Clinique Dr C. Salimon présenté par les Drs D. Chappard et B. Guillaume IMPLANTOLOGIE Possibilités et limites du traitem en cas d’agénésie L’anomalie dentaire qu’est l’agénésie est souvent la cause d’un déficit esthétique et fonctionnel. le traitement de choix de ces édentements et s’associer à l’orthopédie dentofaciale. L’ agénésie dentaire est définie comme une anomalie de nombre correspondant à l’absence d’une unité dentaire, en relation avec l’absence du germe correspondant. C’est la plus fréquente des anomalies rencontrées dans notre pratique quotidienne. Elle peut concerner les dentures définitives ou lactéales. Fréquemment responsable d’un déficit esthétique et fonctionnel, elle est isolée lorsqu’elle se limite à un ou deux organes dentaires. Au-delà, on la qualifie de multiple, unilatérale ou bilatérale, il peut s’agir d’hypodontie, d’oligodontie ou d’anodontie (De Coster et coll., 2009). © Fotolia Ces édentements sont d’autant plus préjudiciables qu’ils concernent une population jeune, en période de croissance avec un hypo-développement des maxillaires, source d’un déficit esthétique à l’origine de troubles psychologiques. Le traitement vise à compenser le déficit esthétique et à restaurer la fonction en rétablissant le coefficient masticatoire. Le traitement revêt un caractère pluridisciplinaire avec la prévalence de l’orthopédie dentofaciale. Longtemps le traitement de choix des agénésies multiples s’est limité à la confection de prothèses amovibles. Le traitement de choix de l’agénésie isolée consistait en la fermeture des espaces par des moyens orthodontiques, l’alternative étant la prothèse fixée conventionnelle. L’avènement et la démocratisation de la thérapeutique implantaire tendent à modifier cette orientation. Il s’agit d’étudier les différentes catégories d’agénésies dentaires en définissant leurs principales caractéristiques sur le plan clinique afin de décider si le traitement implantaire peut effectivement être présenté comme le traitement de choix de ces édentements. 10 - Dentoscope n°149 Les agénésies sont généralement unilatérales Les agénésies dentaires constituent les anomalies de développement les plus fréquemment rencontrées dans l’espèce humaine (Nieminen 2009). Elles peuvent intéresser la denture temporaire avec une fréquence de 0,1 à 0,9 %, ou la denture définitive (fréquence de 5,5 % en Europe, 3,9 % aux USA si l’on excepte les 3es mandibulaires) (Thierry et coll., 2007). Elles sont unilatérales dans 75 % des cas, ou bilatérales. Toutes les dents peuvent être concernées, même si les statistiques indiquent qu’elles intéressent plus particulièrement les dents dites de « fin de série » : dents de sagesse (25 à 35 % d’agénésies), secondes prémolaires (2,5 à 4,5 %), incisive latérale (1 à 2 %). Cette anomalie se rencontre plus souvent chez les sujets de sexe féminin, appartenant à l’ethnie asiatique ou africaine, et beaucoup plus chez les typologies de face courte. L’oligodontie concerne 0,2 % de la population (Lauwers et coll., 2009). Les agénésies dentaires sont souvent associées à des anomalies de forme, de taille, ou de position des autres organes dentaires. On distingue tout d’abord les hypodonties non syndromiques qui concernent un organe dentaire dans 80 % des cas, un nombre réduit de dents dans moins de 10 % des cas, un nombre élevé de dents dans moins de 1 % des cas. Les hypodonties syndromiques sont quant à elles associées à une affection systémique comme la dysplasie ectodermique ou la trisomie 21. CAUSES DES AGÉNÉSIES Différentes hypothèses étiologiques ont été avancées comme une anomalie génétique (mutation survenue sur ent implantaire dentaire Le traitement implantaire peut s’avérer comme les gènes MSX1 ou PAX9) (Nieminen 2009), un accident du développement embryologique lié à un trouble endocrinien, une infection ou une carence et enfin des causes environnementales. L’hypothèse de la diminution du nombre de dents en liaison avec un mécanisme évolutif n’est pas retenue. En effet des documents protohistoriques attestent de la présence d’agénésies et d’hypergenésies depuis fort longtemps (Granat et coll., 1988). Dans le cadre des agénésies syndromiques, on retient