LE JOURNAL novembre-décembre 2012 ÉDITORIAL Ce qui anime notre projet au Théâtre de la Ville est la volonté de partage. Partage de nos deux scènes et partage d’un théâtre de création, de ses outils et de ses financements, avec des artistes de disciplines différentes. Après avoir vu naître la création mondiale du polonais Krystian Lupa récemment, nous découvrirons celle de Jean-Claude Gallotta, en hommage à Hervé Guibert, puis celles de deux artistes d’une autre génération, que nous avons associés à cette grande maison : l’auteur et metteur en scène David Lescot et le chorégraphe Rachid Ouramdane. Le premier créera Les Jeunes, où il s’empare d’une représentation de l’adolescence, le second verra avec Sfumato sa « danse documentaire » se déployer sur le grand plateau du Théâtre de la Ville. Dans ce même mouvement, il nous importe constamment d’accompagner les compagnies d’aujourd’hui dans leurs visées artistiques, David Lescot, Rachid Ouramdane, mais aussi en cette fin d’automne, Marie-Louise Bischofberger qui nous fera découvrir Une petite douleur, pièce rare d’Harold Pinter. Nous portons également une attention renouvelée à l’ouverture au monde. Accompagner les artistes internationaux sur la durée, exposer les expériences singulières qui forment leur répertoire, demeurent un axe essentiel de notre Théâtre. Ainsi, après les Chœurs Slovènes de Heiner Goebbels, pourrons-nous découvrir DESH, solo dans lequel Akram Khan, fidèle compagnon du Théâtre de la Ville, interroge ses racines. Cet accompagnement fidèle ne va pas sans le désir d’ouvrir notre maison à ceux qui n’y ont jamais été présentés : le directeur de troupe ukrainien Vlad Troitskyi présentera son théâtre rêveur et musical, le collectif berlinois She She Pop une adaptation hautement personnelle du Roi Lear et le Ballett am Rhein avec deux pièces de son directeur Martin Schläpfer. Tous viennent pour la première fois au Théâtre de la Ville, qu’ils y soient les bienvenus. Le Parcours {enfance & jeunesse} poursuit sa deuxième édition. Cette aventure nouvelle à Paris, développée avec cinq théâtres partenaires, est issue de notre volonté d’offrir aux plus jeunes et à leurs parents un ensemble de grands spectacles de théâtre, de danse et de musique, français et internationaux, visible dès le plus jeune âge. Tout au long de la saison, ces spectacles sont proposés à des horaires adaptés aussi bien au temps scolaire qu’à celui de la sortie familiale, et sont accompagnés d’un vaste projet d’école du spectateur ouvert à tous. J’ai souhaité que le Théâtre de la Ville s’investisse dans un travail sur la mémoire, proche ou lointaine, des arts de la scène. Après la réflexion sur la trajectoire de Merce Cunningham, entamée bien avant sa disparition, le retour du Berliner et de son flamboyant répertoire ou le portrait Maguy Marin imaginé pour le Festival d’Automne – le Théâtre de la Ville en a été un partenaire actif –, nous aurons l’occasion rare de retrouver Jours étranges, une pièce créée en 1990 par Dominique Bagouet, revitalisée par Catherine Legrand et Anne-Karine Lescop avec dix adolescents de Rennes. Jeunesse et transmission, là encore. Si centrale que soit la capitale, il importe constamment que le Théâtre de la Ville se « décentre », s’ouvre à toutes les nations, d’Europe et du monde, aille pratiquer son art aussi dans ces pays qu’il invite. Notre compagnie est ainsi partie cet automne durant un mois jouer Rhinocéros de Ionesco dans quatre grandes villes des États-Unis, grâce tout d’abord au désir de Joe Melillo, directeur de la Brooklyn Academy of Music à New York, rejoint par d’autres à Los Angeles, Berkeley/San Francisco et Ann Arbor/Detroit. D’est en ouest, dans des salles immenses, nous avons tenté de renouer avec cette grande histoire artistique transatlantique, rencontré au total près de 20 000 spectateurs et mesuré l’immense appétit de tous pour le Théâtre venu d’ailleurs – beaucoup plus rare aux États-Unis que chez nous – et pour une langue française qui suscite encore aujourd’hui un intérêt puissant. Si la tâche qui nous incombe est de donner du plaisir, des lumières et de l’intelligence aux vivants que nous réunissons, ce que nous visons c’est la plus grande diversité possible de cette assemblée, dans un Théâtre où l’acte artistique sous toutes les formes qu’il peut adopter porte toujours une manière de penser l’à-venir. Emmanuel Demarcy-Mota Des étudiants de l’University of Michigan attendent le Rhinocéros dans les rues de la ville © TRULY RENDER 2 • THÉÂTRE DE LA VILLE I THÉÂTRE DES VILLES DU MONDE Théâtre de la Ville PARIS novembre-décembre 2012 RHINOCÉROS AUX USA • 3 novembre-décembre 2012 LA TROUPE DU THÉÂTRE DE LA VILLE AUX ÉTATS-UNIS Rhinocéros d’Eugène Ionesco, mis en scène par Emmanuel Demarcy-Mota, a été invité cet automne dans quatre grandes villes des États-Unis (Los Angeles, San Francisco, New York, Ann Arbor). Retours sur une tournée-événement. À GAUCHE Salle du Royce Hall à l’UCLA-Los Angeles © J. C. // À DROITE Les étudiants d’Ann Arbor sont-ils devenus rhinocéros ? Power Center for Performing Arts-Ann Arbor (Detroit) © TRULY RENDER Quelles conclusions tirez-vous de la présence du Théâtre de la Ville et de Rhinocéros dans votre théâtre ? Il est important que vos lecteurs comprennent le succès artistique énorme de Rhinocéros au Howard Gilman Opera House de la BAM. La salle contient 2000 places et les trois représentations étaient complètes. Le spectacle a capturé l’imagination de notre public, les spectateurs étaient à l’écoute des acteurs travaillant sur la scène, complètement fascinés par le travail et très généreux avec leurs applaudissements à la fin de la pièce. Rhinocéros est un triomphe artistique. Emmanuel Demarcy-Mota a réuni un groupe d’acteurs talentueux, sélectionné des collaborateurs artistiques très imaginatifs et mis en scène la pièce de Ionesco avec beaucoup d’énergie, c’était une vision épique de cette pièce. Ce sera une étape importante pour le Next Wave Festival 2012 à la BAM. À GAUCHE EXTRAITS DE PRESSE Salut des comédiens à New York © CHRISTOPHE LEMAIRE // À DROITE L’équipe à l’entrée des artistes du Théâtre de l’UCLA-Los Angeles © J. C. NEW YORK TIMES Charles Isherwood UNE HISTOIRE LA TROUPE DE « RHINOCÉROS » EN TOURNÉE Serge Maggiani, Hugues Quester, Céline Carrère, Philippe Demarle, Jauris Casanova, Pascal Vuillemot, Gérald Maillet, Stéphane Krähenbühl, Charles-Roger Bour, Sandra Faure, Sarah Karbasnikoff, Gaëlle Guillou, Walter N’Guyen COMÉDIENS Emmanuel Demarcy-Mota, ASSISTANT MISE EN SCÈNE Christophe Lemaire, SCÉNOGRAPHIE & LUMIÈRES Yves Collet, MUSIQUE Jefferson Lembeye, Corinne Baudelot, MASQUES & ACCESSOIRES Clémentine Aguettant MISE EN SCÈNE COSTUMES ÉQUIPE TECHNIQUE FRANÇAISE Stan Daubié, COORDINATION TECHNIQUE Pascal Baxter, RÉGIE LUMIÈRES Nicolas Bats, INGÉNIEUR SON Victor Koeppel, RÉGIE PLATEAU Romain Cliquot, Séverine Gohier, RÉGIE ACCESSOIRES Kevin Raymond, OPÉRATRICE SURTITAGE Pauline Clément RÉGIE GÉNÉRALE HABILLEUSE Quels sont les points principaux de votre projet à la BAM ? © EMERIC LHUISSET La troupe qui accompagne Emmanuel Demarcy-Mota depuis plusieurs années a d’abord été une compagnie indépendante. Le Théâtre des Millefontaines fondé en 1991 a travaillé au Théâtre de la Commune, puis au Forum du Blanc-Mesnil et enfin au Théâtre de la Ville à partir 1998 (où avec la même équipe d’acteurs, Emmanuel Demarcy-Mota a présenté Peine d’amour perdue de Shakespeare, puis créé successivement Six Personnages en quête d’auteur de Pirandello, une première version de Rhinocéros de Ionesco et dernièrement Victor ou Les enfants au pouvoir de Vitrac). Durant toutes ces années, la troupe crée aux Abbesses plusieurs pièces inédites de Fabrice Melquiot. À la direction du CDN de Reims, Emmanuel Demarcy-Mota fonde en 2001 le « Collectif artistique » réunissant l’ensemble des acteurs et les collaborateurs artistiques proches :Yves Collet-scénographe, Fabrice Melquiot-auteur, Jefferson Lembeye-musicien. L’équipe s’engage alors dans un vaste projet d’éducation artistique et de transmission, et travaille à développer des liens organiques avec la ville et ses habitants. Au Théâtre de la Ville, Emmanuel Demarcy-Mota et son équipe artistique engagent de nouveaux partenariats européens (Londres, Lisbonne, Athènes, Milan, Berlin…), tournent dans de nombreux pays, guidés par un double questionnement : Qu’est-ce que le Théâtre apporte à l’Europe ? Qu’est-ce que l’Europe apporte au Théâtre ? Aujourd’hui, l’équipe porte une attention renouvelée à la dimension d’ouverture à l’international, engageant la troupe dans un voyage sur differents continents. Cet automne Rhinocéros a joué dans quatre villes majeures des États-Unis dans des salles de 1000 à 2000 places, rencontrant près de 20 000 spectateurs nord-américains. Cette saison, la troupe se retrouvera également à Moscou, puis dans d’autres villes du monde… TROIS QUESTIONS À JOE MELILLO, DIRECTEUR DE LA BROOKLYN ACADEMY OF MUSIC L’objectif principal de ma vie artistique est d’amener à la BAM les plus importants spectacles américains et du monde et, en cela, je suis au service de la ville de New York. Je travaille pour faire de la BAM « le Centre Mondial des arts du spectacle de New York ». Je cherche des aventures créatives originales et novatrices et qui vont de l’avant dans tous leurs aspects artistiques. Rhinocéros est l’exemple parfait de mes choix en matière de programmation. Comment voyez-vous la situation artistique présente et à venir aux États-Unis ? Nous sommes aujourd’hui dans un contexte difficile, marqué par un manque de ressources financières suffisantes pour permettre aux artistes de faire leur travail et aux organismes culturels de produire et présenter des formes artistiques pour leurs communautés. C’est un très grand territoire géographique qui compte beaucoup d’artistes et d’institutions culturelles, mais où les moyens financiers ne se développent pas proportionnellement au nombre d’artistes et d’organisations qui ont besoin de soutien. […] Rhinocéros, une œuvre rarement montée sur les grandes scènes américaines, arrive aux États-Unis grâce à la troupe du Théâtre de la Ville de Paris et au metteur en scène Emmanuel Demarcy-Mota. Ce spectacle de grande envergure se déploie parfaitement sur le plateau modulable du Howard Gilman Opera. La mise en scène de M. Demarcy-Mota offre une multitude d’effets théâtraux au service de la pièce d’Ionesco qui met magistralement en évidence les dangers toujours présents du conformisme et du fascisme. […] Monsieur Quester, dans le rôle de Jean, qui émet de sinistres grognements et qui se débarrasse avec délectation de son humanité ; Jauris Casanova, Botard, cassant et sceptique collègue de Bérenger ; Céline Carrère, dans le rôle de Daisy, objet de l’amour dévoué de Bérenger mais sans effet sur elle – tous jouent de manière précise et puissante. Monsieur Maggiani porte le spectacle sur ses frêles épaules avec une aisance merveilleuse. D’aspect débraillé, au comportement un peu confus, semblant toujours à la recherche de ses clés, c’est un Bérenger tellement tourmenté par l’échec et le doute de soi, que sa résistance à l’épidémie soudaine de « rhinocérite » semble l’étonner et même le décevoir. […] LOS ANGELES TIMES Charles McNulty La mise en scène intelligente et très élégante de Rhinocéros par Emmanuel Demarcy-Mota au Royce Hall de l’UCLA nous fait accéder à une vision profondément humaine d’Ionesco, incarnée magnifiquement par Serge Maggiani, un Bérenger non héroïque, à l’humanité débraillée. Les superbes décors d’Yves Collet et ses éclairages, qui enserrent l’action dans des puits de lumière, contribuent à la sensation que cette « rhinocérite » furieuse vient de l’intérieur. […] Le spectacle équilibre remarquablement réel et surréel : les destructions auxquelles aboutit l’action sont réellement effrayantes mais leur puissance onirique fait apparaître l’inconscient comme la véritable cible de la maladie. […] SAN FRANCISCO CHRONICLES Robert Hurwitt […] La mise en scène d’Emmanuel Demarcy-Mota, mêlant effroi spectaculaire et résonances intimes, est totalement inventive, et ses interprètes incroyables. Il est excitant, aussi, d’entendre Ionesco dans sa langue originale dont les acteurs excellent à rendre les jeux de mots et autres délires langagiers. […] Le passage (hors scène) du premier rhinocéros – au son tonitruant de la partition bestiale de Jefferson Lembeye – est un chef-d’œuvre, un chaos chorégraphié, collectif et individuel à la fois. […] LOS ANGELES WEEKLY Steven Leigh Morris […] Le Théâtre de la Ville-Paris est l’un des plus importants théâtres français. […] Une excellente version de Rhinocéros ; mise en scène et scénographie superbes. Rhinocéros nous parle. C’est un plaisir de voir le théâtre international de retour à UCLA, de voir cette porte s’ouvrir une fois encore. […] Rencontre à l’université de New York sur Rhinocéros, avec Israel Horovitz, Edward Albee, Marie-France Ionesco & Emmanuel Demarcy-Mota © DR LÀ-BAS, ICI Tout au long de cette tournée aux USA, Vie et destin de Vassili Grosmann a été ma compagnie principale. On y lit dans la préface ce qu’évoquait Blaise Pascal : « Quand l’univers l’écraserait, l’homme serait encore plus noble que ce qui le tue, parce qu’il sait qu’il meurt, et l’avantage que l’univers a sur lui, l’univers n’en sait rien ». Dans Vie et Destin, l’espoir demeure car en dépit des dictateurs impitoyables et de la toute-puissance bureaucratique des forces anti CENT ANS APRÈS humaines, le vivant peut être préservé dans la plus « L’origine de Cal Performances petite, la plus imperceptible cellule de la vie sociale : (le Théâtre de Berkeley, banlieue la simple bonté humaine. « Je suis le dernier homme, de San Francisco) remonte je ne capitule pas » sont les derniers mots prononcés à 1906. La grande tragédienne française Sarah Bernhardt joua par Bérenger dans le Rhinocéros de Ionesco. De Los Angeles à Berkeley, New York, Ann Arbor, le cette année-là Racine, un mois après l’immense tremblement public américain a été un exemple de spontanéité de terre qui ravagea la ville. en acte avec Rhinocéros, le dynamisme impulsé par Elle dirigeait alors un théâtre la mise en scène, l’énergie de chacun. parisien portant son nom, qui Hudson Street. Après un tournage en Italie il y a deviendra le Théâtre de la Ville. plusieurs décennies – Harvey Keitel m’a invité chez Rhinocéros de Ionesco mis en lui. Grâce à sa générosité, j’ai découvert le mythique scène par Emmanuel DemarcyActors Studio. Arthur Penn donnait une Cession. Ce Mota, plus de cent années après, réunit à nouveau nos deux que m’enseignait mon professeur à Malakoff en grandes maisons de Théâtre. » 1966 me semblait si proche. Ensuite ce fut une visite Matías Tarnopolsky, Directeur du Cal au studio Stella Adler. Les élèves acteurs semblaient Performances-Berkeley/San Francisco tétanisés par tant d’autorité, face à leur « néant ». La différence avec Emmanuel est là, il part de ce qu’est l’acteur, sa nature profonde, ses convictions et ses doutes. Il lui ouvre des espaces imaginaires et lui donne sa respiration à l’intérieur du collectif artistique. Il place enfin chacun d’entre nous devant ses propres responsabilités et sa conscience. Al Pacino jouait American Buffalo, génial, chargé d’électricité comme la foudre, cependant si seul à la recherche d’une voix lui indiquant le ni trop, ni trop peu. RENCONTRE. À la BAM, le dernier soir, Harvey Keitel vient Harvey Keitel (AU CENTRE) avec la troupe © CL voir le spectacle, s’enthousiasme, nous rejoint en coulisses avec toute sa famille pour des retrouvailles suivies d’une longue conversation avec Emmanuel et toute la troupe. Hugues Quester. USA. sept.