1 UNE ÉCONOMIE DE L'ATTRACTIVITÉ APPROCHE SUR LE CAS DES HAUTES-ALPES | DDT 05 2 Une économie de l'attractivité Approche sur le cas des Hautes-Alpes (étude 2008) La plupart des approches économiques territoriales se font à partir des emplois. Cela résulte du fait que les données sur l’emploi sont nombreuses, détaillées et régulièrement mises à jour. Elles permettent donc d’alimenter des analyses très riches. Pourtant, analyser le fonctionnement d’un territoire en ne prenant en compte que ces données d’emploi ne permet de le décrire que de manière partielle. C’est ce que font remarquer certains économistes qui ont constaté qu’il existait des zones assez dépourv ues de pôles productifs gros fournisseurs d’emplois, et qui néanmoins parv enaient à un fonctionnement économique très satisfaisant. SOMMAIRE La méthode p. 2 L'économie de l'attractivité p. 3 Les différents territoires p. 5 Spécialisation ou diversification p. 7 Quelques enjeux identifiés p. 8 En effet, l’analyse exclusiv ement par l’emploi n’intègre pas certaines ressources bien réelles comme par exemple : ● les retraites, ● les dépenses touristiques, en général issues de personnes externes au territoire, ● les masses financières issues de la redistribution sociale. D’où l’idée d’essayer d’analyser ce département sous un angle différent, celui des flux financiers entrants. LA MÉTHODE Une analyse par les flux financiers Le principe est d’identifier l’ensemble des masses financières arrivant dans le département, que ce soit via le revenu d’un haut-alpin ou par tout autre mécanisme. Ces flux financiers ont été regroupés en quatre classes, appelées bases : • base productive, • base publique, • base sociale, • base attractive. Le productif comprend l’ensemble des revenus des activités générant des productions potentiellement consommables en dehors du territoire départemental. Il inclut les revenus issus des sphères industrielle et agricole, mais aussi ceux des activités DDT 05 | UNE ÉCONOMIE DE L'ATTRACTIVITÉ APPROCHE SUR LE CAS DES HAUTES-ALPES tertiaires et des professions libérales et artisanales. Le public couvre les revenus des agents des différentes fonctions publiques, y compris l’armée. Le social est alimenté par l’ensemble des prestations à caractère social (chômage, santé, allocations familiales, ...). L’attractif regroupe les flux que le département parvient à capter en raison de son attractivité (retraités, tourisme) et les revenus des emplois de portée locale (services de proximité). Ces flux se caractérisent par le fait qu’ils ne produisent pas de biens externalisables, mais qu’en même temps ils pourraient arriver sur 3 n’importe quel autre territoire. Ce sont donc des masses financières à la fois très localisées et très soumises à la concurrence territoriale. La conjonction des mécanismes de redistribution et des phénomènes de mobilité des flux permet de faire vivre des territoires quasiment vierges d'activités productives. A travers cette démarche, le poids des revenus liés à l’attractivité dans l'économie des Hautes-Alpes peut être estimé, l'objectif étant de comprendre comment un territoire de montagne situé en dehors des dynamiques métropolitaines classiques parvient (ou peut parvenir) à se développer. Les territoires d'analyse Même si la grande variété des bases de données utilisées pour cette étude ont été réparties au niveau communal, ce niveau n'est pas idéal pour faire ce type d'analyse : d'abord parce que les flux financiers sont parfois fournis en référence à l'habitant et d'autres fois au salarié (or les déplacements domicile-travail n’ont pas été pris en compte), ensuite parce que certaines clefs de répartition touchent leurs limites d'utilisation quand elles sont appliquées à la commune. Le territoire le plus pertinent pour analyser cette économie de l’attractivité semble plutôt le bassin de vie défini par l'INSEE comme « le plus petit territoire sur lequel ses habitants ont un accès