Congrès Parmi les multiples exemples pouvant illustrer la relation collaborative de l'examen clinique et de la lecture l'imagerie, on peut citer la rééducation des lésions du LCA. La mesure radiologique d'une pente tibiale supérieure à la norme, est un facteur prédisposant à la tension du néoligament suite à une ligamentoplastie. La mesure de la pente tibiale (Fig. 2) est représentée par l'angle complémentaire du plateau tibial médial et de l'axe diaphysaire du tibia (normalement de 108). Elle renseigne sur le contexte morphologique osseux avec la prédisposition ou non au glissement postérieur des condyles sur les plateaux tibiaux (tiroir antérieur) en chaîne cinétique fermée (CCF). D'autre part l'état des formations capsulo-ligamentaires postéromédiales et du segment postérieur du ménisque médial conditionne la stabilité du compartiment médial du genou, déterminant dans la stabilité globale du genou. La déstabilisation de ce compartiment nécessite une attention particulière pour la rééducation musculaire intensive du semi-membraneux et des muscles de la patte d'oie. L'examen clinique en tiroir antérieur du genou fléchi associé à une rotation externe du segment jambier, permet de tester le degré d'intégrité ou de laxité des formations capsulo-ligamentaires postéromédiales. L'état du segment postérieur du ménisque médial, peu traductible par l'examen clinique, sera précisé par l'IRM et/ou le compte-rendu opératoire si une ligamentoplastie est pratiquée. L'association d'une pente tibiale exagérée avec la détente des éléments capsulo-ligamentairespostéro-médiaux et la lésion ou ménisectomie du segment postérieur du ménisque médial, fait partie de l'investigation clinique et radiologique en kinésithérapie. Une telle association nécessite alors la plus grande réserve quant à l'utilisation des exercices monopodaux en CCF lors des premières semaines derééducation. Cette pratique favorisant la déformation plastique du Figure 2. Mesure de la pente tibiale (en jaune) : angle complémentaire à l'angle d'inclinaison du plateau tibial (trait rouge) et de la perpendiculaire à l'axe de la diaphyse tibiale (trait bleu). 44 néo-ligament facteur d'une micro-laxité du genou, générant à long terme une usure ménisco-cartilagineuse accélérée. Ainsi la complémentarité de l'examen clinique et de l'imagerie apporte des éléments décisionnels pour les choix que peut effectuer le kinésithérapeute afin d'optimiser la rééducation et le devenir à long terme du genou. http://dx.doi.org/10.1016/j.kine.2014.02.013 C13 La rééducation de la maladie de Parkinson : actualités Jean-Pierre Bleton Paris, France Adresse e-mail : [email protected] Mots clés : Évaluation ; Kinésithérapie ; Parkinson La rééducation occupe une place majeure dans le traitement de la maladie de Parkinson (MP). Le livre blanc édité par l'Association France Parkinson en 2010 montre que 75 % des patients ont recours à la kinésithérapie en complément du traitement médical. Malgré un consensus fort sur l'intérêt de la rééducation, les essais cliniques contrôlés cherchant à en valider l'efficacité sont encore peu nombreux (Fig. 1). Des progrès certains ont été réalisés dans ce domaine. Si en 2001 Deane et al. [1] dans une revue systématique pouvait écrire : L'efficacité de la rééducation standard doit être dans un premier temps, démontrée avant d'examiner les variations liées aux différentes méthodes, Tomlinson et al. [2] ont depuis montré une amélioration significative de la MP par la physiothérapie comparée à l'absence d'intervention. Les paramètres de marche, d'équilibre, de motricité et d'incapacité fonctionnelle sont plus particulièrement modifiés sous l'effet de la rééducation. La MP présente une symptomatologie composée de troubles moteurs et non moteurs, qui s'enrichit au cours de l'évolution. Par essence, la kinésithérapie porte plus particulièrement sur le traitement de la Figure 1. Jean-Pierre Bleton, masseur-kinésithérapeute, doctorant: Inserm UMR S 894, centre psychiatrie neurosciences (CPN), centre hospitalier Sainte-Anne (Paris) ; école doctorale des sciences du mouvement humain, faculté des sciences du sport, université AixMarseille (AMU) ; fondation Rothschild, unité James-Parkinson, service de neurologie. Kinesither Rev 2014;14(148):31–50 symptomatologie motrice. Elle est conditionnée par le stade évolutif et l'efficacité des traitements médicaux. Il est actuellement largement accepté de la commencer tôt, dès le stade initial de la