2 CANCUN OU LA COP 16 (Convention des Parties (des Etats) à sa 16è conférence) Rapport Présenté par Alfred Sawadogo, PCA SOS Sahel International BKF Président de la Coalition des OSC sur le Changement Climatique. (Tél. 70 78 27 17 ; Mail : [email protected]) 1. Le voyage : du lundi 29 novembre au mercredi 2 décembre 2010. C’est le temps qu’il a fallu pour joindre Cancun au Mexique, avec trois visas à réunir : celui des Etats-Unis, de la France et enfin du Mexique pris à Paris sur le chemin de Cancun. L’itinéraire Ouagadougou- Paris- New York – Cancun est il faut le dire, physiquement éprouvant. Après une journée entière à dormir à l’arrivée, le moral est bon pour attaquer les travaux de la conférence commencée depuis le 29 novembre 2010. 2. Le site de la conférence : Ceux qui ont pris part à la conférence de Copenhague peuvent avoir une idée sur le site d’un tel évènement. Contrairement à celui de Copenhague qui se déroulait en un seul endroit gigantesque pour contenir jusqu’à 45.000 participants, celui de Cancun pêche à ce niveau, car au lieu d’un site, c’est plusieurs sites assez éloignés les uns des autres avec donc des déplacements incessants lourds à gérer et des pertes de temps. Des dizaines de bus ont été mobilisés à cet effet et, au vu de la disponibilité sans reproche des Mexicains, leur sens de l’accueil de l’autre, les inconvénients des déplacements ont été compensés par l’efficacité de la logistique. Le Mexique : un état fédéral de 32 Etats au sud des Etats-Unis d’Amérique, peuplé de 112 millions d’habitants ; 50 habitants/km2 ; Espérance de vie : 72 ans pour les hommes, 75 ans pour les femmes ; 75% de la population est urbaine ; 90% de la population est alphabétisée; langue officielle, l’Espagnol, mais la population parle aussi 46 autres langues. La capitale, Mexico, 22 millions d’habitants, 5 millions de voitures dans les rues chaque jour sur les 25 millions que compte le pays. C’est la ville la plus polluée du monde. L’homme le plus riche du monde est Mexicain, M. Carlos Slim, qui contrôle toute la téléphonie de l’Amérique Latine. L’Université Nationale du Mexique compte 500 mille étudiants et fait partie des 100 meilleures universités dans le monde ; 22 3 millions de Mexicains vivent aux Etats-Unis et par la force des choses, 5 millions de femmes sont des chefs de ménage au Mexique. N.B. Cancun, 600.000 habitants, est une station balnéaire du Mexique. La température moyenne est de 25°. Les touristes américains et européens s’y bousculent. Les hôtels se dressent à perte de vue, offrant des standings pour toutes les bourses. Si moi je paye 45 dollars US la nuit, il en est qui payent 500 ou 1000. Le dollar américain est autant utilisé que la monnaie locale qui est le peso ; 1 dollar fait 11 pesos : monnaie donc forte et stable à comparer avec le F CFA qui se change entre 400 et 500 F le dollar. Les mets sont très relevés. Les Mexicains vendent beaucoup de hamacs, mais ont peu de succès de les vendre aux Africains, le hamac étant presque inconnu dans les familles africaines. Et pour ceux qui connaissent ce « lit qui balance » entre deux piquets, le fait d’avoir été utilisé par les colons avec des porteurs en travaux forcés, a fait de l’objet un phénomène de rejet social depuis plus d’un demi- siècle. 3. La délégation du Burkina : Les membres de la délégation du Burkina, une dizaine, ont connu un certain flottement au début, n’ayant pas eu une rencontre pour fixer des objectifs généraux. Dès lors, chacun prenait part aux rencontres selon les thèmes de son intérêt propre. Je constate qu’au bout du compte, je suis le seul représentant de la société civile du Burkina et je mesure combien l’UICN Burkina, qui a pris en charge mon billet de voyage et les frais de mon séjour, a consenti un gros engagement dans son budget. Je signale que le Ministre de l’Environnement et du Cadre de Vie du Burkina est arrivé à Cancun le 4 décembre 2010. 