Équations différentielles

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13 Équations différentielles
« A mathematician is a device for turning coffee into theorems. »
Alfréd Rényi (1921-1970)
Plan de cours
I
II
Équations différentielles linéaires scalaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
A
Équations différentielles linéaires d’ordre 1 . . . . . . . . . . . . . . . . .
B
Équations différentielles linéaires d’ordre 2 . . . . . . . . . . . . . . . . .
Systèmes d’équations linéaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
A
Définition et propriétés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
B
Résolution de l’équation homogène X 0 = AX . . . . . . . . . . . . . . . .
C
Résolution de l’équation avec second membre X 0 = AX + B . . . . . . .
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3
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6
.
6
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7
. . 11
I – Équations différentielles linéaires scalaires
On ne s’intéressera ici qu’aux équations différentielles linéaires d’ordre 1 et d’ordre 2.
A – Équations différentielles linéaires d’ordre 1
On considère l’équation différentielle linéaire d’ordre 1 suivante et l’équation homogène associés :
a(t) y 0 + b(t) y = c(t)
0
a(t) y + b(t) y = 0
(E)
(H)
Elle est dite résolue lorsqu’elle est sous la forme y 0 + b(t) y = c(t).
On suppose que a, b, c : I → R sont continues sur un intervalle I de R.
Théorème 13.1 : Problème de Cauchy
Si a ne s’annule pas sur l’intervalle I, le problème de Cauchy
a(t) y 0 + b(t) y = c(t)
y(t 0 ) = y0
admet une unique solution sur I.
En particulier, toute solution d’une équation de la forme y 0 (t) + b(t) y(t) = 0 qui s’annule une fois sur un
intervalle donné y est automatiquement entièrement nulle !
Théorème 13.2 : ÉD linéaire d’ordre 1
• L’équation homogène y 0 + f (t) y = 0 admet pour solution générale t 7→ λe−F (t) où F est une
primitive de f sur I et λ ∈ R.
• L’équation y 0 + f (t) y = b(t) admet pour solution générale t 7→ y0 (t) + λe−F (t) où y0 est une
solution particulière de l’équation avec second membre.
Méthode pour retrouver la formule rapidement (à prendre avec des pincettes !)
y 0 = − f (t) y ⇐⇒
dy
dy
= − f (t) y ⇐⇒
= − f (t) dt
dt
y
–1–
CHAPITRE 13. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
et donc, en intégrant chaque membre de l’égalité,
ln y(t) = −F (t) + k,
k∈R
et on trouve :
y(t) = λe−F (t)
avec λ = ek
Corollaire 13.3 : Structure de l’ensemble des solutions
Lorsque a : I → R ne s’annule pas sur l’intervalle I, l’ensemble SH des solutions de (H) est une droite
vectorielle.
En effet, d’après ce qui précède et en conservant les mêmes notations,
SH = Vect t 7→ e−F (t) et S E = y0 + Vect t 7→ e−F (t)
Exercice 1
Datation au carbone 14
La matière radioactive perd par unité de temps une proportion constante k de sa masse ce qui conduit à
dm
l’équation
(t) = −km(t). Sachant que la période 1 du carbone 14 est de 5500 ans et qu’on a retrouvé
dt
des ossements d’origine humaine ne contenant que 0, 002% de la proportion habituelle, de quand datent
les ossements ?
Pour résoudre une équation différentielle linéaire du premier ordre, on se ramènera toujours au plan de
résolution suivant :
Ê Identification de l’équation.
Ë Mise sous forme résolue en divisant par a(t) sur les intervalles où a ne s’annule pas.
sin t
Ex. : t y 0 − t 2 y + sin t = 0. On résoudra l’équation y 0 − t y +
= 0 sur R∗+ et sur R∗− .
t
Ì Résolution de l’équation homogène : y 0 = f (t) y avec f continue sur l’intervalle de résolution I.
La solution générale de l’équation homogène est y(t) = λe F (t) où F est une primitive de f sur I et
λ ∈ R. SH = Vect(t 7→ e F (t) ).
Í Résolution de l’équation avec second membre.
On recherche pour cela une solution particulière y0 de (E).
S’il n’y a pas de solution évidente, on utilisera la méthode de la variation de la constante en cherchant
y sous la forme y(t) = λ(t)e F (t) . En réinjectant y dans l’équation, on obtient une expression de λ0
que l’on peut généralement intégrer.
La solution générale de l’équation (E) est y(t) = λe F (t) + y0 (t). On a S E = y0 + SH .
Ex. : Résoudre y 0 − x y = x en cherchant une solution particulière de deux façons différentes.
Î Raccordement éventuel des solutions.
Ex. : y 0 + a(x) y = b(x) avec y1 solution sur R∗− et y2 solution sur R∗+ .
y1(x) si x < 0
La fonction y 7→
est solution de l’équation sur R∗ . Elle est solution sur R si son
y2 (x) si x > 0
prolongement par continuité est également dérivable, ce qui nous conduit à deux conditions :
lim y1 (x) = lim− y(x) = lim+ y(x) = lim+ y2 (x)
x→0−
x→0
x→0
x→0
lim y10 (x) = lim− y 0 (x) = lim+ y 0 (x) = lim+ y20 (x)
x→0−
x→0
x→0
Ï Conditions initiales.
–2–
x→0
Mickaël PROST
Lycée Chaptal – PT*
Exemple
Résoudre sur R l’équation différentielle (E ) : t y 0 + |t| y = t 2 e−|t| .
• Résolution de l’équation sur R∗+
On trouve y(t) =
€
t2
2
(E ) ⇐⇒ t y 0 + t y = t 2 e−t
Š
+ C1 e−t où C1 ∈ R.
⇐⇒
y 0 + y = te−t
⇐⇒
y 0 − y = te t
• Résolution de l’équation sur R∗+
On trouve y(t) =
€
t2
2
(E ) ⇐⇒ t y 0 − t y = t 2 e−t
Š
+ C2 e t où C2 ∈ R.
• Recollement des solutions
Supposons que y est solution sur R de l’équation (E ). L’application y est donc dérivable sur R et il
existe deux constantes C1 , C2 ∈ R telles que :
 2
t

