dupliqués dans les pays d’Europe de l’Est de l’après-guerre. Rôle de
l’idéologie, des conjonctures… Développement de la résistance et mutation du système.
L’Empire russe en 1914
C’est une énorme masse continentale avec une énorme population. 22 millions de km²
pour 170 millions d’habitants. Véritable rouleau-compresseur.
Puissance militaire liée à la puissance démographique. Empire multinational avec de
nombreux peuples non-slaves et non-orthodoxes, ce qui fait que les frontières ne sont pas
sûres ce qui est un premier élément de faiblesse.
La Russie tsariste est dépendante de l’Occident : la plupart des investissements
économiques ont été faits par des Français et des Anglais. Occidentalisme culturel. Ceci est
un deuxième élément de faiblesse. Les dysfonctionnements de la société vont être révélés par
la guerre. Avant 14 existait un système autocratique de droit divin. Le tsar était le représentant
de Dieu sur terre.
3 pilier du régime :
 Aristocratie de fonction
 Religion orthodoxe
 Police politique : l’Okhrana chargée de poursuivre les dissidents. Fort mouvement
de terrorisme.
Le régime semblait très puissant du côté de l’Occident. En 1905, révolution qui aboutit
à une démocratisation politique manquée. Le but était la mise en place d’une constitution avec
des libertés publiques, le droit au suffrage universel… Demande de réformes sociales de la
part des classes populaires. Rédaction du « manifeste d’octobre » qui pousse le tsar à octroyer
les libertés civiques et à instaurer la Douma qui était censée être élue au suffrage universel. La
Douma est en fait un faux système parlementaire : l’exécutif n’a pas de contrôle sur le
législatif. Les ministres ne sont responsables que devant le tsar. Chaque groupe social a un
représentant à la Douma. Quota de représentants et système de curies.
Dans un premier temps, la Douma était contestataire. Mais le tsar avait un droit de
dissolution dont il a su faire usage. A la fin, seuls les propriétaires fonciers étaient représentés.
La Russie était principalement rurale (82% de la pop). La plupart des paysans
n’avaient pas de terre ou alors un tout petit lopin. Solypine mène une réforme agraire en 1906
en proposant de racheter des terres au tsar. C’est le début de la mécanisation. Avant la guerre,
15% des koulaks avaient modernisé leur exploitation.
La Russie à l’épreuve de la guerre : du tsarisme au
bolchevisme
La guerre de 14-18 joue un rôle fondamental dans l’émergence de nouveaux courants.
En l’Europe de l’Est, c’est le moment où apparaissent les mouvements. La guerre entraîne un
très haut niveau de violence et une profonde déstructuration des anciennes formes politiques
(autocratie et multinationalité).
1. Le tsarisme, la guerre et la révolution
Le tsar est incapable de maintenir l’union sacrée et une économie de guerre efficace.
Souvenir très humiliant de 1908, quand l’Autriche-Hongrie a annexé la Bosnie. Panslavisme.
But de guerre de la Russie : avoir un accès aux mers chaudes. Dans un premier temps,
patriotisme qui se manifeste (ex : débaptisation de St-Pétersbourg en Petrograd, moins
germanique).
A. Désintégration sur le front et à l’arrière
Les défaites commencent dès août 14. Les empires centraux rentrent dans l’Empire
russe : conquête de la Pologne, de la Lituanie. 900 000 prisonniers dès la première année de
guerre.
10 millions de mobilisés, 1,7 million de morts. Les deux handicaps majeurs sont la
perte de la Pologne industrielle et l’entrée en guerre de la Turquie. Les détroits sont fermés.
Les seules voies de ravitaillement sont Vladivostok et Arkhangelsk.
L’économie de guerre ne fonctionne pas. Il y a de gros problèmes de transport, de
production civile, de pénurie, d’inflation, les prix flambent, les magasins sont vides.
Multiplication des grèves et des manifestations dès 1915. Phénomène exponentiel.
B. L’isolement du gouvernement tsariste
Nicolas II, sa femme et Raspoutine sont très impopulaires. A partir de septembre 1915,
le tsar prend le commandement des armées. Des bourgeois industriels libéraux tentent
d’organiser la production.
Goutchkov, le chef du parti octobriste, réclame un système parlementaire. Il organise
en mai 1915 le comité des industries de guerre.
Fin 1916, se prépare au sein de la Douma une révolution de Palais qui vise à forcer
Nicolas II à abdiquer au profit de son fils avec la régence du Grand Duc Michel.
31 décembre 1916 : assassinat de Raspoutine par le prince Youssoupof et le Grand
Duc Dimitri.
La préoccupation principale à ce moment est de relancer l’effort de guerre pour que la
Russie sorte victorieuse.
C. La révolution de février
C’est un mouvement spontané qui commence par une manifestation et qui se
transforme en critique radicale de l’autocratie et de la guerre.
« Journées de février » : le 23 et le 24, mouvement social spontané avec des femmes et
des ouvriers qui crient « du pain et de la paix ». Le mouvement est très bien accepté par
l’opinion publique. Les grèves se généralisent. Une fois que les autorités font intervenir la
police, le mouvement change de nature.
Les 26 et 27, les soldats et les cosaques envoyés pour réprimer se mutinent. Les
manifestants arrivent à l’Arsenal pour prendre les fusils, ils libèrent les prisonniers politiques
à la forteresse Pierre et Paul et prennent le Palais d’Hiver, siège du gouvernement tsariste.
Les militants révolutionnaires tentent de contrôler le mouvement ; création de deux
organes : les soviets et un gouvernement provisoire. Ce gouvernement se crée dans la Douma,
son président est le Prince Lvov, son ministre de la guerre Goutchkov, son MAE Milioukov et
son ministre de la justice Kerenski. Ce gouvernement va voir le tsar pour lui demander de le
reconnaître et de reconnaître sa responsabilité devant la Douma.