-oct. 2012 4 • PaRCouRS { enfance & jeunesse } 2e édition Théâtre de la Ville PARIS novembre-décembre 2012 novembre-décembre 2012 POUR VOUS ENFANTS, ADOS, ADULTES... CIE THÉÂTRE À CRU IL EST LIBRE, STIRS Comment vivre le présent lorsqu’à peine vécu, le passé disparaît ? En se réinventant, sans cesse, en toute liberté. J’avance et j’efface CRÉATION CONCEPTION, ÉCRITURE & MISE EN SCÈNE Alexis Armengol CRÉATION SON Frédéric Duzan CRÉATION LUMIÈRES François Blet & Rémi Cassabé SCÉNOGRAPHIE James Bouquard COSTUMES Audrey Gendre INTERPRÉTATION Laurent Seron-Keller DESSIN & INTERPRÉTATION Shih Han Shaw CONCEPTION & RÉALISATION VIDÉO ENTRETIEN AVEC ALEXIS ARMENGOL Stirs, enfant de neuf ans, ne se souvient de rien au-delà de trois minutes et découvre le monde par sa nourrice japonaise. Comment peut-il se construire sans mémoire ? ALEXIS ARMENGOL : Cette amnésie pose la question de la transmission, entre les générations, avec autrui. Stirs ne peut s’inscrire dans une généalogie, dans son histoire. L’individu souvent est mu par son passé, par un certain atavisme familial et social. Délié de ces attaches, Stirs est libre mais doit perpétuellement réinventer son présent et son avenir. Avec sa nourrice, ils conçoivent des astuces et stratagèmes pour que leur relation perdure dans l’oubli permanent. Comment partage-t-on le souvenir ? Par des photos, par des fichiers informatiques, ou par le savoir-faire, le rapport à l’autre. Frank Ternier INTERPRÉTATION, CHANT MUSICALE & COMPOSITION Camille Trophème Théâtre à cru est conventionné par le Ministère de la culture et de la communication DRAC Centre, la Région Centre et la Ville de Tours. COPRODUCTION Centre dramatique régional de Tours – Théâtre Romain Rolland, Villejuif – La Halle aux Grains, scène nationale de Blois – Théâtre Paul Eluard, Choisy-le-Roi. SOUTIENS & ACCUEILS EN RÉSIDENCE Le Rayon Vert, scène conventionnée de Saint-Valéryen-Caux - CRÉA / Festival Momix / Scène conventionnée Jeune Public d’Alsace, Kingersheim. AVEC LE SOUTIEN DE la Fondation Ecart Pomaret, de l’Institut Français, de la Région Centre et du Volapük (Tours). AVEC L’AIDE À LA CRÉATION du Conseil Général du Val-de-Marne ET L’AIDE À LA PRODUCTION d’Arcadi. Merci à la ville de Takamatsu et au Festival du théâtre pour la Jeunesse d’Okinawa (Japon) pour leurs accueils. DU 8 AU 24 NOVEMBRE HORAIRES P.23 A. A. : Lors de mon premier séjour, j’ai découvert un pays loin des clichés qui confrontent l’effer- TOUT PUBLIC I À PARTIR DE 14 ANS vescence de l’hyper-modernité et la sérénité des temples anciens. Au Japon, l’homme porte en lui la permanence, la mémoire, la transmission, tandis que les objets sont considérés comme temporaires. Sans doute cette conception est-elle liée à la vulnérabilité des constructions, exposées aux tremblements de terre et aux tsunamis. J’ai écrit une nouvelle qui a servi de base de travail sur le plateau. Lors du second voyage, avec l’équipe, nous avons rencontré des gens, filmé, photographié… Ces matériaux et une immersion physique partagée viennent nourrir la scénographie et la dramaturgie. DAVID LESCOT Ces multiples médias offrent autant de points de vue et de palettes de sensations. Leur combinaison reflète notre relation au monde, que l’on appréhende par nos différents sens. Elle permet d’exprimer la richesse de l’instant où se produisent simultanément plusieurs événements, où les perceptions se superposent, s’entremêlent. Nous essayons ainsi de restituer l’expérience sensible de la mémoire, de faire surgir l’émotion et d’ouvrir l’imaginaire. C’est le merveilleux paradoxe du théâtre que de pouvoir s’affranchir du réalisme tout en étant très réel, par le corps de l’acteur, par la présence, en prise avec l’ici et maintenant. A. A. : © ALEXIS ARMENGOL Entretien réalisé par Gwénola David TOUT PUBLIC I À PARTIR DE 7 ANS LES PERCUSSIONS CLAVIERS DE LYON MAURICE RAVEL I CHARLES PERRAULT Trois contes ADAPTATION, MISE EN SCÈNE Les Jeunes CRÉATION voir aussi p.6 CONFIDENCES S’adresser à tous, quel que soit l’âge, réunir les générations, tel est l’un des talents de David Lescot. Le voilà intégré au Parcours {enfance & jeunesse}… Vous le retrouverez tel quel chez les adultes. L’adolescence, maintenant que j’en suis sorti (du moins officiellement), je la regarde comme un monde en soi. Elle m’apparaît comme une fiction à elle toute seule, une sorte de conte fantastique avec ses codes indéchiffrables, son langage hermétique, ses phénomènes paranormaux, ses personnages aux corps étranges, son mélange inimitable de bêtise et de génie. La vie à l’intérieur de ce monde semble plus intense, plus romantique, plus tragique, plus idéaliste. On y vit plus fort et plus dangereusement. De plus en plus valorisée mais aussi récupérée dans la société actuelle, l’adolescence est à la fois un idéal, un paradis perdu, et un point aveugle. Adolescent, les enfants veulent le devenir le plus vite possible, et les adultes le rester le plus longtemps possible. C’est tout à la fois un rêve impossible et un marché juteux. En cela, l’adolescence est sans doute un bon sujet pour le théâtre (…) J’ai cherché quel pouvait être ce théâtre de forme adolescente, et je me suis dit « le rock », parce que c’est pour cet âge le rêve et l’échappatoire absolus, le fantasme le plus répandu (…). David Lescot Gérard Lecointe Véronique Bettencourt AVEC les Percussions Claviers de Lyon LA LECTRICE (À L’ÉCRAN) ADIPAC / Percussions Claviers de Lyon. Théâtre de Vénissieux – le Grand Angle de Voiron, scène Rhône-Alpes de Voiron – Théâtre de Givors, Les Saisons. Avec le soutien du Théâtre à Châtillon. AVEC L’AIDE DE la SPEDIDAM, du FCM, de la SACEM et de la Compagnie Lyonnaise de Cinéma. PRODUCTION COPRODUCTION À SUIVRE SUR : www.theatredelaville-paris.com LES AUTRES SPECTACLES DU PARCOURS : Mon amoureux noueux pommier à partir de 7 ans JEAN-LAMBERT WILD I STÉPHANE BLANQUET { théâtre & art visuel } → Théâtre national de Chaillot I du 30 nov. au 8 décembre Faim de loup à partir de 8 ans ILKA SCHÖNBEIN I LAURIE CANNAC { marionnettes } → Le Grand Parquet I du 4 janvier au 3 février Kathputli à partir de 4 ans { danse & marionnettes du Rajasthan } → Le Grand Parquet I du 15 février au 3 mars Nos amours bêtes CRÉATION à partir de 6 ans FABRICE MELQUIOT I AMBRA SENATORE { théâtre I danse } → Théâtre des Abbesses I du 6 au 13 avril Sobre la cuerda floja VERSION FRANÇAISE à partir de 8 ans David Sanson MIKE KENNY I TEATRO MILAGROS { marionnettes du Chili } → Théâtre des Abbesses I du 13 au 18 mai L’ÂGE DE CRISTAL L’Après-midi d’un foehn à partir de 6 ans Les cinq musiciens des Percussions Claviers de Lyon et la metteuse en scène Emmanuelle Prager associent la musique de Maurice Ravel et Trois contes de Charles Perrault pour imaginer un spectacle envoûtant. L’enfance est l’un des plus sûrs sésames pour accéder à cette caverne d’Ali Baba que constitue la musique de Maurice Ravel – ce « rêve d’enfant », ainsi que l’a qualifiée un jour Manuel Rosenthal. De Ma mère l’Oye (1910) à l’opéra L’Enfant et les Sortilèges (1925), son insouciance translucide et ses pouvoirs mystérieux irriguent toute l’œuvre d’un compositeur qui, comme l’a écrit son biographe Hans Heinz Stuckenschmidt, « n’a jamais cessé de retrouver le ton particulier aux contes, le pont de cristal qui relie la vie à l’illusion, l’élégance à la naïveté, et qui n’appartient peut-être, après lui, à nul autre que le poète danois Christian Andersen ». Cristallines et féeriques, liquides et lumineuses sont les sonorités que les cinq virtuoses des Percussions Claviers de Lyon parviennent à tirer de leurs instruments (vibraphone, xylophone, marimba). Avec la metteuse en scène Emmanuelle Prager, ils se sont probablement souvenus des mots de Stuckenschmidt lorsqu’ils ont conçu ces Trois contes qui, associant vidéo, texte et musique, entendent réunir la vie et l’illusion, la naïveté et l’ironie, le passé et le présent, les enfants et les adultes. Plutôt que vers Andersen, c’est vers l’univers de Charles Perrault qu’ils se sont tournés, avec le souci d’aborder ses contes – Le Petit Chaperon rouge, La Belle au bois dormant, Le Petit Poucet – pour ce qu’ils sont : comme « un petit chef-d’œuvre du classicisme ». Prenant à rebours les nombreuses entreprises d’édulcoration qui, au fil des siècles, sont venues brouiller l’œuvre de Perrault, ils réussissent, dans leur adaptation, à redonner vie à cette Emmanuelle Prager PROPOSITION ORIGINALE, DIRECTION MUSICALE, TRANSCRIPTION → THÉÂTRE DES ABBESSES I A Vous êtes parti au Japon, d’abord seul en juillet 2011 puis avec votre équipe un an plus tard. Qu’avez-vous rapporté ? Comment le théâtre, le dessin, le chant, la vidéo et la danse se croisent-ils dans votre écriture scénique ? → THÉÂTRE DES ABBESSES I A JEUDI 27 & VENDREDI 28 DÉCEMBRE 19 H 30 I SAMEDI 29 DÉCEMBRE 15 H & 19 H 30 PHIA MÉNARD { cirque } → Le Monfort I ddu 21 mai au 8 juin → Le Centquatre I ddu 11 au 15 juin NOUVEAU ! CARTE PaRCouRS {enfance & jeunesse} PRIX DE LA CARTE 16€ TARIF A accompagnant 13 € • jeune - 16 ans 6 € TARIF C accompagnant 10 € • jeune - 16 ans 6 € 1 carte permet l’achat de 7 places maximum par spectacle du Parcours (1 accompagnant & 6 jeunes ou 2 accom. & 5 jeunes), dans la limite des places disponibles. Location ouverte dès à présent sur tous les spectacles du Parcours. « LE JEUNE PUBLIC A/À L’ÂGE DE LA MATURITÉ » SAM. 20 OCT. DE 10 H À 17 H 30 I AU MONFORT En présence d’Aurélie Filippetti, colloque organisé par “Scène(s) d’enfance et d’ailleurs” et ses partenaires © ARIANE MESTRE TOUT PUBLIC I À PARTIR DE 8 ANS langue « vive, nerveuse, légère, piquante », et à ses histoires bien moins univoques qu’on ne pourrait le croire. C’est un même pari de fidélité et de modernité qui a guidé le travail de la plasticienne Louise Kehl, dont les vidéos, cherchant à renouer avec l’idée d’illustration au sens de la tradition éditoriale des contes, adressent quelques clins d’œil aux inoubliables gravures de Gustave Doré, tout en échappant intelligemment au piège de la « reconstitution » : elles composent une succession de tableaux, un film muet qui, suivant la trame de la narration, s’avère étonnamment parlant. Au même titre qu’une scénographie tirant parti de toutes les qualités « sculpturales » des instruments de musique, ou que la présence diaphane de la narratrice, la vidéo contribue à faire revivre sous nos yeux le monde de Perrault, puissant mariage entre le clair et l’obscur, l’élégance et l’innocence – la géométrie et le mystère, pour paraphraser le mot célèbre de Roland-Manuel au sujet de Ravel. Car tout autour de cela, présidant à la magie de l’ensemble, il y a, bien sûr, sa musique. Le Petit Poucet et La Belle au bois dormant figurent, aux côtés de contes de Mme d’Aulnoy et de Mme de Beaumont, parmi les histoires que Ravel a mises en musique, pour les enfants de ses amis Cypa et Ida Godebski, dans Ma mère l’Oye. Comme toujours chez lui, la pureté classique avec laquelle s’égrènent leurs lignes mélodiques contient avec peine des trésors d’émotion, que l’on retrouve également, dissimulés derrières d’incessantes et éblouissantes trouvailles sonores, dans l’orchestration que le compositeur, dès 1911, réalisa de ce bref cycle pour piano à quatre mains. Tous ces caractères se trouvent magnifiés par la dramaturgie musicale imaginée par Gérard Lecointe, qui, outre Ma mère l’Oye, a puisé, pour sa transcription, dans l’ensemble du corpus ravélien : Les Valses nobles et sentimentales, L’Enfant et les Sortilèges, Le Tombeau de Couperin, La Pavane pour une infante défunte, Daphnis et Chloé, Une barque sur l’océan, La Fanfare pour l’Éventail de Jeanne ou encore Gaspard de la nuit fournissent la trame d’une partition qui rend pleinement justice à cette musique dont les inépuisables sortilèges n’en finissent pas de résonner en nous. © ARIANE MESTRE HORAIRES P.23 …LA FÊTE CONTINUE © ÉRIC DIDYM → LE MONFORT I A DU 8 AU 24 NOVEMBRE PaRCouRS { enfance & jeunesse } 2e édition • 5 Parmi les nombreux intervenants : des universitaires, Pierre Péju (écrivain), Claire Rannou (Anrat), Jean-Pierre Saez (Observatoire des politiques culturelles), Geneviève Lefaure (présidente de Scène(s) d’enfance et d’ailleurs), Dominique Bérody (CDN de Sartrouville), Emmanuel Demarcy-Mota… www.scenesdenfance.com 6 • DAVID LESCOT // ARTISTE ASSOCIÉ Théâtre de la Ville PARIS novembre-décembre 2012 LE PUBLIC C’EST LA MER Auteur, metteur en scène, acteur et musicien, David Lescot est artiste associé du Théâtre de la Ville. Son parcours protéiforme dévoile progressivement les différentes facettes d’une œuvre sensible et réfléchie en prise avec la réalité du monde. novembre-décembre 2012 → THÉÂTRE DES ABBESSES I A DU 8 AU 24 NOVEMBRE HORAIRES P.23 TOUT PUBLIC I À PARTIR DE 14 ANS DAVID LESCOT Les Jeunes CRÉATION TEXTE, MISE EN SCÈNE LUMIÈRES & MUSIQUE David Lescot Laïs Foulc 1 ARTISTE ASSOCIÉ // 2 SPECTACLES • 7 TOUS LES GARÇONS ET LES FILLES DE MON ÂGE Musicien formé par le jazz, David Lescot met en compétition deux groupes rock, et s’interroge sur les ados d’aujourd’hui, sur leur présent, leur avenir. Charlotte Lagrange Michael Schaller COSTUMES Marianne Delayre EFFETS SPÉCIAUX Benoît Dattez RÉGIE GÉNÉRALE Anna Sauvage ASSISTANTE À LA MISE EN SCÈNE SON Alexandra Castellon, Bagheera Poulin, Catherine Matisse, Martin Selze, Marion Verstraeten MUSICIENS Flavien Gaudon, David Lescot, Philippe Thibaut AVEC LES JEUNES Deux groupes de rock rivaux s’opposent dans Les Jeunes. Des garçons raisonneurs et des filles un peu fofolles – ados rageurs et attachants bien décidés à montrer de quoi ils sont capables. Avec Les Jeunes, vous abordez un âge réputé difficile, l’adolescence. Pourquoi ce sujet ? Cie du Kaïros – Théâtre de la Ville-Paris – le Carreau, scène nationale de Forbach – Théâtre de l’Union, CDN de Limoges – la Filature, scène nationale de Mulhouse Le texte du spectacle est édité chez Actes Sud-Papiers. COPRODUCTION → THÉÂTRE DES ABBESSES I A DU 9 AU 21 NOVEMBRE HORAIRES P.23 TTHÉÂTRE I DANSE DAVID LESCOT Quarante-cinq tours TEXTE & MUSIQUE David Lescot DeLaVallet Bidiefono Anna Sauvage RÉGIE Ludovic Losquin DAVID LESCOT : J’avais envie de me tourner vers cette tranche d’âge. J’ai une fille qui a 16 ans. Tout d’un coup l’adolescence m’est apparue comme un monde particulier. J’ai l’impression qu’elle est de plus en plus présente autour de nous. Socialement, c’est devenu une valeur en soi qui fait l’objet d’une promotion intensive. Dans La Commission centrale de l’enfance, je parlais plus de l’enfance, n’abordant l’adolescence proprement dite que vers la fin. Là j’ai eu envie d’aller vers d’autres formes, une approche différente. La musique que je jouais quand j’étais ado et que j’ai apprise c’était le jazz, qui est toujours très présent dans ce que je fais. Mais j’ai commencé comme tout le monde par jouer du rock quand j’avais 10 ans. Trois accords de guitare et on y va. C’est ce que j’ai voulu retrouver dans ce spectacle. Le rock est considéré à tort ou à raison comme la musique de l’adolescence. C’est pour ça que vos personnages montent des groupes de rock ? CHORÉGRAPHIE D. L. : Oui. Le spectacle raconte l’épopée d’un groupe de rock adolescent. Il y a un groupe de garçons et un groupe de filles, mais les CRÉATION LUMIÈRES deux sont joués par les mêmes actrices, chacune jouant un garçon et une fille. C’est complètement écrit, mais je souhaite garder un côté brut ; un peu comme dans L’Instrument à pression dont c’est en quelque sorte le pendant rock. L’idée, c’est que la musique soit au même niveau que le texte. Je me suis beaucoup amusé dans cette opposition entre les garçons et les filles à faire ressurgir le garçon que j’ai pu être et à m’inspirer de ma propre