−t

 2 + C1 e si t > 0
∀t ∈ R∗ y(t) = 2

t


+ C2 e t si t < 0
2
Cela donne a priori de très nombreuses solutions ! On peut en visualiser certaines sur le graphe suivant :
y
4
2
-5
-4
-3
-2
-1
0
1
2
3
4
5
t
-2
-4
y étant continue en 0, lim+ y(t) = C1 = C2 = lim− y(t). y étant par ailleurs dérivable en 0,
t→0
t→0
y(t) − C1
y(t) − C1
lim
= C1 = −C1 = lim−
. Ainsi, C1 = 0 et on trouve une unique solution vat→0
t→0+
t
t
2
t
lable sur R : y(t) = e−|t| .
2
B – Équations différentielles linéaires d’ordre 2
On considère l’équation différentielle linéaire d’ordre 1 suivante et l’équation homogène associés :
a(t) y 00 + b(t) y 0 + c(t) y = d(t)
00
0
a(t) y + b(t) y + c(t) y = 0
(E)
(H)
De telles équations apparaissent souvent en physique.
Exemple
q
g
Pendule simple : θ̈ + ω20 sin θ = 0 avec ω0 = l .
Pour des oscillations faibles, sin θ ≈ θ , on « peut » considérer que θ vérifie l’équation θ̈ + ω20 θ = 0.
–3–
CHAPITRE 13. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
Exemple
Circuit RLC :
q
dq
d2 q
+R
+ L 2 = U(t).
C
dt
dt
On suppose que a, b, c, d : I → R sont continues sur un intervalle I de R.
Théorème 13.4 : Problème de Cauchy
Si a ne s’annule pas sur l’intervalle I, le problème de Cauchy
a(t) y 00 + b(t) y 0 + c(t) y = d(t)
y(t 0 ) = y0 ; y 0 (t 0 ) = y00
admet une unique solution sur I.
On ne s’intéresse dans ce chapitre qu’à la résolution de cette équation pour des coefficients constants.
On écrit (E) désormais sous la forme :
a y 00 + b y 0 + c y = d(t)
(E)
Le résultat suivant est démontré dans la partie II.
Théorème 13.5 : Équa. diff. linéaire d’ordre 2 homogène à coeff. constants
On considère l’équation a y 00 + b y 0 + c y = 0.
On résout l’équation caractéristique aX 2 + bX + c = 0 de discriminant associé ∆.
• Si ∆ > 0, deux racines réelles distinctes r1 et r2 . y(t) = λ1 e r1 t + λ2 e r2 t avec λ1 , λ2 ∈ R.
• Si ∆ = 0, une racine réelle double r. y(t) = (λ1 + λ2 t)e r t avec λ1 , λ2 ∈ R.
• Si ∆ < 0, deux racines complexes conjuguées α ± iβ.
y(t) = (λ1 cos(β t) + λ2 sin(β t))eαt avec λ1 , λ2 ∈ R.
Comme dans le cas des équations différentielles linéaires d’ordre 1, l’ensemble des solutions de l’équation
a(t) y 00 + b(t) y 0 + c(t) y = d(t) est obtenu en recherchant une solution particulière de cette équation.
Théorème 13.6 : Structure de l’ensemble des solutions
Lorsque a : I → R ne s’annule pas sur l’intervalle I, l’ensemble SH des solutions de (H) est un plan
vectoriel. Toute solution de (E) est la somme d’une solution particulière et de la solution générale de
l’équation homogène.
Exercice 2
Résoudre les équations différentielles suivantes :
y 00 + 3 y 0 + 2 y = 0 ;
y 00 − 2 y 0 + y = 0 ;
y 00 − 2 y 0 + 5 y = 0
On peut déterminer une solution particulière de (E) lorsque le second membre d(t) est de la forme :
• d(t) = P(t) avec P un polynôme de degré n. On cherche alors une solution sous la forme d’un
polynôme Q de même degré que P.
Ex. : y 00 − 2 y 0 + y = t 2 .
• d(t) = P(t)emt avec P ∈ R[X ], on cherche y0 sous la forme y0 (t) = Q(t)emt avec Q ∈ R[X ]
et deg(Q) = deg(P) + k, k étant l’ordre de multiplicité de m en tant que racine de l’équation
caractéristique.
• d(t) = cos(ωt), sin(ωt), on passe en complexe et on retrouve le cas précédent 2 .