une anomalie génétique qui va associer cette CV FLASH Dr Christophe SALIMON • Dr en chirurgie dentaire (Paris 7 - 1988). • CES de Technologie des matériaux utilisés en art dentaire (Paris 7 ) (1989). • DU Tissus calcifiés, biomatériaux et implantologie de l’université d’Angers (2014). e e Dr Daniel CHAPPARD • Doctorats d’état en médecine (1979) et es sciences en génie biologique et médical (1992). • Professeur des universités et praticien hospitalier (CHU et faculté de médecine d’Angers). • Directeur de l’unité Inserm u922 (2003-2012) et de l’unité Gerom, groupe d’études sur le remodelage osseux et les biomatériaux (depuis 2012). • Co-organisateur du Diplôme d’université « Tissu calcifiés et implantologie dentaire ». • Expert auprès des Ministères de la recherche autrichien, belge et roumain. • 456 publications (264 indexées sur PubMed et 404 sur ISI Web of Knowledge h-index = 45). • Ouvrages : « L’ostéoporose, mieux la connaître pour mieux la traiter » (Wolters Kluwer, 2009), « Tissu osseux et biomatériaux en chirurgie dentaire » (Quintessence, 2014). anomalie de nombre au trouble du développement d’un organe issu de l’ectoderme. 220 formes ont été étudiées, avec une symptomatologie variable. La plus répandue est la maladie de Christ-Siemens-Touraine (dysplasie ectodermique anhydrotique) qui associe à une agénésie multiple une dysmorphie faciale caractéristique, une intolérance à la chaleur, une absence ou diminution d’émission de sueur, des cheveux fins, secs et clairsemés, des atteintes oculaires, digestives et pulmonaires (Mokhtari et coll., 2012). Dr Bernard GUILLAUME • Doctorat d’état en médecine (CHU Saint-Antoine à Paris en 1981). • CES en stomatologie et chirurgie maxillo-faciale (1983). • Assistant hospitalier en stomatologie et chirurgie maxillo-faciale. • Qualifié en chirurgie maxillo-faciale (1985). • DU : Biomatériaux tissus calcifiés et implantologie dentaire, faculté de médecine d’Angers (1998). • Membre de l’Unité de recherche remodelage osseux et biomatériaux, faculté de médecine (Angers - 2000). • Président fondateur du Collège français d’implantologie. • Co-organisateur du DU : Tissu calcifiés et implantologie dentaire. • Expert près la Cour d’appel de Paris, de la Cour administrative d’appel de Paris et Versailles. • Médecin stomatologue agréé à l’Unesco. • Expert à l’Agence française de lutte contre le dopage et auprès de l’AFFSSAS. • Auteur de 50 publications et de 2 ouvrages : « Les implants dentaires » (Ellebore, 2011) et « Tissu osseux et biomatériaux en chirurgie dentaire » (Quintessence, 2014). Clinique Dr C. Salimon présenté par les Drs D. Chappard et B. Guillaume IMPLANTOLOGIE Le diagnostic avec examen radiologique Les agénésies dentaires isolées (1 ou 2 organes). Maintien ou ouverture de l’espace Le diagnostic repose sur plusieurs éléments, le premier étant l’anamnèse avec recherche d’une prédisposition familiale. L’examen clinique révèle l’absence de la dent (définitive ou lactéale) la persistance de la dent lactéale, la présence d’anomalies de forme et de dimension associée. En radiologie on utilise l’orthopantomogramme (ou radiographie panoramique), le bilan rétro-alvéolaire long-cone, l’examen tomodensitométrique (scanner ou Cone Beam) qui confirment la présomption d’agénésie et mettent en évidence d’autres anomalies, des dents incluses, le degré de rhizalyse de la dent lactéale, l’état radiculaire des dents voisines, le volume osseux résiduel et les obstacles anatomiques en prévision du traitement implantaire. Le diagnostic différentiel sera posé avec une inclusion dentaire, un retard d’éruption ou une exfoliation. Toutes les autres dents peuvent être concernées avec prévalence pour les secondes prémolaires mandibulaires et les incisives latérales maxillaires. Les deux alternatives sont la fermeture ou l’ouverture de l’espace édenté avec remplacement prothétique de la dent. En présence d’une dysharmonie dento-maxillaire, on a recours à l’extraction de la dent lactéale et au traitement orthodontique afin de fermer l’espace. Les inconvénients sont la diminution de la taille du maxillaire, du nombre de dents, un schéma occlusal anormal et enfin un déficit esthétique pour les