LA DÉMOCRATIE ET LES MÉDIAS Axe Evaluation de la démocratie Co-Directeurs : • Emiliano Grossman • Nicolas Sauger Coordinatrice du projet : Julia CAGÉ Julia Cagé est depuis juillet 2014 assistant professeur d’économie à Sciences Po au Département d’Économie. Elle a obtenu un doctorat d’économie à Harvard University en juin 2014. Son domaine d’étude porte sur l’économie du développement, d’économie politique et d’histoire économique. Chercheur associé : Etienne FIZE Etienne Fize est un doctorant au Département d’Economie de Sciences Po Paris. Son domaine d’étude porte sur l’économie politique comportementale. Sous la direction de Julia Cagé, deux nouveaux projets de recherche sur la démocratie et les médias ont débuté. Le premier projet intitulé « Évaluation de l’efficacité des aides à la presse » cherche à évaluer l’efficacité des aides à la presse en France dans le cadre d’une approche comparative. Le deuxième projet intitulé « Qui possède les médias ? Capital, gouvernance et indépendance » portera sur l’ensemble du paysage médiatique (presse, télévision, radio, en incluant les médias en ligne) des pays développés et procédera à un examen systématique des propriétaires de chacun des médias de ces pays pour déterminer qui en possède le capital et qui y dispose du pouvoir de contrôle et des droits de vote. Le LIEPP réalise ce projet en partenariat avec Reporters sans frontières (RSF). Évaluation de l’efficacité des aides à la presse Les aides à la presse représentent une manne financière importante (800 millions d’euros en 2012) mais n’ont jamais fait l’objet d’une évaluation économétrique rigoureuse. ● Quel est l’impact de chaque euro dépensé par l’Etat sur d’une part le chiffre d’affaires des journaux (publicité et vente) et d’autre part la qualité de l’information produite par les journaux (nombre de journalistes, nombre d’articles, qualité de ces articles,…) ? ● Au-delà de l’impact purement économique des aides, celles-ci ont-elles un effet sur le contenu des journaux (biais médiatique ; couverture de l’action du gouvernement,…) ? Ce projet de recherche vise à répondre à ces questions. La stratégie d’identification est multiple. D’une part, il s’agira d’utiliser l’une des caractéristiques du système d’aide français, le Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) et les autres aides à projet. Dans le cadre de ces fonds, le choix de financer les projets de modernisation des journaux, ainsi que le montant des subventions, est laissé à la discrétion d’un comité composé de représentants de l’administration et de la profession. Nous comparerons les titres dont les projets ont été financés à ceux similaires mais dont les projets ont été rejetés et utiliserons la méthode des doubles différences. D’autre part, nous exploiterons les créations de nouvelles aides ainsi que les discontinuités des conditions d’éligibilité à certaines aides. Enfin nous utiliserons une stratégie de matching au niveau international en utilisant les spécificités des régulations nationales. Qui possède les médias ? Capital, gouvernance et indépendance Capital et gouvernance sont deux dimensions cruciales pour l’indépendance d’un média, et en particulier de ses journalistes. En effet, l’indépendance des journalistes ne saurait être la même s’ils travaillent pour un média dont le (ou les) actionnaire(s) tire(nt) l’essentiel de leurs revenus de leurs activités dans le secteur des médias, ou si l’activité principale de ces actionnaires est par exemple la vente d’armes (comment traiter dès lors des contrats d’armement passés par son propriétaire dans les lignes du journal ou lors d’un reportage télévisé ?), la vente en ligne ou le secteur des télécoms. La question de la gouvernance est tout aussi importante que celle du capital dans la mesure où droits de vote (pouvoir de décision) et capital ne coïncident pas systématiquement. 1. Ce projet de recherche établira dans un premier temps, pour chaque pays de l’OCDE, une liste exhaustive des médias « d’information politique et générale », déterminera pour chacun de ces médias sa circulation/ audience (enfin de construire des mesures précises de parts de marché), ainsi que l’identité « fiscale » – par exemple à travers le numéro SIREN en France – des entreprises éditrices (pour la presse écrite et en ligne) et plus généralement des personnes physiques ou morales propriétaires du média ainsi que leur forme juridique. 2. Le projet déroulera ensuite la structure de l’actionnariat de chacun de ces médias afin de déterminer l’identité, le secteur d’activité principal des propriétaires (personnes physiques ou morales) ainsi que la distribution des droits de vote. 3. Le projet de recherche établira dans un troisième temps pour chaque pays (pour l’ensemble du paysage médiatique ainsi que désagrégé par support) un état des lieux de l’indépendance des médias en établissant des statistiques détaillées sur le pourcentage des médias qui peuvent être considérés comme « indépendants » – c’est-à-dire pour lesquels la majorité des droits de votes appartient à des personnes physiques ou morales qui tirent l’essentiel de leurs revenus du secteur des médias – ainsi que sur la part des médias indépendants pondérée par leur part de marché. 4. Le projet de recherche analysera enfin l’évolution historique (depuis les années 1980 – voir antérieurement quand les données seront disponibles) du capital et de la gouvernance des médias. L’analyse historique (et la dimension de panel que cela donnera aux données, au-delà de l’analyse en cross-section) permettra en effet d’identifier les effets de changements de régulation du secteur des médias d’une part sur le degré de concentration de l’industrie, et d’autre part sur l’indépendance des médias. Trois étapes sont envisagées… 1. une analyse de contenu (par exemple analyse textuelle des journaux) permettant d’étudier dans quelle mesure un changement d’actionnariat / de gouvernance affecte le traitement de certains sujets ; 2. une étude plus systématique de l’effet de l’indépendance des médias au niveau cross-country sur un certain nombre de variables d’intérêt, par exemple la participation aux élections, le niveau moyen d’information politique des citoyens ou encore la confiance dans les médias ; 3. Enfin, nous procéderons à l’analyse des causes des changements du niveau d’indépendance des médias, d e s c o n s é q u e n c e s économiques directes de ces changements, ainsi que de leurs conséquences sur la production et la consommation d’information. www.sciencespo.fr/liepp