Les soviets sont une idée des mencheviks (mencheviks ≠ bolcheviks : scission du
PSDOR en 1903 provoquée par Lénine.)
Les Socialistes Révolutionnaires sont une tendance populiste : « la terre aux paysans ».
Lénine fait une synthèse de la tendance populiste et de la tendance marxiste.
Election d’un soviet à la hâte qui comprend une cinquantaine de délégués ouvriers et
200 militants. Bureaucratisation. Le soviet est principalement composé de mencheviks et de
SR. Bolcheviks en exil.
Structuration du soviet : 850 délégués ouvriers et 2000 délégués soldats. Prise en main
du mouvement par les professionnels de la politique. Contrôle du gouvernement provisoire.
Le 3 mars 17, Nicolas II abdique en faveur de son frère qui abdique à son tour. Le 7
mars, on lance un mandat d’arrêt contre le tsar. Pendant la guerre civile, on le conduit en
Sibérie. Dans la nuit du 16 au 17 juillet, il est assassiné avec toute sa famille.
2. La montée des revendications
Absence de tradition démocratique, faiblesse du camp modéré. Les bolcheviks
vont profiter de cette situation. Le tournant essentiel est avril.
Le peuple attend des réformes sociales et veut profiter de sa liberté. Le
gouvernement provisoire veut gagner la guerre.
Abolition de la peine de mort, amnistie des prisonniers politiques, augmentation
de la liberté politique.
A. Les revendications ouvrières et des classes populaires
Les ouvriers sont très largement minoritaires dans l’empire tsariste. C’est une
force sociale agissante depuis le début du siècle. Après la révolution de février, ils
revendiquent une démocratie directe. Conséquences : profusion de comités, de soviets,
d’associations…
Il existe de structures de soviets : de quartiers ou de villes.
Il y a également des comités d’usine censés participer à la gestion des entreprises,
la création de milices populaires (les gardes rouges).
Les revendications sont les journées de 8h, la hausse des salaires, l’assurance
sociale, le contrôle de l’embauche et du licenciement. Certaines revendications sont comblées.
Le soviet de Petrograd est très important.
Le 10 mars on décrète la semaine de 47h, on légalise les comités d’usine comme
interlocuteurs mais ils sont différents des organismes représentants de l’Etat.
En mai 17 sont lancées des expériences d’autogestion.
B. Les revendications paysannes
Les paysans créent des soviets ruraux. Réunion des chefs de village avec à la tête
le vieux, staroste.
Les paysans veulent la terre. Le gouvernement n’est pas prêt à faire une réforme
agraire. L’armée russe est avant tout composée de paysans.
En avril 17, le matériel est saisi et les terres en friche sont distribuées. En juillet
17, coq rouge : incendie des châteaux ou des réserves du propriétaire. Vengeance du paysan.
Réquisition des terres du propriétaire.
C. Les revendications nationales
Le gouvernement provisoire fait un geste : il met fin à toutes les discriminations
raciales et religieuses le 6 mars. Reconnaissance du droit à l’indépendance pour la Pologne et
la Finlande.
Le 25 avril, mouvement en faveur de l’autonomie militaire et des minorités
nationales. Impulsions fortes des mouvements nationaux. Fortes revendications
d’indépendance : en Ukraine, le Rada (parlement), réclame l’indépendance dès juin, puis les
pays Baltes, puis l’Orient russe, les Tatars et leur sultan.
D. Le problème de la guerre
Il existe plusieurs versions concernant les buts de la victoire : selon Milioukov, il
faut annexer des régions ; pour Kerenski, il s’agit de défensisme révolutionnaire contre
l’autocratie prussienne. « Paix sans annexion ni contribution ».
En avril, manifestations suite aux buts de guerre de Milioukov qui poussent le KD
à démissionner.
Gouvernement de coalition marqué par l’influence soviétique : 7 portefeuilles sont
libéraux, 6 sont socialistes. Les responsabilités retombent désormais sur les socialistes ; les
bolcheviks ne participent pas. Kerenski est ministre de la guerre puis Premier ministre.
Tcherrov, le ministre de l’agriculture de tendance SR, n’entreprend pas de réforme agraire, ce
qui fait baisser l’influence des SR dans les campagnes.
Décalage entre les chefs soviétiques du gouvernement provisoire et la population
en ce qui concerne la paix.
Le soviet de Petrograd, qui compte beaucoup de soldats, prend la mesure
d’octroyer des droits civils et politiques aux soldats sur le front : droit de réunion, discussion
des décisions, abolition de la peine de mort (même en cas de désertion). En avril-mai 17, on
compte 80 000 désertions au nord du front. Ce mouvement s’accélère car il y a une rumeur
d’hypothétique réforme agraire. Les officiers sont perdus car ils sont très traditionalistes.
Quand Kerenski relance une attaque mi-juin, c’est un échec retentissant car les soldats ne
combattent pas.
3. Vers un pouvoir soviétique et bolchevique
A. Le poids décisif de Lénine
Né en 1870, il est marqué par la pendaison de son frère en 87 suite à la
préparation d’un attentat contre le tsar. En 95, il fonde le premier groupe social-démocrate
avec Plekhanov. Il joue un rôle dans la scission du parti en 1903.
En 17, les chefs bolcheviques sont en exil. Lénine est en Suisse et il a du mal à
rentrer en Russie. Il arrive le 2 avril à Petrograd d’où il lance ses thèses d’avril le 4.
Gradualisme révolutionnaire : il lance 10 points pour la prise du pouvoir et les premières
mesures socialistes. Il ne s’embarrasse pas des dogmes : action politique avant tout. Il
considère que les soviets ont le pouvoir quotidien et préconise tout pouvoir aux soviets.