2. Si iω n’est pas racine de l’équation caractéristique, y0 (t) = Acos(ωt) + B sin(ωt).
–4–
Mickaël PROST
Lycée Chaptal – PT*
Proposition 13.7 : Principe de superposition
Si y1 est solution de l’équation a y 00 + b y 0 + c y = d1 (t) et y2 de l’équation a y 00 + b y 0 + c y = d2 (t)
alors y1 + y2 est solution de l’équation a y 00 + b y 0 + c y = d1 (t) + d2 (t).
Le plan de résolution est exactement le même que celui décrit pour les équations différentielles linéaires
d’ordre 1.
Lorsque l’équation n’est pas à coefficients constants, il n’y a pas de méthode de résolution systématique.
Voici cependant quelques techniques à connaître. On se laissera guider par l’énoncé dans la plupart des cas.
• Recherche de solutions à l’aide de séries entières
Exemple
00
+∞
X
0
Résolvons l’équation (x + x) y + (3x + 1) y + y = 0 en posant y(x) =
2
an x n puis en dérivant
n=0
terme à terme la somme de la série entière sur l’intervalle ouvert de convergence (inconnu pour le
moment). On trouve, en injectant dans l’équation,
+∞
X
n(n − 1)an x n +
⇐⇒
⇐⇒
+∞
X
n(n − 1)an x n−1 +
+∞
X
n=2
+∞
X
n(n − 1)an x n +
3nan x n +
n=1
n=2
n=2
⇐⇒
+∞
X
nan x n−1 +
n=1
+∞
X
+∞
X
n=1
n=1
(n + 1)nan+1 x n +
+∞
X
3nan x n +
+∞
X
an x n = 0
n=0
+∞
X
+∞
X
n=0
n=0
(n + 1)an+1 x n +
an x n = 0
[n(n − 1)an + (n + 1)nan+1 + 3nan + (n + 1)an+1 + an ] x n = 0
n=0
+∞
X
(n + 1)2 (an+1 + an )x n = 0
n=0
Par unicité du développement en série entière, on trouve an+1 = −an quel que soit n ∈ N, c’est-à-dire
+∞
X
a0
an = (−1)n a0 . Ainsi, y(x) =
a0 (−x)n =
.
1+ x
n=0
On obtiendra systématiquement des solutions sur un intervalle centré en 0. Toutes les solutions de
l’équation n’étant pas nécessairement développables en série entière, il se peut que l’on obtienne qu’une
partie des solutions. Dans l’exemple précédent, il y a bien une infinité de solutions mais les solutions
développables en série entière ne forment qu’une droite vectorielle.
• Recherche de solutions de type polynomiales
On pourra commencer par rechercher le degré d’une fonction polynomiale éventuellement solution, des
conditions sur son coefficient dominant, sur ses racines...
Exemple
Considérons l’équation différentielle x(x + 1) y 00 + (x + 2) y 0 − y = 0.
n
X
Posons P =
ai X i avec n = deg(P), c’st-à-dire an 6= 0.
i=0
Si n 6= 0, le terme dominant 3 de x(x + 1)P 00 (x) + (x + 2)P 0 (x) − P(x) est (n2 − 1)an x n , donc n ¶ 1.
On peut donc poser P(x) = a x + b et en injectant dans l’équation on trouve b = 2a, c’est-à-dire
P(x) = a(x + 2).
• Factorisation par une solution déjà connue (méthode dite de Lagrange)
Cette technique s’apparente à méthode de variation de la constante. Si on connaît une solution y0 de
l’équation différentielle, on peut chercher une solution sous la forme y = y0 z.
–5–
CHAPITRE 13. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
Exemple
Reprenons l’exemple précédent et posons y(x) = (x + 2)z(x).
x(x + 1) y 00 + (x + 2) y 0 − y = 0 ⇐⇒ x(x + 1)(x + 2)z 00 (x) = −(3x 2 + 6x + 4)z 0 (x)
⇐⇒ x(x + 1)(x + 2)Z 0 (x) = −(3x 2 + 6x + 4)Z(x)
en posant Z(x) = z 0 (x). Z vérifie une équation différentielle linéaire d’ordre 1 de la forme (décomposition en éléments simples) :