fille. Les catégories sont très tranchées. Les garçons sont dogmatiques, ils rédigent des manifestes artistiques, veulent changer le monde. Les filles sont complètement filles, dangereuses, sans aucune limite, elles vont beaucoup plus loin. AVEC DeLaVallet Bidiefono, David Lescot Compagnie du Kaïros. SACD & Festival d’Avignon dans le cadre des “Sujets à Vifs” 2011 pour la version 33 tours. Le Théâtre National de Bretagne pour la version 45 tours AVEC LE SOUTIEN DE la Maison des Arts de Créteil. PRODUCTION COPRODUCTION Comment voyez-vous l’adolescence ? Qu’est-ce qui caractérise cet âge selon vous ? Et comment cela se traduit dans le spectacle ? D. L. : Je m’inquiète beaucoup pour cette génération. C’est mon instinct de père qui s’exprime-là, bien sûr. Je constate que la violence est très présente aujourd’hui chez les adolescents. Ils ont une lucidité que nous n’avions pas. Notre vision du monde était assez rassurante au fond. Eux sont confrontés à une complexité plus grande. Le spectacle dégage, je crois, une vraie violence qui se mélange avec l’humour que j’essaie d’y mettre. Mais les coups qu’ils prennent, ce sont de vrais coups. Cet âge intermédiaire où l’on n’est plus enfant mais pas encore adulte m’apparaît menacé par le monde adulte qui essaie de le récupérer, de l’exploiter. Il y a quelque chose de ça dans le spectacle. Et puis il y a la musique qui entraîne toute l’affaire, l’énergie du rock. Propos recueillis par H. L. T. À GAUCHE Catherine Matisse & David Lescot // À DROITE Alexandra Castellon & Bagheera Poulin en répétition des Jeunes © ÉRIC DIDYM ENTRETIEN AVEC DAVID LESCOT On ne le sait pas forcément, mais David Lescot c’est aussi une compagnie de théâtre, la compagnie du Kaïros qui a dix ans cette année. Pourquoi avoir créé une compagnie ? À quoi fait référence ce nom de Compagnie du Kaïros ? DAVID LESCOT : Le kaïros est une notion de philosophie politique qui signifie le bon moment. Il y a des choses qui sont bonnes, mais seulement dans la mesure où elles sont accomplies à tel instant et non à tel autre. Cette notion remet en question l’absolu de la morale. Il n’y a pas de catégories fixes. La réalité ne cesse de bouger et de se reconfigurer. Il faut être à l’écoute du mouvement du monde pour s’efforcer d’être en accord avec lui. Quant à l’envie de créer une compagnie, cela vient, je crois, du besoin à un moment donné de ma vie de réunir des personnes avec lesquelles je me sentais des affinités. Le fait de se choisir et de faire un bout de chemin ensemble, quelque chose qui est lié en même temps au hasard des rencontres et de la vie est une idée qui me plaît beaucoup. Cela passe par l’amitié, l’admiration, l’estime réciproque. On se rassemble et puis on progresse. Vous êtes auteur et metteur en scène. Les deux ont-ils toujours été liés ? D. L. : Oui. Le premier texte que j’ai écrit en tant qu’auteur, ce n’était pas tant pour être auteur que pour réunir des gens et inventer ensemble une forme mêlant jeu et musique. C’était Les Conspirateurs il y a une quinzaine d’années. Cela s’est fait avec les moyens du bord, sans savoir si on allait le jouer en public. Dès qu’il a été question de le montrer, j’ai compris que je devenais metteur en scène et non plus seulement l’ordonnateur d’un projet. Parce que tout d’un coup se posait la question du public. Le rôle du metteur en scène, c’est de prendre en charge cette responsabilité du rapport au public. On construit un bateau, le public c’est la mer. Il y a un architecte, des marins… Le bateau commence à voguer quand le public arrive. Le responsable, c’est le capitaine, autrement dit le metteur en scène. Un homme en faillite, L’Européenne, Le Système de Ponzi… vos spectacles sont très souvent en prise sur le présent. Est-ce délibéré ? Pensez-vous que votre théâtre a une dimension politique ? D. L. : Ce qui m’intéresse c’est de guetter dans le réel le potentiel poétique, plutôt que de projeter directement ma propre intériorité. Je regarde autour de moi ; je suis à l’écoute du monde. J’estime faire un théâtre politique, mais pas un théâtre militant. Je n’ai rien contre l’agit-prop, mais ce n’est pas là que je me situe. Même si j’ai pu écrire un texte sur les Pussy Riots en août dernier à la Mousson d’été, parce que je les trouve vraiment courageuses. Vous êtes artiste associé du Théâtre de la Ville. Qu’est-ce que cela signifie pour vous ? D. L. : Cela s’inscrit dans la continuité d’une relation de fidélité avec Emmanuel Demarcy-Mota, qui remonte à l’époque où il dirigeait la Comédie de Reims. Fabrice Melquiot m’avait invité là-bas en tant qu’auteur. Un homme en faillite a été produit par la Comédie de Reims inaugurant une collaboration qu’Emmanuel Demarcy-Mota envisage comme une construction, c’est-àdire quelque chose qui se développe. Il est conscient que ce qui est acquis aujourd’hui dans le théâtre public ne l’est pas pour toujours. D’où la nécessité d’une inscription dans le temps qui fait qu’à un moment on va vous reconnaître, vous identifier et que cela ne se fait pas en une seule fois. Emmanuel est aussi sensible au fait que je travaille avec un collectif d’acteurs auquel je suis fidèle. Le fait que nous appartenions à la même génération est important aussi. Enfin nous sommes tous deux héritiers à travers nos parents d’une histoire du théâtre public. Emmanuel est très sensible à ça parce qu’il a un sens historique. Il a ce souci d’inscrire le Théâtre de la Ville dans une histoire du théâtre d’art non seulement en France, mais aussi en Europe. LA RENCONTRE L’un a regardé l’autre travailler, et puis ensemble ils ont travaillé, dansé, joué. Façon de symboliquement se battre pour mieux se connaître. QUARANTE-CINQ TOURS On ne se connaissait pas, ou presque pas. Alors pour le connaître mieux, pour un peu le comprendre, en mars 2011 je suis parti une semaine à Brazzaville, là où il travaille, où il vit, là où il invente ce qu’il fait. Pendant une semaine donc, j’ai été le spectateur de DeLaVallet. C’est une bonne manière de commencer à travailler avec quelqu’un. À Brazzaville, capitale de la République du Congo, il existe un seul studio de répétition pour la danse. Il se trouve au Centre culturel français, qu’on doit appeler maintenant l’Institut français mais qu’on appellera toujours “le CCF”. C’est une salle en longueur, assez exiguë, avec une baie vitrée qu’on laisse ouverte sur le jardin. C’est là que DeLaVallet travaille, tous les jours, avec sa troupe de danseurs, ou avec des danseurs apprentis. Il se met face au miroir, les autres sont derrière lui et essaient de le suivre. Il y a de la musique enregistrée, mais il y a aussi des vrais musiciens qui jouent de la basse ou de la batterie par-dessus. Souvent avant l’heure prévue, DeLaVallet annonce la fin de la répétition : « Sinon vous allez mourir », il dit. Par terre il y a de la sueur, pas des gouttes, des flaques. Certains sont allongés et rient de fatigue, et quand ils se relèvent, la transpiration a dessiné leur silhouette sur le sol. DeLaVallet dit que danser au Congo, c’est un combat, c’est comme se battre. Ce ne sont pas que des mots. Ça me fait penser à Heraklès II ou L’Hydre, un texte de Heiner Müller, où le héros marche au combat, à la rencontre de l’ennemi et, en fait, le combat a déjà commencé et l’ennemi il marche dessus, c’est une forêt et c’est en même temps une bête, quelque chose qui vous avale et qui prend votre mesure. L’ennemi c’est le champ de bataille. C’est peut-être ça aussi la guerre, c’est se battre contre le sol sur lequel on marche. Alors DeLaVallet et moi on s’est dit que se battre, se faire la guerre de toutes les manières symboliques possibles, ce serait sûrement un bon moyen de mieux se connaître. David Lescot Propos recueillis par Hugues Le Tanneur David Lescot & DeLaVallet Bidiefono dans 33 Tours, Avignon 2011 © CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE/WIKISPECTACLE 8 • SHE SHE POP // ALLEMAGNE Théâtre de la Ville PARIS novembre-décembre 2012 VLAD TROITSKYI // UKRAINE • 9 novembre-décembre 2012 VLAD TROITSKYI → LE MONFORT I A UN THÉÂTRE DE VIE PÈRES & FILLES Qu’il s’appuie sur Shakespeare ou Gogol, ce metteur en scène qui a fait flamboyer le théâtre ukrainien nous raconte son pays, nous en fait découvrir les complexités et contradictions. DU 28 NOVEMBRE AU 7 DÉCEMBRE 20 H 30 I DIMANCHE 2 DÉCEMBRE 16 H VLAD TROITSKYI Le Roi Lear - prologue LIBREMENT INSPIRÉ DE William Shakespeare Vlad Troitskyi LUMIÈRES Mariya Volkova MASQUES Natalia Marinenko MISE EN SCÈNE Natalka Bida, Daria Bondareva, Dmytro Iaroshenko, Roman Iasynovskyi, Ruslana Khazipova, Dmytro Kostyumynskyi, Tetyana Vasylenko, Solomiia Melnyk, Volodymyr Minenko, Anna Nikityna, Igor Postolov, Vyshnya, Zo, Lytvynenko-Iasinovska Viktoriia MUSICIENS DakhaBrakha Marko Halanevych, Iryna Kovalenko, Nina Garenetska, Olena Tsybulska AVEC PRODUCTION Centre of Contemporary Art “DAKH” Théâtre Vidy-Lausanne Festival Passages – Metz PRODUCTION DÉLÉGUÉE COPRODUCTION De Berlin à Hambourg, pour la première fois à Paris, les She She Pop nous regardent, se regardent vivre. Sans pitié, en tout humour et complicité. → THÉÂTRE DE LA VILLE I B DU 10 AU 14 DÉCEMBRE 20 H 30 SPECTACLE EN UKRAINIEN & EN FRANÇAIS VLAD TROITSKYI Viï - le roi terre CRÉATION 2012 Klim (INSPIRÉ DE Nicolas Gogol) & MISE EN SCÈNE Vlad Troitskyi TEXTE Klim TRADUCTION Julia Batinova AVEC LA COLLABORATION DE René Zahnd SCÉNOGRAPHIE Dmytro Kostiumynskyi, Vlad Troitskyi COMPOSITION MUSICALE DakhaBrakha, Roman Iasinovskyi, Solomiia Melnyk, Vlad Troitskyi CRÉATION VIDÉO Maksym Poberezhskyi, Oleksii Tyschenko CRÉATION LUMIÈRES Zvezdan Miljkovic CONSTRUCTION DÉCOR Ateliers du Théâtre Vidy-Lausanne PEINTURE Sibylle Portenier COSTUMES Kateryna Vyshneva MASQUES Valentina Voityuk TRADUCTION & INTERPRÉTATION Maksim Ilyashenko, Romain Bovy DE CONCEPTION Le testament en question est celui du Roi Lear, qui, chez Shakespeare, entreprend de léguer son royaume à ses trois filles. Il n’a pas réellement envie d’abandonner le pouvoir, de prendre sa retraite. Avant tout il veut leur offrir l’occasion de le remercier, et surtout de dire combien elles l’aiment. Il veut être aimé, regretté, il veut à tout prix y croire. Y croire jusqu’à en mourir. Mais l’a-t-il vraiment mérité, cet amour ? Qu’attend donc un père de ses enfants ? Que peut-il leur offrir ? Et comment ? Par étapes ou en une seule fois ? Mais d’abord, qu’attendent les enfants de leur père ? Telles sont les questions posées par les She She Pop, un groupe – comme son nom ne l’indique pas – allemand, composé principalement de jeunes actrices performeuses. Alors, pour traiter clairement de la situation, chacune met en jeu son propre père. Un à un ils arrivent, s’assoient sur des fauteuils, leurs visages souriants repris en grand sur écran, tandis que les filles, après les avoir présentés, dévident leurs rancœurs. Tels qu’elles les décrivent, nous avons là : un bourgeois tranquille, un intellectuel hargneux, un bon vivant. Trois figures courantes de notre société, de notre temps. Des hommes, des seniors d’aujourd’hui en pleine forme, qui, pas plus que Lear, n’ont réellement envie, quoi qu’il se passe, d’abandonner leur pouvoir, de prendre leur retraite. Évidemment, la première chose à laquelle on pense, c’est : comment ces jeunes filles sontelles parvenues à persuader leur père respectif de se prêter à un jeu pour le moins risqué ? Car bien entendu personne ne se fait de cadeau. D’autant qu’après avoir calmement écouté, les pères s’expriment… Seulement voilà : avant tout, il s’agit de théâtre et non pas d’un psychodrame chaotique. D’ailleurs, pour éviter toute dérive, de soir en soir, les interprètes des trois filles (deux actrices, un acteur) changent de personnage, et donc de père. Oui, un théâtre d’une énergie joyeusement féroce, et parfaitement maîtrisé. Et qui rejoint Shakespeare, dans la mesure où s’élaborent à partir de la pièce, des situations, des conflits qui la construisent, la mènent de scène en scène. Des textes s’affichent sur écran, lus par le personnage impliqué, qui alors enchaîne sa propre histoire. Comme encouragé, chacun peut, sans jamais verser dans le sentimentalisme – c’est d’autant plus frappant – exposer ses problèmes, faire exploser sa fureur, sa douleur. Étranges, bouleversants rappels de ce que le quotidien le plus banal peut se gaver d’incompréhensions mutuelles, de décalages affectifs, toutes ces petites choses qui parfois font mal, et quoi qu’il en soit, marquent l’existence. Sans quitter la réalité de leur présent, avec une distance non pas d’ironie, mais de tendre malice, d’humour funèbre, les She She Pop retrouvent la force de Shakespeare, cette impitoyable force de vie qui traverse les siècles. Et puis, elles ne se contentent pas de suivre l’exemple, elles poursuivent, elles creusent. Car après tout, les pères, ils ont eux-mêmes été des fils. Les filles, elles sont ou seront des mères. Sans reproche ? Comment se situer, avec toutes ces questions sur ce qu’on a fait, que l’on aurait dû, mais que l’on n’a pas… Comment se connaître, avec tous ces problèmes d’héritage, d’hérédité, de transmission, de malentendus ou de conflits générationnels… « L’homme-clé du renouveau artistique d’une Ukraine qui peine à se trouver une identité. » Le Monde, Fabienne Darge mai 2011 Né en Russie, Vlad Troitskyi grandit en Ukraine. À Kiev, où il suit l’École polytechnique, tout en fréquentant la scène. Après s’être perfectionné au GITIS de Moscou, il revient et fonde le Théâtre Dakh. Autrement dit « le Théâtre sur le toit » puisque c’est à l’air libre sur le toit d’un immeuble de la capitale ukrainienne que tout commence. Puis il s’installe en périphérie, dans une salle vraiment petite (60 places). En 2004, vient se joindre le Groupe DakhaBrakha, qui mêle folklore et musiques d’aujourd’hui. En 2007 Vlad Troitskyi lance le Festival Gogol, qui chaque année pendant un mois, entraîne spectateurs et acteurs dans sa fête. La morale de l’histoire ? D’un côté, on est content de soi quand on est fier de la façon dont on s’imagine avoir élevé ses enfants… De l’autre, on est content de soi quand on s’imagine « s’être fait tout seul ». Colette Godard Testament de She She Pop © DORO TUCH → THÉÂTRE DES ABBESSES I B DU 28 NOVEMBRE AU 3 DÉCEMBRE 20 H 30 I DIMANCHE 2 DÉCEMBRE 15 H UN GRAND VOYAGE EN ALLEMAND SURTITRÉ EN FRANÇAIS SHE SHE POP & LEURS PÈRES Testament D’APRÈS CONCEPT LE ROI LEAR DE WILLIAM SHAKESPEARE She She Pop & leurs pères ASSISTANT Kaja Jakstat & INTERPRÉTÉ PAR Sebastian & Joachim Bark, Fanni & Peter Halmburger, Mieke & Manfred Matzke, Lisa Lucassen, Ilia & Theo Papatheodorou CRÉÉ She She Pop. CORÉALISATION Théâtre de la Ville-Paris et Festival d’Automne à Paris. Hebbel am Ufer Berlin – Kampnagel Hambourg et FFT Düsseldorf. Avec le soutien financier de la ville de Berlin, de la ville de Hambourg et les fonds du Darstellende Künste e.V. PRODUCTION COPRODUCTION Dans le cadre du tandem Paris Berlin organisé à l’occasion des 25 ans d’amitié entre les villes de Paris et de Berlin. Gogol, mais aussi Shakespeare, ont inspiré les deux œuvres qu’il nous présente. Avec Le Roi Lear - prologue, il s’agit d’un spectacle purement visuel et musical, autour d’un thème essentiel de la pièce : famille, amour et trahison, avec ses personnages centraux : les trois filles du roi. Ici, un trio de femmes en robes de mariée, chantant au cœur d’un étrange rituel païen, patchwork d’influences diverses. Sur fond de musiques non moins diverses jouées live par « l’ethno-chaos-band », le DakhaBrakha, on pense aux marionnettes japonaises du Bunraku, manipulées à vue… Manipulation, mélange qui reflètent la situation aujourd’hui en Ukraine. C’est encore autour d’une jeune