Il veut la paix. Pravda circule sur le front avec succès ; adhésion des soldats. Premier congrès
pan-russe des soviets du 3 au 23 juin avec plus de 20 millions d’électeurs. 600 délégués SR et
mencheviques, 105 bolcheviques. Deuxième congrès le 25 octobre avec cette fois 390
bolcheviques sur 673 personnes.
B. Le gouvernement provisoire et les bolcheviques
Série de crises qui ponctuent la période : crise d’avril avec un nouveau
gouvernement provisoire, de nombreux soldats refusent de partir sur le front, insurrection. Du
coup, durcissement du gouvernement, les bolcheviques sont traqués. Kerenski au pouvoir le
23 juillet : danger bolchevik, pression des chefs des armées, Lénine traître allemand. En aoûtseptembre 17, tentative de coup d’état du généralissime Kornilov en fédérant tous les antirévolutionnaires. Le putsch échoue car les cheminots sont en grève. Après cette tentative, on
libère les bolcheviques.
Trotski devient président du soviet de Petrograd le 9 septembre, majorité du parti
dans plus de 50 soviets des grandes villes, majorité à la conférence des comités d’usine,
popularité chez les soldats.
C. Qui prend le pouvoir et au nom de qui ?
Réunion du congrès des soviets le 25 octobre. Direction bolchevique, qui
préfèrerait une victoire légale, c'est-à-dire par majorité au congrès qui destituerait le
gouvernement provisoire. Cependant, Lénine et Trotski sont pour lune insurrection immédiate
et pour la défense de la révolution et du soviet. En fait, ils veulent marquer une rupture,
donner la prééminence au parti des soviets et accaparer tout le pouvoir sans coalition. Ceci
aboutit à la prise du Palais d’hiver et à l’arrestation du gouvernement provisoire par les gardes
rouges.
Le congrès des soviets est entériné malgré les contestations et le départ des
mencheviques et SR.
Conseil des commissaires des peuples formé presque exclusivement par des
bolcheviques ; Lénine est président de ce sovnarkom. Ambiguïté de la révolution d’octobre :
putsch ou révolution populaire ?
Parlement soviétique ou gouvernement bolchevique à parti unique. 200 000
militants au parti, encore méconnu dans les campagnes.
Nouveau régime soviétique, dictature des classes populaires ; droit de vote refusé
à la population (en janvier 18, l’Assemblée Constituante élue au SU met les bolcheviques en
minorité : dissolution). En juillet 18 sont exclus du droit de vote les oisifs, les ecclésiastiques,
les bourgeois et les nobles. Le pouvoir est confisqué par les bolcheviques.
C’est un régime inédit apparu rapidement sans trop de violence. Charisme d’un
chef, rôle DU parti, poids idéologique qui contraste avec le soutien de la population ralliée sur
quelques mots d’ordre démagogique.
Les bolcheviques au pouvoir : l’expérience fondatrice de
la guerre civile
D’octobre 17 à l’automne 20, la période est très complexe et mouvementée. En
21, on peut dire qu’un certain nombre de traits sont définis : toute puissance du parti, rapports
sociaux tendus, méthodes de direction administrative empreintes de militarisme et de
violence. Quelle est la part de la conjoncture ? Quels sont les facteurs les plus profonds ?
Héritage du tsarisme, idéologie socialiste et fonctionnement du parti.
1. Les mécanismes de la violence
A. Une guerre totale
Cette guerre commence vraiment début 18. L’armée blanche se constitue à partir
de morceaux de l’ancienne armée tsariste. Fin de la guerre en mars 18, avec le traité de BrestLitovsk. A partir du front, les Blancs vont faire la guerre aux bolcheviques.
Au sud, les cosaques du Don sont menés par Denikine. A l’extrême orient,
création d’un gouvernement par l’amiral Koltchak. Forces anti-bolcheviques en Ukraine,
Biélorussie, Finlande, Pologne, dans les Pays Baltes. Les SR considèrent qu’ils ont la
légitimité et créent un gouvernement à Samara. Formation d’une armée, attentats contre les
bolcheviques (Fanny Kaplan en août 18 contre Lénine).
Les Alliés vont maintenir un front à l’Est : négociation avec tout le monde. L’aide
à l’armée blanche vise d’abord à maintenir un front, puis cela devient un combat contre les
bolcheviques. Aide matérielle, envoi de conseillers militaires, débarquement de quelques
soldats à Odessa. Les Tchèques, qui s’étaient rendus massivement aux Russes pour lutter
contre l’Allemagne et l’Autriche-Hongrie du côté des Français se retrouvent coincés au beau
milieu de la Sibérie, à Irkoutsk. Du coup, ils se battent contre les bolcheviques.
Eté 18 : les bolcheviques sont limités à la Moscovie. Très mauvaise position.
Retournement de la situation et victoire acquise fin 19.
Développement d’idéologies de part et d’autre ; méthodes semblables découvertes
par la lecture du livre vert en 21 écrit par un paysan du maquis. Incendies des villages,
réquisition des biens, exécutions sommaires, filtrage des prisonniers… Recours aux affiches,
agit’prop,…
La mortalité est très importante : environ 800 000 morts sur les fronts. Excédent
de mortalité de 8 millions. Beaucoup de maladies…
B. La terreur rouge
La violence se fait par en haut et par en bas. Grand organisateur : Trotski. Il crée
une armée de volontaires qui se transforme en mobilisation obligatoire des hommes dès 18.
Imitation de Carnot qui avait organisé l’armée de l’an II. Réquisition d’officiers tsaristes
surveillés par des commissaires bolcheviques, qui vont finir par apparaître aux yeux des
officiers tsaristes comme les vrais patriotes.