dents antérieures. En absence d’encombrement dentaire, on envisagera le remplacement prothétique de la dent. Un traitement orthodontique d’interception devra donc créer l’espace qui accueillera la prothèse. Une fois le résultat obtenu, il sera maintenu par des artifices prothétiques. LE TRAITEMENT DE L’AGÉNÉSIE DENTAIRE Cela peut être une prothèse amovible : peu coûteuse et facile à réaliser, elle manque toutefois de confort et favorise la survenue de pathologies parodontales et carieuses sur les dents support. Une autre option est le bridge collé, procédé esthétique et fonctionnel. Sa tenue à long terme est aléatoire et sa mise en place peut nécessiter la préparation des dents support. Le traitement définitif interviendra à la fin de la croissance, vers 20 ans. Il peut s’agir d’une prothèse implanto-portée, solution que nous détaillerons ou d’un bridge scellé conventionnel qui impose la préparation des dents support et leur fait supporter des contraintes occlusales excessives. Selon Lindquist, 35 % des bridges réalisés ne sont plus en place après 20 ans (Lindquist et coll., 1997). Un bridge collé peut être la solution de choix en cas de restauration de l’édentement à un âge plus avancé du patient (Samama et coll., 2005). Il s’agit d’étudier les différentes catégories d’agénésies dentaires ]f\ ÒfakkYfld]mjkhjaf[ahYd]k[YjY[l jaklaim]kkmjd]hdYf[dafaim]YÒf de décider si le traitement implantaire peut effectivement être présenté comme le traitement de choix de ces édentements. Fig.1 L’agénésie dentaire est fréquemment diagnostiquée pendant l’enfance. La compensation de l’édentement devra permettre de restaurer le coefficient masticatoire, d’assurer l’apprentissage de la phonation, de contribuer à l’intégration sociale par le rétablissement de l’esthétique, de favoriser une croissance harmonieuse du maxillaire et enfin d’assurer des rapports inter et intra-arcades fonctionnels. Le handicap est parfois associé à des troubles du développement d’autres organes. Le traitement d’interception assurera la fonction pendant la phase de la croissance grâce à une prothèse amovible dont la rétention sera éventuellement améliorée par la pose de deux ou quatre implants pris en charge par l’Assurance maladie chez l’enfant après 6 ans dans le cadre du traitement d’une maladie rare, jusqu’à la fin de sa croissance. La difficulté réside dans la nécessité de réévaluer l’adaptation de la prothèse tout au long de la croissance, tous les trois mois en moyenne, afin de permettre un développement harmonieux des maxillaires (Lauwers, Wojcik, Delbarre, Movaghar and Ferri 2009). Le traitement définitif intervient à la fin de la croissance avec de préférence le recours à la prothèse implanto-portée souvent associé à des greffes autologues. 12 - Dentoscope n°149 Fig.1 : Cas n°1 d’une agénésie d’une incisive latérale mandibulaire. (A) : Etat initial avant la disjonction. (B) : Tracé opératoire de la disjonction. (C) : Écartement et comblement. (D) : Résultat à 6 mois. (E) : Pose d’un implant Euroteknika. 2€ PAR HEURE DE TRAVAIL * Le nouveau poste de travail XO 4 vous permet de réaliser les meilleurs traitements sur des patients détendus tout en protégeant votre santé et vos finances. C’est important, car vous allez passer plus de 20.000 heures en compagnie de votre prochain poste de travail. Vous pouvez bien entendu porter votre choix sur un équipement bon marché pour économiser quelques euros. Mais alors vous ne profiterez pas des valeurs XO. * Rendez-vous sur www.xo-care.com pour en savoir plus. DISTRIBUTEURS XO EN FRANCE: Brive ............................. Chatelleraut .................. Clermont Ferrand ......... Draveil .......................... Emerainville .................. Horbourg-Wihr ............. Idron ............................. OMNIUM DENTAIRE J L DENTAL GDD DENTALFIX DENTAL WAVE B D S DENTAL DEPÔT PÝRÈNÈES-DENTAIRE Lunel ............................. Marseille ....................... Merignac ....................... 