Chapitre 11 : l’immunité adaptative. L’immunité innée, même si elle représente un système de défense efficace, parfois ne suffit pas à enrayer l’infection. Dans ce cas, l’organisme va initier une autre réponse immunitaire plus lente mais spécifique et très efficace : l’immunité adaptative. Problèmes : Comment cette immunité se met-elle en place ? Quelles cellules servent de support à cette immunité et par quels mécanismes parviennentelles à éliminer les agresseurs de l’organisme. ? 1. De l’immunité innée à l’immunité adaptative. Lorsque les mécanismes de l’immunité innée ne suffisent pas à éliminer un agent infectieux, les cellules dendritiques vont phagocyter les agents infectieux ou les débris de cellules infectées par un virus. Elles digèrent alors une fraction des protéines de l’agent infectieux. d’Histocompatibilité). Les peptides issus de cette digestion sont alors associés à des molécules présentes sur leur membrane plasmique : les molécules du CMH. (= Complexe Majeur Cette association molécule du CMH / fragment peptidique de l’agent infectieux permettra d’initier une nouvelle phase de la réponse immunitaire : la réponse adaptative, impliquant la production de molécules : les anticorps et l’utilisation d’un autre type de cellule : les lymphocytes spécifiques de l’agent infectieux. Après avoir réalisé la phagocytose, les cellules dendritiques vont quitter le lieu de l’infection et gagner les organes lymphoïdes (ex. les ganglions lymphatiques) dans lesquels elles vont présenter aux lymphocytes le complexe CMH-peptides. (on parle de cellules CPA : Cellules Présentatrice de l’Antigène) Ce complexe peptide – CMH va donc constituer un signal indispensable à l’activation des cellules de l’immunité adaptative. TP 18 : structure et fonction d’un anticorps 2. Les anticorps : agents du maintien de l’intégrité du milieu extracellulaire A. Structure de la molécule d’anticorps et spécificité Les anticorps sont des protéines complexes appelées : immunoglobulines. Ils sont localisés dans l’ensemble des liquides qui baignent le milieu extracellulaire : le plasma, la lymphe, le lait maternel… Ces anticorps sont constitués de l’assemblage de 4 chaînes polypeptidiques identiques deux à deux : deux chaînes lourdes (~420 acides aminés) et deux chaînes légères (~220 acides aminés), l’ensemble constitue une molécule en forme de Y. 1 Les chaînes lourdes et légères comportent une partie constante et une partie variable. (~les 110 premiers acides aminés) Les parties variables d’une chaîne lourde et d’une chaîne légère forment un site de reconnaissance d’un antigène spécifique. Partie variable = site de reconnaissance à l’origine de la spécificité Partie constante = commune à tous les anticorps Site de fixation aux récepteurs membranaires des phagocytes En effet, les régions variables des chaînes légères et lourdes se replient dans l'espace pour former les sites de combinaison anticorps-antigène (site antigénique), c'est à dire les sites qui se lient aux antigènes particuliers contre lesquels les anticorps sont dirigés. Chaque anticorps possède donc deux sites de reconnaissance identiques et spécifique d’un antigène. La spécificité des anticorps est due à la partie variable. Les parties constantes des chaînes lourdes portent des sites de liaison non spécifiques qui interagissent avec des récepteurs membranaires présents sur les phagocytes. Rq. La diversité des sites anticorps est telle que l'organisme est capable de reconnaître variété quasi infinie d'antigènes différents. TP 19 : Réaction antigène – anticorps : test d’Ouchterlony B. La formation de complexes immuns : une neutralisation des antigènes. Les anticorps sont des molécules solubles libérées dans les liquides extracellulaires et capables de se lier, grâce à leurs sites anticorps, à des antigènes dont la forme est complémentaire de celle des sites C'est la réaction antigène-anticorps. • Si l'antigène est lui-même une molécule soluble (toxine microbienne, par exemple), le résultat est la formation de complexes immuns. Ceux-ci sont insoluble et précipite (cf .Réaction d’Ouchterlony) • Si les molécules antigéniques sont fixées sur la paroi d'une cellule : bactérie ou virus, les anticorps vont s’y accrocher et bloquer la cellule. Les anticorps ont donc pour fonction essentielle de neutraliser les antigènes, c'est à dire de les rendre biologiquement inertes mais ils ne les détruisent pas. RQ. Les anticorps dirigés contre les protéines virales peuvent bloquer la pénétration des virus dans les cellules, mais ne peuvent pas agir sur les cellules déjà infectées. 