Discipline de fer : la désertion est punie de peine de mort, création de la Tcheka
en 17, polices politiques locales organisées par les soviets. Grande participation de la
population qui confisque les biens, arrête, juge.
C. Une violence qui vient de loin
On est obligé de réutiliser des anciens fonctionnaires tsaristes. Servilité à l’égard
des supérieurs et mépris à l’égard des inférieurs.
En 1920, les paysans commencent à se détacher de l’armée rouge : ex : révolte de
Tambov menée par Antonov. Utilisation de méthodes tsaristes pour la répression : gaz,
déportation, mise en place de camps…
2. D’une révolution populaire à un régime impopulaire
A. Les décrets bolcheviques
Dès octobre 17, lancement de décrets qui réalisent les aspirations des classes
populaires.
Sur la terre : plus de propriété foncière, réorganisation de la terre à raison de 2,2 à
3,2 ha pour chaque famille
Sur les entreprises : comités d’usine qui doivent œuvrer pour la cogestion ou la
socialisation de l’entreprise.
Sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes : indépendance de la Finlande, de
l’Ukraine, des Pays Baltes et trans-caucase.
Sur la paix : pourparlers qui échouent en décembre 17 ; nouvelle offensive
allemande qui mène à la signature du traité de Brest-Litovsk en mars 18.
B. Des réalisations confisquées :
La terre : petite agriculture, peu de produits commercialisés, autoconsommation,
problèmes de ravitaillement dans les villes qui entraînent une réquisition des récoltes. Les
bolcheviques envoient des ouvriers qui réclament une partie du blé gratuitement. Organisation
de comités de paysans pauvres où la délation est monnaie courante.
Développement des résistances, des maquis verts, qui entraîne un gel des terres ;
la SAU baisse de 35 à 60% ; famine en 21.
L’autogestion ouvrière : en juin 18, nationalisation des banques et de l’industrie.
Création du conseil suprême de l’économie nationale (VSNKh). Lutte contre l’esprit de
clocher des usines.
On retire de plus en plus le pouvoir de décision des ouvriers. Militarisation du
travail : tout le monde est obligé de travailler entre 16 et 50 ans sous peine de mort, travail
aux pièces, création des soubotniks,..
Grèves et manifs en 20-21 ; opposition ouvrière menée par Aleksandra
Kollontaï. : le parti perd ses bases ouvrières.
Mutinerie de Kronstadt en 21 qui se bat au nom de la défense de la démocratie
soviétique contre le gouvernement des commissaires.
Le droit des peuples est limité car des territoires non-russes sont reconquis dès
1920 pour soutenir des mouvements révolutionnaires ou se défendre contre les Blancs.
La paix est effectivement signée mais juste après il faut s’enrôler dans l’armée
rouge.
La composante anti-populaire des Rouges s’accroît au fur et à mesure de la défaite
des Blancs. La terreur rouge devient une lutte anti-populaire.
3. L’état bolchevique à la sortie de la guerre civile
A. Le tout-Etat
Le communisme de guerre est instauré. Grand dirigisme économique renforcé par
l’idéologie communiste. On a dans tous les pays des économies de guerre. Le modèle
allemand a influencé les bolcheviques : rationalisation de la production et contrôle de la
distribution. Le gouvernement provisoire de 17 avait déjà mis en place des mesures comme le
ticket de rationnement, le monopole de l’Etat sur le marché des graines… Les bolcheviques
vont plus loin et y ajoutent des mesures coercitives comme la nationalisation des industries et
des banques, l’organisation de la production par le VSNKh, la militarisation du travail. La
distribution est placée sous le signe du communisme de guerre : réquisition, disparition du
commerce libre, distribution dans les magasins d’Etat selon le rationnement… Les paysans y
échappent car ils doivent se nourrir eux-mêmes. L’argent disparaît car il est devenu inutile.
B. Les nouveaux promus
Ce sont ceux qui réussissent leur ascension sociale grâce au nouveau régime. Les
ouvriers et soldats de l’armée rouge vont en faire partie et deviennent les fonctionnaires du
nouveau régime. Hétérogénéité de l’appareil d’Etat : niveaux très différents entre les anciens
tsaristes et les nouveaux fonctionnaires.
En 1921, chute très forte du nombre de travailleurs dans l’industrie (ils sont moins
d’un million). Morts, fuites dans les campagnes, industrie qui végète, promotion des meilleurs
ouvriers….
L’Etat ouvrier a perdu ses ouvriers.
C. L’essor de l’idéologie
Toute l’expérience de la guerre civile montre que l’idéologie est prédominante.
Tout est lu à travers un filtre idéologique.
En 20-21, débat entre Trotski et Tomski : pour l’un, il est inutile d’avoir des
syndicats puisque l’Etat est ouvrier, alors que pour l’autre, les syndicats ont encore leur rôle à
jouer.
Mars 21 : congrès du parti. Période très difficile pour le gouvernement
bolchevique (mutinerie de Kronstadt). Déclenchement de la NEP. Concessions économiques
et sociales.
Décision de resserrer les rangs du parti : interdiction des fractions. Toutes les
solutions au problème sont d’ordre politique. Il existe un décalage entre les concessions
économiques et sociales et le resserrement politique.
Beaucoup de traits de l’Etat soviétique se sont fondés sur la révolution et la guerre
civile. Les plans politiques et idéologiques ont été mis en place à cette époque.
La recomposition des espaces : l’émergence des Etatsnations en Europe Centrale et spécificités de la construction
soviétique
Le territoire est composé de peuples imbriqués les uns dans les autres. Les statuts
et légitimités sont variés dans le passé. Les découpages ne respectaient pas les ethnies.
Il existe des zones frontières entre trois empires qui donnent lieu à des conflits.
Nationalités majoritaires et dominantes qui ont un fort pouvoir d’assimilation comme les
Austro-Hongrois, les Allemands, les Russes et les Italiens.