4. Les thèmes récurrents de la conférence : - Contenir la hausse de la température mondiale à moins de 2°, l’idéal étant de 1,5° à ne pas dépasser. Or, des études tendent à montrer que si des mesures énergiques ne sont pas prises, l’augmentation de la température serait de 4° à 5° d’ici 2050 ! ! Dans ces conditions, les pays insulaires (les iles) seront menacés dans leur survie, les glaciers continuant de fondre et les eaux des mers continuant à monter. (Il vous souviendra qu’en 2009 lors de la COP 15 de Copenhague, aucun accord n’a été obtenu, les pays industrialisés ayant refusé de prendre tout engagement formel de réduire leur émission de l’oxyde de 4 carbone (CO2)). La question reste donc entière, et comme les pays insulaires, l’Afrique en souffrira terriblement si ces températures connaissent les augmentations comme le prédisent les scientifiques si rien n’est fait pour amoindrir les émissions du CO2 à travers les productions industrielles utilisatrices de charbon. - Dégager des ressources substantielles pour les activités d’adaptation au changement climatique comme celles déjà opérationnelles pour les activités de mitigation. - Améliorer la participation des ONG dans les prises de décisions en leur accordant un temps de parole en temps réel au moment des conférences pour valoriser leurs points de vue sur les diverses questions. Enfin, la question du reboisement des montagnes est à l’ordre du jour. Je dirai enfin ! Car depuis 2007, la question du reboisement des montagnes pour recréer la biodiversité propre à ces milieux me préoccupe et m’a même poussé à l’élaboration d’un projet intitulé « Reverdissement des collines de Tikaré pour la renaissance d’une biodiversité ». Cependant, aucun partenaire ne s’y est encore intéressé. On parle du Cap Vert qui a réussi le reboisement de ses collines par le « cash for work ». C’est donc une question sur laquelle il convient d’accorder toute l’attention nécessaire. 5. Les activités quotidiennes. Il convient de montrer comment une journée de la conférence sur le climat est organisée : Les hôtels où sont logés les participants, environ 15.000 venus de près de 200 pays, sont à une vingtaine de km des centres des conférences. Chaque matin, chaque conférencier doit prendre un taxi pour arriver à une place dite « America Palace », vers 7h30. Là, des dizaines de bus assurent le transport gratuit jusqu’au centre principal. C’est là où le programme du jour (ou daily programme) est distribué. Puis, au vu des dizaines de conférences et de rencontres du jour, chacun choisit de prendre part à telles ou telles rencontres. Attention ! Aucune traduction en Français n’est faite et ceux qui ne comprennent pas l’Anglais sont véritablement des « analphabètes ». L’orgueil de la maîtrise du Français n’est que vanité. Les Mexicains parlent l’Espagnol, mais tous parlent l’Anglais en raison de la forte influence des Etats-Unis. D’ailleurs, les frais d’hôtel sont réglés en dollars US. Donc, les membres de chaque délégation s’organisent chaque jour pour prendre part à 5 un grand nombre possible de rencontres. Indépendamment de ces rencontres officielles, certaines organisations, surtout celles de la société civile, ou certains pays, organisent ce qu’on appelle des « évènements parallèles ». Dans ce cas, des faire part sont distribués aux participants à la manière des tracts, et ça marche toujours. Pendant ce temps, les délégués commis aux négociations sont cachés quelque part avec les hautes autorités du pays hôte pour les négociations. Ils reviennent toujours les traits tirés pour faire le point aux différents groupes qui les ont mandatés et retournent autour de la table des négociations, incertains d’obtenir des avancées significatives. Il s’agit des délégués de l’Afrique, des pays industrialisés dont l’UE, des Etats-Unis, des pays insulaires, des 77 + la Chine (les 77 comprennent les pays africains et des pays de l’Asie). En effet, il faut comprendre que 3 (trois) groupes constituent les cibles directement menacés à court terme par le changement climatique : il s’agit du groupe Afrique avec ses 53 pays ; le groupe des pays insulaires (les habitants des îles) et enfin les 77 + la Chine. Pour ma part, en tant que membre unique de ma propre délégation dont les charges de mon voyage et de mon séjour ont été assurées par UICN Burkina, je choisis de pouvoir rencontrer les autres membres des sociétés civiles, peu nombreux, et d’assister aux autres rencontres. Il faut reconnaître l’absence de divergences de vue et d’objectifs entre les sociétés civiles et les gouvernements africains dans cette problématique de changement climatique. Donc tous épousent les mêmes causes. Les sociétés civiles des pays industrialisés se battent contre le manque d’engagement de leurs gouvernements en soutien à la cause des plus faibles. La journée d’un participant commence vers 7h et finit vers 22h. Ce qu’il convient de savoir : Le sommet de Copenhague en décembre 2009 n’a pas abouti à un accord