Journal : Vivre sous l’emprise de la religion (Julien Bourlon : 2009-04-10) Banat est un iranien de 33 ans qui, chose rare, parle anglais. Il est pauvre, sans travail, vit à l’hôtel, porte la même chemise et le même pantalon usés tous les jours. Ses parents sont vieux et malades. Ses deux incisives de devant ont été cassées mais la réparation laisse deux traces noirs assez hideuses. D’un point de vue sexuel, je pense qu’il se cherche. Il m’a posé plusieurs questions sur l’homosexualité et il est toujours puceau. Avant même que je lui pose la question, il me dit qu’il n’est pas gai mais j’en doute car sachant que je suis hétérosexuel, il veut absolument me voir tous les jours. Il est vrai qu’avec mes 4 euros par jour, nous arrivons à manger un plat chaud chacun quotidiennement dans le quartier de la gare. Du coup, c’est peut être pour satisfaire sa faim qu’il s’impose ma présence journalière. Banat est le seul iranien que je connaisse qui parle bien anglais. Il m’apprend les us et coutume du pays. L’islam est évidement très présente et tellement ancrée dans la tête des gens qu’il est tout simplement impossible de faire quelque chose qui n’est pas permis par cette religion. Banat me le dit mais je le vois aussi car même à Téhéran avec 14 millions d’habitants, les gens se connaissent au niveau des quartiers. La majorité des personnes s’inquiètent du respect des règles de l’islam et le contrôle se fait naturellement par les habitants. La police de la république islamique est là mais je pense qu’elle n’a pas beaucoup à intervenir. Ainsi les iraniens conscient ou pas, vivent dans un monde dogmatique où il est impossible de boire de l’alcool, il n’y a pas de boîte de nuit, les transports en commun séparent les filles des garçons, on ne mange pas de porc, on fait l’amour qu’une fois marié… Je trouve l’islam très intrusif car il règle la journée avec 5 prières par jour et dit ce qui est bien de ce qui ne l’est pas. Où est le libre arbitre qui distincte l’homme de l’animal ? Pourquoi ne puis-je pas faire l’amour avant le mariage ? Plus je voyage et plus je suis impressionné par la puissance de l’islam pour ordonnancer le quotidien des personnes. Ceux-ci acceptent cet état de soumission car en agissant ainsi ils pensent sincèrement être des gens biens. Au fond de mon âme, je suis profondément choqué car je crois que l’homme est fait pour être libre. Or la liberté demande de pouvoir choisir entre plusieurs options. Qu’est ce qui permet de choisir ? La connaissance. Je n’aime pas du tout les pays musulmans que j’ai vu que se soit l’Iran, l’Egypte, l’Ouzbékistan ou la Turquie car dans tous ces pays, la pression populaire pour appliquer la religion est tellement forte qu’elle oblige tout le monde à vivre en « bon musulman ». D’ailleurs c’est le peuple qui demande à être dirigé par des partis politiques religieux. Sans les militaires qui tentent de maintenir la laïcité en Turquie, le pays serait encore davantage musulman. Pour les personnes dans la norme qui trouvent une femme, se marient et sont heureux en ménage, la religion musulmane n’est certainement pas un fardeau trop lourd mais pour la grande majorité des personnes sortant de la norme, cette vie est un poison. Banat, mon ami iranien, est clairement malheureux dans son pays. Il rêve d’Europe où les gens des grandes villes, vivent dans une certaine indifférence permettant à quiconque de vivre sa vie comme il l’entend. Je pense que nous sommes nombreux à être « anormaux » même en Iran. Alors pourquoi accepter de vivre sous la pression de la religion ? Plusieurs raisons puisque celle-ci dispose d’une logique interne très efficace et si nous n’avons pas eu la chance d’être confronté à d’autres systèmes de pensée, nous sommes incapables de sortir de la logique religieuse que l’on nous a inculqués. C’est pourquoi je déteste l’enseignement des écoles religieuses lorsque celles-ci n’enseignent que leur religion. C’est le cas, par exemple, des écoles coraniques d’Ouzbékistan qui m’avait révolté. Une autre raison est que l’homme a horreur du changement sauf éventuellement quand il est jeune car il ne sait pas faire la différence entre le vieux et le nouveau puisque tout est nouveau. Du coup, il reproduit ce que faisaient ses parents et ils détestent changer les règles. Or dans les pays musulmans, les règles sont celles de la religion et quiconque cherche à les transgresser, est exclu par les autres. Quelle leçon pour Hope ? Déjà le mélange des communautés est quasiment impossible avec les musulmans car ceux-ci accepteront de se marier avec un non musulman que s’il se convertit à sa religion. Cette règle, aussi valable pour les juifs, est un sommet de l’intolérance. Vous aimez une personne avec qui vous souhaitez vous unir et malgré tout votre amour, vous lui demandez de se convertir car ses croyances sont différentes des vôtres. Pourquoi ne serez-ce pas vous qui vous convertirez ? Pourquoi pensez-vous avoir raison et elle tord ? Je crois que par l’éducation, n’importe qui peut comprendre que l’autre a le droit de penser différemment. Ainsi par l’apprentissage de toutes les religions et toutes les cultures, la tolérance peut venir que ce soit chez les musulmans, les juifs ou les chrétiens dogmatiques. Avec la tolérance viendra le mélange des communautés. Le programme éducatif sera le point crucial dans le succès ou l’échec de Hope car le nouveau pays devra réussir le mélange des communautés et des cultures. C’est ainsi qu’il pourra faire naître quelque chose de neuf qui aura digéré sa diversité. Or le mélange des communautés n’est pas naturel et il faudra un effort quotidien pour le favoriser. Marc le 29/03/2009