aux principaux services et à l'emploi ». L'ÉCONOMIE DE L’ATTRACTIVITÉ dans les Hautes-Alpes UNE BASE ATTRACTIVE DOMINANTE L'ANALYSE DES CHIFFRES ÉCONOMIE DE L’ATTRACTIVITÉ L'économie du département est fortement liée à la base attractive (2/3 du total). Elle est nettement plus forte qu'au niveau national. Des confirmations Base Hautes-Alpes France 11,8 % ≈ 20 % 13 % ≈ 20 % Sociale 10,9 % ≈ 20 % Attractive 64,3 % ≈ 40 % Productive Publique Cette valeur de 64,3 % de la base attractive est de plus certainement sous-estimée car une part significative de l'emploi salarié et non-salarié est de fait très liée au tourisme (BTP, artisans et commerçants, professions libérales, immobilier, ...). Ces salaires du productif n'ont pas été extraits de la base productive pour être intégrés dans la base attractive car cela aurait nécessité de faire, pour chaque profession, un choix un peu arbitraire pour déterminer sa part liée à l’attractif (l'agent immobilier travaille beaucoup pour le tourisme, mais pas exclusivement). Cependant, cette question se pose aussi pour les autres bases : par exemple, une part de la fonction publique est dédiée à suivre ou encadrer l'activité touristique. Faut-il pour autant l'extraire de la base publique ? • La faible part des flux productifs industriels Après les fermetures industrielles dans les années 1985 / 1990 et les tentatives avortées plus récentes, les activités productives classiques sont peu représentées et s'appuient essentiellement sur un tissu de petites PME. • L'impact de la population « présente » sur le département Cette donnée est importante pour comprendre les dynamiques territoriales et l'incidence sur les besoins en services publics, médecins, commerces et équipements divers. Les Hautes-Alpes bénéficient d'un taux de présence moyen annuel de 150 (c'est à dire qu'il y a, par rapport à la population recensée, 50 % de personnes en plus à l'année dans le département). Cette valeur moyenne masque des ratios encore plus forts en période de pointe touristique. Lors de certaines périodes de vacances scolaires, c'est une population presque 3 fois plus importante que la population résidente qui est présente sur le département, voire davantage sur certaines zones. Les Hautes-Alpes ont une capacité d’accueil très importante : plus de 338 000 lits, correspondant à l’équivalent de près de 62 000 habitants supplémentaires à l’année, alors que la population hautalpine s’établit à 133 000 habitants. UNE ÉCONOMIE DE L'ATTRACTIVITÉ APPROCHE SUR LE CAS DES HAUTES-ALPES | DDT 05 4 Des surprises importante • L'importance économique des retraites Dans quasiment tous les bassins de vie, les retraités apportent plus de revenus que le secteur productif. Ils sont porteurs de richesses dans les territoires ruraux et urbains des Hautes-Alpes et alimentent ainsi une « économie des retraites ». La question de l'attractivité de ces flux mérite d'être posée pour le département. En effet, si une part importante des retraités ne change pas de résidence au moment de la retraite (en particulier les agriculteurs), il y a de nombreux retraités qui viennent de l'extérieur du département et qui ont le choix de s'installer à leur guise sur le territoire français. Ces retraités qui changent de cadre de vie... Parmi les retraités vivant dans les Hautes-Alpes, 8,4 % d'entre eux habitaient dans un autre département 5 ans auparavant. Ce taux est nettement plus élevé que celui observé en France métropolitaine (4,7 %) et en PACA (6 %). Dans les autres départements de la région PACA, les Alpes de Haute-Provence et le Var sont encore plus attractifs pour les retraités (respectivement 10,7 et 9,4 % des retraités y résidant habitaient un autre département 5 ans auparavant), le Vaucluse et les Alpes-Maritimes se situant au niveau régional, tandis que les Bouches-du-Rhône n'attirent guère les retraités (moins de 3 % des retraités concernés). Dans les Hautes-Alpes, cette situation