contraignant sur la réduction des gaz à effet de serre après la fin de la première période du Protocole de Kyoto en 2012. C’est ce qui a fait dire que le sommet avait été un échec. Cancun (Mexique) est la suite de Copenhague, du 29 novembre au 10 décembre 2010. La conférence se tient sous la responsabilité morale de la « Convention Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) dirigée par une Secrétaire Exécutive (Mme Christina Figueres de nationalité Costa Rica). C’est parce que les négociations se passent sous les auspices des Nations Unies que son Secrétaire Général, M. Banki- moon, arrive le 7 décembre pour adresser un discours à la conférence. Cependant, la conférence de 6 Cancun est présidée par la Ministre des Affaires Etrangères du Mexique, Mme Espinosa. La question de l’atténuation de l’émission des gaz à effet de serre, et le principal gaz émis est le CO2. Et le CO2 est produit par le fonctionnement des usines alimentées par le charbon. Les deux principaux pollueurs du monde : les Etats-Unis et la Chine, mais aussi les pays de l’UE, le Brésil, l’Inde, le Japon. Toute la difficulté réside dans le fait d’avoir un accord contraignant après 2012 indiquant pour chaque pays développé le pourcentage de réduction des émissions du CO2 et pour chaque pays en développement un engagement volontaire de réduction du même gaz. Les négociations sont complexes, les intérêts se contredisant, les pays industrialisés exigeant que la Chine, le Brésil et l’Inde qui sont des pays émergents, réduisent leurs émissions respectives du CO2. Ceux-ci rétorquent que de telles mesures freineraient leur essor industriel. Et, pire, les Etats-Unis qui sont le premier pollueur du monde ne peuvent même plus prendre des engagements de réduction du CO2, ni prendre des engagements de contribution financière à cause du blocage du Sénat américain majoritaire qui est ouvertement hostile à cette problématique. Et le Président OBAMA est impuissant face à cet état de fait. Au niveau d’un pays, la réduction des émissions des gaz à effet de serre, le CO2 peut s’opérer de plusieurs façons : changer de mode production industrielle en utilisant des énergies propres qui ne polluent pas. Et atténuer les émissions du CO2 émanant des forêts. C’est là qu’intervient le mécanisme « REED » ou Réduction des Emissions liées à la déforestation et à la dégradation des Forêts ». Il sera nécessaire de mener des formations spécifiques à l’attention des organisations membres de la coalition sur le changement climatique pour mieux maîtriser ces importants différents mécanismes. La question de l’adaptation au changement climatique : La question de l’adaptation est la principale ligne de force que les pays africains défendent. Il y a la question de l’atténuation qui engage des mécanismes un peu compliqués au niveau de chaque pays. Par contre la question de l’adaptation est plus facile à maîtriser, mais il est nécessaire de disposer d’importantes ressources financières. Les activités d’adaptation au changement climatique sont très nombreuses, plus faciles à mener avec les 7 producteurs et diffusables à grande échelle par les acteurs de la société civile. Par exemple au Burkina, le reboisement systématique, la récupération des terres en glacis, la recherche de nouvelles semences à cycle adapté et bientôt le traitement spécifique des collines pour qu’elles recouvrent leur biodiversité, la stabulation du bétail, constituent autant d’activités d’adaptations plus ou moins déjà mises en œuvre et qui doivent se poursuivre. Les pays africains négocient donc toutes griffes dehors pour que les pays pollueurs mettent beaucoup de ressources à court et long terme pour la bonne fin de ces activités. En principe d’ici 2012, 10 milliards de dollars US par an, puis 100 milliards par an après 2012. Les propositions des pays développés sont en deçà de ces objectifs considérés comme des minima. La journée du 2 décembre 2010 : jour de mon arrivée à Cancun vers 4h du matin. Je me suis présenté au centre des conférences vers 16h pour les inscriptions d’usage, le badge étant obligatoire. Et passer dans les nombreux stands pour m’informer sur les milliers d’initiatives qui se prennent de par le monde pour lutter contre le réchauffement climatique. Les stands sont surtout le fait des pays industrialisés et des pays d’Asie, très peu de l’Afrique. La journée du 3 décembre 2010 : La rencontre phare a été celle du groupe Afrique présidée par