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La pose des implants ne devrait intervenir qu’une fois la croissance terminée, pas avant 20 ans, parfois plus tardivement. On vérifiera la fusion de l’épiphyse et de la diaphyse sur une radio du poignet. Plus sûrement, on attendra la superposition parfaite de deux tracés céphalométriques réalisés à partir de téléradiographies de profil réalisées à six mois d’intervalle. LE TRAITEMENT DES AGÉNÉSIES MULTIPLES Fig.2 : Cas n°1, agénésie d’une incisive latérale mandibulaire. (A) : Scanner initial. (B) : Coupes scanner : état de la crête avant la disjonction. (C) : Scanner effectué six mois après la disjonction. (D) : Coupes scanner, après la disjonction. LE PROTOCOLE IMPLANTAIRE APPLIQUÉ AUX PRINCIPAUX CAS Un ensemble d’éléments sont à recueillir lors du diagnostic pré-implantaire. Nous nous intéresserons ensuite à la particularité du traitement implantaire chez le jeune patient puis au traitement implantaire des cas d’agénésies les plus fréquemment rencontrés (Muller et coll., 1970). Le traitement de l’agénésie s’adressant plutôt à un patient jeune, la prise de décision sera assurée de façon conjointe avec les parents. Il faut s’assurer du profil psychologique du patient : ses souhaits, sa demande esthétique et sa motivation (respect des rendez-vous). Le bilan médical général permet d’évaluer l’état global du patient et de préciser l’existence d’une contre-indication ou d’un risque médical. Il doit se présenter sous forme d’un questionnaire rempli par le patient, accompagné d’examens complémentaires. On recherchera une maladie systémique de risque locaux (tabac, alcool, bruxisme, foyers endodontiques et parodontaux). Le bénéfice du traitement étant supérieur au risque, la pose d’implants est indiquée chez de jeunes patients après 6 ans pour le traitement d’une hypodontie associée à une maladie rare. 14 - Dentoscope n°149 L’examen clinique comprendra un examen exo-buccal, endo-buccal, un bilan parodontal, une analyse occlusale avec une évaluation esthétique et une étude prothétique. L’examen radiographique La radiographie met en évidence le volume osseux disponible et peut apporter des informations sur la qualité osseuse des sites à implanter. La radiographie panoramique (orthopantomogramme) permet de visualiser les maxillaires, les arcades dentaires, les ATM, les sinus maxillaires, le nerf alvéolaire inférieur. Elle met en évidence les diverses pathologies dentaires et osseuses, la hauteur disponible, les rapports entre le site édenté et les obstacles anatomiques. Chez l’édenté partiel, le bilan long-cone précise le diagnostic parodontal, endodontique, prothétique. L’examen tomodensitométrique (scanner) permet d’obtenir des renseignements sur les rapports tridimensionnels entretenus entre les différents éléments d’une région donnée, de visualiser ces rapports sous forme de coupes ou de reconstructions tridimensionnelles et de simuler la mise en place d’implants grâce au couplage informatique avec des logiciels de planification implantaire. Le Cone Beam, tomographie volumique à faisceau conique, permet d’obtenir une imagerie 3D du volume à implanter. Il est d’une qualité supérieure à celle du scanner pour l’examen des tissus durs, ou en présence d’éléments métalliques, tout en délivrant une irradiation moindre que celui-ci. L’utilisation d’un guide radiologique facilite l’interprétation du scanner. Il est confectionné en résine acrylique ou en plaque thermoformée. Ce guide va permettre de localiser aisément l’emplacement du forage à la lecture du scanner. Le traitement implantaire chez le jeune patient L’implant se comporte comme une dent lactéale ankylosée. Les remaniements osseux dus à la croissance entraînent un enfouissement progressif des implants. De plus cette croissance n’étant pas constante en tous points des maxillaires (l’angle mandibulaire et le secteur incisif maxillaire ont une croissance plus importante), l’axe des implants posés précocement ne présentera plus la même orientation à la fin de celle-ci, ce qui perturbera la reconstitution finale. Les prothèses implanto-portées initialement posées se retrouvent en infraclusion. On peut observer une altération du germe de la dent voisine de l’implant ou une déviation de son orientation. Lors de son éruption des défauts infra-osseux péri-implantaires appararaîtront. On prendra donc garde à ne pas utiliser