de mobilité géographique forte concerne principalement les anciens cadres et professions intermédiaires (12 % des retraités de cette catégorie), mais également les anciens employés, ouvriers, artisans, commerçants et chefs d'entreprise (presque 8 % de ces catégories). Inversement, les anciens agriculteurs sont traditionnellement moins mobiles (seuls 2 % concernés). Sou rce : INSEE, Recensement de la Population 2007 Savoir pourquoi et comment un retraité décide de s'installer là et pas ailleurs est donc une question importante pour un territoire tel que les Hautes-Alpes. Il est certainement utile que les élus du département soient conscients de l’importance financière de ce poste dans leur économie. Pour autant, il ne faut pas miser sans discernement sur la captation des revenus des retraités car, même si le nombre de ceux-ci doit augmenter ces prochaines années (le rapport entre actifs et retraités pourrait passer de 2,6 en 2005 à 1,4 en 2050), le phénomène de dépendance lié à l'amélioration de l'espérance de vie générera de fortes interventions financières pour les collectivités. Il faudra donc voir si, dans le futur, ce flux des retraites sera encore très majoritairement issu d'un système de redistribution ou s'il incombera pour une part aux familles, ce qui changerait alors la perception de ce flux en terme économique. • La faible part de l'agriculture Les Hautes-Alpes sont très souvent présentées comme un département rural. Si par rural on entend un territoire où l'activité agricole est importante, alors le département n'en fait, à l'évidence, pas partie. Il serait alors plus pertinent de décrire le département comme territoire d’industrie touristique. L ' a g r i c u l t u r e n e r e p r é s e n t e e n e ff e t aujourd’hui que 2% du total des flux financiers. Même si ce chiffre n'est pas représentatif de l'importance de l'activité agricole en terme de gestion et d'entretien de l'espace (paysage, lutte contre les risques naturels, entretien du patrimoine, …), il n'en demeure pas moins qu'en termes purement économiques, l'activité agricole seule n’a plus un poids économique significatif sur le département. Seuls les territoires les plus provençaux (Val de Durance, Laragnais et Buëch) peuvent revendiquer une agriculture significative, grâce à l'activité arboricole. • La forte hétérogénéité des composantes attractives Même si le pourcentage du flux attractif est finalement assez constant sur l’ensemble des bassins, les éléments qui contribuent à ce flux varient beaucoup suivant les territoires. Certains bassins sont des déserts de ressources financières venant des retraités (Queyras, Guillestrois), alors que d’autres en font une ressource vitale (Laragnais, Gapençais et à un degré moindre Buëch et Embrunais). De la même façon, le flux financier des dépenses touristiques varie de 5 % sur le Gapençais à 66 % dans le Queyras ! Sous une apparente homogénéité se cachent des modes de développement très différenciés. DDT 05 | UNE ÉCONOMIE DE L'ATTRACTIVITÉ APPROCHE SUR LE CAS DES HAUTES-ALPES 5 LES DIFFÉRENTS TERRITOIRES Analyse de quelques bassins de vie L’analyse comparée de quelques bassins de vie du département vis à vis du concept d’économie de l’attractivité permet de caractériser ces espaces. Les exemples détaillés ci-après concernent les bassins éloignés de la moyenne départementale. Le cœur urbain : le Gapençais Gapençais Hautes-Alpes Productive 17 % 12 % Publique 23 % 13 % Sociale 13 % 11 % Attractive 47 % 64 % Le poids relativement fort du secteur public s'explique par l’absence d’autre pôle urbain départemental significatif et par l’éloignement des métropoles régionales (PACA et RhôneAlpes). Les représentations administratives sont toutes regroupées sur Gap, chef-lieu des Hautes-Alpes. Même modeste en regard des standards nationaux, l’attrait économique du secteur par rapport au reste du département apparaît. C’est la seule zone où une activité de type