‹
2
1
2
0
Z (x) = −
+
−
Z(x)
x +2 x +1 x


‹
‹
x +1
1
1
A 1
1
0
Ainsi, Z(x) = A ·
=
, puis, z(x) = A
−
+ B avec A, A0 , B ∈ R.
−
(x + 2)2 x 2
4 x 2 (x + 2)2
x +2 x
A00
Enfin, y(x) =
+ B(x + 2) avec A00 , B ∈ R. On a obtenu l’ensemble des solutions sur R∗+ (et non R∗ ).
x
• Changements de variable ou d’inconnue (toujours fournis par l’énoncé)
Exercice 3
Résoudre sur R∗+ l’équation différentielle x 2 y 00 + y = 0 en posant t = ln(x).
II – Systèmes d’équations linéaires
A – Définition et propriétés
Un système d’équations différentielles linéaires d’ordre 1 à coefficients constants est un système de la forme :
 0
x 1 (t) = a11 x 1 (t) + · · · + a1n x n (t) + b1 (t)




 x 20 (t) = a21 x 1 (t) + · · · + a2n x n (t) + b2 (t)
..
..


.
.


 0
x n (t) = an1 x 1 (t) + · · · + ann x n (t) + bn (t)
On peut alors le mettre sous la forme X 0 = AX + B avec :




x 1 (t)
a11 . . . a1n
.
.
.. 
X (t) =  ..  ∈ Mn1 (K) ; A =  ..
∈ Mn (K) ;
.
x n (t)
an1 . . . ann

b1 (t)
.
B(t) =  ..  ∈ Mn1 (K)
bn (t)