des prothèses implanto-portées reliant les deux hémi-maxillaires pendant la phase de croissance, ce qui va perturber le développement transversal de l’os. Le diagnostic est souvent précoce, le handicap lourd et généralement associé au trouble du développement d’autres organes. Le traitement est donc long pendant toute la période de croissance de l’organisme. Il vise à assurer les principales fonctions de celui-ci afin de faciliter un développement harmonieux et une intégration sociale. Il s’appuie fréquemment sur une prothèse adjointe, de préférence stabilisée par la pose de deux ou quatre implants, et qui sera réévaluée régulièrement pour l’adapter à la croissance des maxillaires. Il est important de corriger progressivement la DVO afin d’obtenir une occlusion stable servant de référence à la réhabilitation future. Cette prothèse adjointe aura un rôle de stimulation pour la croissance osseuse, et de mises en condition musculaire, articulaire et phonétique progressives (Lauwers, Wojcik, Delbarre, Movaghar and Ferri 2009). C’est à cette période que pourra être entrepris un traitement d’orthopédie dentofaciale préliminaire dont l’objectif sera d’agencer favorablement les organes dentaires présents dans le but de réaliser le traitement prothétique définitif dans les meilleures conditions. On évitera de fermer les espaces afin de conserver la longueur de l’arcade. On imagine aisément l’importance de la collaboration entre les différents praticiens (orthodontiste, chirurgien, prothésiste) tout au long d’un traitement qui s’étend sur de longues années ainsi que de la coopération du jeune patient et de ses parents (Illouz et coll., 2000). MARIAGE RÉUSSI L'efficacité du numérique L'ergonomie du film Les avantages du numérique et du film, enfin réunis. 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RETROUVEZ NOTRE SÉLECTION EXPERTE D’OUVRAGES EN MÉDECINE BUCCO-DENTAIRE Le traitement prothétique définitif n’intervient qu’en fin de croissance et est mené en fonction des caractéristiques propres de l’édentement. Il faudra privilégier la réalisation de prothèses fixées implanto-portées en prévoyant un implant par dent remplacée et en bannissant tout appui mixte dentaire et implantaire. Ces édentements anciens s’accompagnent constamment de dysmorphoses qui vont provoquer un trouble de la croissance verticale et vont imposer d’avoir recours à des procédés de chirurgie orthognathique, de greffes d’apposition osseuse, de disjonction, de déviation du nerf alvéolaire inférieur (Guillaume 2014, Lauwers, Wojcik, Delbarre, Movaghar and Ferri 2009, Thalji et coll., 2010) ; (Fig.1 à 3). Le traitement des agénésies isolées Les modalités du traitement dépendront évidemment de la topographie de l’édentement. L’agénésie d’une incisive latérale maxillaire est responsable d’un déficit esthétique majeur. La racine de cette dent servant de guide lors de l’éruption de la canine, il y a un risque accru d’inclusion de cette dent. Différentes situations cliniques vont se présenter : soit la persistance de l’incisive latérale lactéale, soit la canine définitive est à la place de l’incisive latérale avec persistance de la canine lactéale, soit il y a absence d’incisive latérale avec migration de l’incisive centrale et de la canine en son site et la présence de diastèmes. Enfin il peut y avoir déviation de la ligne médiane en cas d’agénésie unilatérale (Martin 1992, Sabri et coll., 2008, Tuverson 1970) ; (Fig.4 et 5). Fermeture de l’espace avec canine en position d’incisive latérale Deux possibilités thérapeutiques se présentent : soit la fermeture de l’espace avec canine en position d’incisive latérale, soit une ouverture de l’espace et une restauration prothétique. Les indications sont représentées par une dysharmonie dentomaxillaire, une protrusion dentoalvéolaire avec incompétence labiale et prochéilie et un encombrement mandibulaire imposant l’extraction de la 2e prémolaire mandibulaire. Cette option nécessite la transformation de la canine en incisive latérale. Une égression orthodontique de cette dent permettra d’aligner les collets. On devra procéder à une coronoplastie de la canine avec adjonction de composite et meulage du