Le postulat de Bertrand par Arnaud Dhallewyn En 1845 Joseph Bertrand énonce la conjecture suivante : ∃ p ∈ P| n < p < 2n La conjecture fut complètement démontrée en 1850 par Pafnouti Tchebychev. Une autre démonstration de Landau qui est sensiblement la même que celle de Tchebychev fut aussi donnée. En revanche une démonstration plus simple fut présentée par Srinivasa Ramanujan, et enfin Paul Erdös donna une preuve encore plus simple en 1932. Démonstration de Ramanujan. Soit θ(x) représentant la somme des logarithmes de tous les nombres premiers n’excédant pas x et soit : 1 1 ψ(x) = θ(x) + θ x 2 + θ x 3 + (1) 1 1 log [x]! = ψ(x) + ψ x + ψ x + (2) 3 2 où [x] désigne la partie entière de x. De (1) nous avons : et de (2) : 1 1 √ 1 ψ(x) − 2 ψ( x ) = θ(x) − π(x) − π x θ x 2 + θ x 3 − (3) 2 log [x]! − 2 log 1 1 1 x ! = ψ(x) − ψ x + ψ x − (4) 2 2 3 Maintenant rappellons que θ(x) et ψ(x) sont des fonctions en constante croissance, nous trouvons de (3) et (4) que √ ψ(x) − 2ψ( x ) 6 θ(x) 6 ψ(x); (5) et 1 1 1 1 ψ(x) − ψ x 6 log [x]! − 2 log x ! 6 ψ(x) − ψ x + ψ x (6) 2 2 2 3 Mais il est simple de voir que 1 1 1 1 1 6 log [x]! − 2 log x ! 6 logΓ(x + 1) − 2log Γ x + log Γ(x) − 2log Γ x + (7) 2 2 2 2 2 Maintenant en utilisant les approximations de Stirling, nous déduisons de (7) que log [x]! − 2 log 3 1 x ! < x, if x > 0, (8) 4 2 1 et 3 1 log [x]! − 2 log x ! > x, if x > 300, (9) 4 2 Il suit de (6), (8) et (9) que 3 1 x < x, if x > 0, (10) ψ(x) − ψ 4 2 et 1 3 1 ψ(x) − ψ x + ψ x > x, if x > 300, (11) 3 2 2 1 1 1 Maintenant changeons x en x, x, x,...dans (10) et en additionnant tous les résultats, nous 2 4 8 obtenons 3 ψ(x) < x, if x > 0, (12) 2 Nous avons encore : √ √ 1 1 1 1 1 1 ψ(x) − ψ x +ψ x 6 θ(x) + 2ψ( x ) − θ x + ψ x < θ(x) − θ x + x + 3 x (13) 2 2 3 2 3 2 en vertu de (5) et (13) : Mais il est évident que √ 1 1 θ(x) − θ x > x − 3 x , if x > 300, (14) 2 6 √ 1 x − 3 x > 0, if x > 324 6 D’où : θ(2x) − θ(x) > 0, if x > 162, (15) En d’autres mots, il y a au moins un nombre premier entre x et 2x si x > 162. Ainsi le postulat de Bertrand est vérifié pour tout x > 162. Une vérification pour x < 162 montre montre que le postulat est toujours valable. Soit π(x) désignant le nombre de nombres premiers inférieures ou égales à x. Alors puisque 1 π(x) − π x 2 1 1 est le nombre de nombres premiers entre x et x, et θ(x) − θ x est la somme des logarithmes 2 2 1 de nombres premiers entre x et x, il est évident que 2 1 1 θ(x) − θ x 6 π(x) − π x log x (16) 2 2 pour tout x. Il suit de (14) et de (16) que √ 1 1 1 x − 3 x , if x > 300, (17) π(x) − π x > log x 6 2 2 De ceci, nous déduisons facilement que 1 π(x) − π x > 1, 2, 3, 4, 5, , if x > 2, 11, 17, 20, 41, (18) 2 Démonstration de Erdös. Déterminons tout d’abord ∀x ∈ R > 2 : Y p 6 4x−1 (1) p6x qui se montre par récurrence si q 6 x alors : Y p= Y 4 q −1 6 4x−1 et p p6 q p6x il suffit de vérifier (1) quand x = q ∈ P. Pour q = 2 on a 2 6 4 pour q = 2m + 1 Y p= p62m+1 car Y p6m+1 p· 2m + 1 6 4m22m = 42m p 6 4m m Y m+1<p62m+1 Y p 6 4m p<m+1 On a l’inégalité Y p6 m+1<p62m+1 car et 2m + 1 m en