Etats-nations jeunes et conquérants : Roumanie, Bulgarie, Serbie.
Etats avec un support historique : Pologne, Tchéquie, Croatie, Lituanie, Finlande,
Ukraine, Géorgie et Arménie.
Nationalisme potentiel dans les états qui n’ont jamais existés : Lettonie, Slovénie,
Slovaquie…
1. Les modèles de reconstruction nationale
Modèle français : assimilation d’un Etat-nation qui ne tient pas compte de
l’ethnicité mais d’une expérience passée commune. Nation fondée sur un territoire. Ce
modèle a une forte influence en Pologne. Staline écrit en 13 « Le marxisme et la question
nationale et coloniale ». Critères des nations selon lui : territoire, langue, culture.
Modèle autrichien (inventé par Karl Reiner) : théorie de l’autonomie personnelle :
l’Etat-nation en Autriche est impossible. Définition personnelle du territoire : chaque citoyen
s’inscrit sur le cadastre national. Budget propre. Système appliqué en Moldavie juste avant la
guerre. C’est le seul modèle qui intègre les nationalités (modèle anti-assimilationniste).
Modèle yougoslave (qui reprend le modèle italien) : modèle autour duquel
s’agrègent d’autres nationalités. Etat fort fondé sur un modèle centraliste et unitaire. En
Serbie, Nikola Pasic s’oppose aux découpages intérieurs de l’Etat ; accords de Corfou :
territoire libre et indépendant unifié avec une citoyenneté unique.
2. Les frontières en devenir
A la fin de la première GM, naissance de l’Etat-nation. Mouvement de maturation
interne du sentiment national et traités qui créent de nouveaux Etats (produits de la guerre).
A. Les leaders nationaux interlocuteurs des grandes puissances
Tchécoslovaquie : Masaryk et Benès. Créateurs du conseil tchécoslovaque qui
siège à Paris depuis 1916. Action déterminée auprès des gouvernements alliés français et
anglais : au départ, peu de succès. Après 17, sentiment de russophilie chez les Tchèques qui
agissent auprès de la nouvelle Russie.
Pologne : Pilsudski chef depuis 1894 du PS polonais à tendance populiste.
Pendant la guerre, il devient le commandant des légions polonaises organisées à part de
l’armée autrichienne. Il pense obtenir une reconnaissance polonaise du côté des
Allemands/Austro-Hongrois. En juillet 17, Pilsudski change de camp et décide de contacter
les Alliés par lui-même. Vision de terrain. On le surnomme le « commandant ».
Dmowski, lui, essaie d’influencer les Alliés pour obtenir l’indépendance polonaise
à la fin de la guerre. Il s’oppose à Pilsudski. En 1915, il quitte la Russie polonaise pour
Londres où il fonde un Comité national polonais qui siège ensuite à Paris. Il représente la
Pologne dans les conférences de l’après-guerre. Il est le chef du parti national-démocrate qui
remporte les premières élections législatives en janvier 19.
Yougoslavie : Nikola Pasic chef des vieux radicaux serbes à la tête de la
délégation yougoslave à Versailles.
Cependant, tout ne s’est pas fait grâce aux Alliés. Pour les pays Baltes,
l’indépendance est venue par l’Allemagne.
B. Les mouvements d’indépendance
Empire russe : tout d’abord, occupation allemande qui voit le développement de
mouvements nationaux et de courants autonomes. En Pologne, occupation depuis 1915 ;
établissement à Varsovie d’un governerat général avec mise en place du polonais comme
langue dominante, création d’universités polonaises, instauration de l’autonomie politique.
Néanmoins, à partir de la révolution de février, la Russie peut apporter
l’indépendance. De février 17 à mars 18, mise en place de l’autonomie puis de l’indépendance
des pays auxiliaires. Le traité de Brest-Litovsk impose une occupation allemande des pays
mais la reconnaissance de leur indépendance.
En mai 18, la Géorgie, l’Arménie et l’Azerbaïdjan deviennent indépendants ;
indépendance qui ne sera reconnue par les Alliés qu’en 1920 (pour contrer l’expansion du
bolchevisme). Mise en place de républiques indépendantes dans l’Est : Tatares, Bachkires…
Empire austro-hongrois : grosses différences selon les pays. Pays les plus
avancés : Tchèques, Polonais, Serbes. Pays moins favorables à l’indépendance : Croates et
Slovènes qui sont fidèles à la couronne. Les Slovaques sont relativement peu impliqués.
Moment décisif : quand les Alliés renoncent à une rénovation de l’empire. Le 29
mai 18, le secrétaire d’Etat américain Lansing se dit favorable à la libération des Tchèques,
Croates et Slovènes. Création de la Yougoslavie et de la Tchécoslovaquie. La France et la
Grande Bretagne se rallient à cette déclaration.
Ce soutien s’explique par l’échec des négociations secrètes avec Vienne. Peur du
vide étatique.
C. Le processus de conquête ou de reconquête
Roumanie : sort grandie de la guerre. Elle fait sa petite guerre pour récupérer la
Bessarabie russe en janvier 18.
Pologne : joue la carte diplomatique et militaire. Trois guerres pour s’agrandir : la
Posnanie (novembre 18 à février 19), l’Ukraine (novembre 18 à janvier 19) qui permettent la
récupération de la Pologne orientale. Troisième guerre contre la Russie en avril 20 qui va
contre la ligne Curzon pour s’étendre à l’Est. Contre-offensive russe qui va jusqu’à Varsovie
en été mais refoulement dès l’automne. Traité de Riga en mars 21. Soutien français jusqu’à la
guerre avec la Russie.
