dons et religions © ABM agence de la biomedecine la dignité de la personne humaine à travers l’usage fait de son cadavre et c’est pourquoi l’Église retient le consentement avisé de la personne relativement au don de ses organes ainsi que l’accord de sa famille à travers les liens de parenté et de filiation définis par le mariage. Il ne faut pas culpabiliser un refus de don. Pour les Protestants, la mort encéphalique est acceptée, le progrès médical qui permet la greffe est une bienfaisante intervention du Seigneur dans un monde plutôt occupé à sa propre destruction. Mais là encore l’expression de la volonté du donneur et le respect des souhaits de sa famille sont requis. Les témoins de Jéhovah font une interprétation très littérale de la Bible, mais ne s’opposent pas systématiquement au prélèvement ni à la greffe puisque les organes prélevés sont lavés de leur sang. Pour les Chrétiens orthodoxes, le corps est l’image de la perfection de la création, la maladie le fruit du péché. Il y a un fort débat autour de la mort encéphalique car l’âme ne quitte le corps qu’au bout de 3 jours après le décès. Le don est possible si le défunt a exprimé sa volonté, si sa famille l’accepte. Dans le Judaïsme deux principes vont s’affronter : la préservation de la vie est un devoir et toute mutilation sur les morts est interdite. Le Talmud, dans la Halakha, définit la mort par l’arrêt respiratoire, l’arrêt de tous les mouvements et l’arrêt des battements du cœur. Lors d’une réunion au Sénat en 2004, le rabbin Ariel Messas disait « il y a une discussion actuellement pour savoir si la mort encéphalique est le critère qui détermine la fin de la vie ». Aujourd’hui, dans l’Etat d’Israël, la mort encéphalique est légalement reconnue. De plus il existe un certain nombre d’interdits : l’interdiction de l’enlaidissement du corps par tout acte de défiguration, Nivoul Hamet, la défense de tirer profit de la dépouille mortelle, Issour Hanaa, l’obligation de l’inhumation du corps entier, Hiyouv Kévoura. Dans ces conditions le prélèvement d’organes est problématique mais il est possible avec l’accord de son vivant de la personne défunte. En effet, l’organe prélevé échappe à la mort, sauvegarde la vie du receveur et donc surmonte par là même tous les interdits de la Torah. On comprend facilement que les avis soient partagés entre orthodoxes et libéraux. Dans l’Islam, la vie, l’organisation sociale et familiale sont rythmées et nourries par la religion, les traditions sont fortes, l’homme, responsable de ses actes, est directement soumis à Dieu dont la parole est écrite dans le Coran. Ici encore les positions sont contrastées : la position officielle ne refuse pas le prélèvement, des posi- DOSSIER GREFFE RENALE tons privées affichent une pluralité d’opinions. La mort encéphalique est débattue car la mort ne peut être attestée que sur des critères traditionnels. Dieu interdit de disposer de la vie et du corps qui est son réceptacle, la mutilation du cadavre est une offense à Dieu (Sourate 32,6), le corps entier est nécessaire à la résurrection. Pourtant, les plus hautes autorités religieuses de l’Islam (Académie du droit musulman affiliée à la Ligue islamique mondiale et à l’Organisation de la conférence islamique sur la transplantation) décident que la mort encéphalique est la mort de la personne, que le prélèvement d’un organe sur une personne décédée pour greffe est permis . Mais le défunt doit avoir pris position de son vivant et sa famille sous l’autorité du père et du frère ainé ou la communauté musulmane joue un rôle majeur. La transplantation d’organe est à considérer comme Hassana, une bonne action, Sadaka, une aumône. « Celui qui aura rendu la vie à un homme sera regardé comme s’il avait rendu la vie à tout le genre humain » peut-on lire dans la Sourate 5, 35. En conclusion pour l’Islam des prises de positions diverses sont là encore possibles. Le bouddhisme, sagesse, plus que religion exprime les mêmes difficultés à partir des mêmes questions : la mort encéphalique n’est pas acceptée par tous et l’âme ne quitte le corps que plus tardivement. Par contre, « le don d’organe peut contribuer à aider autrui ce qui est conforme à la notion bouddhiste de compassion », proclamait l’Union bouddhiste de France dès 1986. Si le défunt a clairement exprimé le souhait de donner, celui-ci doit être respecté et sa famille doit être consultée. En conclusion il est facile de comprendre les refus pour motifs religieux, même si cette raison est rarement officiellement avancée. Les familles, les proches ressentent le devoir de protéger le cadavre. Par contre la connaissance des religions par les équipes de coordination qui rencontrent les familles, peut aider des proches hésitant en leur fournissant des informations précises ou en leur faisant rencontrer des religieux. On voit aussi la difficulté pratique d’appliquer la loi, qui demande de recueillir la non opposition du défunt et non de demander l’autorisation aux proches. \\\ octobre 2011 - avril 2012 - Reins-Échos n°11 /// 13