Rachis, /993, vol. 5, nO 2 NOTE TECHNIQUE STABILISATION D'UNE FRACTURE DE L'ODONTOIDE PAR CROCHETS D'HALIFAX ET INTERPOSITION D'UNE BARRE DE BIOPOLYMERE (B.O.P.) INTERNAL FIXATION OF AN ODONTOID FRACTURE BY HALIFAX INTERLAMINAR CLAMPS WITH INTERPOSITION OF SYNTHETIC BIOPOLYMER B.O.P. P. MESCOLA Service de Neurochirurgie (pr P.M. Georges) - Hôpital A. Vesa/e. 706 route de Gozee, 6110 Montigny Le Tilleul, Belgique RESUME SUMMARY L'al!teur présente un cas de fracture de l'odontoïde à trait oblique en bas et en avant dont le déplacement initial a motivé le traitement chirurgical. La fixation a consisté en une arthrodèse temporaire du complexe CIC2 obtenue à l'aide de deux couples de crochets d'Halifax serrés sur une barre de RD.P. implantée dans l'espace interlamaire. Le montage réalisé a été retiré, y compris la barre de RD.P., à 6 mois de l'intervention pour restaurer la rotation de la tête. Le résultat à un an de l'accident est jugé bon selon les critères de RoyCamille (rotation de la tête égale à 45° de chaque coté, reprise du travail habituel, pas de douleurs spontanées nécessitant un traitement médical). Bien que l'idée d'une prothèse interlamaire temporaire ait déjà été préconisée et appliquée depuis plusieurs années par Roy-Camille, l'utilisation à cette fin de la barre de RD.P. représente une application originale de ce matériel normalement destiné à une intégration osseuse complète lorsqu'il est implanté dans un milieu favorable. Les indications à son association aux crochets d'Halifax et la fiabilité de ceux-ci sont discutées. A case of a young male patient suffering from a non neurological type III odontoid fracture is reported and the surgical treatment is discussed. Instability of the fracture was detected on lateral radiographs wich showed anterior slipping of the dens. Tomography documented anterior and downward irradiation of the fracture to the right articular process. The patient underwent surgical posterior.flXation of the CI-C2 complex using the Halifax interlaminar clamp and with interposition of a synthetic biocopolymer B. O.P. rod between the posterior vertebral arches in order to preserve the normal widening of the interlaminar space. Care was taken to avoid rod ossification and CI-C2 fusion by preserving the cortical surface of the archs and by removing clamps and biopolymer once fracture was radiologically and clinically healed. After 12 months result was good and rotation of the head was restored up to 45° for each side. Interposition of the biopolymer rod acheived thefollowing objectives : 1. interlaminar height did not collapse when calmps were screewed so avoiding posterior deplacement or angulation of the fracture 2. the compressive force exerced by the clamps was better transmitted to the anterior portion of the CI-C2 complex where the fracture Mots clefs: Fracture odontoide - Ostéosynthèse - Biopolymere. 93 P. MESCOLA was located. Fracture healing was improved and the articular function of the cranio-cervical jonction preserved as far as the traumatic articular les ion permitted. Although the wedge compression method and the use of a temporary interlaminar prothesis have been already described and fully employed, the association of Halifax clamps and B.O.P. rod is an original one. As the aim was to use B.O.P. rod as an inert body, the ossification of the biopolymer was intentionally avoided by carefully preserving the corticallayers of the laminar surfaces at implantation. Keys wards : odontoid fracture - Interlaminar OBSERVATION Les fractures de l'odontoïde représentent plus de la moitié des fractures de l'axis (9). Elles ont été différenciées sur la base de la hauteur du trait de fracture et/ou de sa direction MI. Lan ... Karl, âgé de 20 ans, est victime d'un accident de voiture durant lequel il est projeté contre le pare-brise et subit un traumatisme crânien par impact direct associé à un traumatisme cervical en extension par accélération / décélération. L'examen neurologique réalisé peu de temps après l'accident retrouve uniquement des douleurs spontanées dans le territoire du nerf grand occipital gauche. Une luxation acromio-claviculaire gauche est visualisée par les radiographies de l'épaule. Leur traitement vise à prévenir les troubles neurologiques secondaires pouvant survenir de l'instabilité occipito-cervicale. Nous présentons le cas d'une fracture de la base de l'odontoïde à trait oblique en bas et en avant et étendue à un massif articulaire de C2. Cette fracture a été traitée chirurgicalement par voie postérieure à l'aide de crochets sous-Iamaires d'Halifax et d'une barre de B.O.P. (1,2, clamp- Biopolymer. 