les Ministres de l’Environnement de la RDC et de l’Algérie en présence du Ministre Gambien. L’objet d’une telle rencontre est de faire le point sur l’avancement des négociations sur les deux points essentiels : Le premier point : le Protocole de Kyoto en abrégé KP. Signé en 2008 pour 4 ans, ce document juridique engage les pays signataires à diminuer progressivement leur émission de CO2 dans des proportions indiquées au regard de chaque pays. Le problème sur cette question est que le Japon où est signé ledit protocole, a, dans un discours à Cancun, indiqué son désengagement vis-à vis du protocole à son expiration en 2012. Or, il était indiqué qu’après 2012, une autre période du protocole devait courir comportant les mêmes engagements contraignants. Il est fort probable qu’avec le désengagement du Japon, d’autres pays suivraient cet exemple. Il est à signaler que les Etats-Unis n’ont pas signé ce protocole qui ne les engage pas. L’objectif de ce protocole est d’amener tous les pays à contenir la hausse des températures à 2° ou encore mieux à 1,5° d’ici 2050. Or, les scientifiques pensent de 4 à 5° d’augmentation si rien n’est fait. 8 Le deuxième point est le financement des activités de mitigation des effets et de l’adaptation au changement climatique. Là encore comme à Copenhague, rien ne semble indiquer que des engagements formels seront pris : il est prévu en principe 10 milliards de dollars par an jusqu’en 2012 et de 100 milliards par an après 2012. Ces fonds devraient être générés sur la base des émissions du CO2 du pays qui le produit. « Les pollueurs payent ce qu’ils ont pollué ». Mais là encore, les pays industrialisés ne s’engagent pas. Journée du 4 décembre 2010 : A 9h, rencontre avec le Coordonateur de « Pan African Climate Justice Alliance ». C’est une coalition panafricaine sur le changement climatique basée à Nairobi au Kenya et qui a pour vocation de fédérer toutes les coalitions présentes dans les différents pays. Ainsi, j’ai pu rentrer en possession des textes d’adhésion qui devraient permettre à la nouvelle coalition née au Burkina le 7 septembre 2010 d’être bientôt membre de cette importante structure panafricaine. Dans le cadre de son action de pression et de lobbying pour soutenir les négociations dans un sens positif, les membres de la société civile africaine se rencontrent tous les jours à 9h au stand de l’Alliance panafricaine pour des concertations en vu de prendre des actions. Ainsi, une première lettre ouverte adressée au Japon dénonce « la fuite en avant » du Japon en renonçant à des engagements après la première période du Protocole de Kyoto qui s’achève en 2012. De même, une lettre ouverte a été adressée à la Présidente de la conférence pour dénoncer le manque de transparence dans les étapes des négociations. Ce n’est pas d’accords politiques qu’il s’ agit, mais d’accords sur le changement climatique qui concerne tout le monde. Il faut signaler que contrairement à Copenhague, les membres des sociétés civiles africaines n’ont pu être nombreux à Cancun en raison des coûts élevés du voyage et du séjour. Leur présence n’est donc pas d’une grande visibilité. A 13h comme tous les jours, le groupe Afrique s’est à nouveau réuni avec un plus grand nombre de ministres de l’environnement : RDC, Algérie (qui assurent la présidence), puis du Burkina, de la Namibie, de la Gambie, du Togo. Le point a été fait par les négociateurs. Trois cas de figure sont possibles au terme des négociations : Scénario 1 : un protocole formel sur Kyoto et un informel sur les financements ; 9 Scénario 2 : Il n’y a pas de documents juridiques contraignants, mais des arrangements sur la base de décisions consensuelles qui permettent de travailler au niveau de chaque pays. Scénario 3 : aucun arrangement n’intervient et on reporte le tout à plus tard (a Durban en Afrique du Sud en 2011. Le groupe africain marque son option pour qu’il se dégage des financements pour les activités d’adaptation au changement climatique, au transfert des technologies d’adaptation, à l’amélioration de la qualité de la vie des populations alors que les pays industrialisés marquent leur préférence pour les activités de réduction des émissions du CO2 dans le cadre de la gestion des forêts. Journée du dimanche 5 décembre : C’est la 4è journée mondiale des forêts, célébrée solennellement par la conférence. En effet, le Président des EtatsUnis du Mexique a présidé en personne la cérémonie où les