effet : (1 + 1)2m+1 x + = 4m = 2 2m + 1 m (2m + 1)! m! (m + 1)! = 2m + 1 m 2n + 1 m 6 22m 2 + 2m + 1 m+1 et puisque 2m + 1 m 2m + 1 = m+1 Du théorème de Legendre, il vient : 2n n = (2n)! contient le facteur premier p exactement : (n!)2 X 2n n −2 k pk p k>1 3 fois > 2m + 1 m Ici chaque terme de la somme est au plus égal à 1, puisqu’il vérifie n 2n n 2n −2 k < k −2 k −1 =2 p p p pk les termes de la somme disparaissent dès que pk > 2n, ainsi 2n n contient p exactement : X 2n n −2 k 6 max {r: pk 6 2n} fois pk p k>1 n’est pas supérieur à 2n. En Par conséquent la plus grande puissance de p qui divise 2n n √ particulier, les p > 2n apparaissent au plus une fois dans la factorisation de 2n . En outre les n 2 2 4 nombres premiers p qui vérifient n < p 6 n (p 6 n si n < p 6 n alors 2p 6 2n < 3p soit p2 > n2 > 2n 3 3 9 2 . En effet 3p > 2n implique que p et 2p sont les seuls multiples de d’où n) ne divisent pas 2n n 3 (2n)! p qui apparaissent comme facteur du numérateur de . (n!)2 Estimons 2n n si n > 3 4n 6 2n 2n n ainsi, puisqu’il n’y a pas plus de 6 Y √ p6 2n 2n · √ p· 2 2n < p6 n 3 Y p n<p62n √ 2n nombres premiers : √ p6 4n 6 (2n)1+ √ Y 2n · √ Y 2 2n < p6 n 3 p· 2n Y n>3 p (2) n<p62n Supposons qu’il n’y a pas de p ∈ P tels que n < p 6 2n. Le deuxième produit dans (2) vaut alors 1. En substituant (1) dans (2), on obtient : 4n 6 (2n)1+ √ 2 1 √ n 2n 3 n 4 ⇔ 4 3 6 (2n)1+ 2n (3) ce qui est faux dès que n suffisamment grand, en utilisant a + 1 < 2a, on a : 2n = √ √ √ √ 6 6 6 2n 6 < 6 2n + 1 6 < 26 2n 6 26 2n (4) √ Ainsi si n > 50 (et par conséquent 18 < 2 2n ) on déduit de (3) et (4) que : 22n 6 (2n)3 √ 1+ 2n √ < 26 √ 2n 18+18 2n √ 6 < 220 √ 2n 2n = 220(2n) cela implique (2n)1/3 < 20 et donc n < 4000. Et pour n < 4000, on vérifie aisément que la propriété est toujours valable. De (2) on déduit que Y 1 p > 2 30 n si n > 4000 n< p62n 4 2/3 et donc qu’il y a au moins Y p log(2n) log p log2n √ p6 2n 1 n 2 30 = n 1 30 log2 n + 1 nombres premiers dans [n; 2n]. Autre démonstration. Soit : dn = Y p log n log p p6n pour n > 2, on a : d2n = 6 Y log(2n) log p Y p log(2n) log p √ p6 2n p √ p6 2n √ √ Y Y p log(2n) log p 2n < p6n p 2n <p6n ! Y n< p62n Y p log(2n) log p n< p62n ! p 6 (2n)π √ 2n dn Y n<p62n p ! n n−8 Or ∀n > 8, π(n) 6 . En effet la suite 9;10;...,n contient au plus nombres premiers ( car 9 P 2 2 et 2q P ) et il existe seulement 4 nombres premiers 67. Donc : 1√ 4n 6 d2n 6 e 2 2n log(2n) Y dn n< p<2n ainsi : Y n< p<2n ! ! 1√ 2n log(2n) n log 3+ 2 p 6e (log 4−log3)n− >e Y n<p<2n p ! 1√ 2n log(2n) 2 >1 Dès lors que n > 226, il existe alors un nombre premier p tel que n < p < 2n. On peut aussi vérifier le résultat qui est aussi vrai pour n < 226. Bibliographie. • S.Ramanujan. A proof of Bertrand’s postulate. Journal of the Indian Mathematical Society, 11, 1919, 181-182. • M.Aigner/M.Ziegler. Proof from the books (2000). • Hardy/wright. An introduction to the theory of numbers (1979). 343-345 et 373. • D.Duverney. Théorie des nombres (2007). • P.Erdös. Beweis eines Satzes von Tschebyschef . Acta.Litt.Sci.Szeged 5,194-198 (1932). 5