industriel est un peu présente. La base attractive est très particulière : Les dépenses touristiques y sont très faibles, ceci s’explique par l’absence de stations de ski ou de sites touristiques renommés. Par contre, la part des salaires du tourisme et des services associés est forte, similaire à ce que l’on trouve dans les secteurs les plus touristiques. En effet, Gap concentre une part importante des effectifs du tourisme, alors même que cette activité ne se passe pas sur son périmètre. La part des retraites est importante et montre l’importance de la présence de services pour les retraités. Le secteur Gapençais n’est pas forcément le plus attractif en terme de paysage ou d’activités de pleine nature ; c’est pourtant lui qui draine le plus de retraités. Un certain équilibre : le Laragnais Laragnais Hautes-Alpes Productive 21 % 12 % Publique 13 % 13 % Sociale 15 % 11 % Attractive 51 % 64 % productifs constituent un flux non négligeable. Ce secteur a fortement évolué ces dernières années avec l'arrivée de l' A51 à Sisteron et les aménagements hydroélectriques sur le Buëch, qui ont permis la p l a n t a t i o n d e v e r g e r s i r r i g u é s . L'arboriculture est la seule activité agricole qui embauche des salariés, des saisonniers principalement. Le secteur attractif s'appuie sur les revenus des retraités et un tourisme principalement estival et plus diffus dans l’espace. L’ultra-touristique : le Briançonnais Briançonnais Productive Publique Sociale Attractive Hautes-Alpes 7% 12 % 12 % 13 % 9% 11 % 72 % 64 % Archétype du bassin touristique, le Briançonnais compte plusieurs sites touristiques de renommée internationale (stations de Serre Chevalier et La Grave, routes du Galibier et de l’Izoard, …). La proximité du Parc National des Écrins, le classement au patrimoine mondial UNESCO des sites Vauban et de la vallée de la Clarée en Grand Site expliquent également la très forte prégnance de la base attractive sur ce secteur. Si la part des dépenses touristiques est importante (42 % du total), il faut néanmoins souligner que la part de retraités n’est pas négligeable. L’altitude élevée de ce bassin et la réputation plutôt sportive de ses stations ne suffit donc pas à éloigner les retraités comme le laisserait penser la faiblesse de cette population dans le Queyras et le Guillestrois (le Pays des Écrins partage avec le Briançonnais cette caractéristique) . L'attrait de ce bassin s'appuie sur la diversité des activités : développement des activités de pleine nature liées à l'air, à l'eau, patrimoine historique, double saisonnalité, ... Il s'agit d'un bassin de vie provençal plus rural. Seul bassin à disposer d’une activité agricole proche de 10 %, ses revenus UNE ÉCONOMIE DE L'ATTRACTIVITÉ APPROCHE SUR LE CAS DES HAUTES-ALPES | DDT 05 6 Un exemple extrême : le Queyras Un équilibre masqué : l’Embrunais Queyras Embrunais Hautes-Alpes Productive 7% 12 % Productive Publique 4% 13 % Sociale 6% 82 % Attractive 9% 12 % Publique 10 % 13 % 11 % Sociale 10 % 11 % 64 % Attractive 71 % 64 % Plus petit territoire des Hautes-Alpes en terme de flux financier global, le Queyras souffre (ou bénéficie) de son isolement géographique. A l’abri de ses remparts naturels (gorges du Guil, frontière francoitalienne), il a pu conserver un paysage et des villages peu modifiés par le tourisme industriel. Bien que l’agriculture y soit aussi peu importante que dans le reste du département, elle impose son empreinte visuelle dans un paysage constitué principalement d’alpages et de forêts. Territoire de « monoculture touristique », les deux-tiers des flux financiers proviennent des visiteurs extérieurs. Cette manne financière, assez bien répartie entre l’été et l’hiver, rend ce bassin très dépendant de cette activité. C’est à l’évidence une fragilité alors que plusieurs facteurs peuvent faire évoluer à la baisse la fréquentation touristique en montagne : coût de l’énergie, réchauffement