Cas bolchevique : reconquête qui commence en 20 pendant la guerre civile. Il ne
s’agit pas d’un sentiment de grande Russie. La première motivation est idéologique : OK pour
l’indépendance, mais si il y a des mouvements révolutionnaires dans les pays satellites, il faut
les aider. Principe d’expansion révolutionnaire.
Reconquête qui se limite au Caucase et à l’Asie centrale. Pragmatisme : éviter la
guerre avec les Alliés et espoir que la révolution se fasse de manière interne (cf Allemagne).
Pour eux, le Caucase et l’Asie centrale sont des lieux stratégiques politiques et
économiques. Reconquête militaire (un peu moins nette en Ukraine, où il y a un véritable
noyau révolutionnaire). Offensive qui commence en avril 20, intégration des Etats comme
républiques autonomes au sein de la République de Russie.
Transcaucasie : début d’un grand procédé. Soutien d’un mouvement communiste
local et aide à l’organisation d’un putsch. Ces putschistes se déclarent gouvernement légitime
et appellent l’armée rouge. Intervention et création d’un traité fraternel qui les rend république
autonome.
De plus, aide de la part des minorités qui ne veulent pas l’indépendance (Abkhaz
adjars en Géorgie et Arméniens qui ont peur des Turcs).
3. La délimitation des frontières
Trois critères utilisés par les Alliés et les Bolcheviks : ethnographie, économie,
administration.
Chez les Alliés, souci de créer des entités fiables assez fortes pour résister contre
les menaces bolchevique et allemande. Cordon sanitaire.
Chez les Bolcheviks, souci de redécouper les espaces dans les républiques
autonomes selon un critère ethnographique mais en dissociant le contenu de la forme.
A. Les Etats récompensés
La Pologne, la Tchécoslovaquie, la Roumanie et la Yougoslavie se taillent la part
du lion. Etats tampons. Souci politique de créer de grands Etats. Pas vraiment de démarcation
entre ethnies. La Roumanie devient un pilier contre le bolchevisme et pour la politique
française. Pourtant elle avait perdu la guerre contre les Allemands.
B. Le problème des minorités
Après les traités de paix, 80 millions de personnes ont changé de nationalité. Plus
de 20 millions d’entre elles sont considérées comme des minorités (race, religion, langue
différente de leurs concitoyens et placés sous une souveraineté qui n’est pas celle de leur
choix).
Allemands pour les Sudètes, Hongrois de Transylvanie : irrédentisme utilisé par
Hitler.
Chaque Etat est obligé de mettre en place un traité de minorité. Combat
permanent entre la SDN et les nouveaux Etats. Seulement 14 demandes sur 325 ont été
examinées au conseil. Ces plaintes viennent souvent des minorités allemande ou hongroise.
Deux types de droit exigés par minorités : droits négatifs et positifs.
C. La spécificité de la construction de l’Union Soviétique
Elle naît le 30 décembre 22 avec un fédéralisme officiel et un grand contrôlisme :
c’est le Parti qui dirige le pays.
Quatre niveaux de républiques : fédérée, autonome, région autonome et
arrondissement national.
Les Russes n’ont pas vraiment de représentation nationale. Dans les 20’s, légère
tendance à la discrimination positive. Cette politique ne fait pas l’unanimité. Les experts du
Gosplan sont hostiles au développement des identités nationales au nom du développement
économique. Mais les dirigeants ukrainiens sont très favorables au développement d’une
identité nationale par le biais d’une structure ethnique.
Les ethnographes définissent des frontières liées à l’appartenance ethnique.
Cependant, les revendications continuent jusqu’à la fin des 20’s. Jeu de répartition politique
utilisé par Moscou. Idée d’arriver à un égalitarisme pour supprimer l’identité nationale.
Echec.
Dans les 20’s, « korenizatsia » : enracinement des différentes nationalités.
Développement qui explique ce qui s’est passé à la fin de l’URSS. Découpage territorial qui
n’a jamais été remis en cause. Cette politique va disparaître très largement par la suite. Mise
au pas dans les 30’s.
Que ce soit pour les soviétiques ou pour les Alliés, beaucoup d’effets ont
largement échappé aux initiateurs. De plus, cette création de république fédérées et autonomes
censée faire disparaître le sentiment national va en fait le créer ou le renforcer.
Le système politique stalinien
Régime en guerre contre son peuple.
1. D’une dictature d’un parti à celle d’un homme
A. Le fonctionnement du parti
Pour avoir le pouvoir, il faut être Secrétaire Général. Généralement, une seule liste
de candidats aux élections. Touts les structures ne sont pas permanentes, elles se réunissent en
plenum.
Structures permanentes : comités, bureau politique, secrétariat qui gèrent le
quotidien. Développement des nominations entre comités. Le secrétariat est chargé de
s’occuper des comités et du BP. Staline devient SG en 22 car il est considéré comme un très
bon administrateur. Le secrétariat n’était pas important pour les bolcheviks. Tous les chefs
étaient au BP.
Staline est très conscient de la capacité à contrôler par le biais administratif. Outils
de Staline (outre le téléphone) : interdiction des fractions à l’intérieur du parti, nomenklatura,
Guépéou, manipulation politique.
Jusqu’en 34, Staline ne peut pas toucher un cheveu des bolcheviks, il peut juste
les arrêter et les exiler.
Staline a compris la dualité du pouvoir : Etat / Parti : il réussit à unifier les deux. Il
écrit une lettre à Molotov en 1930 où il dit qu’il faut évincer l’actuel président du conseil des
commissaires du peuple, Rykov, et le remplacer par Molotov.
B. Qui est Staline ? Un héritier, pas un chef charismatique
Né en 1879 en Géorgie. Vrai nom : Josef Djougatchvili. Il devient membre du BP
en 1912. Il n’a jamais quitté l’empire russe. Selon Trotski, il est « la plus éminente médiocrité
du parti ». Ce n’est pas un théoricien. « Animal politique ».