15). Figure 1 Bilan radiographique préopératoire. Identification d'une fracture à trait oblique en bas et en avant. Ouverture postérieure du foyer de fracture et glissement antérieur de la dent. Sur la coupe tomographique de face démonstration de l'irradiation du trait au massif articulaire droit (petites flèches). 94 ST ABTLlSA TTON D'UNE FRACTURE DE L'ODONTOlDE Figure 2 Radiographies réalisées en post-opératoire immédiat: l'écart entre les arcs postérieurs des deux vertébres cervicales est maintenu par la barre radiotransparente de B.O.P. PAR CROCHETS D'HALIFAX couple de crochets sous-Iamaires d'Halifax qui réalisent une fixation postérieure en compression bilatérale. Les suites postopératoires sont banales et le malade est levé dès le lendemain de l'intervention avec la même orthèse amovible apposée en préopératoire. Les contrôles radiologiques postopératoires immédiats montrent une stabilisation du déplacement précédemment signalé et un écart physiologique entre les arcs postérieurs de CI et C2 (fig2). La névralgie d'Arnold disparaît complètement en postopératoire et l'examen neurologique demeure négatif. Le patient sort à une semaine de l'intervention avec la prescription de continuer le port de l'orthèse. A trois mois de l'intervention, des contrôles tomographiques démontrent une bonne consolidation de la fracture et la persistance de l'écart entre les arcs postérieurs des vertèbres intéressées par l'ostéosynthèse (fig 3). La minerve est retirée et une kinésithéranie visant à rééduauer le rachis cervical inférieur est poursuivie pendant deux mois. La rotation de la tête demeure limitée par l'ostéosynthèse encore en place. A six mois de l'intervention, le patient subit une intervention d'ablation du matériel d'ostéosynthèse et du biopolymère. Les suites sont banales et le patient est soumis à des séances de kinésithérapie visant à rétablir une possibilité de rotation de la tête la plus ample possible. A huit mois de la première intervention, le patient, qui a terminé sa rééducation, reprend son travail de maçon. Il est revu en consultation un an après son accident. Le résultat est jugé bon selon les critères de Roy-Camille (2), avec rotation de la tête égale à 45° de part et d'autre sans douleurs ni gênes Les radiographies de la colonne cervicale montrent une fracture de la base de l'odontoïde avec déplacement antérieur de la dent et de CI. Des tomographies conventionnelles et un scanner cervical précisent que le déplacement de la dent ne dépasse pas en amplitude les 50% du diamètre apophysaire total et que le trait irradie à la surface articulaire droite de C2 (fig 1) . Une immobilisation stricte en décubitus dorsal est prescrite en association au port d'une minerve à double appui, mentonnier et occipital. Une intervention chirurgicale est réalisée trois jours après l'admission, chez un patient en Dosition ventrale. Un abord occinito-cervical médian permet d'exposer les arcs postérieurs des deux premières vertèbres cervicales dans un plan sous-périostal. Les deux arcs sont écartés à l'aide de l'écarteur intersomatique de Cloward inséré dans l'espace inter-Iamaire Cl-C2. Les ligaments jaunes sont respectés. Une barre rigide de BOP (10 mm sur 12 mm) est insérée transversalement entre les arcs postérieurs maintenus écartés de façon à ce que la gouttière de l'implant s'adapte aux bords osseux juxtaposés et que sa face antérieure repose contre la face postérieure des ligaments jaunes. L'alignement vertébral est surveillé à l'aide de l'amplificateur de brillance. L'intervention est complétée par l'apposition de chaque coté de l'implant d'un 95 P. MESCOLA Figure 3 Contrôle tomographique fracture avec remplissage osseux. à 3 mois de l'accident: de l'écart interfragmentaire consolidation de la postérieur par le cal significatives. La reprise du travail s'est effectuée sans restriction ni douleurs spontanées mise à part l'apparition occasionnelle de cervicalgies hautes ne nécessitant pas un traitement médical. L'étude radiologique du rachis cervical confirme la consolidation et la statique vertébrale telles qu'elles ressortaient de l'examen réalisé à trois mois de l'intervention. DISCUSSION Le complexe articulaire O-Cl-C2 assure à lui seul presque la moitié de la rotation axiale permise au niveau céphalique et la majorité de ce mouvement a lieu entre CI et C2 (18). Il est donc souhaitable d'éviter autant que possible la compromission définitive de la rotation axiale entre Clet C2 lorsque l'on est obligé de stabiliser jusqu'à sa consolidation