On suppose par la suite que la fonction vectorielle B à valeurs dans Rn est continue sur un intervalle I. On
suppose de plus, dans le cadre de ce chapitre, que les coefficients de la matrice ne dépendent pas de t.
Exemple
Le système
x 0 = 3x − y + 2
x
3 −1
2
peut s’écrire X = AX + B avec X =
, A=
et B =
.
y
1 1
2
y0 = x + y + 2
0
Théorème 13.8 : Structure de l’ensemble des solutions
• L’ensemble des solutions du système différentiel X 0 = AX est un sous-espace vectoriel de C 1 (I, Kn )
de dimension n.
• Les solutions du système différentiel X 0 = AX + B sont la somme des solutions du système homogène
associé et d’une solution particulière du système.
–6–
Mickaël PROST
Lycée Chaptal – PT*
Démonstration
• Cas du système homogène
La fonction nulle (à valeurs dans Kn ) est évidemment solution du sysème et si X 1 et X 2 sont deux
solutions , λ un scalaire, alors λX 1 + X 2 est encore solution :
A(λX 1 + X 2 ) = λAX 1 + AX 2 = λX 10 + X 20 = (λX 1 + X 2 )0
On admet la dimension de l’espace en question.
• Cas du système avec second membre
Supposons que X 0 est une solution particulière du système différentiel X 0 = AX + B.
X̃ solution du système complet ⇐⇒ X̃ 0 = AX̃ + B
⇐⇒ X̃ 0 = AX̃ + X 00 − AX 0 ⇐⇒ (X̃ − X 0 )0 = A(X̃ − X 0 )
⇐⇒ X̃ − X 0 solution du système homogène
X̃ est bien la somme d’une solution particulière et de la solution générale du système homogène. „
Théorème 13.9 : Problème de Cauchy
Soient t 0 ∈ I et X 0 ∈ Mn1 (K). Alors, le problème de Cauchy
X 0 = AX + B
X (t 0 ) = X 0
admet une et une seule solution.
Considérons enfin l’équation différentielle linéaire (scalaire) d’ordre n : y (n) = a0 y +a1 y 0 +· · ·+an−1 y (n−1) (∗)


0 1
0 ···
0


y
.. 
.. .. ..

.
.
.
. 
0
 y0 
. .

0


.
.
(∗) ⇐⇒ Y = AY avec Y =  ..  et A =  .

.. .. ..
.
0


.

(n−1)
0 ··· 0
0
1 
y
a0 a1 · · · · · · an−1
Résoudre une équation différentielle linéaire scalaire d’ordre n revient à résoudre un système différentiel
linéaire d’ordre 1.
B – Résolution de l’équation homogène X 0 = AX
1 – Cas où A est diagonalisable dans Mn (R)
Le plus simple est sans doute de constater ce qu’il se passe sur un exemple.
0
x 1 (t) = x 1 (t) + 2x 2 (t)
Considérons le système
qui peut s’écrire sous la forme matricielle :
x 20 (t) = 2x 1 (t) + x 2 (t)
x1
1 2
0
et A =
X = AX avec X =
x2
2 1
Remarquons que la matrice A est diagonalisable car symétrique à coefficients réels. On peut même déterminer
une matrice de passage orthogonale.
Le vecteur (1, 1) est clairement vecteur propre associé à la valeur propre 3. La trace nous fournit la dernière
valeur propre, à savoir −1. Elle est associé au vecteur propre (−1, 1) qui est orthogonal au premier vecteur
(les sous-espaces propres sont orthogonaux). Ainsi,
3 0
1 −1
−1
D = P AP avec D =
et P =
0 −1
1 1
–7–
CHAPITRE 13. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
Ainsi construite, la matrice P n’est pas orthogonale, ce qui pourrait conduire à un calcul de l’inverse un peu
pénible. La suite des calculs montrera que nous n’en avons pas besoin.
X 0 = AX ⇐⇒ X 0 = P DP −1 X ⇐⇒ P −1 X 0 = DP −1 X ⇐⇒ Y 0 = DY
avec
Y = P −1 X
Notons que P −1 X 0 = (P −1 X )0 car les coefficients de A donc
de P ne dépendent pas de t.
y
Écrivons le nouveau système obtenu en posant Y = 1 :
y2
0
y1 (t) = 3 y1 (t)
Y 0 = DY ⇐⇒
y20 (t) = − y20 (t)
Le système obtenu n’est que la concaténation de deux équations différentielles scalaires indépendantes que
l’on peut facilement résoudre :
y1 (t) = C1 e3t
C1 , C2 ∈ R
y2 (t) = C2 e−t
De plus, X = PY donc les fonctions x 1 et x 2 sont combinaisons linéaires des fonctions y1 et y2 . Plus
précisément,
x 1 (t)
1 −1
y1 (t)
C1 e3t − C2 e−t
=
=
= C1 e3t X 1 + C2 e−t X 2
x 2 (t)
1 1
y2 (t)
C1 e3t + C2 e−t
où X 1 et X 2 sont les deux colonnes de la matrice P.
On généralise facilement le résultat précédent à une matrice diagonalisable dans Mn (R) quelconque.
Théorème 13.10
Soit A une matrice diagonalisable dans Mn (R). Il existe alors une base (X 1 , . . . , X n ) de vecteurs propres
associés aux valeurs propres λ1 , . . . , λn éventuellement multiples.
Les solutions de l’équation X 0 = AX sont de la forme :