plus hautes sommités des questions sur les forêts ont donné leur point de vue. Le thème a été : « Lier la question des forêts au changement climatique. Il est temps d’agir ». Ont successivement pris la parole, M. le Secrétaire d’Etat à l’Environnement et des Ressources Naturelles, M. Juan Raphael Elvira Quesada, M. Eduarto Rojas-Briales, FAO, Mme Frances Seymour, Directeur Général de CIFOR qui est le plus grand centre international de recherche sur les forêts dont le siège est à Mexico (cela reste à être vérifié). Enfin le Président du Mexique M. Filipe Calderon. Il a délivré un discours de militant convaincu pour la forêt ; il consacre 620 millions de dollars US chaque année à la préservation des forêts du Mexique. Il a dit en substance que chaque Mexicain plante un arbre même à l’occasion d’un « barbecue », une fête entre amis. (Comme cela se faisait sous le Conseil National de la Révolution, du temps du Président Thomas Sankara). A la fin de la cérémonie, le président a serré les mains. Et j’ai serré chaleureusement sa main. J’ai donc serré la main du président du Mexique ! Qui l’eut cru ! Puis la journée s’est poursuivie avec les exposés. En effet, le Ministre de l’Environnement et du Cadre de Vie du Burkina M. Salif Sawadogo, a participé à un panel aux côtés de la Banque Mondiale sur les problèmes des forêts. Le Ministre a bossé un aperçu sur les questions des forêts dans un pays du Sahel comme le Burkina et a apprécié que la Banque Mondiale 10 montre de l’intérêt pour accompagner le Burkina dans sa quête pour renforcer le tissu forestier du pays. Une mission de la Banque Mondiale se rendra au Pays en juin pour faire suite à une première mission dans le cadre de l’élaboration du PIF ou Programme intérimaire Forestier. Au terme du Panel, j’ai pris la parole pour citer un certain nombre d’activités rentrant dans le cadre des adaptations, mais qui manquent de ressources financières. Or, chaque conférence sur le climat est une espérance de mobilisation des ressources, mais une espérance chaque fois déçue. Pourquoi cela ? En fin de soirée, le Ministre de l’Environnement et du Cadre de Vie M. Salif Sawadogo, a convié tous les membres de la délégation du Burkina à un diner où le négociateur et le point focal ont pu faire le point sur l’état des négociations. A cette occasion, le ministre a prodigué ses encouragements aux membres présents à Cancun : Il s’agit de 2 Députés, d’un cadre du Ministère de l’Economie et des Finances, du ministère de la Santé, du CNREST, 3 cadres négociateurs du Ministère de l’environnement et de moimême, soit une douzaine de membres. La Député (Mme Korsaga) est rentrée au pays depuis ce matin 5 décembre. Journée du lundi 6 décembre 2010 : Rencontre du Groupe Afrique sous la présidence du Président de la Commission de l’Union Africaine, M. Jean Ping. Celui-ci a salué les négociateurs et encouragé la cohésion entre Africains afin de faire bloc pour faciliter les prises de décisions. L’objet de la présente rencontre est de faire le point et donné les tendances sur la situation actuelle des négociations. Le protocole de Kyoto a été adopté en 1997 ; après la ratification qui prend du temps, le protocole est rentré en vigueur en 2005. Une conférence de Montréal au Canada adopte la période de validité du protocole de 2005 à 2012. Après cette période, les Etats se mettront d’accord sur les modalités de poursuites du protocole. Lors de l’ouverture de la présente conférence, le Japon refuse de s’engager dans une seconde période après 2012, quoique soient les conditions. Cette position est contraire aux intérêts des pays les moins avancés, notamment des pays d’Afrique, et cette position favorise la démobilisation des autres pays développés grands pollueurs de la planète par leurs industries. Cependant, la Norvège marque sa position en faveur d’une 2è période. Du protocole. Par contre, l’Australie et la Nouvelle Zélande sont 11 en faveur mais d’un traité unique et pour un nouvel engagement. Il faut rappeler qu’il existe deux documents : le protocole de Kyoto et la Convention Cadre des Nations Unies Sur le Changement Climatique. Le groupe des 77 et la Chine sont en faveur de deux documents distincts. Le groupe Afrique, naturellement, est pour le principe de deux documents distincts et pour une nouvelle période après 2012. Le groupe africain souhaite : réduction de 40% des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2020 et 50% d’ici 2050. Pour