fille que tourne l’histoire de Viï-le roi terre. Elle est mourante, demande à être veillée par un jeune philosophe élève d’un séminaire, lequel bientôt se rend compte qu’en fait, elle est la sorcière qu’il croyait avoir tuée. Et c’est là qu’il rencontre une créature abominable, venue à la demande de la jeune morte : Viï, le chef des gnomes… & MUSIQUE Pierre-Antoine Dubey, Bartek Sozanski, Anatolii Cherkov, Nina Garenetska, Marko Halanevych, Nataliia Halanevych, Tanya Havrylyuk, Dmytro Iaroshenko, Roman Iasinovskyi, Ruslana Khazipova, Dmytro Kostiumynskyi, Iryna Kovalenko, Solomiia Melnyk, Volodymyr Minenko, Olena Tsybulska, Tetyana Vasylenko, Kateryna Vyshneva, Nataliia Zozul JEU Le Roi Lear - prologue mise en scène Vlad Troitskyi © THÉÂTRE DAKH Théâtre Vidy-Lausanne Théâtre de la Ville-Paris – Festival Passages, Metz AVEC LE SOUTIEN DE Ukrainian Art Project, Fondation Landis & Gyr PRODUCTION DÉLÉGUÉE Selon vous, de quoi parle Viï ? COPRODUCTION VLAD TROITSKYI : Il ne s’agit pas seulement d’un conte d’épouvante, mais avant tout d’une histoire qui porte à la réflexion, et que depuis longtemps, je voulais aborder. Cela dit, je ne mets pas en scène le texte littéral de Gogol, je m’appuie sur le travail du dramaturge Klim, autour de quelques thèmes. Tout d’abord : la femme. Qu’est-ce que la femme, principalement en Ukraine ? Et puis je veux insister sur les rapports, les liens entre les individus d’une même culture ou de cultures différentes, y compris traditionnelles. Je ne tiens pas à mettre en avant les traditions, je voudrais dire d’où nous venons, qui nous sommes. Ce n’est pas le folklore qui m’intéresse, c’est la vie. Dans sa réalité. Je voudrais montrer une Ukraine inconnue. Une Ukraine différente de l’image que l’Europe peut s’en faire. Pour moi, ce pays n’est pas compris. Tout au moins il est mal compris. À travers cette création, je souhaite éclairer le côté mystique de la culture ukrainienne, mais pas seulement. C’est-à-dire que je souhaite m’appuyer sur le conflit entre la tendance européenne – que je perçois comme raffinée, délicate – et quelque chose d’autre, pas encore entaché par une « pseudo civilisation ». Une culture proche de la terre. Vous montez Vïi avec deux comédiens francophones, pourquoi ? V. T. : C’est l’histoire d’un voyage, celui de deux étrangers en Ukraine. Les deux comédiens francophones incarnent parfaitement ces personnages. Pour les préparer, je les ai emmenés dans les Carpates, et je les ai laissés, seuls, dans des conditions assez sévères. Se trouver là-bas, sans connaître la langue ni personne, c’est un peu comme se perdre dans la jungle. À mon avis, pour eux comme pour le spectacle il est essentiel d’avoir vécu cette expérience, loin de la civilisation, proche de la terre, du peuple. Proche du rite. D’après le dossier presse de Vidy-Lausanne Création au Théâtre-Vidy Lausanne le 29 mai 2012 M. Vitalyi Chudnovskyi REMERCIEMENTS PARTICULIERS À Viï – le roi terre est dédié à René Gonzalez. 10 • HAROLD PINTER // MARIE-LOUISE BISCHOFBERGER Théâtre de la Ville PARIS novembre-décembre 2012 JEAN-CLAUDE GALLOTTA • 11 novembre-décembre 2012 DE JOIE ET DE PEUR → THÉÂTRE DE LA VILLE I B DU 31 OCTOBRE AU 10 NOVEMBRE 20 H 30 I DIMANCHE 4 NOVEMBRE 15 H JEAN-CLAUDE GALLOTTA Racheter la mort des gestes Chroniques chorégraphiques 1 CRÉATION MONDIALE AU THÉÂTRE DE LA VILLE CHORÉGRAPHIE CONCEPTION Jean-Claude Gallotta & TEXTES Jean-Claude Gallotta & Claude-Henri Buffard Mathilde Altaraz Jacques Schiotto & Marion Mercier ASSISTANTE À LA CHORÉGRAPHIE COSTUMES Sarah Barrau, Christophe Delachaux, Ximena Figueroa, Ibrahim Guetissi, Mathieu Heyraud, Georgia Ives, Cécile Renard, Gaetano Vaccaro, Thierry Verger, Béatrice Warrand & UN GROUPE DE 20 intervenants AVEC Parce qu’elle aime le théâtre où se heurtent le concret et l’irréel, où se manifestent les mouvements d’humour et d’angoisse, Marie-Louise Bischofberger aime Pinter, et tout particulièrement Une petite douleur. Centre chorégraphique national de Grenoble. Théâtre de la Ville-Paris. la MC2 : Grenoble. Le Centre chorégraphique national de Grenoble est financé par la DRAC Rhône-Alpes / ministère de la Culture et de la Communication, la ville de Grenoble, le conseil général de l’Isère, la région RhôneAlpes, et soutenu par l’Institut français pour les tournées internationales. PRODUCTION COPRODUCTION AVEC LE SOUTIEN DE → THÉÂTRE DES ABBESSES I A DU 7 AU 22 DÉCEMBRE 20 H 30 I DIMANCHE 9 DÉC. 15 H HAROLD PINTER I MARIE-LOUISE BISCHOFBERGER Une petite douleur CRÉATION Gisèle Joly, Séverine Magois (NOUVELLE TRADUCTION) © L’Arche Editeur CONCEPT & MISE EN SCÈNE Marie-Louise Bischofberger SCÉNOGRAPHIE & COSTUMES Bernard Michel TRADUCTION Ateliers du Théâtre Vidy-Lausanne Bertrand Couderc SON André Serré ASSISTANTE À LA MISE EN SCÈNE Pauline Masson CONSTRUCTION DÉCOR LUMIÈRES AVEC Ximena Figueroa & Gaetano Vaccaro dans Racheter la mort des gestes de Jean-Claude Gallotta © GUY DELAHAYE Marie Vialle, Louis-Do de Lencquesaing, Christian Le Borgne Théâtre Vidy-Lausanne Théâtre de la Ville-Paris PRODUCTION DÉLÉGUÉE COPRODUCTION L’Arche est éditeur et agent théâtral du texte représenté. www.arche-editeur.com Louis-Do de Lencquesaing & Marie Vialle en répétition au Théâtre de la Ville © DR Un beau jour de juin dans la campagne anglaise, un couple savoure son thé, et puis une guêpe vient les perturber, et puis un homme arrive, impose sa présence silencieuse. Qui est-il, que veut-il ?… Ainsi s’amorce cette Petite Douleur, d’Harold Pinter que met en scène Marie-Louise Bischofberger. Née près de Zurich, elle a beaucoup voyagé. D’abord avec ses parents, tous deux peintres, et qui lui donnent – indirectement – le goût du théâtre : elle les voit pendant la journée, sans un mot, se concentrer sur leurs gestes. Alors le soir, fébrilement ils parlent, dialoguent, racontent des histoires… Elle se rêve actrice, suit des cours, envisage l’école de cinéma de Berlin. Puisqu’elle doit travailler, qu’elle aime découvrir et écrire, elle devient reporter pour des journaux suisses, et finalement renonce à Berlin. Non pas pour rester dans la presse, mais elle rencontre celui qui devient son mari : Luc Bondy. Avec lui, elle parcourt les scènes d’Europe. À ses côtés, elle travaille en tant qu’assistante et dramaturge. Aurait-elle pu rêver d’une meilleure école ? Pour autant, elle ne renonce pas à sa carrière, prend des cours auprès de l’immense actrice de la Schaubühne, Edith Clever, qui lui demande d’écrire une pièce en vue d’un concours. Ce sera Jeanne la folle, qui est choisie, où elle ne joue pas, mais qu’elle met en scène ; la voie est tracée. Suivent des auteurs comme Marguerite Duras, Thomas Bernhard, Jon Fosse… Et Shakespeare, Le Viol de Lucrèce, où principalement elle s’attache aux relations entre les principaux personnages, dans toute leur violence. En fait, elle se passionne pour un théâtre que l’on pourrait qualifier d’intimiste angoissé, et qui tout naturellement l’amène à Pinter : « Le quotidien est un entrelacement de joie et de peurs, cette alternance lui ressemble. J’ai entendu un entretien entre un metteur en scène anglais et lui. Il garde son humour tranquillement acéré et, sans raison apparente, une sorte de rage le prend, monte, puis s’arrête d’un coup… On retrouve ça dans Une petite douleur qui date de 1959, juste après L’Anniversaire, mal accueilli à sa création, ce qui, je pense, l’a stimulé. Je tiens à cette pièce depuis longtemps. Pour interpréter le couple, j’ai fait appel à Louis-Do de Lencquesaing que je connais depuis toujours, et Marie Vialle qui a joué pour moi Je t’ai épousée par allégresse de Natalia Gin à la Madeleine *. « Pinter a d’abord écrit Une petite douleur pour la radio, on doit donc “matérialiser” l’espace, et aussi les silences, qui ne sont pas dans le même rythme si l’on voit ou ne voit pas les personnages. C’est possible, puisque lui-même l’a fait en 1961. Il n’est pas question de retrouver l’époque, mais l’étrangeté de la situation : un couple de la middle class qui lit le Times – garder la dimension anglaise est important – et n’a plus les moyens de vivre au centre-ville. La campagne n’est pas vraiment un choix, ils en souffrent. Lorsqu’ils voient l’autre homme, un rapport de force s’établit. D’abord, ils le traitent avec un léger mépris, en inférieur. Et progressivement, comme chez Thomas Bernhard, s’impose la puissance du silence, qui ouvre la carapace des convenances et des habitudes, amène à parler, parler, se dévoiler… « Tout commence en comédie de boulevard, avec une légèreté, un humour peu à peu glissant dans le cauchemar tangible. On ne sait plus où est le réel. Cette pièce est peut-être celle qui met le plus en évidence les mouvements liés à l’angoisse, voilà pourquoi je l’aime tant. » C. G. * À l’origine, le couple devait être interprété par Hugues Quester et Valérie Dashwood. Mais le temps a passé, Hugues Quester est en tournée aux États-Unis avec Rhinocéros, et Valérie Dashwood est indisponible. DES GESTES ANCRÉS DANS LA VIE Avec Racheter la mort des gestes, création mondiale au Théâtre de la Ville, Jean-Claude Gallotta ouvre le journal de ses souvenirs. Figures de l’amitié, moments de répétition et tranches de vie se passent le relais dans le voyage d’une mémoire sensible. LE SPECTACLE SÉQUENCE PAR SÉQUENCE (extraits) SÉQUENCE A Nous avions créé une première ébauche de ce spectacle dans notre studio de Grenoble ouvert sur la ville. Aujourd’hui, en répétition, dans la boîte noire du théâtre, le “dehors” nous a manqué. Une part du jeu entre la fiction et le réel, qui constitue un des axes de ce spectacle, n’y était plus. C’est une chorégraphie qui s’amuse avec la profondeur et la perspective, qu’elles soient spatiales ou temporelles. Le tram qui traverse de jardin à cour et de cour à jardin nous était essentiel. SÉQUENCE B Avec Hervé Guibert, nous parlions des grands films populaires qui nous avaient aidés à construire notre imaginaire. Lawrence d’Arabie étaient l’un de ceux-là. De ces films qui ne se contentaient pas de nous distraire, ils nous racontaient intelligemment le monde. Cette histoire si somptueusement filmée fait rêver par la beauté de ses plans et en même temps traite d’un sujet grave, le désir et le projet de fondation d’une nation arabe indépendante moderne. Par ailleurs, cet extrait placé en début de spectacle montrant, dans le désert, venant vers nous, un homme comme un point tremblant sur la ligne de l’horizon, ouvre le champ de la scène à l’infini. SÉQUENCE I George Mac Briar est l’un des invités du spectacle. Nous l’avons rencontré en audition. Il est à la fois celui que je serai peut-être plus tard (avec notamment mon mal au genou qui a conditionné ma danse à mes débuts) et une figure possible de Merce Cunningham (à qui il peut vaguement ressembler) qui nous avait dit à New York devant nos efforts démesurés pour plaire : « Ne jouez pas les héros »… SÉQUENCE U Au cours des auditions, il y a des moments d’une grande intensité auxquels le public n’a pas accès. Ces chroniques chorégraphiques nous permettent enfin de les montrer. Nous avons choisi trois personnes venues passer l’audition, qui nous ont touchés, mais qui n’auraient pas trouvé leur place dans nos autres spectacles. Elles s’appellent Sylviane, Annie, Frédéric. Pour eux, comme pour les autres danseurs et acteurs du spectacle, je reprends à mon compte la belle phrase de Robert Bresson : « Je vous imagine tels que vous êtes ». SÉQUENCE W Une invitée, seule sur la scène. Elle appelle : « Maman ! ». Il n’y a pas d’âge pour chercher sa mère. Elle ne cesse de l’appeler. Sur tous les tons. On en frissonne. En amont, dans le spectacle, on a déjà entendu cette quête. Oui, bien sûr, il s’agit de nous tous, mais plus particulièrement… SÉQUENCE X … de moi. J’ai appris la mort de ma mère le soir d’une de nos représentations à Paris. C’était comme un signe, comme si ma mère me réclamait que je lui rende hommage dans un de mes spectacles. Une de nos invitées, Marie-Alice, arrive de la salle, accueillie sur la scène par les danseurs et par la musique d’Armide de Lully que j’ai chorégraphié il y a quelques années. Elle est ma mère, caressée, palpée, manipulée, enveloppée, emportée… SÉQUENCE Y Lorsque nous avons créé l’ébauche de ce spectacle en studio en 2008, nous commencions à préparer L’Homme à tête de chou avec Alain Bashung. Je lui avais demandé la permission d’utiliser sa chanson Résidents de la république dans ces Chroniques. Il en était ravi et insistait pour savoir quels gestes étaient effectués sur sa chanson. Ce n’était pas de la politesse. Déjà très malade, chaque instant de vie avait de l’importance pour lui. En 2008, cette fin dansée/chantée était un petit signe amical pour sceller notre projet ; en 2012, Bashung disparu, elle est devenue un hommage. Jean-Claude Gallotta, Claude-Henri Buffard 12 • RACHID OURAMDANE // ARTISTE ASSOCIÉ Théâtre de la Ville PARIS novembre-décembre 2012 → THÉÂTRE DE LA VILLE I A DU 13 AU 15 NOVEMBRE 20 H 30 RACHID OURAMDANE Sfumato CRÉATION 2012 Rachid Ouramdane Sonia Chiambretto MUSIQUE Jean-Baptiste Julien CHANT Deborah Lennie-Bisson DÉCOR Sylvain Giraudeau LUMIÈRES Stéphane Graillot VIDÉO Aldo Lee, Jacques Hoepffner COSTUMES La Bourette ASSISTANTE DE CRÉATION Erell Melscoët CONCEPTION, CHORÉGRAPHIE TEXTE Jean-Baptiste André, Brice Bernier, Jean-Baptiste Julien, Lora Juodkaite, Deborah Lennie-Bisson, Mille Lundt, Ruben Sanchez AVEC L’A. L’A. est subventionnée par le ministère de la Culture et de la Communication / DRAC Île-de-France au titre de l’aide à la compagnie conventionnée, par la région Île-de-France au titre de la permanence artistique et culturelle et par l’Institut français pour ses projets à l’étranger. Rachid Ouramdane est artiste associé au Théâtre de la Ville de Paris et à Bonlieu, scène nationale Annecy. PRODUCTION COPRODUCTION Biennale de la danse de Lyon – Bonlieu Scène nationale Annecy – Le Quai, Angers – Kaaitheater, Bruxelles – Dans le cadre du réseau Imagine 2020, Art et changement climatique – King’s Fountain – Théâtre de la Ville-Paris – Théâtre national de Bretagne, Rennes – Centre chorégraphique national de Tours dans le cadre de l’accueil-studio AVEC L’AIDE DE la MC2 – Grenoble - du Musée de la danse, Centre chorégraphique national de Rennes et de Bretagne et du Centre national de danse contemporaine, Angers pour l’accueil en résidence AVEC LE SOUTIEN DE l’associationBeaumarchais – SACD au titre de l’aide à l’écriture et de la SPEDIDAM. Mille Lundt dans Sfumato de Rachid Ouramdane © AGATHE POUPENEY CLIMAT MÉTAPHORIQUE Pluie tropicale sur le plateau de Sfumato ! Rachid Ouramdane, artiste associé du Théâtre de la Ville, choisit la métaphore poétique et visuelle pour évoquer les dérèglements climatiques et les drames qu’ils engendrent. La scène, le monde. Vases communicants. En entamant la création de Sfumato, Rachid Ouramdane disait vouloir « transposer le témoignage des “réfugiés climatiques”, confrontés à la disparition et la dissolution de leurs territoires. » Mais comment la danse peut-elle « transposer » un drame planétaire, avec sa cohorte de situations intimes et collectives ? Et n’est-ce pas là prendre le risque d’esthétiser les souffrances du monde ? L’écrivain Jean-Luc Raharimanana répondait sur un précédent spectacle de Rachid Ouramdane, Des témoins ordinaires, nourri de rencontres avec des personnes ayant subi des actes de torture : « La question n’est pas de reproduire la laideur du monde sur scène, elle est de rappeler que l’intolérable nous est contemporain, par ces visages que nous pouvons situer quelque part dans notre monde actuel, dans notre histoire récente, et que nous avons refoulés quelque part, par lâcheté… »*. Il