2 C. La phagocytose : un mécanisme inné non spécifique d’élimination des complexes immuns. La formation de ces complexes favorise l’intervention de mécanismes innés d’élimination par phagocytose. La phagocytose est encore plus active lorsque l’élément étranger est recouvert d’anticorps liés aux particules antigéniques (= opsonisation). En effet, les phagocytes, macrophages et granulocytes possèdent des récepteurs capables de reconnaître la partie constante des chaînes lourdes des anticorps. Exercice : les mécanismes de l’immunité. D. De la détection de l’antigène à la production d’anticorps. Cette reconnaissance s’effectue en trois étapes : • Reconnaissance de l'antigène ou sélection clonale Lorsqu’un élément étranger (portant un antigène) pénètre dans l’organisme, il va être détecté par des Lymphocytes B spécifiques portant un Anticorps membranaire capable de se lier à cet antigène. En effet, parmi les millions de clones différents de LB, préexistants avant tout contact avec l’antigène, sont donc sélectionnés seulement les clones capables de reconnaître l'antigène. Cette reconnaissance active ces LB. Rq. . Un clone = quelques milliers de cellules portant les mêmes anticorps membranaires. • Prolifération clonale des LB activés L'activation d'un LB entraîne une multiplication intense de celui-ci par des mitoses successives. Elle est donc à l'origine d'une amplification clonale de lymphocytes possédants rigoureusement la même spécificité. (soit le même type d’anticorps membranaires) RQ. A ce stade, l'activité des LT4 est indispensable à la multiplication des LB activés. (cf. partie 4) 3 • Différenciation des LB - Une partie des LB se différencie en plasmocytes, cellules sécrétrices d’anticorps circulant (immunoglobulines solubles) qui présentent la même spécificité que les anticorps membranaires qui ont déclenché la réaction immunitaire lors de la reconnaissance de l’antigène. - Une autre partie des LB se transforme en LB mémoire, cellules à durée de vie longue et beaucoup plus nombreuses que les LB initialement présents dans l'organisme et spécifiques de cet antigène. Ils interviendront au cours d’une deuxième infection par le même antigène. L'ensemble des LB circulants dans le sang et la lymphe ou stockés dans les organes lymphoïdes (ganglions lymphatiques, rate, ...) assure ainsi une surveillance permanente des liquides extracellulaires. 3. Les lymphocytes T: agents du maintien de l’intégrité des populations cellulaires. A. La détection des cellules infectées par les lymphocytes T8 (ou TCD8) Outre les LB, l'organisme contient des lymphocytes T, ou LT. Produits dans la moelle osseuse, ils achèvent leur maturation dans le thymus où ils acquièrent leurs marqueurs membranaires spécifiques, les récepteurs T. Les lymphocytes T8 possèdent également un marqueur spécifique : le marqueur CD8 qui les différencie d’une autre population de lymphocytes T : les LT4 (possédant le marqueur CD4) Les récepteurs T sont des protéines spécialisées dans la reconnaissance des antigènes lorsqu'ils sont présentés sur les cellules de l'organisme. CMH Chaque clone de LT8 ne possède qu’un seul type de récepteur T spécifique d’un type d’antigène, comme pour les LB. Les récepteurs T sont des protéines membranaires constituées de deux chaînes peptidiques. Chaque chaîne possède, comme celle d'un anticorps, une partie constante et une partie variable. Les cellules infectées (par un virus) ou les CPA expriment à leur surface des fragments peptidiques issus des protéines du microbe pathogène, ce fragment forme un antigène. Les lymphocytes T, par la partie variable de leurs récepteurs T spécifiques, reconnaissent ces fragments exprimés uniquement par les cellules infectées associés à un marqueur membranaire particulier du CMH. Rq. Le marqueur CMH, ou Complexe Majeur d’Histocompatibilité définit ce qu’on appelle les marqueurs du soi. Ils permettent de différencier les cellules appartenant à notre corps des cellules étrangères. 4 Cette reconnaissance déclenche alors un mécanisme proche du précédent : sélection clonale, puis prolifération, puis différenciation (avec l’intervention des LT4 (cf partie 4)), elle conduit en la synthèse de lymphocytes T cytotoxiques spécifiques. Ces derniers vont éliminer les cellules infectées. B. L’élimination des cellules anormales On peut résumer le "scénario" de l'attaque d'une cellule-cible (cellule infectée par un virus, ou cellule cancéreuse) de la façon suivante: • Contact entre LTc et cellule-cible, • Libération du contenu de certaines vésicules cytoplasmiques par le LTc, • Mort de la cellule quelques heures plus tard, que l'on peut schématiser très simplement selon deux mécanismes: - l'apoptose, qui est un processus d'autodestruction cellulaire ("suicide cellulaire") programmé génétiquement, mais accéléré par certains signaux issus de l'environnement cellulaire: l'ADN se fragmente, la membrane bourgeonne. - la cytolyse: la cellule infectée est l'objet d'une attaque par des protéines libérées par le lymphocyte cytotoxique, qui "percent" littéralement la membrane et font éclater la cellule. Dans les deux cas, les fragments cellulaires seront phagocytés par des granulocytes et des macrophages. 