les pays favorables à la reconduction du protocole de Kyoto après 2012, certains penchent pour 5 ans, d’autre 8. L’année de référence de la prise en compte pour le calcul des masses de pollution par pays est 1990, acceptée par tous. Rentrée en vigueur de cette 2é période : 31 décembre 2012, pour éviter un flottement entre deux accords toujours néfaste. Rencontre du Président du Mexique avec la Société Civile, de 16h à 18h 30 : salle comble. L’ouverture commence par l’intervention du représentant de l’OXFAM Mexique, M. Carlos Zarco Mera, qui a plaidé pour la création d’un « Fond Vert » pour le financement des activités d’adaptation au changement climatique. Chaleureusement ovationné. Puis le Secrétaire Général de la Confédération des Syndicats du Mexique, à la fois Député Fédéral. Il y est aussi allé de sa ferveur pour la lutte contre le changement climatique. Puis un spécialiste du développement des administrations, qui prône la diffusion à grande échelle des thèmes sur le changement climatique auprès des 6 ou 7 milliards d’habitants de la planète. Puis enfin le Président du Mexique, qui a salué la présence des représentants de la société civile et des peuples autochtones. Les ONG a-t-il lancé sont plus crédibles auprès des communautés de base que le sont les gouvernements. Votre rôle est donc essentiel dans la problématique du changement climatique auprès des populations. Puis il a laissé la parole à l’assistance. Ce sont surtout les représentants des ONG de l’Amérique latine qui ont pris la parole pour plaider la cause des peuples autochtones inquiets de la destruction des forêts, détruisant à la fois leur culture, leur mode de vie, leur existence tout simplement. Le président assure qu’il en est conscient. C’est pourquoi de 30 millions de dollars pour les forêts au moment de sa prise de fonction il 8 ans, le budget est maintenant de 650 millions de dollars. En outre, il voudrait mener la même politique sociale que le président Lulla au Brésil. Au lieu de 12 subventionner les hydrocarbures, il va distribuer des subsides mensuels au moins à 30.000 familles les plus pauvres. Il a souligné qu’il existe au Mexique plus de 5 millions de ménages dont les chefs de familles sont des femmes, et il est sensible sur cette question. Les représentants des associations venus d’Afrique, sans doute peu habitués à dialoguer avec les chefs d’Etat, n’ont pas pris la parole. Journée du 7 décembre 2012 : Ce qu’il faut retenir de la rencontre du groupe Afrique : il y a peu de chance que des accords formels sortent de Cancun. Au meilleur des cas, le principe d’un « Fond Vert » sera retenu assorti de la constitution d’un Comité de gestion. Les Africains auraient souhaité que ce fonds soit spécialement localisé en Afrique ; la suite du protocole de Kyoto sera retenue pour une signature formelle le 31 décembre 2012 à Durban ; La durée de la période sera comprise entre 5 et 8 ans. Les pays africains et en général les 77 + la Chine jusque là avaient un choix volontaire dans la réduction des émissions du CO2. Les pays développés souhaitent que la réduction du CO2 soit contraignante et que les fonds verts soient en proportion de ces réductions. Or, ce fonds vert (estimé à 30 milliards de dollars) est institué en réparation des pollutions déjà commises. Et, avec la présence de la Chine, du Brésil et de l’Inde et de l’Afrique du Sud parmi les 77 + la Chine qui sont de bons pollueurs par leurs industries à combustion de charbon, fait que les pays développés veulent exiger du groupe de ces pays des réductions contraignantes de leurs émissions de CO2. Voilà toute l’ambigüité de la situation. Dans l’après midi, le Secrétaire Général des Nations Unies M. Banki-moon , le Président du Mexique et les chefs d’Etat de la Sous Région ont inauguré le démarrage des travaux du segment de haut niveau des Parties (des gouvernements). Les négociations sont donc entrées dans leur phase « politique », les experts ayant élaboré les propositions selon l’idéal de chaque groupe : le groupe africain, le groupe des 77 + la Chine, le groupe des pays insulaires dont le chef de file est le Tuvalu, le groupe des pays développés dont les Etats-Unis ne figurant dans aucun protocole et où l’UE est la locomotive. Les Nations Unies ne jouent qu’un rôle de facilitateur mais souhaitent que les points de vue des pays les moins avancés soient pris en compte dans les conclusions. 