bombé vestibulaire. La teinte souvent plus sombre de cette dent nuira à l’esthétique et peut imposer d’avoir recours à une facette céramique. Les avantages de cette option sont la durée du traitement et un coût réduits, un résultat acquis dès la fin du traitement en orthopédie dentofaciale (ODF), l’absence de restauration prothétique dont la durée de vie est nécessairement limitée. Les inconvénients sont : la pose d’une contention collée, Fig.3 un schéma occlusal aberrant (l’absence de fonction canine impose une fonction de groupe sollicitant des prémolaires dont les racines sont parfois courtes), la teinte et la dimension de la canine peuvent rendre difficile le subterfuge et enfin la présence d’une bosse canine en position d’incisive latérale (Nordquist et coll., 1975). Ouverture de l’espace et restauration prothétique Les indications sont représentées par la présence d’espace disponible au maxillaire avec absence de biproalvéolie, la présence d’une occlusion inversée antérieure et le manque de support de la lèvre supérieure. Le traitement ODF préalable va permettre de maintenir ou de rétablir une normocclusion postérieure, de normaliser les surplombs vertical et horizontal, de fermer les éventuels diastèmes antérieurs et de placer en position distale les canines. Ceci sera réalisé dans le but d’obtenir un espace prothétique adéquat, respectant différents critères esthétiques, orthodontiques et prothétiques. En matière d’esthétique, la largeur statistique d’une incisive latérale est de 6,88 mm chez l’homme, de 6,77 mm chez la femme. Une autre valeur donnée est de 77 % de la largeur de l’incisive centrale. En fait, une certaine variabilité dimensionnelle est acceptée, l’essentiel étant d’assurer la symétrie par rapport au côté controlatéral (Pini et coll., 2013). Sur le plan orthodontique on cherche à obtenir une occlusion de classe I canine, des surplombs horizontal et vertical harmonieux (2 mm) et des lignes médianes inter-incisives alignées. Sur le plan prothétique, la largeur minimale de l’espace est de 7 mm, ce qui permet de placer un implant de diamètre réduit (3,2 mm) en respectant un espace de 2 mm avec les dents voisines. Le traitement ODF doit assurer dès le début un parallélisme entre les racines de l’incisive centrale et de la canine. Le déplacement de ces dents peut provoquer un mouvement de version autour du centre de rotation (tiers apical radiculaire), et rapprocher les apex, ce qui empiète sur l’espace disponible pour la fixture. Chez le jeune enfant, il est recommandé de favoriser l’éruption mésiale de la canine dans le site de l’incisive latérale manquante par une extraction précoce de l’incisive latérale temporaire. La canine prend place accompagnée d’un environnement osseux favorable et sera distalée par des moyens orthodontiques ultérieurement. Le maintien de l’espace obtenu par le traitement orthodontique préliminaire est assuré par une prothèse adjointe, ou mieux un bridge collé. On pourra créer orthodontiquement un surplomb qui permettra de placer des ailettes qui n’interféreront pas avec l’occlusion, quitte à corriger ce surplomb avant le traitement implantaire. Ce Fig. 3 : Cas n°4 : orthopantomogramme d’un cas d’agénésie dentaire multiple. Clinique Dr C. Salimon présenté par les Drs D. Chappard et B. Guillaume IMPLANTOLOGIE bridge collé est le plus à même de maintenir l’axe radiculaire des dents voisines. Le scanner permet de mesurer le volume osseux dans le sens transversal. On pourra constater que dans ce secteur la crête osseuse a fréquemment une forme effilée et présente une concavité naturelle dans la région apicale qui contraste avec le relief enserrant l’incisive centrale et le volume de la bosse canine (Uribe et coll., 2013). Le recours à une greffe d’apposition osseuse, puis à un greffon conjonctif enfoui vont permettre de placer dans un second temps un implant dans de meilleures conditions, en position plus vestibulée, qui pourra éventuellement supporter une prothèse transvissée. La forme et le contour gingival seront fortement impliqués dans le résultat esthétique final. Le point d’impact sera centré entre les deux dents voisines. Comme on doit respecter un espace de 2 