y a chez Rachid Ouramdane, comme d’autres artistes de sa génération, le souci de répondre, dans les matériaux mêmes de la fabrique artistique (ici, le corps, l’image, éventuellement la parole), à ce qui, du dehors, influe sur nos existences communes. Car quand bien même nous n’aurions connu quiconque ait subi l’épreuve de la torture (Des témoins ordinaires), que nous ne connaîtrions aucun « réfugié climatique » (Sfumato), cela fait partie du sentiment d’humanité qui constitue chacun. En fondant sa compagnie, L’A., en 2007, Rachid Ouramdane disait vouloir en faire un « lieu de réflexion artistique sur nos identités contemporaines. » Avec Loin, magnifique solo créé en 2008, il commence véritablement à déployer les enjeux qui l’animent aujourd’hui. Il part alors sur les traces de son père, né en Algérie, enrôlé dans l’armée française partie combattre en Indochine : « Je me suis alors senti très proche de personnes vivant dans des géographies très éloignées. Cela m’a donné envie de sonder davantage les endroits où l’on vit, qui sont souvent constitués de plusieurs couches culturelles. » Au Vietnam, il tombe sur un village en passe d’être enseveli sous les eaux. C’est là, peut-être, que naît le désir d’évoquer le sort des populations déplacées, déracinées. L’exil peut être causé par des raisons politiques, économiques, et aujourd’hui climatiques. Ces dernières ont suscité la trame de Sfumato. Non à la façon d’un documentaire (même si y contribuent des portraits filmés en Chine par Aldo Lee), mais sur un mode poétique et métapho- rique, où le plateau devient paysage noyé dans le brouillard, puis douché par une pluie tropicale. Les images, puissantes, prennent corps dans l’alternance dansée de solitudes cosmiques (le tournoiement prodigieux de Lora Juodkaite) et de corps détrempés. Une scansion à laquelle, en ouverture de Sfumato, un texte de Sonia Chiambretto donne la respiration et le tempo. « Le climat, écrit-elle, cristallise aujourd’hui la question de l’effroi. » À l’aune des dérèglements environnementaux et des catastrophes qu’ils engendrent, Rachid Ouramdane compose avec cet effroi contemporain pour inscrire, dans l’ici et maintenant de corps en mouvement, les échos et les traces des bouleversements qui restent à venir. Jean-Marc Adolphe * Jean-Luc Raharimanana, Mouvement n° 53, octobre-décembre 2009. Ruben Sanchez dans Sfumato © A. POUPENEY HOMMAGE À DOMINIQUE BAGOUET • 13 novembre-décembre 2012 LA VIVE JEUNESSE DE DOMINIQUE BAGOUET Vingt ans après sa mort, le legs de Dominique Bagouet, ce funambule des ellipses, reste porteur d’une épatante liberté, comme le manifeste la reprise de Jours étranges par un groupe d’adolescents rennais. Disparu voici vingt ans, Dominique Bagouet a imprimé à la danse contemporaine française une ligne en taille douce, dont la sève a été prolongée par les danseurs des Carnets Bagouet. Avec eux, le Théâtre de la Ville rend hommage à une œuvre dont les traces restent vibratiles, et se transformera, dimanche 18 novembre, en véritable ruche, avec deux ateliers danse, une rencontre et plusieurs projections, dont l’émouvant Noces d’or en soirée, documentaire de Marie-Hélène Rebois qui reconstitue, à la façon d’un puzzle, la dernière création que Dominique Bagouet n’a pu achever. « Un jour, Dominique [Bagouet] était parti en laissant la musique des Doors assez fort dans le studio. Et nous, comme il y avait pas mal de tension accumulée, on s’est mis à se défouler et à faire tous ces gestes qu’on fait quand on est seul et qu’on met de la musique. En fait, il était dans un bureau derrière la vitre et il nous regardait. Et il a noté pour chacun des choses assez caractéristiques qu’on a ensuite réutilisées. » Cette anecdote de répétition, rapportée par l’une des interprètes de Jours étranges, au lendemain de sa création en juillet 1990 au festival Montpellier Danse 1, en dit assez long sur un processus d’écriture assez inhabituel chez Dominique Bagouet. Luimême évoquait, lors de cette même rencontre publique, le rôle « assez provocant » de Catherine Legrand, qui fut son assistante sur la pièce et qui « ne poussait pas du tout dans le sens de chorégraphier les choses ». Une complicité qui ne pouvait qu’inciter Dominique Bagouet à rompre avec une écriture « bien clean », voire même à « ruer dans les brancards » et « jeter le bonnet par-dessus les moulins », comme il disait… En 1990, le chorégraphe ne savait pas qu’il ne lui restait hélas plus que deux ans à vivre. Avec Jours étranges, il revisite ce moment de « l’adolescence qui cherchait alors, dans ce qui est devenu une sorte de mythologie, ses propres valeurs et vivait aussi d’obscurs désirs mal définis de révolte contre les normes et les codes établis ». La fièvre de mai 1968 n’avait pas encore enflammé les esprits et les corps, qu’en 1967 Dominique Bagouet faisait ses classes au Centre de danse de Rosella Hightower, à Cannes. Dans ses bagages, une jeune élève américaine rapporte cette année-là le second album des Doors, un groupe fondé deux ans plus tôt à Los Angeles et alors quasiment inconnu en France. « Avec la voix chaude de Jim Morrison, le climat de ces Strange Days correspondait parfaitement au désarroi de notre adolescence », se souviendra Dominique Bagouet au moment de la création de la pièce. L’album des Doors, inscrit dans la mémoire, lui permet « de renouer avec un état qui n’est pas si éloigné de celui d’aujourd’hui où la remise en question, la quête d’aventures, se heurtent encore à de nouvelles conventions, des systèmes qui redeviennent pesants et qu’il semble urgent de secouer 2 ». Vingt ans après la mort (bien trop prématurée) du chorégraphe, ce qu’il disait en 1990 demeure d’actualité. Et le legs de Dominique Bagouet, ce funambule des ellipses qui a su allier exigence et fantaisie, légèreté et gravité, reste porteur d’une épatante liberté. Dans la continuité du travail considérable qu’ont mené les Carnets Bagouet pour faire vivre, de façon non muséale, la mémoire du chorégraphe, Catherine Legrand et Anne-Karine Lescop ont entrepris, à Rennes, de transmettre Jours étranges à un groupe de dix lycéens. Outre que cette expérience est, en elle-même, un modèle de ce qui peut être tenté entre les milieux artistiques et ceux de l’éducation, elle colore l’écriture de Dominique Bagouet, en toute confiance d’interprétation, de toute la palette d’exubérance et de fragilité, de chahut et de rêverie, qui en manifeste la vive jeunesse. Dominique Bagouet © MARC GINOT → THÉÂTRE DE LA VILLE I A DU 17 AU 20 NOVEMBRE 20 H 30 I DIMANCHE 18 NOVEMBRE 15 H DOMINIQUE BAGOUET LE TRIANGLE CITÉ DE LA DANSE Jours étranges Dominique Bagouet 1990 Catherine Legrand & Anne-Karine Lescop MUSIQUE 5 CHANSONS EXTRAITES DE L’ALBUM Strange Days DU GROUPE The Doors DÉCOR Laurent Gachet RÉALISATION Vincent Gadras LUMIÈRES Serge Dées RECRÉÉES PAR Robin Decaux COSTUMES Laure Fonvieille CHORÉGRAPHIE REPRISE SOUS LA DIRECTION ARTISTIQUE DE 10 ADOLESCENTS DE RENNES Leslie Degot, Alexis Hédouin, Eve Jacquet, Matéo Labrosse, Shankar Lestréhan, Sarah Montreuil, Isaac M’Vemba, Melvin Nze-Eyoune, Valentine Petitjean, Pauline Rip AVEC Le Triangle, cité de la danse. avec le soutien du ministère de la Culture et de la Communication, le Centre national de la danse dans le cadre du dispositif « Danse en amateur et répertoire », de la DRAC Bretagne, de la ville de Rennes et de la Caisse des Dépôts. PRODUCTION EN COLLABORATION AVEC J.-M. A. Hélène Cathala, lors d’une rencontre publique animée par Lise Ott au festival Montpellier Danse en juillet 1990, avec Dominique Bagouet, Hélène Cathala et Fabrice Ramalingom. In Dominique Bagouet, coffret livre DVD, ouvrage collectif sous la direction de Anne Abeille, La Maison d’à côté, 2010. 2 Citations de Dominique Bagouet extraites du texte-programme de Jours étranges en 1990. 1 HOMMAGE À DOMINIQUE BAGOUET DIM. 18 NOVEMBRE À PARTIR DE 11 H Ateliers, films, rencontre, soirée hommage (cf page 20) Jours étranges, version 2012 © CAROLINE ABLAIN 14 • MARTIN SCHLÄPFER // BALLETT AM RHEIN Théâtre de la Ville PARIS novembre-décembre 2012 AKRAM KHAN • 15 novembre-décembre 2012 LE SENS DES CONTRASTES → THÉÂTRE DE LA VILLE I B DU 19 DÉCEMBRE AU 2 JANVIER 20 H 30 I DIM. 23 & LUNDI 31 DÉC. 15 H AKRAM KHAN AKRAM KHAN COMPANY DESH (SOLO) CRÉATION 2011 DIRECTION ARTISTIQUE, CHORÉGRAPHIE & INTERPRÉTATION Akram Khan Tim Yip Jocelyn Pook CONCEPTION LUMIÈRES Michael Hulls HISTOIRES IMAGINÉES PAR Karthika Nair & Akram Khan ÉCRITES PAR Karthika Nair, PolarBear & Akram Khan DRAMATURGIE Ruth Little DIRECTION D’ACTEUR Zoë Nathenson VOIX D’ESHITA Sreya Andrisha Gazi VOIX DE JUI Eesha Desai ANIMATION VISUELLE Yeast Culture DIRECTION TECHNIQUE Fabiana Piccioli VIDÉO & CONSTRUCTION DÉCOR Sander Loonen (Arp Theatre) CRÉATION SONORE Nicolas Faure PRODUCTION Farooq Chaudhry CONCEPTION VISUELLE COMPOSITION MUSICALE Akram Khan est artiste associé à la MC2 : Grenoble et à Sadler’s Wells, Londres dans le cadre d’un accord de coopération internationale. PARTENANRIAT COLAS/Akram Khan company. COPRODUCTION MC2 : Grenoble – Curve Leicester – Sadler’s Wells, Londres, Théâtres de la Ville de Luxembourg – Concertgebouw, Bruges. CRÉÉ EN RÉSIDENCE au Curve, Leicester et à la MC2 : Grenoble. AVEC LE SOUTIEN DE l’Arts Council England. AKRAM KHAN COMPANY REMERCIE la Bangladesh High Commission, Londres, pour son soutien. Invité par le Théâtre de la Ville, le directeur du Ballett am Rhein à Düsseldorf, Martin Schläpfer présente pour la première fois en France deux pièces au climat fort différent : l’une est ludique, l’autre plus spirituelle. → THÉÂTRE DE LA VILLE I E DU 28 NOVEMBRE AU 5 DÉCEMBRE 20 H 30 I SAMEDI 1ER DÉCEMBRE 15 H & 20 H 30 MARTIN SCHLÄPFER I BALLETT AM RHEIN Forellenquintett I Neither FORELLENQUINTETT Don’t be shy DE The Libertines & Quintette pour piano, violon, alto, violoncelle et contrebasse en la majeur D 667 (La Truite) DE Franz Schubert CHORÉGRAPHIE Martin Schläpfer DÉCOR, COSTUMES & VIDÉO Keso Dekker LUMIÈRES & VIDÉO Franz-Xaver Schaffer Akram Khan dans DESH © RICHARD HAUGHTON MUSIQUE AVEC 23 danseurs NEITHER Neither, OPÉRA EN UN ACTE DE Morton Feldman Samuel Beckett MISE EN SCÈNE & CHORÉGRAPHIE Martin Schläpfer INSTALLATION VIDÉO LUMIÈRE, DÉCOR & COSTUMES rosalie LUMIÈRES Volker Weinhart MUSIQUE TEXTE LA SOURCE DES ORIGINES À GAUCHE M. SCHL.: Si Forellenquintett est ma création la plus joyeuse, Neither Akram Khan, dont la compagnie a été créée en dont la mémoire se transmet ou pas. Lorsque j’étais adolescent, mon père s’est battu pour partager ses souvenirs avec moi. » Rébellion de la part d’un jeune homme dont l’environnement se situe à des années-lumière du Bangladesh ; frustration et tristesse du côté du père. « Ma mémoire n’a rien à voir avec la sienne, ajoute Akram Khan. Ce n’est que récemment que j’ai eu envie de me confronter à son histoire – je suis allé dans son village – et à mes racines. » fait partie des pièces auxquelles j’accorde le plus d’importance, puisque dans sa polyphonie effervescente, la composition de Feldman est absolument singulière. C’était ma première œuvre pour toute la compagnie du Ballett am Rhein et la première où j’ai interdit aux maîtres de ballet de « nettoyer » la gestuelle et de parfaire les unissons. Je voulais préserver les différences individuelles, rendre ainsi la danse indépendante du rythme musical et la faire vivre dans l’instant même. 2000, à Londres, en rêvait depuis longtemps. Les risques que ce type de projet représente le retenaient. Puis, il a foncé. Questions d’urgence, de temps qui passe et qui pousse, d’énergie à vif… Entouré d’une équipe de proches collaborateurs dont l’écrivain Karthika Nair, il a décidé de séjourner pendant quelques semaines au Bangladesh, le pays d’origine de ses parents – Akram Khan est né à Londres –, d’y collecter dans les villes comme à la campagne, images, sensations, histoires et témoignages. Ce socle de vie commune racontée dans un texte de Karthika Nair, est le cœur battant de DESH, créé en 2011, à Londres. Desh troisième syllabe du nom Bangla-desh, signifie « terre ». « Je suis parti sur les traces de mon père et de sa mémoire personnelle, explique le chorégraphe. À travers l’évocation de la relation père-fils, j’avais envie de questionner la façon Sur le plateau, Akram Khan, formidable danseur, a traduit en tourbillons de gestes électriques les multiples visions qu’il a engrangées lors de son voyage. Mains volubiles et vibrantes, jambes déliées toujours prêtes à sauter, chuter, rebondir… Les mouvements quotidiens des tisseurs avec leurs machines à filer rudimentaires, les attitudes des mendiants dans la rue, la simple beauté d’une immense roue d’osier qui tourne… ont soufflé un répertoire chorégraphique nourri de toutes les rencontres faites par le chorégraphe. Si le kathak, danse traditionnelle indienne dans laquelle Akram Khan est virtuose depuis l’enfance, innerve évidemment sa gestuelle, son écriture déborde toute étiquette, tirant des bords entre abstraction et narration sans jamais perdre sa nervosité profonde. Bodgan Nicula dans Forellenquintett // À DROITE Ainara García Navarro, Jörg Weinöhl, Ensemble dans Neither © GERT WEIGELT ENTRETIEN AVEC MARTIN SCHLÄPFER Dans leur rapport au mouvement, privilégiez-vous le temps, l’espace ou la musique ? Né en Suisse alémanique, Martin Schläpfer dirige le Ballett am Rhein (Düsseldorf/Duisbourg) depuis 2009 et en a fait une M. SCHL. : La musique, clairement. C’est elle qui va décider s’il me faut des pointes ou le pied nu. Après ces choix, je fais des recherches sur le compositeur et d’autres thèmes. J’accumule du matériel, ensuite je crée la structure. référence. Pour la première fois invité à se produire à Paris, il vient avec deux pièces emblématiques, éclairant deux facettes de son savoir-faire unanimement acclamé outre-Rhin. Vous êtes venu à la danse grâce au patinage artistique ! MARTIN SCHLÄPFER : En effet, j’avais quinze ans quand un professeur de ballet, Marianne Fuchs, m’a découvert lorsque je pratiquais le patinage. Mais ma famille était fortement opposée à ce que je devienne danseur, jusqu’à ce que je sois lauréat du prix de Lausanne. L’essentiel de ma carrière s’est déroulé au Ballet de Bâle sous la direction de Heinz Spoerli. De votre temps d’interprète, comment avez-vous pris vos marques dans le paysage chorégraphique ? M. SCHL. : J’ai surtout dansé des chorégraphies de Heinz Spoerli, et un peu de Hans van Manen ou de Balanchine, vers le début des années 1980. Après avoir cessé de danser, j’ai ouvert une école de danse. Ensuite je me suis installé aux États-Unis. Comme j’étais un des rares danseurs suisses connus, on m’a proposé de diriger le Ballet de Berne. Voilà comment je suis devenu chorégraphe. Pendant les années 1980, la scène française s’est divisée entre le courant bauschien et le courant cunninghamien. Votre danse, construite à partir de personnages et pourtant très graphique, résonne telle une synthèse des deux. M. SCHL. : On se trouve toujours confronté aux œuvres des plus grands, et si on a de la chance, on élabore une approche personnelle à travers cet héritage. Il est essentiel qu’une création soit portée par tout ce qui lui a précédé. Le Ballett am Rhein donne des pièces très contemporaines et aussi du Balanchine ou autres néoclassiques. Ces contrastes m’inspirent. La question n’est pas de savoir si danser sur pointes est contemporain ou pas. Ça l’est, par définition. Il s’agit uniquement du comment et du pourquoi. Je suis connu pour des frappes violentes au sol, ce qui confère à la ballerine un côté phallique. Mais nous ne le faisons pas dans Forellenquintett qui est plus ludique. On détecte dans Neither des accents spirituels, qu’il