13 Journée du mercredi 8 décembre 2010 : Session sur Information et Technologies de Communication : Environnement et Changement Climatique, organisée par l’Union Internationale de Télécommunication (ITU) à l’initiative du Ghana : Les exposés ont été délivrés par les spécialistes de ITU qui est une organisation des Nations Unies sur les télécommunications ; de même, une représentante de la marque « Black Berry » des téléphones a exposé les efforts déployés pour que les appareils consomment le moins d’énergie possible. Les participants, essentiellement du Nigeria et du Ghana, ont surtout attiré l’attention des experts sur le coût de plus en plus élevé des technologies de communication et de ce fait, limite leur utilisation et donc, ne peuvent jouer un rôle déterminant dans les questions de changement climatique, en tout cas pas au niveau populaire. De même, le changement rapide de modèles nouveaux et fantaisistes engendre des gaspillages que les pays africains ne peuvent supporter. Plantation d’arbres : « l’association L’arbre pour la planète, les arbres pour la justice sur le climat », une association mexicaine qui mobilise les jeunes des écoles primaires et secondaires, a initié une cérémonie de plantation d’arbres dans la cour de l’hôtel Moon Palace. Chacun des 200 pays présents à la conférence doit planter son arbre. J’ai planté l’arbre du Burkina Faso, lequel arbre porte le drapeau du pays protégé dans une gaine en plastique. Ce fut une cérémonie simple mais très médiatisée pour que les reportages télévisés soient visionnés dans les écoles du Mexique afin de conscientiser les jeunes sur la question du changement climatique. Une grande campagne a précédé cette activité. Des photos géantes du Prince de Monaco, de la Reine de Jordanie, dont des enfants posent leurs mains sur la bouche avec le slogan : « Stop Talking, Strart Planting » (Cesse de parler, commence à planter ». Mes photos ont également été prises en mimant ce slogan. Rencontre sur le Changement climatique et les législations sur le développement durable. A l’initiative d’un institut universitaire de recherche sur le développement durable, changement climatique et dispositions légales, une session a eu lieu réunissant 8 experts de haut niveau, dont Marie-Claire Cordonnier, Professeur titulaire de Chair à McGille University à Montréal au Québec, Canada et le vice 14 Ministre de l’Agriculture du Vietnam. Les exposés ont démontré qu’il n’est pas possible d’impulser un développement durable et lutter contre le changement climatique si des dispositions juridiques n’interviennent dans l’environnement des acteurs. Ainsi, j’ai pu donner l’exemple du Burkina qui, depuis une dizaine d’années, prépare les esprits des populations rurales à accepter le principe d’une loi agraire et foncière rurale, pour sécuriser ceux qui s’investissent dans l’agriculture, y compris les paysans eux-mêmes. Rencontre sur le Fonds Mondial de l’Environnement (GEF ou Global Environment Facility) avec sa Directrice Exécutive, Mme Monique Barbut. En fait, c’est une rencontre des Ministres africains de l’Environnement et de leurs experts. Le ministre de l’Environnement et du Cadre de Vie du Burkina étant reparti au moment de cette réunion, ce sont le Conseiller Technique et le Directeur de cabinet qui l’ont représenté. J’étais présent à cette rencontre à la demande du Négociateur du Burkina à cette conférence, empêché. La directrice de ce mécanisme qui fonctionne déjà a rappelé que depuis la conférence de Copenhague, le fonds a été reconstitué jusqu’à hauteur de 4,3 milliards de dollars US, soit une augmentation de 54% par rapport au fonds initial. La ventilation du fonds sera la suivante : 1,35 milliards aux projets d’atténuation du changement climatique ; 1,2 milliards pour les projets sur la biodiversité ; la gestion des eaux internationales et la gestion durable des sols augmenteront de 27% et 44% ; 1 milliard de dollars ira à la gestion durable des Forêts et REED + ; et enfin, une nouvelle mobilisation de fonds permet d’affecter 600 millions de dollars aux activités de l’adaptation. La question de l’accès direct du Fonds par les Etats a fait l’objet d’échanges entre les ministres et la Directrice du GEF, car des expériences peu concluantes ont été relatées par le Congo au nom du Bassin forestier du Congo. En effet, les fonds du GEF avaient été logés à la BAD qui, pendant 3 ans, n’a pas débloqué le moindre sou pour le projet. Il faut repenser autrement cette action de mise à disposition de ces fonds. Il sera intéressant que le ministère de l’Environnement et du Cadre de Vie du Burkina explore le mode d’utilisation de ces fonds qui jusque là, sont mobilisés dans le cadre du FEM/ONG au niveau du PNUD. (Cela reste à être vérifié) NB. La rencontre a eu lieu dans un hôtel de 2500 chambres ! Le buffet ouvert à l’occasion de cette rencontre a été remarquable ! 