C1 eλ1 t
.
X (t) = P  ..  = C1 eλ1 t X 1 + · · · + Cn eλn t X n
Cn eλn t

avec
C1 , . . . , Cn ∈ R
Démonstration
On a D = P −1 AP = diag(λ1 , . . . , λn ) avec P la matrice dont les vecteurs colonnes sont les vecteurs propres
X j . En posant Y = P −1 X , il vient Y 0 = DY . Ainsi, pour tout i ∈ ¹1, nº, yi0 (t) = λi yi (t) donc yi (t) = Ci eλi t
avec Ci ∈ R. D’où le résultat suivant :

C1 eλ1 t
.
X (t) = PY (t) = P  ..  = C1 eλ1 t X 1 + · · · + Cn eλn t X n
Cn eλn t

„
Remarquons deux choses :
• À aucun moment il n’a fallu inverser explicitement la matrice P.
• L’ensemble des solutions du système homogène peut s’écrire sous la forme :
SH = Vect(t 7→ eλ1 t X 1 , . . . , t 7→ eλn t X n )
On retrouve bien le fait qu’il s’agit d’un sous-espace vectoriel de C 1 (I, Rn ). Mais les vecteurs colonnes
étant linéairement indépendants, ils forment une base de cet espace qui est donc de dimension n.
Exercice 4
Résoudre le système
x 0 = 3x − 2 y
y 0 = −x + 2 y
–8–
Mickaël PROST
Lycée Chaptal – PT*
2 – Cas où A est diagonalisable dans Mn (C) avec A ∈ Mn (R)
Si A ∈ Mn (R), les solutions trouvées doivent être réelles, même si l’on fait un détour par C pour résoudre le
système.
D’après ce qui précède,
X (t) = C1 eλ1 t X 1 + · · · + Cn eλn t X n
(∗)
avec C1 , . . . , Cn ∈ C, λ1 , . . . , λn ∈ C (rappelons que A est diagonalisable dans Mn (C)).
A ∈ Mn (R) donc son polynôme caractéristique est à coefficients réels. Ainsi, si λ est une valeur propre non
réelle de A, λ est également valeur propre. De plus, les vecteurs propres associés sont eux-mêmes conjugués :
AX = λX
=⇒
AX = λ · X
⇐⇒
AX = λ · X
Il apparaît dans (∗) une expression de la forme Ceλt X + C 0 eλt X avec C, C 0 ∈ C. On admettra que l’on peut
la réécrire sous la forme :
Ceλt X + C 0 eλt X = aRe(eλt X ) + bIm(eλt X )
avec
a, b ∈ R
Un résultat analogue (cas des équations différentielles linéaires d’ordre 2) est démontré au paragraphe 4.
Exemple
x 10 (t) = x 1 (t) + 2x 2 (t)
1 2
.
associé à la matrice A =
Étudions le cas du système
−1 3
x 20 (t) = −x 1 (t) + 3x 2 (t)
On a alors :
2+i
0
1−i 1+i
−1
et D =
D = P AP avec P =
0
2−i
1
1
Puis,
x 1 (t)
(2−i)t 1 + i
(2+i)t 1 − i
+ C2 e
= C1 e
X (t) =
1
1
x 2 (t)
avec
C1 , C2 ∈ C
Or,
(2+i)t
e
1−i
1−i
2t
2t cos(t) + sin(t)
2t sin(t) − cos(t)
= e (cos(t) + i sin(t))
=e
+ ie
1
1
cos(t)
sin(t)
Au final,
x 1 (t)
2t sin(t) − cos(t)
2t cos(t) + sin(t)
+ be
X (t) =
= ae
cos(t)
sin(t)
x 2 (t)
a, b ∈ R
3 – Cas où A est trigonalisable
On notera que cela est toujours possible, quitte à travailler dans Mn (C).