s’agisse de la musique de Morton Feldman ou de la chorégraphie. Cette dimension est importante. Chez Feldman, les influences bouddhistes sont moins fortes que chez Cage, mais elles sont présentes. M. SCHL. : Un solo, ce n’est pas rien. Autoportrait, carte d’identité, mise au point, ADN artistique, confidence…, le solo, pas loin aussi parfois du monologue théâtral, est un livre ouvert et exige de la part de son créateur un taux élevé d’engagement et de transparence. Il faut avoir envie de se mouiller pour relever le défi d’un solo, d’un vrai. Que représentent ces pièces dans votre œuvre ? Neither est une pièce pour plus de quarante danseurs. Au Théâtre de la Ville ce sera un événement en soi, voire une transgression par rapport aux codes de la maison. M. SCHL. : Je mesure ce que Paris représente pour la danse et son histoire. Je suis très curieux de voir les réactions. Si elles sont négatives, je ne changerai pas forcément de métier. Je suis très reconnaissant au Théâtre de la Ville d’avoir rendu possible la venue d’une troupe aussi nombreuse. Propos recueillis par Thomas Hahn DESH concentre les atouts nombreux du danseur et chorégraphe en revenant à l’essence même de son besoin de danser. Akram Khan aime souligner sa relation profonde avec l’eau. « Je suis fasciné par l’eau à l’intérieur de la terre, c’est le noyau dur de ma façon de penser et de bouger, confie-t-il. Il y a énormément d’eau et de terre au Bangladesh… J’ai eu envie d’explorer une histoire qui rassemble la tragédie et la comédie des vies dans ce pays. » Akram Khan n’est pas tout à fait seul en scène. Les mots de Karthika Nair, le design visuel magique signé par Tim Yip, la musique de Jocelyn Pook, enveloppent et portent l’élan d’un homme qui sait s’entourer et aime les rencontres. Depuis 2000, au gré d’une quinzaine de spectacles qui ont fait connaître son nom dans le monde entier, Akram Khan a collaboré avec des écrivains comme Hanif Kureishi, le musicien Nitin Sawhney, le plasticien Anish Kapoor… Il a aussi conçu et interprété des duos avec Sidi Larbi Cherkaoui, Sylvie Guillem et Juliette Binoche. Désir d’en découdre encore et toujours, vitalité extrême et virtuosité sensible, l’alchimie Akram Khan ne cesse de se raffiner. Jeanne Liger © PAMELA RAITH Né à Londres, Akram Khan renoue avec le Bangladesh, pays de ses parents. Il traduit en tourbillons de gestes électriques les multiples visions qu’il a engrangées lors de son séjour. 16 • HOMMAGE À JOSÉ AFONSO Théâtre de la Ville PARIS novembre-décembre 2012 PORTUGAL • 17 novembre-décembre 2012 UNE VOIX REBELLE, UN ÉVEILLEUR DE CONSCIENCE J’ai eu la chance, enfant, de connaître José Afonso au moment de la Révolution des Œillets, puis de le revoir dans les années qui suivirent. La beauté de l’homme, de l’être humain, reste étrangement présente dans mon esprit, autant que le talent qui fit de lui cet immense compositeur-chanteur-poète jusque dans les années 90. Il sut tant réinventer des fados de Coimbra et des ballades que revivifier les chants populaires de son pays, les mâtinant parfois de sons africains. Je suis heureux et fier que le Théâtre de la Ville rende aujourd’hui hommage à celui qui fut l’auteur de Grandola Vila morena, la chanson qui passa sur les ondes de Radio Renaissance, déclenchant le signal de la Révolution des Œillets – et de nombreuses chansons engagées toujours teintées de merveilleux et de fantastique. Vie, œuvre, action de José Afonso ont préludé à la Révolution des Œillets, la forge de l’Histoire. Qui a entendu une fois le chant de ce poète, de cet artiste généreux autant que chaleureux le porte en soi comme la voix d’un ami. Emmanuel Demarcy-Mota → THÉÂTRE DE LA VILLE I B MERCREDI 21 NOVEMBRE I 20 H 30 HOMMAGE À JOSÉ AFONSO Francisco Fanhais, Joao Afonso, Antonio Zambujo, Mayra Andrade & Yara Gutking CHANT Julio Pereira DIRECTION MUSICALE, MANDOLINE, GUITARE, VOIX Miguel Vera GUITARE, VOIX Yara Gutking CLAVIERS, CHANT Marcos Alves PERCUSSIONS Portugal CONCERT DIFFUSÉ EN DIRECT SUR NOUVEAU PARTENARIAT MEDIAPART Afin d’offrir une plus large audience aux artistes, le Théâtre de la Ville et Mediapart, journal indépendant d’information en ligne, poursuivent un partenariat élaboré en juin 2012 dans le cadre de Chantiers d’Europe avec le concert d’Angélique Ionatos. Au cours de la saison 2012-2013, plusieurs concerts de Musiques du monde seront diffusés en direct et en accès libre sur Mediapart. Après le concert du groupe chilien Bloque Depresivo diffusé le 20 octobre, c’est l’hommage à José Afonso que de nombreux internautes pourront suivre en direct sur Mediapart en partenariat avec Dailymotion. José Afonso © DR Au terme d’une enfance partagée entre Portugal, Angola et Mozambique, et d’études secondaires et universitaires à Coimbra, José Afonso commence à chanter en 1949. Il a vingt ans ; il ne cessera guère, quelles que soient les difficultés, d’exercer cet art. Du fado lyrique de Coimbra, il évolue vers la ballade ; à partir du début des années soixante, il s’engage dans « la chanson d’intervention politique ». En ces temps de censure et de répression, ces chansons, diffusées par les radios d’Alger et de Conakry, sont écoutées en cachette. José Afonso est, sous la dictature de Salazar et Caetano (1932-1974), l’une des voix les plus Janita Salome, Carlos Salome, José Afonso, Julio Pereira en concert © DR écoutées par les opposants au régime. Une voix rebelle quand, officiellement, Amália Rodrigues règne sur les scènes. Diffusée dans la nuit du 25 avril 1974, Grandola, l’une des chansons du proscrit, donne le signal de la Révolution des Œillets. Reprise dans tout le pays, elle devient un hymne. Célèbre auprès du grand public, au Portugal comme à l’étranger, son auteur ne cède pas à la tentation du vedettariat ; sa fonction est d’une autre nature, éveiller les consciences. José Afonso choisit la chanson comme arme politique; orfèvre, il en cisèle la forme artistique, textes et musiques. Pour assurer l’impact de ses paroles, souvent poétiques, il imagine de solides mélodies, soutenues par des rythmes efficaces, à l’occasion, inspirés de la tradition populaire du centre du Portugal, ou bien par l’Afrique voire le Brésil. Sa voix séduit d’emblée ; elle traduit une vive sensibilité et exprime toutes les nuances de l’émotion. Intellectuel, ce francophone émérite est professeur de portugais, d’histoire et de philosophie dans les lycées du Portugal, puis du Mozambique, de 1964 à 1967. En 1968, il est chassé de l’enseignement pour raisons politiques… Il vit alors de leçons particulières et de son activité musicale ; celle-ci, soumise aux tracasseries et aux avanies des autorités, se déroule dans la clandestinité. Au cours des cinq années qui précèdent la Révolution des Œillets, il pratique la pédagogie du chant et de la parole, activité propice à la prise de conscience politique de ses disciples. Le 29 avril 1973, il est embastillé à la prison de Caxias. Après le 25 avril 1974, il se consacre à une chanson qui reflète les événements politiques et s’investit – et s’épuise – dans la défense du pouvoir populaire : campagne de « dynamisation culturelle » et mouvement des coopératives. Après quelque répit, il poursuit sa tâche d’éveilleur de conscience, voire de provocateur, dans un Portugal alors gouverné à droite : chansons-documents, écriture automatique, mots empruntés à Michelet ou à Reich… Sans délaisser le langage direct de la chanson destinée à informer, il tend, depuis quelques années, à user d’un langage plus métaphorique. En novembre 1981, il offre une série de cinq récitals au Théâtre de la Ville. Quelque temps plus tard, victime d’une incurable maladie, il se trouve fort démuni. Le 28 janvier 1985, le Théâtre de la Ville organise, en son honneur et à son profit, une soirée destinée à recueillir quelques fonds, avec Paco Ibañez, le Cuarteto Cedrón, Gilbert Laffaille… Auteur de quatorze disques, José Afonso s’éteint le 23 février 1987. Sa dépouille repose au cimetière de Setubal : une sépulture modeste, à son image. C’est la mémoire de cette voix rebelle et de cet éveilleur de conscience que le Théâtre de la Ville célèbre : soirée en son hommage, sous la direction musicale de Julio Pereira, à ses côtés sur scène, en novembre 1981, à laquelle participent Francisco Fanhais, un autre de ses compagnons, Joao Afonso, son neveu, chanteur lui aussi, l’illustre interprète de fado Antonio Zambujo, la talentueuse chanteuse cap-verdienne Mayra Andrade et, Yara Gutking, voix de l’ensemble de Julio Pereira. Article de presse, Libération, 5 mai 1974 Jacques Erwan Affiche 1974 (COLLECTION JACQUES ERWAN) Affiche célébrant le 1er mai 1974 (COLLECTION JACQUES ERWAN) 18 • MUSIQUES DU MONDE Théâtre de la Ville PARIS DIALOGUES RYTHMÉS Éternellement jeune, Zakir Hussain (né en 1951!) est l’unique musicien de l’Inde à attirer un public mêlé, souvent très jeune, sous tous les continents. Idole vivante dans son pays où il devient un mythe, il a hissé le tabla au sommet des percussions du monde, explorant les possibilités sonores de son instrument fétiche là où personne encore ne les avait entrevues à un tel point de perfection et de nouveauté. Ses doigts d’or, d’une vélocité vertigineuse, opèrent une magie électrisante. Et la beauté des sons graves produits par la main gauche sur le baya reste un mystère : nul joueur de tabla ne peut atteindre une rondeur du son aussi satisfaisante par sa force, sa souplesse et sa plénitude, ni produire des mélodies avec tant de justesse. Non content de savoir accompagner tous les genres (chant, art instrumental, danse kathak), le fils aîné d’Alla Rakha (accompagnateur fétiche de Ravi Shankar) s’adonne depuis trente ans au plaisir d’un partage enrichissant avec des artistes de jazz, tels John McLaughlin ou Jan Garbarek. Nous le retrouvons ici dans la tradition classique de l’Inde, avec le sitariste Niladri Kumar qui prend tous les risques d’une haute voltige dans le vif tirage et relâchement des cordes sur leurs arceaux. Le jeune Dilshad Khan, neveu du regretté Sultan Khan, accompagne Zakir pour son solo. Deux percussionnistes de la tradition carnatique viennent compléter l’aspect rythmique du programme avec le tambour mridangam et le pot de terre ghatam. Christian Ledoux SANAM MARVI SAMURAI À la vaillante beauté de Sanam Marvi fait écho celle de sa voix, une de ces voix d’âme dont le chant fond d’un coup d’aile sur le bonheur du présent, caresse les siècles passés, embrasse les vastes paysages où naquit la contemplative poésie soufie. Sanam Marvi, chanteuse pakistanaise de vingt-six ans, a le chant dans la peau, en témoigne la tranquille évidence de sa présence, où son souffle prend sa source et ses vertigineuses envolées. Elle est née à Hyderhabad, Pakistan, dans le Sindh, terre d’un des plus grands poètes du soufisme, Shah Abdul Latif (1689-1752). En son sanctuaire vénéré, tous les ans pendant trois jours, le temps d’un festival rituel (« Urs »), s’y rassemblent les maîtres musiciens et chanteurs soufis. Dès l’enfance, Sanam Marvi fut nourrie de ce paisible et rassembleur mysticisme. Son père, Faqir Ghulam Rasool, était l’un de ces chanteurs soufis, et c’est de lui, dit-elle, qu’elle a tout appris. Sans doute, mais elle y a mis du sien. La légende qui l’entoure déjà raconte qu’à l’âge de sept ans, un jour où elle accompagnait son père à Radio Pakistan et l’attendait dans le jardin, elle n’eut de cesse de le convaincre de l’autoriser à passer à son tour une audition. Ce qui fut fait, à une condition: qu’elle fasse fructifier le talent qui lui était donné par le travail, et le travail encore. Alors, Sanam Marvi apprend (notamment auprès d’Ustah Fateh Ali Khan de l’école de Gwalior) à sertir de sa voix les joyaux de la poésie soufie : Shah Abdul Latif bien sûr, et Baba Sheik Farid, Baba Bullet Shah et autres messagers de la foi dans la paix et l’amour. Sanam Marvi donne ses premiers concerts en 2004 sur une chaîne régionale du Sindh. Puis sa participation aux « Saisons » télévisées du Coke Studio lui ouvre les portes d’une gloire qui dépasse les frontières de la musique traditionnelle, la mène de « Bollywood » aux ÉtatsUnis. Mais Sanam Marvi, jeune femme du moderne Pakistan, sait où est sa juste place de pacifique guerrière du soufisme. Cinq accordéons diatoniques, dix mains, cinquante doigts, cinq pays, autant de traditions et de personnalités mélangées, autant de styles différents et de découvertes. Ces cinquante doigts en amour avec des centaines de petits boutons ont choisi pour nom Samurai et on s’en amourache de ces fous du petit piano à bretelles ! Didier Laloy pour la Belgique, Bruno Le Tron pour la France, David Munnelly pour l’Irlande, Riccardo Tesi pour l’Italie et Markku Lepistö pour la Finlande… Accrochez-vous, vous aurez le souffle coupé par ces fêlés du soufflet, vous allez tanguer sous le roulis de leur croisière au royaume de l’accordéon. Ce diable d’instrument redore ici son blason, si besoin en est encore. C’est un orchestre, une fanfare, une harmonie, c’est une symphonie, une polyphonie. Ce sont des basses qui ronflent, des mélodies qui s’enchaînent et se superposent, des rythmes qui se poursuivent fouettés par cinq fougues. C’est un festival, une fête, c’est le bonheur d’une rencontre qu’il fallait oser entre ces cinq agendas chargés de cinq spécialistes du piano du pauvre. Mais quelle richesse, quelle énergie, quelle vie dans cette musique ! Et quelle musicalité dans cette vie ! L’Europe musicale n’est pas en danger avec de tels ambassadeurs. Et sur scène, ça bouge, ça s’amuse, ça se répond, ça s’écoute, ça se déchaîne et, forcément, ça étonne non seulement le public mais parfois les musiciens euxmêmes, surpris par leurs comparses, éblouis des possibilités de leurs moulins à musique. Un régal. Étienne Bours UNE PRINCESSE AU ROYAUME DES POÈTES SOUFIS RÉJOUISSANTE VITALITÉ DE L’ACCORDÉON ! © ANNE FERMI © LIEVE BOUSSAUW © KAMROUZ © KAMROUZ ZAKIR HUSSAIN MUSIQUE CLASSIQUE • 19 novembre-décembre 2012 novembre-décembre 2012 THE DELANO ORCHESTRA FOLK VOLCANIQUE DE CINQ AUVERGNATS DÉTONANTS The Escape « MVAT MVCT MLWY » I « EITSOYAM » Un programme en deux actes. Une invitation au voyage mental, évocation de paysages, des cycles de la nature et du temps, des sensations intimes. Épure accompagnée d’images vidéo. Puis exploration d’un nouvel univers : « compositions brutes, courtes, rock ». Marc Coppey (au centre) et les solistes de Zagreb © ROMANO GROZIC MVAT MVCT MLWY est une pièce instrumentale composée pour un ensemble de chambre de six solistes – violoncelle, violons, piano, trompette. Véritable réflexion sur le temps et ses variations, ce prolongement musical, qui mêle de nouvelles compositions à la réorchestration de thèmes des précédents albums, invite l’auditoire à prendre le temps et à se plaire dans ce temps suspendu. Au centre des nappes atmosphériques déployées, les cordes et les pianos sont introduits avec légèreté et dépouillement pour une douce intensité. Par la transcription intime des sensations générées par les premières pluies automnales, le tremblement des feuilles sous le vent, la friction des herbes hautes sur les jambes et le frémissement des fourmis volantes estivales, on assiste à une formidable émancipation – une ritournelle amoureuse tout en retenue. Avec EITSOYAM, le groupe dans sa formation traditionnelle libère un second temps électrique où chants intimistes et guitares rageuses reprennent leurs droits dans des compositions rock brutes, percutantes et lumineuses. Cette quête de soi, romantique et combative, commence par des bruits de pas dans la neige pour s’évanouir dans un bain de soleil. Fort de sentiments nouveaux et de motifs amples et colorés, il est fait