4. Les lymphocytes T4 : pivots des réactions immunitaires spécifiques. A. Les LT4 : « chef d’orchestre » de la réponse immunitaire. Comme les LT8, les LT4 possèdent des récepteurs T mais ils possèdent également un marqueur spécifique : le CD4. antigène. A la suite de l’entrée d’un antigène dans l’organisme, des lymphocytes T4 spécifiques de cet antigène vont le reconnaitre. Ils vont, comme pour les LT8, proliférer puis ils vont se différencier soit : • en lymphocytes T4 mémoire, cellule à durée de vie longue. • en lymphocytes T4 sécréteurs (LT4 auxiliaire ou helper) de messagers chimiques (interleukines). Or les interleukines stimulent la multiplication et la différenciation des clones de lymphocytes B et de lymphocytes T activés par le contact avec un Ainsi, la présence d’interleukine (et donc de LT4 activés) est indispensable pour coordonner la réponse immunitaire. 5 B. Les LT4 : cellules cibles du VIH Lors de la contamination par le VIH (phase de Primo-infection), le nombre de virus présents (appelé charge virale) augmente fortement, puis diminue rapidement à cause de la réponse du système immunitaire. Deux semaines à quelques mois après la contamination, la présence dans le sang de différents anticorps anti-VIH est décelée, le sujet est dit alors “ séropositif pour le VIH”. Or dans le cas du SIDA, les virus VIH pénètrent rapidement dans les LT4 (ou dans les macrophages) car ces cellules sont les seules à posséder un marqueur membranaire : la protéine CD4, qui est indispensable à l’ancrage du virus sur la cellule hôte. Après la phase de primo-infection, le malade entre dans la phase asymptomatique. Pendant cette période de plusieurs années, les défenses immunitaires restent actives et tendent à limiter la prolifération du virus mais elles sont peu efficaces. En effet : • Les anticorps anti-VIH sont peu efficaces car le virus est inaccessible, « caché » dans les cellules-hôtes parasitées. • Des lymphocytes spécialisés, les LTc, véritables « cellules tueuses », s’attaquent aussi aux cellules infectées par le virus, c’est à dire aux LT4 qui présentent à leur surface des peptides viraux. Il y a donc destruction de son propre système immunitaire. On constate donc une baisse inexorable de la population de LT4. Depuis 1993, un malade peut être considéré au stade SIDA lorsqu'il présente une concentration en lymphocytes T4 inférieure ou égale à 200 cellules/mm3 dans le sang. Le malade entre dans la phase symptomatique. A ce stade, le système immunitaire est "débordé", les populations de LT8 et de plasmocytes s’effondrent, le nombre de virus augmente fortement et les symptômes apparaissent. Le sida se caractérise alors par l’apparition de diverses maladies opportunistes qui peuvent entraîner la mort du malade. Elles peuvent avoir pour origine des agents pathogènes variés : virus, bactéries (pneumonie, tuberculose), champignons, protozoaire (toxoplasmose)… 6 5. La maturation du système immunitaire Il n’existe que quelques gènes contrôlant la production des anticorps et des récepteurs T. Par des mécanismes d’épissage de l’ARMpm et de réarrangement de fragments géniques, on peut obtenir un nombre infini de lymphocytes monoclonaux. Parmi les millions de clones de LT ou LB produits dans la moelle osseuse, certaines combinaisons aboutissent à la formation d’anticorps ou de récepteurs T (TCR) dirigées contre les propres molécules de l’organisme (« molécules du soi ») et susceptible de déclencher une réponse immunitaire. Ces clones de LT ou LB sont dits autoréactifs, ils sont potentiellement dangereux. Une fois produits, les LT4 et LT8 « naïfs » migrent dans le thymus (petite glande située à la base du cou) où des cellules spécialisées leur présentent un large échantillon de protéines de l’individu. Les LT dont les TCR (récepteurs) reconnaissent ces protéines sont généralement éliminés (des mécanismes similaires existent pour les LB). L’ensemble des lymphocytes immunocompétents constitue le répertoire immunitaire. Les maladies auto-immunes sont associées à des dysfonctionnements de ces mécanismes. Par exemple : le diabète de type I (ou diabète insulino-dépendant) : Il survient généralement avant l’âge de 20 ans. Il se caractérise par le destruction des cellules bêta du pancréas qui sécrètent l’hormone hypoglycémiante, l’insuline. Cette destruction est réalisée par des LT autoréactifs qui reconnaissent les cellules bêta du pancréas comme étrangères. L’individu devient rapidement diabétique. 7