Staline se présente comme l’héritier de Lénine. Inventeur du léninisme.
Personnage incontournable de l’enterrement qu’il organise, propose le mausolée… Ecrit « les
bases du léninisme », référence culte des 20’s. Promotion Lénine. L’héritage de Lénine est la
légitimité principale de Staline mais c’est également le garant de l’unité du parti.
C. Staline constructeur du socialisme et d’un nouveau parti
Grande idée des 20’s : construction du socialisme dans un seul pays. A partir de
28, idée de réaliser rapidement le socialisme sur une base d’abolition totale de la propriété
privée et l’étatisation totale.
Staline devient le fondateur du socialisme réel en URSS. En 29, il a 50 ans. C’est
le début du culte de la personnalité. Caractère fondateur qui apparaît surtout en 36 avec une
nouvelle constitution censée entériner la réussite du grand tournant avec la disparition des
mauvaises classes. Régime le plus démocratique du monde : au même moment, début des
purges et Grande Terreur.
En 38, Staline écrit un « précis d’histoire du PC » où on a une sorte de
réconciliation entre le tsarisme et le communisme afin d’inscrire la révolution dans l’histoire.
Reconstruction du parti à la faveur des purges qui se développent après décembre
34 et l’assassinat de Kirov. En 39, on a un parti totalement stalinien. Grande place faite aux
praktiki qui font leurs études dans les universités ouvrières et aux stakhanovs.
Couches sociales favorables au régime de Staline : communistes, ouvriers et
kolkhoziens de choc, nouveaux promus. Kotkin parle d’une « civilisation stalinienne ». Une
bonne partie des jeunes était partie prenante de l’ère stalinienne. Komsomol. Elan de
construction socialiste.
2. Pouvoir et société : un Etat de guerre
Projet ultravolontariste de Staline de modeler la société qui résiste. Mais capacité
à utiliser le populisme pour réprimer l’URSS du milieu.
A. La guerre contre les paysans
Collectivisation qui commence véritablement fin 29. Mot d’ordre :
dékoulakisation menée par Molotov. On vise les paysans riches pour les empêcher de nuire. 3
à 5% de la population paysanne. Koulaks clairement contre révolutionnaires qui sont déportés
(environ 60 000 familles) ; koulaks potentiellement révolutionnaires déportés dans les
colonies spéciales et les koulaks loyaux qui sont mis à l’écart sur des terres à bonifier.
Dépassement du quota, excès de zèle, économie de plan, règlement de comptes…
Déportation abandon.
Début de la résistance. En 30, 14 000 révoltes impliquant 2,5 millions de paysans.
Mars : décollectivisation. La deuxième phase de collectivisation commence à l’automne.
Révoltes paysannes qui entraînent la mort des fonctionnaires. Répression très forte avec
police politique et une partie de l’armée. 20 000 condamnations à mort par les juridictions
d’exception de la Guépéou.
Révoltes principalement en Ukraine, dans les terres noires et au Caucase du Nord.
Guerre qui débouche sur une famine en 33. 6 millions de morts, en particulier en Ukraine, au
Kazakhstan et au Caucase du Nord. Pour Staline, il s’agit d’une trahison de la part des
paysans. Famine cachée, mise en place d’une frontière fermée.
B. La pénalisation globale des rapports sociaux
Passeportisation de la population citadine lancée en décembre 32. But : contrôler
la croissance des villes dans un contexte d’exode rural, de nomadisation… Entre 26 et39,
arrivée de 30 millions de personnes dans les villes. Autre but : contrôler et ficher la population
citadine. Tout habitant des villes doit recevoir un passeport avec l’origine sociale, le travail et
la nationalité mentionnés. On ne donne de passeports qu’aux gens qui sont loyaux et dont
l’origine sociale le permet. Bande d’orphelins dans les rues, au NKVD… 7 juillet 32, loi des
épis : protection de la propriété socialiste : répression des petits vols sous peine de mort ou
déportation. Un citoyen sur 6 a été au goulag.
C. Le développement du goulag
Créé en avril 30. Les camps existaient avant, mais pas l’administration. A ce
moment-là, 140 000 détenus. En juin 29, on décide de décongestionner les prisons : tous les
condamnés de plus de 3 ans étaient envoyés aux camps de travail. Début 41 : 1,93 million de
prisonniers. 700 000 étaient arrivés en 37. Les colons spéciaux sont assignés à résidence en
famille dans des zones reculées de l’URSS. Limites poreuses entre les deux types de camps.
Grand turnover au goulag : en général, les détenus restent 3 ans puis vont dans les colonies
spéciales. Enormément de délation. En 50, il y a 2,5 millions de colons et 2,5 millions de
détenus. Forte mortalité.
3. Resituer la grande terreur
A. La terreur contre les cadres du régime
Trois grands procès de Moscou entre août 36 et mars 38. Août 36 : procès des
vieux bolcheviks (Zinoviev, Kamenev) de lutte contre le trotskisme. Accusation d’hitlerotrotskisme. Février 37 : procès contre les cadres de l’économie (Piatakov) contre le sabotage.
Mars 38 : procès contre Boukharine et d’autres pour hitlero-trotskisme et terrorisme. Les
procès sont publics, les journalistes du monde entier sont invités. La plupart des accusés
avouent leurs « crimes ».
Méthode du NKVD : torture, perte de notion du temps et de l’espace, menaces sur
la famille… Les journalistes et la ligue des DH croient aux aveux. « Procès écrans ».
B. La spécificité de la Ejovlina
Ejov : chef du NKVD de 36 à 38. Plan de répression centralisé, planifié. En
décembre 34, l’assassinat de Kirov plonge Staline dans la paranoïa : mise en place d’un
arsenal juridique qui limite au maximum les procès, ordres opérationnels de répression…
Victimes : ex-koulaks, cadres, marginaux… Existence de listes nominatives.