15 Journée du 9 décembre 2010 : cette journée a été consacrée à une assemblée générale des ONG à une quarantaine de km de Cancun. Après une forêt qui rappelle bien les massifs forestiers des pays de la côte (le Mexique produit du café et du cacao), nous avons débouché sur un terrain immense couvert d’un gazon soigneusement tondu qui permet à des chevaux élevés juste à côté de se livrer à des cavalcades au gré des clients. Des tentes dressées nous ont servi de salles de conférences : en tout une cinquantaine de nationalités où dominent les pays de l’Afrique de l’Est. L’objet de cette A.G. est de dresser les points négatifs de la conférence du point de vue même de l’implication de la société civile. Il faut reconnaitre que l’impact de la participation de la société civile n’a pas été ni visible, ni ressenti. Les ONG se contentaient de livrer des analyses et à condamner l’attitude de tel ou tel pays dont la position semble une sorte de fuite en avant par rapport aux enjeux ? Ainsi le Japon et le Canada ont été dénoncés pour s’être désengagés visiblement du protocole de Kyoto après son expiration en 2012. Les mesures pratiques de participation à la COP 17 à Durban en Afrique du Sud : - Des contacts opérationnels seront maintenus entre les ONG mexicaines, américaines et les ONG d’Afrique qui ont reproché aux ONG des Etas Unis leur présence très peu remarquée. - Une rencontre à Dakar au Sénégal en février 2012 va se tenir pour permettre à la société civile mondiale de préparer la rencontre de Durban où les sociétés civiles devraient être plus visibles. - Les différentes coalitions sur le changement climatique devraient jouer des rôles à définir dans un futur immédiat pour que le concept même des conférences sur le climat soit de plus en plus l’affaire des peuples et non pas les uniques gouvernements. - Au moment où les ONG se séparaient vers 20h, les négociations se poursuivaient toujours entre les parties. Il est donc probable que le résultat final de la conférence ne sera connu par la plupart des participants de la société civile que par voie de presse, car tous seront déjà repartis chez eux au moment de la clôture qui pourrait intervenir tard le 10 décembre 2010. Conclusion Mon rapport n’a donc pas pour le moment de conclusion, les négociations se poursuivant toujours au moment de mon départ de Cancun. En effet, quittant Cancun le 10 décembre avant la clôture des travaux, j’emporte le sentiment que 16 la solidarité mondiale exprimée avec force dans tous les discours, cette solidarité s’estompe quand il s’agit de partager les coûts de la pollution, les plus grands pollueurs devant être les plus grands payeurs. Par exemple, les 30 milliards de dollars en ressources additionnelles promises à Copenhague par les pays développés entre 2010 et 2012, attendent toujours ; 420 millions d’euros promis par la France à Copenhague entre 2010 et 2012, attendent toujours ; 500 millions d’euros pour la biodiversité promis par la France à Nagoya (Japon) à partir de 2014 tiendront-ils ? Cependant, il ne faut pas désespérer de ces conférences mondiales où le participant devient anonyme au milieu de la multitude. Des progrès s’observent dans la démarche collective pour sauver la terre d’un réchauffement fatal. Mais, les pays africains doivent cesser d’exprimer ce qui est un droit par des jérémiades devenues inefficaces. L’objet de mon rapport est de permettre au lecteur de vivre cette conférence au jour le jour, et d’en faire sa préoccupation. C’est déjà le rôle du participant de faire mieux connaitre autour de lui le concept du changement climatique. Le Président du Mexique a insisté dans ses interventions que le rôle de la société civile sera d’informer le plus largement possible l’opinion publique pour une appropriation la plus large possible du changement climatique. Quant aux résultats officiels des négociations, les négociateurs de notre pays qui relèvent du ministère de l’Environnement et du Cadre de Vie nous en feront le point dès leur retour de Cancun. Cancun, Mexique, le 9 décembre 2012 Alfred Sawadogo.