maladie, afin de ne pas cumuler troubles moteurs en rapport avec la MP et effets délétères de la sédentarité. L'exercice physique est désormais considéré comme une véritable thérapie au même titre que le traitement médical. Certaines études ont même cherché à évaluer le potentiel neuroprotecteur de l'exercice physique [3]. Cependant, l'effet préventif et de décélération dans le développement de la MP par la pratique régulière d'exercices physiques reste à démontrer. Il apparaît également que les personnes atteintes de MP tirent les mêmes bénéfices de l'activité physique que les personnes saines à condition d'en adapter les modalités et l'intensité. Les programmes d'exercices sont construits pour maintenir les aptitudes physiques que la MP tend à réduire comme l'adaptation à l'effort, la souplesse, l'amplitude des mouvements ou le déroulement temporel du geste. Ils s'ouvrent à des techniques rééducatives ou des activités ludiques comme le chant (importance du souffle), le rythme qui agit comme un stimulant pour réaliser les actions conscientes, la vitesse d'exécution (mouvements forcés en vitesse sur cycle-ergomètre et/ou tapis roulant) [4] ou le renforcement musculaire, en particulier au niveau de la musculature axiale [5]. Il a été montré que l'exercice physique peut être pratiqué sans risque de modifier la pharmacocinétique des traitements par levodopa [6]. Aussi voit-on se développer, avec l'avis favorable du monde médical, nombre d'activités physiques dont certaines ont démontré leur efficacité comme le tango argentin [7]. À la phase de maladie installée, la MP se caractérise par des fluctuations motrices (effet On–Off), des blocages (freezing), des mouvements anormaux. Les personnes atteintes de MP se plaignent le plus souvent de troubles de la marche et de l'équilibre, de lenteur, de troubles de l'écriture, de fatigue [8]. L'évolution de la MP et ses présentations cliniques contraignent le kinésithérapeute à s'interroger sur les modalités de la rééducation : le choix des techniques (rééducation en tâches orientées), l'horaire des séances (rééducation en phases On ou Off), rééducation individuelle ou en groupe, rééducation au long cours ou rééducation par stages intensifs entrecoupés de périodes d'auto-rééducation [9]. À ce stade, certains des symptômes paraissent ne pas répondre au traitement médical. C'est en particulier le cas des signes axiaux, ainsi nommés car ils touchent l'axe médian du corps. Ils apparaissent souvent après dix ans d'évolution et sont dus à l'aggravation de lésions cérébrales non-dopaminergiques donc peu dopa-sensibles [10]. Les signes axiaux représentent l'essentiel du traitement de kinésithérapie. Leur degré de sévérité est évalué par 6 des items de l'UPDRS moteur. L'item 18 (parole), l'item 22 (rigidité), l'item 27 (se lever d'une chaise) qui explore la motricité globale et fonctionnelle, l'item 28 (posture), l'item 29 (stabilité posturale), l'item 30 (démarche). Les principes de la rééducation de la parole par la méthode LSVT® (Lee Silverman Voice treatment) ont été appliqués avec succès à la motricité : rééducation Big and Loud Therapy program [11]. La rigidité longtemps combattue par des exercices d'assouplissement est désormais traitée par des programmes de renforcement musculaire de type aérobie contre résistance (avec haltères) [12]. Les troubles de la motricité complexe et globale comme se lever d'une chaise ou faire demi-tour, mettent en évidence une pathologie des fonctions exécutives. Leur rééducation fait appel à la dissociation séquentielle du mouvement complexe et à la représentation imagée du mouvement [13]. Les déformations axiales sont parfois très sévères (camptocormie, syndrome de la Tour de Pise). Les mécanismes en cause sont encore mal connus. Ils sont probablement en lien avec un déficit de la musculature paravertébrale avec ou non une composante dystonique et probablement un défaut d'intégration des informations proprioceptives. La rééducation pratiquée sous la forme de stages intensifs de récupération de l'équilibre Congrès a permis de montrer que les personnes atteintes de MP sont capables d'apprentissage moteur [14]. Les troubles de la marche sont le miroir de la symptomatologie motrice. Leur rééducation est : – d'une part, qualitative, mobilisant l'attention du patient sur des aspects spécifiques de sa démarche et utilisant des moyens de contrôles comme l'indiçage sonore et/ou visuel ; – d'autre part, quantitative : l'enchaînement répété des pas sur tapis roulant apporte non seulement une amélioration des qualités d'endurance mais également de la régularité de l'allure et de la longueur de l'enjambée. La période du déclin est annoncée par les chutes. La personne souffrant de MP perd son autonomie. La symptomatologie est non seulement marquée par l'accentuation des signes axiaux, des troubles de la marche, de l'équilibre, mais également par la fréquence des signes non moteurs : douleurs, troubles végétatifs et cognitifs. L'éducation thérapeutique revêt une grande importance aussi, la conduite du traitement par la rééducation est définie par les différents acteurs impliqués (le patient, son entourage, le neurologue et le kinésithérapeute). En fonction du stade évolutif les indications de la rééducation sont d'ordre préventif afin de préserver l'indépendance fonctionnelle, d'autres sont symptomatique (micrographie, douleurs, freezing), d'autres encore sont palliatives (raideurs articulaires, déficit musculaire, complications liées à l'inactivité). Les modalités d'application de la kinésithérapie peuvent être comparée à la dispensation d'un médicament : une évaluation clinique standardisée préalable permet de définir le contenu du programme d'exercices (orientation ciblée des exercices vers un objectif déterminé), les modalités d'application (rééducation en groupe et/ou individuelle), le rythme, la fréquence et la quantité d'exercices (influence dose/effet de l'exercice), les précautions et/ou contre-indications, les critères d'appréciation des résultats. Références [1] Deane KH, Jones D, Playford ED, Ben-Shlomo Y, Clarke CE. Physiotherapy for patients with Parkinson's disease: a comparison of techniques. Cochrane Database Syst Rev 2001;(3): CD002817. [2] Tomlinson CL, Patel S, Meek C, Herd CP, Clarke CE, Stowe R, et al. Physiotherapy intervention in Parkinson's disease: systematic review and meta-analysis. BMJ 2012;345:e5004. [3] Alonso-Frech F, Sanahuja JJ, Rodriguez AM. Exercise and physical therapy in early management of Parkinson disease. Neurologist 2011;17(6 Suppl. 1):S47–53. [4] Laupheimer S, Härtel S, Bös K. Forced Exercise - effects of MOTOmed® therapy on typical motor dysfunction in Parkinson's disease. Neurol Rehabil 2011;17(5/6):239–46. [5] Lima LO, Scianni A, Rodrigues-de-Paula F. Progressive resistance exercise improves strength and physical performance in people with mild to moderate Parkinson's disease: a systematic review. J Physiother 2013;59(1):7–13. [6] Lopane G, Contin M, Scaglione C, Albani F, Baruzzi A, Martinelli P. The effect of a clinically practical exercise on levodopa bioavailability and motor response in patients with Parkinson disease. Clin Neuropharmacol 2010;33(5):254–6. [7] Hackney ME, Earhart GM. Effects of dance on movement control in Parkinson's disease: a comparison of Argentine Tango and American Ballroom. J Rehabil Med 2009;41(6):475–81. [8] Association France Parkinson. Premier états généraux des personnes touchées par la maladie de Parkinson. Livre Blanc; 2010. [9] Bleton JP, Ziégler M. Rééducation de la maladie de Parkinson. EMC Kinésithérapie-Médecine Physique-Réadaptation. Paris: Elsevier Masson SAS; 2011 [26-451-A-10]. [10] Bonnet AM, Loria Y, Saint-Hilaire MH. Does long-term aggravation of Parkinson's disease result from nondopaminergic lesions? Neurology 1987;37:1539–42. 45 Congrès [11] Fox CM, Farley B, Ramig LO, McFarland DH. An integrated rehabilitation approach to Parkinson's disease: learning big and loud. Mov Disord 2005;20(Suppl. 10):S127. [12] David FJ, Rafferty MR, Robichaud JA, Prodoehl J, Kohrt WM, Vaillancourt DE, et al. Progressive resistance exercise and Parkinson's disease: a review of potential mechanisms. Parkinsons Dis [Internet]; 2012 [Available from: http://www.ncbi.nlm.nih.gov/ pmc/articles/PMC3236435/(cited 2013 Nov 7)]. [13] Malouin F, Jackson PL, Richards CL. Towards the integration of mental practice in rehabilitation programs. A critical review. Front Hum Neurosci [Internet]; 2013 [Sep 19 (cited 2013 Nov 7); 7. Available from: http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/ PMC3776942/]. [14] Jöbges M, Heuschkel G, Pretzel C, Renner C, Hummelsheim H. Repetitive training of compensatory steps: a therapeutic approach for postural instability in Parkinson's disease. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2004;75:1682–7. http://dx.doi.org/10.1016/j.kine.2014.02.014 Figure 1. C14 Les lésions musculaires. Diagnostic, évolution et traitement médical et paramédical Vincent Gremeaux Dijon, France Adresse e-mail : [email protected] Mots clés : Diagnostics ; Lésions musculaires ; Thérapeutiques La pathologie traumatique du muscle strié est une lésion fréquente en traumatologie sportive, mais aussi dans les accidents de vie quotidienne. Le tableau clinique initial est très variable, source de douleurs et d'impotence majeure ou parfois prenant une apparence de banalité trompeuse dans la mesure où elle peut être responsable de séquelles douloureuses ou fonctionnelles. Les questions posées sont toujours les mêmes : « La blessure est-elle grave ? Combien de temps durera l'indisponibilité ? » Pour y répondre, il est indispensable de connaître le mécanisme lésionnel et le geste sportif, et de parfaitement maîtriser l'examen clinique, qui suffit le plus souvent pour un diagnostic lésionnel précis. Il permet de distinguer relativement facilement les accidents sans ou avec lésions anatomiques. Les traitements immédiats restent simples, basés sur le protocole GREC (glaçage, repos, élévation, compression) en évitant certains gestes ou traitements comme le massage profond ou la prescription d'anti-inflammatoires non stéroïdiens les 48 premières heures. Ces dernières années de nombreux travaux ont apporté beaucoup de connaissances nouvelles, notamment à propos de trois aspects : – la valeur de mesures préventives qui doivent permettre une diminution notable des accidents intrinsèques ; – l'apport des examens complémentaires récents, échographie surtout, mais aussi parfois imagerie par résonance magnétique (IRM) pour les lésions profondes, en précisant toutefois d'emblée qu'ils ne remplacent pas l'examen clinique et qu'ils ne doivent être employés qu'à bon escient et non de façon aveugle ou automatique ; – les mécanismes histologiques de la cicatrisation musculaire et les phénomènes de régénération de la fibre musculaire, mal connus précédemment, qui ont nettement modifié les schémas thérapeutiques. La prise en charge physique est ainsi habituellement organisée autour de 5 à 6 phases : – phase 1 : repos, étape obligatoire après laquelle la rééducation classique interviendra ; – phase 2 : remodelage, dans le but d'éviter la formation d'une cicatrice fibreuse douloureuse et/ou fragile ; 46 – phase 3 : renforcement musculaire et début de travail proprioceptif ; – phase 4 : réadaptation avec travail plus global et réintroduction progressive du geste sportif ; – phase 5 : reprise de l'entraînement et réathlétisation ; – phase 6 : reprise de la compétition. Ces phases distinctes auront des durées et modalités variables et adaptées en fonction de la gravité initiale de la lésion, des capacités du patient et de sa récupération. Certaines thérapies adjuvantes pourront être proposées, essentiellement en phase de remodelage, comme les ondes de choc radiales ou les injections de plasma riche en plaquettes dont l'efficacité reste cependant discutée. Enfin, il ne faudra pas oublier de rappeler les mesures préventives générales et plus spécifiques à maintenir au long cours au sein de la préparation sportive, particulièrement le renforcement musculaire excentrique et le travail de rééquilibration de l'équilibre musculaire ago/antagonistes (Fig. 1). http://dx.doi.org/10.1016/j.kine.2014.02.015 C15 Instabilité et proprioception : une relation pas si claire Nicolas Forestier Le Bourget du Lac, France Adresse e-mail : [email protected] Mots clés : Déstabilisation ; Entorse latérale de cheville ; Proprioception musculaire Il est désormais établi que l'entorse latérale de cheville représente en France la pathologie traumatique la plus répandue. Elle génère un coût de prise en charge par la collectivité de près de 1,2 millions d'Euros journalier (Fig. 1). Toutefois, associés à un taux de récidive pouvant atteindre 70 % à 80 % pour des populations sportives, les résultats de cette prise en charge sont décevants. Le suivi de trois cohortes d'étudiants en STAPS (n = 559) sur la période 2010–2012, nous a permis de constater que le taux de récidive se situait invariablement aux alentours de 50 % et ce, que les individus aient ou non bénéficié de soins de kinésithérapie. Très récemment, Postle et al. [1] ont interrogé via une méta-analyse l'efficacité des exercices « proprioceptifs » sur les récidives d'entorses. Ils concluent que bien qu'utilisés systématiquement et massivement depuis plus de 45 ans il n'existe, à ce jour, pas de