climatique, vieillissement global de la population, « désamour » des vacances en montagne... BASES ÉCONOMIQUES uelques bassins de vie DDT 05 | UNE ÉCONOMIE DE L'ATTRACTIVITÉ APPROCHE SUR LE CAS DES HAUTES-ALPES Hautes-Alpes Si l’on s’en tient aux chiffres bruts, l’Embrunais n’est pas différent d'autres territoires touristiques du département avec une base attractive représentant 71% du total, dont 42% de dépenses touristiques. Ce qui est spécifique à ce bassin, c’est le bon équilibre entre les activités d’été, centrées sur le lac de Serre-Ponçon, et celles d’hiver (stations des Orres et à un degré moindre de Crévoux et de Réallon). Cette diversification temporelle rend le territoire moins fragile vis-à-vis d’éventuelles fluctuations de fréquentation. Les autres bases (retraités, productif, public) sont un peu mieux représentées que sur les bassins touristiques avoisinants. 7 SPÉCIALISATION OU DIVERSIFICATION Quel équilibre économique ? Si les chiffres montrent bien la prépondérance de la base attractive dans l’économie des Hautes-Alpes, ils ne permettent pas de répondre à la question : peut-on (ou faut-il) miser sur une autre base économique ? Ceci pourrait se traduire par trois types d’actions : Capter des flux significatifs venant d’une autre base n’est pas évident pour les HautesAlpes. Les activités productives industrielles ont tendance à s’épanouir à proximité des zones densément peuplées et bien desservies. Le département ne semble pas posséder d' avantage concurrentiel fort pour attirer des industriels. Les nouvelles orientations de la PAC ne sont pas de nature à augmenter sensiblement la valeur ajoutée de ce secteur. Les services publics de l’État se retirent progressivement des espaces ruraux (départ du tribunal et de l’armée à Briançon, représentations territoriales de l’État, ...) dans le cadre de la révision générale des politiques publiques. La part sociale n’a pas vocation à augmenter au delà de l’augmentation de la démographie. Le département vient d’être classé récemment dans une enquête d’un grand hebdomadaire comme premier département français pour les seniors. Les retraités contribuent pour une part importante dans l’économie des territoires. Pour autant, il ne suffit pas d’avoir un territoire attractif en terme de paysage pour capter cette clientèle. La présence de services, en particulier les services à la personne et la diversité des activités offertes, est une condition tout aussi fondamentale pour l’accueil de retraités. Sur ces questions, les Hautes-Alpes peuvent encore certainement améliorer leurs résultats ; cela passe par une sensibilisation des décideurs locaux sur l’intérêt stratégique de cette question.. Le département semble donc condamné à moyen terme à conserver une base attractive hypertrophiée. Si tout ce qui sera fait pour augmenter (ou maintenir à leur niveau actuel) les autres bases doit être vu comme favorable à l’équilibre global du territoire, on peut aussi se demander s’il ne faut pas rechercher une nécessaire diversification à l’intérieur même de la base attractive. Rendre le territoire plus attirant pour les retraités Capter des revenus touristiques en dehors des périodes de pointe L’activité touristique du département est trop largement concentrée sur les vacances scolaires (71 % des nuitées). Parvenir à capter des séjours hors de ces vacances présente le triple avantage d’augmenter les revenus du tourisme, de diminuer la précarité des emplois liée à la saisonnalité sans pour autant augmenter fondamentalement les infrastructures existantes. Par ailleurs, une meilleure présence des services tout au long de l’année, est de nature à amener une clientèle d’urbains sans enfants ou de « retraités actifs » à venir passer des séjours dans les Hautes-Alpes. Il faut convaincre les professionnels qu’une période d’activité aussi limitée dans l’année est un facteur de déséquilibre majeur. Les tendances actuelles ne sont guère favorables à