une fracture de l'odontoïde. D'autre part l'immobilisation doit être suffisamment fiable pour ne pas encourir le risque d'une pseudarthrose. Ceci est d'autant plus vrai pour une fracture déplacée et donc instable. Dans ce dernier cas le choix nous parait restreint à l'alternative entre le traitement par Halo- Veste, orthèse qui assure meilleure immobilisation du rachis cervical supérieur (14), et le traitement chirurgical (15). Parmi les différentes techniques et voies d'abord chirurgicales possibles, l'abord antérieur par voie transbucco-pharyngée (la) expose la dent sur toute sa hauteur mais ses inconvénients sont l'étroitesse et la profondeur du champ opératoire ainsi que le passage à travers une cavité septique. Le vissage bilatéral des massifs articulaires de C l-C2, qu'il soit réalisé par voie antérieure (II) ou postérieure (16) abolit définitivement la rotation de la tête et il en est ainsi pour les arthrodèses occipito-cervicales (17). Le vissage direct de l'odontoïde (3) assure l'intégrité fonctionnelle des articulations latérales du complexe C l-C2 mais sa réalisation est difficile, voire contre-indiquée, en cas de trait oblique en bas et en avant (2) par risque d'écartement ou de glissement des fragments lors du passage de la vis. La solidarisation des arcs de CI et C2 par voie postérieure est dans ce cas préférable et réalisable par différentes techniques et matériaux : laçage des arcs postérieurs (19), matériel d'ostéosynthèse de Knodt (6) ou de Cotrel Dubousset (8). Un point crucial des techniques de solidarisation C l-C2 est d'éviter toute hypercorrection par rapprochement excessif de l'arc postérieur de CI avec les lames de C2 : ceci peut provoquer soit un déplacement de la dent soit une ouverture antérieure du foyer de fracture. Les conséquences en sont une réduction du calibre du canal rachidien et/ou une pseudarthrose. L'hypercorrection peut être évitée si la compression entre les arcs postérieurs de CI et de C2 est réalisée le plus latéralement possible STABILISA nON D'UNE FRACTURE DE L'ODONTOIDE PAR CROCHETS D'HAUF AX P.MEBCOLA intersomatique de Cloward. Sa solidité était diminuée et les manœuvres d'ablation ont provoqué une fracture en deux blocs selon son grand axe (parallélement à la direction des fibres de polyamide). Aucun signe d'ossification n'était visible confirmant ainsi les données scanographiques préopératoires (jig 5). Les arcs vertébraux de Clet C2 montraient, quant à eux, une corticale intacte. provisoire suivant les mêmes indications posées par RoyFigure 5 Contrôles scanographiques réalisés à un an d'intervalle (en postopératoire immédiat et juste avant l'ablation du matériel) : malgré la différence de fenêtre osseuse employée, la barre de B.O.P. présente les mêmes morphologie et situation (flèches). Camille pour l'emploi de sa prothèse en polyéthylène (15, 19). Les propriétés d'ostéoconduction du BOP ont été contournées en évitant tout avivement des corticales des arcs postérieurs et en maintenant l'implant in situ pour une période prédéterminée (trois mois d'immobilisation complète et trois mois d'immobilisation relative). Le choix du B.O.P. a été déterminé par la résistance mécanique immédiate offerte par la barre et par la présence des gouttières longitudinales sur ses faces latérales. Ces gouttières ont garanti une bonne adaptation aux marges juxtaposées des deux arcs vertébraux. La fixation in situ de la barre a été assurée, même après le démontage du matériel d'ostéosynthèse, par la conservation des ligaments jaunes entre Cl et C2. Au moment de son ablation, la barre présentait les mêmes caractéristiques de morphologie qu'à son insertion et était inclue dans une gaine fibreuse réactive non adhérente: elle a pu être retirée aisément après écartement des arcs postérieurs à l'aide de l'écarteur CONCLUSION Le résultat de la fixation temporaire par ostéosynthèse postérieure d'une fracture à trait oblique en bas et en avant reste satisfaisant à un an du traitement. L'association des crochets d'Halifax et du B.O.P. est, à notre connaissance, un choix technique original. Ceci est particulièrement vrai pour le biopolymère dont on a voulu contourner les propriétés d'ostéoconduction tout en exploitant ses propriétés physiques. Ceci renforce l'idée que l'intégration de cet implant obéit aux mêmes lois qui règlent le succès d'une autogreffe et qu'aucun matériel destiné à une greffe ne peut compenser par ses propriétés intrinsèques un lit osseux ou des conditions biomécaniques défavorables. 98 P. MESCOLA 7. 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