C. Le bilan de la grande terreur
La lutte contre les cadres a fragilisé l’Etat. Entre 36 et 39, 70% des gens arrêtés
ont fait des études supérieures. Entourage immédiat de Staline directement touché. Les
derniers membres du CC et du BP ont été élus lors du XVII° congrès de février 34.
Enormément d’arrestations au niveau local : 90% du soviet de Leningrad, 3
survivants du PC ukrainien sur 200.
Deux purges d’Etat : diplomates dont 60% sont arrêtés et exécutés jusqu’en 37
(irrationalité du choix des victimes) et militaires avec l’arrestation des grands de l’Armée
rouge en juin 37 (Toukhatchevski)…
Purges également des élites nationales et des intellectuels. Paralysie de la
diplomatie, incompétence de l’armée rouge… pour Staline, la compétence n’est pas
l’essentiel, c’est la loyauté qui prime. Peur de la 5° colonne.
Le décalage entre le discours et la réalité est frappant. Les citoyens ont peur des
autres, pas du régime.
L’URSS et le monde : d’un phare révolutionnaire à un statut de
grande puissance (17-41)
Spécificité de la politique extérieure : dualiste : d’un côté les relations
diplomatiques de l’ordre de l’Etat, de l’autre le parti qui se veut le fer de lance d’une
révolution mondiale.
Le PC vise à développer chez ses voisins des situations de crie et d’instabilité
pour amener la révolution.
Synthèse stalinienne : le socialisme dans un seul pays. Volonté de construction
d’une puissance interne. Staline n’a pas une vision internationaliste mais étatique de
l’expansion révolutionnaire.
1. Les fondements de la politique internationale de l’URSS
A. Un réseau de PC à l’étranger
En mars 19, Lénine fonde l’Internationale Communiste (ou Komintern ou III°
Internationale) face à la faillite de la II° Internationale. Patriotisme et non internationalisme.
Réunion d’un congrès en pleine guerre civile.
Le véritable moment fondateur est l’été 20 pendant le deuxième congrès qui
structure et développe les particularités de l’Internationale. Etat-major de la révolution.
Les délégués des différents pays rentrent chez eux et proposent aux partis de
rentrer dans l’Internationale. France : congrès de Tours en décembre 20. Souvarine et Cachin :
oui. Blum : non. En 21, la plupart des socialistes reviennent au SFIO.
24 : bolchevisation des PC ; exclusion des dirigeants de la première période.
28 : VI° congrès. Mise en avant du devoir de défense inconditionnelle de l’URSS.
Mise en place de la lutte contre le social-fascisme. Les socialistes sont plus dangereux que les
fascistes : plus d’alliance avec les réformistes.
Chef du Komintern en 27 : Zinoviev ; en 28 : Boukharine ; en 35 : Dimitrov
(Bulgare).
Tournant de 34-35 symbolisé par le VII° congrès en août 35. Tactique des fronts
populaires rassemblés pour une mobilisation anti-fasciste. Unité des forces socialistes contre
le fascisme.
Enormément d’associations autour des PC : on laisse le parti dans l’ombre et on
met en avant de grands noms. « Les amis de l’union soviétique », « Le comité AmsterdamPlayel »…Ces associations vivent de l’argent de Moscou.
Stratégie envers les PC en Asie différente : émancipation coloniale, donc alliances
avec les bourgeoisies nationales. 1920 : congrès des peuples d’orient à Bakou.
B. Une diplomatie sur la défensive
L’URSS n’est pas une grande puissance avant 45. Puissance ostracisée par les
autres. Soit elle fait peur, soit on la regarde comme la vieille Russie d’antan. Les Bolcheviks
vont jouer des deux.
Moyens utilisés pour s’affirmer : le développement des commissariats du peuple
aux affaires étrangères présidé d’abord par Trotski, vite remplacé par Tchitcherine puis par
Litvinov ; en 39, Molotov devient MAE.
Signature en 22 avec l’Allemagne du traité de Rapallo qui scelle les relations entre
les deux Etats.
En 24, reconnaissance de l’URSS par la Grande Bretagne puis par la France.
Reconnaissance des Etats-Unis en 33 et de la Petite Entente en 34.
L’Allemagne et l’URSS sont les bannis du traité de Versailles. L’Allemagne
trouve la possibilité de réarmer et de créer des camps d’entraînement sur le sol russe et les
Russes bénéficient des progrès allemands. Avantages économiques complémentaires ; haine
commune de la Pologne ; échange de renseignements.
Litvinov joue un rôle important dès 26, même s’il ne devient MAE qu’en 30.
Utilisation des contradictions anti-impérialistes : il faut éviter la construction d’un bloc uni
anti-soviétique : soutien du révisionnisme allemand puis du rapprochement avec la France et
la Grande Bretagne contre Hitler.
Lutte pour la paix et le désarmement. A côté de cet outil diplomatique, services
clandestins : renseignements de l’armée rouge, du NKVD…
C. L’outil du commerce extérieur
Confrontations entre le commerce extérieur (le plus important est de faire des
bonnes affaires) et la diplomatie (on ne peut pas commercer avec des Etats qui ne nous
reconnaissent pas).
Entre 28 et 31, pic commercial entre les Etats-Unis et l’US, alors que la
reconnaissance ne vient qu’en 34.
Le commerce extérieur se développe profondément au moment du plan
quinquennal. Deux grands partenaires : la GB et l’Allemagne.
Le but ultime de l’URSS est tout de même l’autosuffisance.
2. Un nouveau statut pur l’URSS à la veille de la guerre
A. Les gains de la politique de Lidvinov (juillet 30 – mai 39)
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