ce scénario puisque la montagne en général, et les Alpes du Sud en particulier, p e r d e n t r é g u l i è r e m e n t d e s v i s i t e u r s , principalement en été. Par ailleurs il paraît important de se poser la question de l'adaptation de l'offre actuelle des produits touristiques par rapport à l'évolution des comportements et des attentes de la clientèle, mais aussi de l'évolution de la marge de manœuvre financière de la dite clientèle. Diversifier le tissu économique Dans un contexte de mondialisation et de concurrence accrue, les Hautes-Alpes ne disposent que de faibles avantages comparatifs en matière de base productive : • éloignement des grands axes d'échanges et de communication (A51 inachevée, desserte ferroviaire peu compétitive, loin du TGV et des aéroports importants) ; • situation hors de la zone d'influence immédiate des aires métropolitaines de PACA ou de Rhône-Alpes ; • faible présence de compétences et savoirfaire spécifiques (recherche et développement, ingénierie financière, …). Si un accroissement sensible de l’activité industrielle semble peu réaliste dans le département, une certaine diversification du tissu économique ne paraît pas hors de portée des acteurs. Les quelques expériences des Pôles d'Excellence Rurale ont démontré que l'on pouvait rechercher des "niches" économiques dans des filières axées sur la valorisation et/ou l’exploitation des ressources naturelles (air, eau, bois, énergies renouvelables, agro-alimentaire, …) ou patrimoniales. UNEÉCONOMIE ÉCONOMIEDE DEL'ATTRACTIVITÉ L'ATTRACTIVITÉAPPROCHE APPROCHESUR SUR CASDES DESHAUTES-ALPES HAUTES-ALPES|| DDT DDT 05 UNE LELECAS 8 QUELQUES ENJEUX IDENTIFIÉS pour les Hautes-Alpes L'avantage comparatif des Hautes-Alpes pour attirer des revenus réside essentiellement du côté de la qualité du paysage, du climat, du patrimoine local et de la possibilité d’avoir des activités touristiques quelle que soit la saison. À partir de ce postulat, quelques questions constituant des enjeux forts pour ce territoire en matière d’économie de l’attractivité apparaissent. Trouver des scénarios alternatifs au « tout-tourisme » La part importante du flux touristique, vitale dans les bassins de vie « ultra-touristiques », fait craindre que des difficultés apparaissent : • face au développement de l'offre concurrentielle dans un contexte de mondialisation à faible coût accrue (destinations étrangères ou sports d'hiver en pays de l'Est) et à l'érosion de la demande touristique en montagne, l'été notamment ; • face au renchérissement du prix de l'énergie qui va agir sur le coût des déplacements et sur le budget de fonctionnement des stations de sports d’hiver ; • face à la difficulté de maîtriser une clientèle de plus en plus volatile et exigeante : progression des courts séjours, recherche de tarifs compétitifs, recherche de qualité, de plus de sécurité ; • face au vieillissement de la population, alors que les activités montagne sont encore peu dédiées aux clientèles des seniors et des non-skieurs ; • face aux évolutions liées au réchauffement climatique qui va pénaliser en premier les stations de moyenne montagne. De plus, la relative faiblesse des revenus réels et des qualifications des travailleurs saisonniers ainsi que leur impression de précarité globale sont une source de tension dans les communes stations, renforcée par la difficulté de loger les jeunes locaux ou les saisonniers en station. Enfin, les pressions environnementales et foncières engendrées par ces dynamiques génèrent des dysfonctionnements sur le marché du logement en sites touristiques, une banalisation du paysage et une surfréquentation en haute saison dans des endroits fragiles. Sans céder au catastrophisme, il faut être conscient que la pérennité des revenus touristiques n’est pas garantie. La perte d’attractivité constitue un risque réel L’économie attractive n’a pas que de bons côtés ; elle a tendance via une forte demande en