λ1 × ×
Supposons que A = P T P −1 avec T =  0 . . . × . Avec les notations précédentes,
0
0 λn
Y 0 (t) = P −1 X 0 (t) = T Y (t) ⇐⇒
 0
y1 (t) = λ1 y1 (t) + t 12 y2 (t) + · · · + t 1,n yn (t)





y20 (t) = λ2 y2 (t) + · · · + t 2,n yn (t)
..
.





yn0 (t) = λn yn (t)
On détermine alors yn puis on remonte... On retrouve alors X à l’aide de la formule X = PY (il est toujours
inutile de calculer P −1 ).
–9–
CHAPITRE 13. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
4 – Application à la résolution des équations différentielles linéaires d’ordre 2
Considérons l’équation différentielle linéaire à coefficients constants suivante :
a x 00 + b x 0 + c x = 0 (a 6= 0)
On peut réécrire cette équation sous la forme :
x0
x 00
−b/a −c/a
0 =
x
x
1
0
x0
−b/a −c/a
En posant X =
et A =
, on a X 0 = AX . Notons que le polynôme caractéristique de A est
x
1
0
c
b
χA = X 2 − X + . Ses racines sont donc solutions de l’équation (caractéristique !) a x 2 + b x + c = 0.
a
a
Là, plusieurs cas sont envisageables.
• Si A admet deux valeurs propres réelles
λ1 et λ2 distinctes, A est diagonalisable.
λ1 0
.
La matrice est alors semblable D =
0 λ2
X donc x est alors une combinaison linéaire de t 7→ eλ1 t et t 7→ eλ2 t .
• Si A admet deux valeurs propres complexes
non réelles conjuguées λ et λ, A est diagonalisable.
λ 0
La matrice est alors semblable D =
avec λ = α + iβ.
0 λ
X donc x est là encore une combinaison linéaire (à coefficients complexes) de t 7→ eλt et t 7→ eλt .
On peut donc écrire x(t) = C1 eλt + C2 eλt où (C1 , C2 ) ∈ C2 . Écrivons λ sous la forme α + iβ avec β 6= 0.
Comme les solutions recherchées sont réelles, on a, en particulier :
y(0) = C1 + C2 ∈ R ;
π
y
2β

‹
απ
= ie 2β (C1 − C2 ) ∈ R
Ce qui conduit à C = C1 = C2 , puis :
€
Š
y = eαt Ceiβ t + Ceiβ t = 2eαt Re Ceiβ t = eαt (c1 cos(β t) + c2 sin(β t))
(c1 , c2 ) ∈ R2
x est ainsi une combinaison linéaire (à coefficients réels) de t 7→ eαt cos(β t) et t 7→ eαt sin(β t).
Exercice 5
À quelle(s) condition(s) sur α et β les solutions obtenues sont-elles bornées sur R+ ?
• Si A admet une racine double λ, A n’est pas diagonalisable.
En effet, A serait alors semblable donc égale à λI2 ce qui n’est pas possible au vu de la formede A. λ 1
Elle est cependant trigonalisable ! Il existe même P ∈ G L2 (R) telle que T = P −1 AP avec T =
.
0 λ
Le nouveau système obtenu est alors de la forme :
y10 (t) = λ y1 (t) + y2 (t)
y20 (t) = λ y2 (t)
On trouve alors y2 (t) = c1 eλt puis y10 (t) = λ y1 (t) + c1 eλt donc y(t) = (c1 t + c2 )eλt .
Au final, X donc x est une combinaison linéaire de t 7→ eλt et t 7→ teλt .
Remarquons que dans les trois cas, l’ensemble des solutions forme un plan vectoriel.
– 10 –
Mickaël PROST
Lycée Chaptal – PT*
C – Résolution de l’équation avec second membre X 0 = AX + B
Traitons seulement le cas où A serait diagonalisable. Avec les notation précédentes,
X 0 = AX + B ⇐⇒ X 0 = P DP −1 X + B
⇐⇒ P −1 X 0 = DP −1 X + P −1 B ⇐⇒ Y 0 = DY + P −1 B
On peut alors résoudre le système Y 0 = DY et rajouter une solution particulière du système Y 0 = DY + P −1 B.
On aura alors X = PY . On notera que dans ce cas, le calcul de P −1 est nécessaire.
– 11 –
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