le récit d’une plénitude retrouvée : « Il y a la douceur, l’intensité, le jeu, le mystère, la sensualité, il y a TOUT ». Émilie Fernandez Odile Quirot MARC COPPEY & LES SOLISTES DE ZAGREB DES ARTISTES EN PLEIN IDYLLE → THÉÂTRE DE LA VILLE I D SAMEDI 10 NOVEMBRE I 17 H LES SOLISTES DE ZAGREB I MARC COPPEY DIRECTION & VIOLONCELLE SOLO AMANDO IVANCIC Sinfonia pour cordes, n° 9 JOSEPH HAYDN Concerto pour violoncelle, n° 1 en do majeur, Hob/VIIb.1 (Marc Coppey VIOLONCELLE) IVO MALEC “Lumina” pour cordes et bande magnétique PIOTR ILLICH TCHAÏKOVSKI Sérénade pour cordes, en ut majeur, op. 48 De vraies histoires naissent parfois sans que quiconque ait vraiment soupçonné leur devenir. Il en va ainsi de la rencontre récente de Marc Coppey avec les Solistes de Zagreb (Zagrebački Solisti), qui fêtent leurs cinquante ans en 2013. Le 24 septembre 2011, le violoncelliste français débutait avec eux en Croatie, au Festival de Samobor, dans le double habit de soliste et chef d’orchestre. Ce jour-là, les musiciens ont certainement songé aux premiers pas des Solistes, créés en 1953 à l’initiative de Radio-Zagreb : l’Italien Antonio Janigro (1918-1989), premier directeur musical, qui donna aux douze musiciens de départ leur profil artistique, était lui aussi violoncelliste et chef d’orchestre. À la veille de leur demi-siècle, la nostalgie a-t-elle joué un rôle ? Toujours est-il que Coppey succède directement à Janigro, étant seulement le deuxième violoncelliste à hériter des responsabilités de directeur artistique – la place avait été trop bien tenue ! On n’y verra aucun hasard : soliste réputé, Coppey est un subtil chambriste dont les cinq années passées au sein du Quatuor Ysaÿe ont enrichi de l’intérieur son expérience du jeu d’ensemble. Conscient de leur riche histoire, il a immédiatement apprécié leur polyvalence et leur état d’esprit : « C’est un ensemble d’un excellent niveau musical, qui a intégré ces dernières années nombre de jeunes et → THÉÂTRE DE LA VILLE I B → THÉÂTRE DES ABBESSES I D → THÉÂTRE DES ABBESSES I D → THÉÂTRE DE LA VILLE I D LUNDI 5 NOVEMBRE I 20 H 30 SAMEDI 1ER DÉCEMBRE I 17 H SAMEDI 15 DÉCEMBRE I 17 H JEUDI 20 DÉCEMBRE I 20 H 30 ZAKIR HUSSAIN SANAM MARVI SAMURAI THE DELANO ORCHESTRA TABLA & FRIENDS Niladri Kumar SITAR Dilshad Khan SARANGI Sridar Parthasarathy MRIDANGAM Uma Shankar GHATAM Inde du Nord & du Sud CHANT Ali Babar NEY Ajmal Muhammad TABLA Amanat Ali HARMONIUM Pakistan POUR LA PREMIÈRE FOIS À PARIS ACCORDÉONS Didier Laloy Belgique Markku Lepistö Finlande Bruno Le Tron France David Munnelly Irlande Riccardo Tesi Italie Alexandre Rochon COMPOSITION & RÉALISATION Guillaume Bongiraud VIOLONCELLE, COMPOSITION & ARR. Florent Cardinale VIDÉO Marc Chalosse PIANO Thomas Dupré BASSE Annick Fongarnand VIOLON Alexandre Kondo ALTO Matthieu Lopez GUITARE Christophe Pie BATTERIE Fabrice Planchat ALTO Julien Quinet TROMPETTE Alexandre Rochon GUITARE, VOIX Kütu Folk Records, de la DRAC Auvergne et de Clermont Communauté. AVEC LE SOUTIEN DE A GA K HAN TRUST FOR C ULTURE Music Initiative France → THÉÂTRE DES ABBESSES I D SAMEDI 8 DÉCEMBRE I 17 H CÉLINE FRISCH CLAVECIN BACH er Intégrale du 1 Livre du Clavier bien tempéré 2e CONCERT Toccata en ré majeur, BWV 912 Préludes et fugues de 13 à 24, BWV 858 à BWV 869 2e CONCERT talentueux musiciens. Il a su faire face aux terribles conséquences de la guerre de Yougoslavie, parvenant à se maintenir et à se renouveler en dépit de l’adversité ». La saison 2012-2013 est la première où Coppey assume ses fonctions de plein exercice : « Nous souhaitons mêler de manière harmonieuse la musique ancienne, les répertoires classique, romantique ou contemporain ainsi qu’un certain nombre de transcriptions […] Ce sont donc des artistes en pleine idylle qui visitent aujourd’hui le Théâtre de la Ville. L’année de la Croatie a en outre fourni au nouveau directeur musical prétexte à exercer sa réelle curiosité. En ouvrant son programme avec la brève Sinfonia n° 9 pour cordes d’Amando Ivancic (1727-1790), il révèle un compositeur croate du siècle des Lumières inconnu chez nous : « C’est une œuvre de très belle facture, s’enthousiasme Coppey, joyeuse, dynamique, transparente ». Composé en 1762 pour son collègue Joseph Weigl, le Concerto pour violoncelle n° 1 en ré majeur Hob. VIIB. 1 de Joseph Haydn (1732-1809) est au contraire une pierre angulaire du répertoire. Il exige à la fois une élégance particulière du son et du phrasé, un sens aigu de la respiration juste, et une énergie virevoltante dans l’irrésistible Allegro molto final : les qualités mêmes qui font de Marc Coppey l’un des plus purs héritiers de l’école française de violoncelle. En proposant ensuite Lumina, œuvre pour cordes et bande magnétique d’Ivo Malec, Coppey revient lui aussi sur ses pas : « J’ai passé mon prix au Conservatoire de Paris en présentant Arco I, un solo pour violoncelle de 1987, très intense et virtuose, que j’ai eu alors le privilège de travailler avec Ivo Malec lui-même. Lumina, qui date de 1968, est une œuvre dont les douze cordes sont traitées avec une grande indépendance. Si le déclenchement de la bande obéit à un protocole précis, la pièce comporte une part d’aléatoire. La bande a été préparée par le GRM ». Le GRM, c’est-à-dire le Groupe de recherches musicales, laboratoire source depuis 1958 de nombreuses créations et expérimentations dans le domaine du son et des techniques électro-acoustiques […] Conclure ce très beau parcours avec la Sérénade pour cordes op. 48 de Tchaïkovski (1840-1893), c’est parier sur du velours, tant cette partition à l’inspiration mélodique profuse et séduisante trône depuis toujours au centre du répertoire des orchestres à cordes. À considérer les axes programmatiques définis par Marc Coppey, ne manque guère à ce panorama qu’une transcription. Sans doute le bis y pourvoira-t-il… Rémy Louis CÉLINE FRISCH AMOUREUSE DE BACH L’artiste au son plein et à la virtuosité joyeuse, fascinée par le clavecin dès l’âge de six ans, pratique un jeu précis et racé qui sait ne plus être sage quand la fougue du contrepoint commande. Il n’est guère meilleure carte de visite que les Toccatas pour clavier et les 48 préludes et fugues du Clavier bien tempéré pour exposer son art. Vincent Borel 20 • BRÈVES Théâtre de la Ville PARIS novembre-décembre 2012 À DÉCOUVRIR • 21 novembre-décembre 2012 DIMANCHE 18 NOVEMBRE À PARTIR DE 11 H RENCONTRES & CONFÉRENCES « HOMMAGE À DOMINIQUE BAGOUET » RÉSERVATION SUR LE SITE INTERNET www.theatredelaville-paris.com (RUBRIQUE RENCONTRES PUIS CALENDRIER & INSCRIPTIONS) 2 ATELIERS DE PRATIQUE DE DANSE I 3 FILMS I 1 RENCONTRE OUVERTURE DE LA LOCATION LE 30 OCTOBRE « LES VOYAGES DU COMÉDIEN » PAR GEORGES BANU, essayiste & critique, connaisseur de la scène européenne, de ses metteurs en scène & acteurs OUVERT À LA LOCATION • TARIF UNIQUE 5 € JEUDI 15 NOVEMBRE 19 H I YOSHI OIDA I AU CAFÉ DES ŒILLETS OUVERTURE DE LA LOCATION MARDI 30 OCTOBRE • TARIF UNIQUE 5 € JEUDI 13 DÉCEMBRE 19 H I HUGUES QUESTER I AU CAFÉ DES ŒILLETS © M. SAKAMOTO // © P. MESSINA CALENDRIER « PORTRAIT MAGUY MARIN » « UN DIMANCHE POUR UNE RENCONTRE » DU 13 AU 15 NOV. I LE CENTQUATRE Cap au Pire AUTOUR DE UNE PETITE DOULEUR DIMANCHE 9 DÉCEMBRE 2012 I AU THÉÂTRE DES ABBESSES I À L’ISSUE DE LA REPRÉSENTATION TARIF UNIQUE 5 € ATELIER DANSE À PARTIR DE 16 ANS (non danseurs) Catherine Legrand INTERPRÈTE DE LA COMPAGNIE BAGOUET * Pour faire écho à la pièce que vous aurez déjà vue, ou anticiper sur votre point de vue de spectateur si vous êtes sur le point de l’être, et cela après une brève mise en mouvement, nous aborderons ensemble l’apprentissage d’une des danses de Jours étranges. →13 H - 14 H 30 // AU CAFÉ DES ŒILLETS ENTRÉE LIBRE DANS LA LIMITE DES PLACES DISPONIBLES JOURS ÉTRANGES FILM « MA BIBLIOTHÈQUE IDÉALE » GRATUIT SUR RÉSERVATION (projection en boucle) durée 45 mn Captation de Jours étranges par la Compagnie Bagouet le 25 juillet 1993 à la cour d’honneur du Palais des Papes d’Avignon. © Les Carnets Carnets Bagouet → 15 H - 15 H 50 // GRANDE SALLE JOURS ÉTRANGES SPECTACLE durée 50 mn ATELIER DE DANSE POUR ADOLESCENTS DE 11 À 16 ANS DIRIGÉ PAR Anne-Karine Lescop INTERPRÈTE D’ODILE DUBOC ET RESPONSABLE ARTISTIQUE DE LA REPRISE DE JOURS ÉTRANGES * Voir texte du premier atelier de 11 H. → 17 H - 18 H30 // AU CAFÉ DES ŒILLETS GRATUIT SUR RÉSERVATION PLANÈTE BAGOUET FILM RÉALISATION durée 90 mn Charles Picq © Agat Film Plus qu’un portrait, ce film tente de saisir la portée de l’œuvre de Dominique Bagouet : le travail du chorégraphe, ses rapports avec les interprètes et son installation au début des années 1980 au Centre chorégraphique de Montpellier. L’enseignement qu’il y dispensa ne fut pas la moindre de ses actions. Tourné lors du festival Montpellier Danse en 1993, quelques mois après la mort du chorégraphe, le film donne la parole aux danseurs et aux fidèles de son équipe (Christine Le Moigne, Alain Neddam, Sven Lava Pohlhammer, etc.), dans un ultime hommage qui fut le fil conducteur de l’ensemble du festival. → 20 H 30 - 22 H 15 // GRANDE SALLE GRATUIT SUR RÉSERVATION NOCES D’OR OU LA MORT DU CHORÉGRAPHE FILM durée 75 mn (20 H 30) PRÉSENTATION DU FILM Jack Ralite, AMI ET PRÉSIDENT DES CARNETS BAGOUET DE (21 H) PROJECTION RÉALISATION Marie-Hélène Rebois © Daphnie Production Jours étranges, version 2012 © CAROLINE ABLAIN L’histoire d’une œuvre inaboutie, Noces d’or, que Dominique Bagouet voulait offrir à ses parents et à son public avant de mourir. La réalisatrice a retrouvé tous ceux qui faisaient partie de l’équipe de création de cette pièce, leur a demandé ce qu’ils savaient du projet et, comme dans un puzzle, a reconstitué les intentions du chorégraphe. Ce documentaire revient aussi sur la personnalité complexe et hors du commun de Dominique Bagouet et sur la naissance de sa vocation. DU 31 OCTOBRE AU 16 NOVEMBRE I AU THÉÂTRE DE LA VILLE La Geste d’Émile exposition des photos de Racheter la mort des gestes. Chroniques chorégraphiques 1 de Jean Claude Gallotta par Guy Delahaye. À PARTIR DU 20 OCTOBRE I AU THÉÂTRE DE LA VILLE Hommage à José Afonso Photos & documents sur la Révolution des Œillets 1974. À LA LIBRAIRIE DU THÉÂTRE DE LA VILLE QUELQUES RÉFÉRENCES POUR UN PARCOURS DE SPECTATEUR FACES I MAGUY MARIN I DU 13 AU 19 OCTOBRE • Sabine Prokhoris, Le Fil d’Ulysse-retour sur Maguy Marin (édition Presses du Réel) • Maguy Marin et Denis Mariotte, Ça quand même (édition Tarabuste) • Edward Bernays, Propaganda : comment manipuler l’opinion en démocratie (Zone) RACHETER LA MORT DES GESTES I JEAN-CLAUDE GALLOTTA I DU 31 OCT. AU 10 NOV. • Claude-Henri Buffard – Photographies de Guy Delahaye, Mon lointain parent : pour la chorégraphie de Jean-Claude Gallotta, 99 Duos (éditions Comp’Act) • Jean-Claude Gallotta, Les Variations d’Ulysse (Lansman) • Hervé Guibert, Articles intrépides (Gallimard) • Hervé Guibert, Le mausolée des Amants : Journal 1976-1981 (Gallimard) SFUMATO I RACHID OURAMDANE I DU 13 AU 15 NOVEMBRE • Sonia Chiambretto, Une petite randonnée (Actes sud-Papiers) • Sonia Chiambretto, Zone éducation prioritaire (Actes sud-Papiers) • Sonia Chiambretto, Chto : interdit au moins de 15 ans (Actes sud-Papiers) • Sonia Chiambretto, Polices (Grmx. ed) Parole intime d’un artiste à travers l’évocation des 10 livres qui ont compté dans son parcours. « CYCLE DE CONFÉRENCES SUR L’HISTOIRE DE LA DANSE » 4e SAISON JOURS ÉTRANGES I DOMINIQUE BAGOUET I DU 17 AU 20 NOVEMBRE « Parler de… Dominique Bagouet » (La maison d’à côté) « Les carnets Bagouet : la passe d’une œuvre » Sous la direction d’Isabelle Launay (Solitaires Intempestifs) • Isabelle Ginot, Dominique Bagouet, un labyrinthe dansé (Centre national de la danse) LA DANSE À LA RENCONTRE DES AUTRES ARTS Par Sonia Schoonejans, historienne, journaliste, réalisatrice de documentaires. VIÏ-LE ROI TERRE I VLAD TROITSKYI I DU 10 AU 14 DÉCEMBRE • Nicolas Gogol, Nouvelles complètes (Gallimard) • Nicolas Gogol, Théâtre complet (Actes sud) LA DANSE ET LES ARTS PLASTIQUES 2e partie RETROUVER LES AUTEURS PROGRAMMÉS AU THÉÂTRE DES ABBESSES TARIF UNIQUE 5 € : OUVERT À LA LOCATION PAR TÉLÉPHONE • PAR INTERNET www.theatredelaville-paris.com (RUBRIQUE RENCONTRES PUIS CALENDRIER ET INSCRIPTIONS) • OU AUX CAISSES DIMANCHE 2 DÉCEMBRE 2012 À 11 H I AU THÉÂTRE DE LA VILLE EN BREF GRATUIT SUR RÉSERVATION Jean-Marc Adolphe AVEC des danseurs de Dominique Bagouet (Sylvain Prunenec, Olivia Grandville SOUS RÉSERVE) & AVEC Anne Abeille ASSISTANTE DU CHORÉGRAPHE * 30, RUE YVONNE LE TAC, PARIS 18 LE 3 DÉC. I LA CINÉMATHÈQUE FRANÇAISE Maguy Marin : retour sur Umwelt (cinéma) → 18 H30 - 20 H // AU CAFÉ DES ŒILLETS ANIMÉE PAR MERCREDI 7 NOVEMBRE 2012 I 18 H I À LA LIBRAIRIE DES ABBESSES* DU 29 NOV. AU 1er DÉC. I TH. NAT. DE CHAILLOT DU 6 AU 8 DÉC. I MAISON DES ARTS CRÉTEIL DU 13 AU 15 DÉC. I THÉÂTRE DE ST-QUENTIN-EN-YVELINES Cendrillon Extraits du texte de Fabienne Arvers, in Catalogue images de la culture n° 19, CNC, janvier 2005. DANSEURS, TRACES VIVANTES DU CHORÉGRAPHE RENCONTRE PAR JEAN-CLAUDE GALLOTTA © STEPHEN BERKELEY-WHITE → 16 H 30 - 18 H // À LA COUPOLE TARIF UNIQUE 5 € DIRIGÉ PAR Rencontre avec l’équipe artistique. DU 22 AU 27 NOV. I TH. CITÉ INTERNATIONALE Ça quand même Prises/Reprises → 11 H -12 H 30 // À LA COUPOLE EXPOSITIONS OUVERTURE DE LA LOCATION MARDI 30 OCTOBRE • GRATUIT SUR RÉSERVATION LES 16 & 17 NOV. I LE CENTQUATRE DU 20 NOV. AU 1ER DÉC. I TH. DU ROND-POINT May B Dominique Bagouet © DR Le théâtre ces derniers temps redécouvre la place de l’acteur et il est temps de l’entendre. Georges Banu qui vient de publier Les Voyages du comédien (Éd. Gallimard) invite chaque mois un grand acteur pour dévoiler aussi bien des éléments biographiques, des récits de travail, des aveux sur le jeu : Angela Winkler, Yoshi Oïda, Hugues Quester, Laurent Poitrenaux, Josse De Pauw, Valérie Dréville, André Wilms… Le Théâtre de la Ville, au carrefour de la France et de l’Europe les accueille. • Rachid Ouramdane, artiste associé, travaillera avec un lycée de Goussainville et l’option Danse du lycée Brassens, autour de Sfumato sa création 2012. • Intervention en milieu scolaire autour du concert Hommage à José Afonso, avec Jacques Erwan – conseiller Musiques du monde et la participation de Francesco Fanhais, en partenariat avec l’Inspection générale de portugais et l’Inspecteur Général, M. Pérez. Un jury de 36 personnalités a attribué à Can We Talk About This ?