habitat individuel à consommer des espaces naturels souvent fragiles et de qualité. • Le développement rapide de l'urbanisation et du mitage, source de gaspillage d'espaces naturels ou agricoles, de conflits d'usage et de banalisation des paysages, réclame une réelle planification « durable » supra-communale. Il n'y a, à ce jour, aucun SCOT opposable dans les Hautes-Alpes. • La multiplication des zones d'activités « fourre-tout » à l'entrée des villes et le long des principaux axes de communication (RN 85 Sud et RN 94 Est de Gap, RN 94 Sud Briançon et vallée de la Guisane), décidées sans réelle réflexion économique à l'échelle d'une intercommunalité « pertinente », ni schéma d'aménagement d'ensemble ou intégration paysagère et architecturale amène de vraies dégradations du paysage qui rendent des secteurs entiers peu attractifs pour de la population retraitée ou touristique, alors que leur positionnement en périphérie urbaine le permettrait. Ce qui est en cause n’est pas l’utilité de ces zones, mais bien leur dissémination peu efficace et trop pénalisante pour le paysage. • Dans la plupart des stations « intégrées », les hébergements sont vieillissants, d'un confort insuffisant et les espaces publics sont trop souvent dédiés à l'automobile. Si on souhaite maintenir une forte attractivité du département, il faut veiller à ce que le paysage, dans toutes ses composantes, continue à donner l’envie d’y venir. Le nécessaire développement économique ne doit pas se faire contre l’attractivité touristique mais autour. Le développement de l'attractivité ne peut s i m p l e m e n t s ' a p p u ye r s u r u n e r e n t e paysagère ou climatique. La diversification de l'économie des stations (activités complémentaires au « tout ski », sports de pleine nature, thermo-ludisme, centre de remise en forme, tourisme culturel) est aussi une nécessité pour éviter que ne s’érode l’envie des visiteurs de venir sur le département. De même, la requalification urbaine des sites touristiques reste un enjeu pertinent : travail sur les espaces publics, promotion des modes de déplacement doux, ... en bonne articulation avec la réhabilitation du parc des meublés vétustes et inadaptés aux exigences de la clientèle. Cela pourrait passer par la mise en place d'un schéma des activités touristiques (opposable ?) permettant un meilleur accueil et une réelle protection et valorisation des sites naturels (en dehors des zones déjà protégées). Cette politique à inscrire dans une logique globale de vallées, peut passer par un contrôle des aménagements et la recherche d'une meilleure répartition des résidents (permanents ou temporaires) dans l'espace. Par exemple, l'offre hivernale reste encore trop centrée sur les stations et n ' i n t è g r e p a s a s s e z l e s o ff r e s complémentaires des vallées. Une vraie politique de l’habitat est indispensable à l’activité touristique Une des caractéristiques du fonctionnement de l'économie touristique, c'est qu'elle est générée par une clientèle au pouvoir d'achat globalement supérieur à celui des actifs locaux, avec des phénomènes de distorsion dans l'habitat entre les niveaux de prix pratiqués et les capacités dont disposent les acteurs locaux. En l'absence d'intervention de la puissance publique pour tenter de réguler le marché, c'est probablement l’essor du tourisme et des services qui est fragilisé, car les actifs du tourisme ne peuvent plus trouver à se loger. Cette contrainte est déjà ressentie par certains des acteurs hauts-alpins mais il reste à la faire partager par le plus grand nombre pour qu’elle s’affiche nettement comme une condition sine qua non d’un développement pérenne de l’activité touristique. Direction départementales des territoires Service de l'aménagement soutenable 3 place du Champsaur - BP 98 - 05007 GAP Cedex Tél. 04 92 40 35 00 | Courriel : [email protected] DDT 05 | UNE ÉCONOMIE DE L'ATTRACTIVITÉ APPROCHE SUR LE CAS DES HAUTES-ALPES