mm par rapport à celles-ci, on aura fréquemment recours à des implants de diamètre réduit (3 mm : Euroteknika ; 2,8 mm : Anthogyr ; 2,5 mm : TBR), afin de préserver l’esthétique par la reconstitution d’une papille gingivale. Le col de l’implant sera placé de 2 à 4 mm sous la jonction amélo-cémentaire des dents voisines. Le respect d’une distance maximale de 5 mm entre la crête osseuse et le point de contact de la dent voisine assure une bonne prédictibilité quant à la formation de cette papille (Tarnow et coll., 1992). La reconstitution prothétique définitive sera conduite au moyen d’une prothèse transvissée de préférence. Les techniques de CFAO permettent d’avoir recours à des matériaux esthétiques, par exemple une armature zircone céramisée. Toutefois, si l’intégration esthétique est excellente, les défauts d’adaptation marginale seraient plus importants qu’avec les prothèses céramo-métalliques (Hosseini et coll., 2013). La seconde prémolaire mandibulaire Il peut être indiqué là aussi de fermer l’espace, en présence d’une DDM importante de l’arcade mandibulaire. On recherchera le maintien ou l’ouverture de l’espace en cas d’agénésie unilatérale. Dans le cas d’une agénésie bilatérale, ce choix se fera en présence d’une relation de classe I molaire sans encombrement, de classe II avec surplomb important, de rotation mandibulaire postérieure et de profil convexe (Kokich et coll., 2006). 18 - Dentoscope n°149 Fig.4 Fig.4 : Cas n°2 : agénésie des incisives latérales maxillaires. (A) : Orthopantomogramme initial. (B) : Orthopantomogramme après pose de deux implants. (C) : Aspect, 6 ans après la pose des implants. On peut envisager le maintien sur l’arcade de la dent lactéale le plus longtemps possible afin d’assurer le maintien de l’espace mésio-distal entre la première prémolaire et la première molaire définitive. Il est toutefois indispensable de contrôler radiographiquement l’état de résorption radiculaire de cette molaire lactéale. Si celle-ci s’ankylose, il vaudra mieux procéder rapidement à son extraction pour éviter une perte conséquente lors d’une intervention en fin de croissance. Dans ce cas, il peut être judicieux de laisser la molaire ou la prémolaire occuper l’espace libéré. Cette migration dentaire créant les conditions d’un environnement osseux favorable à l’implantation, moyennant un traitement orthodontique afin de déplacer secondairement la dent migratrice (Kokich et coll., 2006). En tout état de cause, les dimensions mésio-distales de la molaire lactéale étant souvent supérieures à celles de la prémolaire absente, une correction orthodontique s’imposera, sauf à procéder à des coronoplasties proximales de la dent lactéale régulièrement et à laisser la première prémolaire et la molaire migrer dans l’espace libéré jusqu’à obtention d’un espace adéquat. La chirurgie implantaire est menée de façon classique, à la fin de la croissance du patient. Si la dent lactéale est restée en place, que l’environnement osseux est favorable, et que les dimensions de cette dent sont identiques à celles de la dent prothétique, il peut être réalisé une extraction avec implantation immédiate, voire une mise en esthétique immédiate (Noharet et coll., 2009). Un contrôle radiographique permet de préciser les rapports de l’implant avec le canal alvéolaire inférieur et son émergence, le foramen mentonnier. La longueur de l’implant est choisie en respectant une marge de sécurité de 2 mm par rapport à cet obstacle anatomique. Son diamètre est déterminé sur la coupe coronale du scanner. Celui-ci sera généralement de 4 mm (RP). Le protocole de forage est classique. La chirurgie pourra se dérouler en un temps opératoire. Un pilier de cicatrisation est alors mis en place et restera jusqu’à la réalisation de la prothèse définitive, 3 mois plus tard. LA PROTHÈSE IMPLANTO-PORTÉE A MODIFIÉ LA PRISE EN CHARGE DE L’AGÉNÉSIE Les agénésies dentaires sont des anomalies de développement rencontrées fréquemment. Elles sont généralement dépistées précocement mais, si elles sont prises en charge dans la petite enfance, leur traitement définitif ne s’achèvera qu’à la fin de la croissance. Qu’il s’agisse d’agénésie syndromique, associée à des