* de DV8/Lloyd Newson le prix de la Meilleure production de l’année (2011-12) en Allemagne. La cérémonie de remise des prix, organisée par Tanz Magazine, a eu lieu à Berlin en août. Parmi les autres artistes primés : Alina Cojocaru et Anne Teresa De Keersmaeker nommées meilleures interprètes de l’année. Can We Talk About This ? a également reçu le Helpmann Award dans la catégorie Meilleur spectacle de danse. La cérémonie a eu lieu à l’Opéra de Sydney le 24 septembre 2012. *spectacle présenté au Théâtre de la Ville en octobre 2011. La plupart des artistes peintres ou sculpteurs sont fascinés par l’idée de rendre le mouvement, et la danse reste pour eux un défi. Degas, Matisse, Picasso, Nolde, Rauschenberg, autant de peintres pour qui la danse a été source d’inspiration. Quant aux artistes chorégraphiques, ils ont depuis toujours, entouré leurs danses de matières picturales participant à l’illusion théâtrale. Le tissage de la danse avec les arts plastiques s’est encore resserré après que le spectacle chorégraphique s’est rapproché de la performance ou de l’installation. Quelques exemples pris dans la création contemporaine nous aideront à mieux comprendre la grande porosité qui existe aujourd’hui entre ces disciplines. LES JEUNES I DAVID LESCOT I DU 8 AU 24 NOVEMBRE • David Lescot, Les Jeunes suivi de On refait tout et la réfection (Actes sud-Papiers) (L’ensemble de l’œuvre théâtrale de David Lescot est édité chez Actes sud-Papiers) LES VOYAGES DU COMÉDIEN YOSHI OIDA I JEUDI 15 NOVEMBRE • Coffret Yoshi Oida : L’Acteur Flottant - L’Acteur invisible - L’Acteur rusé PARCOURS JEUNESSE : UNE SÉLECTION POUR OFFRIR AUX PLUS PETITS PROCHAINEMENT « LES LUNDIS DE LIBÉRATION » • Charles Perrault, Le Petit Chaperon rouge et autres contes (Pockett) • Le Petit Poucet, raconté par François Morel (Gallimard Jeunesse) • La Belle au bois dormant, raconté par Annie Duperey (Gallimard Jeunesse) • Le Petit Chaperon rouge raconté par Claude Aufaure (Gallimard Jeunesse) • Le Petit Chaperon rouge illustré par Lydie Arickx (Actes sud Junior) • Jacques Prévert, Contes pour enfants pas sages (Gallimard Jeunesse) PREMIÈRE RENCONTRE LUNDI 5 NOVEMBRE À 18 H I AU THÉÂTRE DE LA VILLE Et retrouvez notre choix de livres pour la jeunesse : albums, pièces de théâtre… Le Théâtre de la Ville et le quotidien Libération proposent huit rendez-vous/débats avec des invités prestigieux autour de grands thèmes société et culture. Durant toute la saison, un lundi par mois, à 18 h, dans la grande salle. À DÉCOUVRIR JEUDI 31 JANVIER 2013 À 20H I AU THÉÂTRE DE LA VILLE : La Danse et la littérature DIMANCHE 21 AVRIL 2013 À 11H I AU THÉÂTRE DE LA VILLE : La Danse et le cinéma TARIF UNIQUE 5 € : OUVERT À LA LOCATION PAR TÉLÉPHONE • PAR INTERNET www.theatredelaville-paris.com (RUBRIQUE RENCONTRES PUIS CALENDRIER ET INSCRIPTIONS) • OU AUX CAISSES Programme à suivre sur le site internet du Théâtre de la Ville. ÉDUCATION ARTISTIQUE, ACTIONS PÉDAGOGIQUES • La compagnie de Jean-Claude Gallotta va assurer un atelier de pratique avec Difé Kako, la compagnie de jeunes lycéens guadeloupéens avec qui le Théâtre de la Ville est en partenariat pour la 3e année. • Bertolt Brecht, La Résistible Ascension d’Arturo Ui (L’Arche Éditeur, nvlle trad.) • Gidon Kremer, Lettres à une jeune pianiste (L’Arche Éditeur) 22 • TÉMOIGNAGE MERCI ROBERT DOIZON 1921-2012 Après avoir épaulé Jean Vilar au TNP comme à Avignon, où il a poursuivi sa tâche avec Paul Puaux, Bernard Faivre d’Arcier et Alain Crombecque, Robert Doizon a participé à la naissance du Théâtre de la Ville en 1968. Pendant plus de 33 ans, il s’est consacré aux relations avec le public, puis au conseil d’administration. Pour lui rendre hommage, je donne aujourd’hui la parole à Gérard Violette, qui avant de devenir le Directeur que l’on sait de 1985 à 2008, était administrateur général aux côtés de Jean Mercure dès 1968. Emmanuel Demarcy-Mota Théâtre de la Ville PARIS novembre-décembre 2012 Infinie tristesse, Robert Doizon nous a quittés le 8 juillet, date hautement symbolique marquant à la fois la fin de la saison 2011-2012 du Théâtre de la Ville et le début de l’édition 2012 du Festival d’Avignon. Les trompettes de Maurice Jarre, qui annoncent depuis toujours l’ouverture au public de la cour d’honneur du palais des Papes, ont dû saluer l’arrivée de Robert Doizon au paradis des gens bien. INTIMES CONFIDENCES Cher Gérard, J’ai vécu au cours de ma carrière théâtrale trois aventures exceptionnelles: celle du TNP-Jean Vilar, celle d’Avignon au cours de quarante-deux festivals, celle du Théâtre de la Ville, depuis son ouverture en décembre 1968, appelé par Jean Mercure et vous-même pour me joindre à une équipe dynamique et motivée. J’ai, du premier instant, aimé et assumé avec enthousiasme la responsabilité de ces contacts privilégiés avec les représentants des collectivités, comités d’entreprises, groupes d’amis, associations culturelles, enseignants, tout en veillant particulièrement aux meilleures conditions d’accueil d’un public découvrant un nouveau théâtre. Toujours inconditionnel des spectacles de ce théâtre, où je me sens chez moi, mon grand plaisir sera maintenant de vous apercevoir dans la salle, toujours aussi enthousiaste. Le temps passe et je vous assure de mon indéfectible attachement Robert Doizon, juin 2008 et de mon affection. Pour un public d’adultes, un théâtre sans œillères NOVEMBRE 2012 — Il y a ceux qui voudraient voir le théâtre populaire s’engager dans une voie résolument moderne, voire d’avant-garde, et ceux qui voudraient au contraire le voir s’attacher, en les renouvelant, aux grands classiques ? — Le théâtre populaire n’est pas un compartiment, une catégorie de théâtre, c’est au contraire le seul théâtre sur lequel on peut traiter tous les sujets : un théâtre « sans œillères » où le spectateur est considéré comme un adulte. C’est en même temps un retour aux sources et l’image, le témoin d’une société, de son époque. Jean Mercure, journal n°1, juin 1968 THÉÂTRE DE LA VILLE 20 H 30 THÉÂTRE DES ABBESSES 20 H 30 UN PARCOURS « L’unique joie au monde c’est de commencer. » Cesare Pavese Quand j’ai été pressenti, mes pensées sont allées tout naturellement vers Jean Vilar, dont j’avais suivi, jour après jour, l’expérience avec un intérêt passionné. Je savais qu’il me fallait partir de là, mais pour aller plus loin et vite. Et tout de suite, il m’est apparu comme une évidence qu’un théâtre à vocation populaire ne pouvait plus se restreindre au seul répertoire dramatique. Un large public pouvait, devait être initié à la danse et à la musique, et être à même de suivre leur évolution. Il fallait avant tout éveiller ce désir de connaissance qu’est la curiosité. Et pour cela, il fallait défendre et promouvoir, avec rigueur, la politique de l’abonnement en l’étendant pour la première fois à la danse et à la musique. C’était un risque, nous l’avons pris. Jean Mercure, journal, 1977 « Que demande le peuple ? » s’interrogeait récemment Bertrand Poirot-Delpech dans un article d’une lucidité remarquable et assez désolée. Démontrant l’impossibilité, sinon l’imposture, d’élaborer des œuvres et d’établir un répertoire à partir d’une consultation systématique du public populaire, il concluait en définissant ainsi le pari fondamental de l’action culturelle : « Présumer ce qui manque le plus à qui manque de tout. » Ce propos qui fait la part belle à l’intuition, à l’instinct, à une divination heureuse, nous paraît, à nous autres, éducateurs, gens d’enseignement, plus judicieux encore si nous l’appliquions à cette jeunesse qui nous est confiée. Pierre Descazeaux, professeur de collège d’enseignement général, • aux côtés de Jean Vilar et de Jean Mercure dès les débuts © DR de leurs belles aventures • 33 ans au Théâtre de la Ville • 42 festivals d’Avignon dont 33 pendant ses vacances ! • au fil des saisons, de plus en plus de responsabilités : contrôleur chef au TNP à Chaillot ; à la tête de l’équipe d’accueil au Festival d’Avignon, sous les directions successives de Jean Vilar, Paul Puaux, Alain Crombecque et Bernard Faivre d’Arcier ; créateur de trois services essentiels, location, accueil, relations publiques, au Théâtre de la Ville. Robert a su, dans les premiers, faire bénéficier le public d’importants progrès techniques : informatisation de la location et des fichiers, location et information par internet… une amélioration considérable pour le public. • en 1996, Robert participe activement à la création du Théâtre journal n°1, juin 1968 Traiter le public en ami Ceux qui renoncent au confort de leur chez-soi pour venir jusqu’à nous sont déjà des amis, et je voudrais les traiter comme tels. Il ne suffit pas d’offrir aux spectateurs des œuvres de qualité, il faut aussi veiller à leur accueil. Ce que je voudrais, c’est essayer de leur épargner tous les petits tracas administratifs, toutes les difficultés qu’ils rencontrent dès qu’ils ont l’intention d’aller au théâtre. Ce n’est pas toujours facile, mais cela me semble d’une importance capitale. Jean Mercure, journal n°1, juin 1968 Aujourd’hui, tout a changé : le théâtre, la société, les comportements. Robert a su s’adapter, ce n’était pas facile pour lui, qui, de son travail avec les représentants des collectivités, avait fait une priorité. Mais aujourd’hui, et depuis longtemps, l’individualisme a triomphé du collectif… UN RETOUR AUX SOURCES – LE CREDO DE ROBERT DOIZON Robert avait une haute idée des missions d’un théâtre public à vocation populaire… Sans nostalgie, quelques souvenirs rafraîchissants de l’importance du public pour Jean Vilar et Jean Mercure. Serons-nous jamais assez nombreux ? Nous savons bien, en effet, que les problèmes que nous imposent désormais une culture, un savoir et le divertissement étendus au plus grand nombre et aux plus déshérités sont infinis. Et quelle tâche, enfin, de rapprocher pour un temps au moins la solitude souvent amère du créateur, de la curiosité de ces assemblées nouvelles ! Jean Vilar, journal n°1 du Théâtre de la Ville, 1968 « Pour ne rien rater de l’actualité quotidienne du Théâtre de la Ville, découvrir les coulisses des spectacles, suivre les équipes en tournée, participer à des concours… Rejoignez-nous. » 1 Jean-Claude Gallotta Buchettino 14 H 30 & 19 H 30 VE 2 Jean-Claude Gallotta Buchettino 14 H 30 & 19 H 30 SA 3 Jean-Claude Gallotta DI 4 Jean-Claude Gallotta 15 H LU 5 Il mérite bien cette page dans ce journal. Emmanuel DemarcyMota l’a bien compris, n’oubliant pas ce qu’il a apporté avec son équipe dévouée et efficace au Théâtre de la Ville d’aujourd’hui. Six Personnages en quête d’auteur de Pirandello mis en scène en 1968 par Jean Mercure et en 2001 par Emmanuel DemarcyMota, deux dates marquant le début et la fin de son remarquable parcours. Une pièce majeure du théâtre contemporain, pour rappeler le goût de Robert pour les grands textes. Un signe du destin ? Une grande estime, une sincère affection pour l’ami fidèle auquel je dois tant. Et quel bonheur pendant toutes ces années de l’avoir eu à mes côtés prenant tant de plaisir à faire son travail et à le faire bien. Pour tout, merci Robert. Gérard Violette Zakir Hussain & Masters of Percussions MA 6 Jean-Claude Gallotta ME 7 Jean-Claude Gallotta JE 8 Jean-Claude Gallotta Les Jeunes J’avance et j’efface VE 9 Jean-Claude Gallotta Les Jeunes 15 H // 45 tours 20 H 30 J’avance et j’efface 14 H 30 & 20 H 30 Solistes de Zagreb I M. Coppey 17 H Jean-Claude Gallotta Les Jeunes 15 H // 45 tours 20 H 30 J’avance et j’efface SA 10 Quarante-cinq tours 15 H DI 11 LU 12 MA 13 Rachid Ouramdane Les Jeunes 14 H 30 & 20 H 30 J’avance et j’efface ME 14 Rachid Ouramdane Quarante-cinq tours J’avance et j’efface 14 H 30 & 20 H 30 JE 15 Rachid Ouramdane Les Jeunes 14 H 30 // 45 tours 20 H 30 J’avance et j’efface VE 16 Les Jeunes 14 H 30 & 20 H 30 J’avance et j’efface 14 H 30 & 20 H 30 45 tours 15 H // Les Jeunes 20 H 30 J’avance et j’efface 16 H & 20 H 30 Dominique Bagouet DI 18 Journée D. Bagouet à partir de 11H (H. abo.) Dominique Bagouet 15 H LU 19 Dominique Bagouet Les Jeunes 14 H 30 // 45 tours 20 H 30 MA 20 Dominique Bagouet Les Jeunes 14 H 30 // 45 tours 20 H 30 J’avance et j’efface ME 21 Hommage à José Afonso Quarante-cinq tours J’avance et j’efface 14 H 30 & 20 H 30 JE 22 Les Jeunes 14 H 30 & 20 H 30 J’avance et j’efface VE 23 Les Jeunes 14 H 30 & 20 H 30 J’avance et j’efface 14 H 30 & 20 H 30 € € JEUNE -12 ANS * toutes catégories ..................... 9 € SA 24 Les Jeunes 15 H & 20 H 30 J’avance et j’efface TARIF B THÉÂTRE I DANSE I MUSIQUES ME 28 M. Schläpfer I Ballett am Rhein Testament Le Roi Lear - prologue TARIF PLEIN JEUNE 1 Cat. 30 € 2 Cat. 25 € 1re et 2e catégories .................17 € JE 29 M. Schläpfer I Ballett am Rhein Testament VE 30 M. Schläpfer I Ballett am Rhein PRIX DES PLACES TARIF A TARIF PLEIN JEUNE TARIF C THÉÂTRE I DANSE I MUSIQUE 1re Cat. 26 € 2e Cat. 20 1re et 2e catégories ................ 15 re e DI 25 LU 26 MA 27 THÉÂTRE DÉCEMBRE 2012 1 seule catégorie ....................16 1 seule catégorie ....................12 THÉÂTRE DE LA VILLE 20 H 30 € € JEUNE -12 ANS * 1 seule catégorie ....................... 9 € TARIF PLEIN JEUNE TARIF D MUSIQUE I MUSIQUES DU MONDE TARIF PLEIN JEUNE 1 seule catégorie .................. 1 seule catégorie .................. 20 € 15 € TARIF E THÉÂTRE I DANSE TARIF PLEIN JEUNE 1re Cat. 35 € 2e Cat. 30 1re et 2e catégories ............... 26 € € JEUNE : MOINS DE 30 ANS (JUSTIFICATIF OBLIGATOIRE) *accompagnant un adulte pour J’avance et j’efface, Nos amours bêtes, Sobre la cuerda floja, L’Après-midi d’un foehn, Faim de loup & Trois contes (max. 4 enfants). Location Le Roi Lear - prologue Le Roi Lear - prologue THÉÂTRES PARTENAIRES THÉÂTRE DES ABBESSES 20 H 30 M. Schläpfer I Bal. am Rhein 15 H & 20 H 30 Sanam Marvi 17 H Testament LE MONFORT 20 H 30 SA 1 DI 2 LU 3 M. Schläpfer I Ballett am Rhein MA 4 M. Schläpfer I Ballett am Rhein Le Roi Lear - prologue ME 5 M. Schläpfer I Ballett am Rhein Le Roi Lear - prologue JE 6 VE 7 Une petite douleur SA 8 Céline Frisch 2 e concert 17 H Une petite douleur DI 9 Testament 15 H Le Roi Lear - prologue Le Roi Lear - prologue 16 H Testament Le Roi Lear - prologue Le Roi Lear - prologue Une petite douleur 15 H LU 10 Viï - le roi terre MA 11 Viï - le roi terre Une petite douleur ME 12 Viï - le roi terre Une petite douleur JE 13 Viï - le roi terre Une petite douleur VE 14 Viï - le roi terre Une petite douleur Samurai 17 H Une petite douleur SA 15 DI 16 COMMENT RÉSERVER LU 17 01 42 74 22 77 du lundi au samedi de 11 h à 19 h Robert est devenu un exemple, une référence et, le temps qui passe aidant, un sage. Robert a formé bon nombre de personnes, des femmes en majorité, certaines d’entre elles toujours, en ce début de saison, au Théâtre de la Ville à des postes de responsabilités. LE MONFORT 20 H 30 SA 17 PAR TÉLÉPHONE UN EXEMPLE - UNE RECONNAISSANCE des Abbesses, un événement capital pour moi et le Théâtre. • en 2001, l’année de sa retraite, toujours prêt à servir, il entre au conseil d’administration et accepte le rôle sérieux et ingrat de trésorier. http://www.facebook.com/TheatredelaVille.Paris THÉÂTRES PARTENAIRES JE Un large public pour la danse et la musique Un public jeune, l’importance du théâtre en pédagogie « Pour Robert, le théâtre c’était toute sa vie », m’avouait, en m’annonçant sa disparition, Marcelle sa femme, respectueuse de sa passion et toujours fidèle à ses côtés les jours de premières ! Une longue vie riche, parfaitement réussie au service Gérard Violette des autres. CALENDRIER • 23 novembre-décembre 2012 AUX CAISSES Une petite douleur MA 18 ME 19 Une petite douleur Akram Khan Une petite douleur JE 20 The Delano Orchestra Une petite douleur VE 21 Akram Khan Une petite douleur Une petite douleur SA 22 Akram Khan Théâtre de la Ville I 2 place du Châtelet, Paris 4 du mardi au samedi de 11 h à 20 h (lundi de 11 h à 19 h) DI 23 Akram Khan 15 H Les Abbesses I 31 rue des Abbesses, Paris 18 du mardi au samedi de 17 h à 20 h ME 26 Akram Khan JE 27 Akram Khan Trois contes I Ravel I Perrault 19 H 30 VE 28 Akram Khan Trois contes I Ravel I Perrault 19 H 30 PAR INTERNET www.theatredelaville-paris.com SA 29 Akram Khan Trois contes I Ravel I … 15 H & 19 H 30 LU 24 MA 25 DI 30 QUAND RÉSERVER LU 31 Akram Khan 15 H OUVERTURE DE LA BILLETTERIE 21 jours avant la 1re représentation et pour toutes les représentations du spectacle concerné. CONSULTEZ NOTRE SITE INTERNET POUR CONNAÎTRE : → Les rencontres du Théâtre de la Ville, organisées dans les deux théâtres et en partenariat avec les bibliothèques, les arrondissements, des associations ou des librairies. → Les surprises programmées par le Théâtre de la Ville au fil de la saison: bal littéraire, ateliers, expositions, émissions de radio, projections de films, cycle de conférences sur l’histoire de la danse du XXe siècle, rencontres exceptionnelles avec les auteurs associés et l’Ensemble Artistique du Théâtre de la Ville. 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