manifestations plus générales, ou d’agénésie localisée, le traitement devra faire appel à une équipe pluridisciplinaire. La communication entre les différents membres de cette équipe est essentielle. Le spécialiste en orthopédie dentofaciale va traiter les dysmorphoses, permettre les différentes fonctions de la sphère orofaciale, déplacer les organes dentaires afin de placer des années plus tard une prothèse esthétique et fonctionnelle. Le prothésiste va réaliser des prothèses d’attente et les remanier au cours de la croissance avant de réaliser les prothèses définitives en fin de celle-ci. Le chirurgien Clinique Dr C. Salimon présenté par les Drs D. Chappard et B. Guillaume IMPLANTOLOGIE Fig.5 Figure 5 : Cas n°3 : orthopantomogramme d’un cas d’agénésie des incisives latérales maxillaires. cette technique, dans le cas qui nous intéresse, est complexe par le nombre des intervenants et la durée du traitement, et coûteuse. Les progrès de la dentisterie adhésive pourraient nous offrir une option thérapeutique intéressante dans un proche avenir. L’idéal thérapeutique proposé au patient ne correspondra pas forcément à son désir ni à ses possibilités. Le rôle du thérapeute est de présenter les différentes alternatives au patient et de l’orienter vers un compromis acceptable. Il n’y a pas de règle absolue dans le traitement des agénésies dentaires. REMERCIEMENTS pourra être amené à réaliser des interventions de chirurgie orthognathique, avant de placer les implants en fin de croissance, si telle est l’option retenue. Le traitement implantaire apparaît aujourd’hui comme le traitement de choix en termes d’esthétique, d’économie tissulaire, et de confort pour le patient. Il n’en reste pas moins qu’il représente un investissement conséquent, qu’il s’étend sur une durée importante et qu’il s’accompagne fréquemment comme nous l’avons vu d’interventions chirurgicales qui peuvent être lourdes. Il faudra faire apprécier ces éléments aux parents du jeune patient lors de l’élaboration du plan de traitement. A contrario, la solution orthodontique pure de fermeture des espaces peut sembler une solution simple, relativement rapide, pérenne et moins coûteuse. Il n’en reste pas moins qu’elle aboutit à une situation esthétique, fonctionnelle tant sur le plan local (rapports interdentaires) que régional (sphère orofaciale) qui n’est qu’un compromis. L’avènement de la prothèse implanto-portée a considérablement modifié la prise en charge de l’agénésie dentaire. Pendant longtemps, les praticiens ont privilégié la fermeture orthodontique des espaces au détriment de l’équilibre de la sphère orofaciale car les seules alternatives à ce traitement étaient la réalisation de prothèses plurales dento-portées mutilantes pour leurs piliers, des prothèses adjointes inconfortables et destructrices des tissus de soutien et des bridges collés à tenue aléatoire. Nous disposons aujourd’hui avec les implants d’une solution économe en tissu dentaire, esthétique et fiable dans le temps. Il reste que la mise en œuvre de Ce travail a été soutenu comme mémoire pour l’obtention du Diplôme d’université « Tissus calcifiés et implantologie dentaire » à l’Université d’Angers et a obtenu l’une des meilleures notes lors de l’année universitaire 2013-2014. Il est publié en accord avec les coordonnateurs scientifiques de ce DU le Dr Bernard Guillaume (Collège français d’implantologie-CFI) et le Pr Daniel Chappard – GEROM (Groupe d’études sur le remodelage osseux et les biomatériaux, Angers). L’iconographie clinique et radiologique a été aimablement fournie par le Dr Bernard Guillaume (CFI). références DE COSTER P. J., MARKS L. A., MARTENS L. C., HUYSSEUNE A. : « Dental Agenesis : Genetic and Clinical Perspectives ». J. Oral Pathol. Med., 2009 ; 38 : 1-17. GRANAT J., CHAPELLE P. : « Agénésies, hypergénésies dentaires et évolution ». Actualités Odontostomatol., 1988 ; 161 31-48. GUILLAUME B. : « Autogreffe, xénogreffe et allogreffe : utilisation clinique. In : Tissu osseux et biomatériaux en chirurgie dentaire ». Eds B. Guillaume, M. Audran and D. Chappard ; Quintessence International, Paris (2014), 24, 337-366. 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