Voyage en Islande – Rejse til Islands

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Voyage en Islande – Rejse til Islands
Ci-contre mon parcours avec les
étapes.
Les trajets en pointillés ont été
fait en bus.
Il fait gris au sortir de l'avion et quand je me lance sur les
petites routes de la péninsule de Reykjanes après une nuit
de voyage. Le paysage, un rugueux désert de lave, prend
vite des allures de fin du monde. Il pleut ; les bourrasques
s'enhardissent ; au loin, la mer se dechaîne. Je dois lutter
pour maintenir mon cap et marcher parfois quand le vent
menaçe trop mon équilibre. Arrivée trempée et épuisée à
Grindavík, je décide de ne pas planter la tente.
De la chambre où je loge ce premier soir, j'entends le bruit
du vent, un bruit sourd continuel, parfois des sifflements.
J'ai deux lits, une salle de bain, une cuisine dans un mini
studio qui accueille des travailleurs polonais au gros de la
saison de pêche. Des tableaux liés à la mer habillent des
couloirs sonores; le bâtiment sent un peu le poisson.
Grindavík est toujours un port de pêche, on y prépare de
la morue. Non loin de là, le nombre d'épaves qui rouillent
le long du cap de Hópsnes tout proche témoignent de la
rudesse du climat. Le phare, orange, est la seule couleur
vive dans un paysage gris et vert sombre.
ÞÞÞÞ
Mon périple à vélo commence vraiment le 10 août, sous la
pluie, mais avec un vent plus clément. Le ciel est moins
bas et laisse apparaître à droite l'océan et sur la gauche,
un champ de lave recouverte de mousse verte menant
vers des collines abruptes. Puis le soleil revient et la
soirée est agréable.
Premier objectif: traverser l'intérieur du pays, un désert,
inaccessible l'hiver, où les hors-la-loi étaient bannis ou en
fuite. Je choisis de suivre la F35, une piste pour 4x4 sans
passage à gué. Après avoir admiré les tons verts, bleus et
gris de l'estuaire de l'Ölfusa, je bifurque vers le nord. Je
traverse une zone cultivée, longe des prairies remplies de
chevaux, puis suit la rive droite de Þinvallavatn, le plus
grand lac d'Islande dont les eaux bleu-roi étincellent au
soleil.
L'estuaire de l'Ölufsa
Ölufsas flodmundingen
Plus loin, je visite Geysir, d'où vient le nom geyser et
admire la cascade de Gullfoss, deux lieux hautement
touristiques qui me rappellent d'autres lieux semblables,
mais moins visités, sur une autre terre volcanique:
Madagascar. Je crois que là-bas, il n'y a pas encore de
dames asiatiques qui ajustent leurs permanentes dans les
toilettes de luxe d'un magasin de souvenir. Puis c'est la
piste sur de la poussière terre de sienne. Il y a un peu
d'herbe et de petit groupes de mouton quand une rivière
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apporte un peu de verdure. Le soleil et la chaleur
inhabituels renforcent l'impression de désert chaud et je
me croirais à nouveau sous les tropiques si je ne voyais à
l'ouest le Langjökull, le “long glacier”, se jeter dans le lac
Hvítárnes. Je campe seule ce soir-là, au bord de l'eau,
baignée de la douce lumière du nord.
Gullfoss
Gýgjarfoss
Le lendemain est nuageux, la température basse. Les
glaciers et la neige, coincée dans les nervures des
collines, ne trompent pas: c'est un désert froid. La route
est mauvaise: graviers, zones de tôle ondulée où je me
sens comme un camionneur du Salaire de la peur. Dans
ces conditions, 35km prennent 5 heures, mais les
paysages, plus montagneux, ne déçoivent pas. Quand je
poursuis ma route, je découvre le désert dans sa version
mouillée. Ciel bas, horizon clos ; réparer une crevaison
dans la bruine, ce n'est pas très drôle.
Le désert, version humide
Ørkenen i sin våde form
Puis les nuages s'amincissent, l'orbe solaire se dessine
juste, les pierres, plus blanches, sont comme
luminescente. Au final, le désert n'est plus désert: il est
habité de lumière. Un peu de ciel bleu, un rideau de pluie,
du soleil qui éclate sur Hofsjökull, et les arcs-en-ciel. Le
premier, très large et s'étendant sur une dizaine de degrés
s'intensifie peu à peu. Puis nous jouons. “Et celui-là, tu le
vois?” dit la Lumière en plaçant de timides taches de
couleur sur un nuage. “Regarde, je peins où bon me
semble,” renchérit-elle en m'en montrant un, horizontal,
au milieu du ciel. Plus tard, durant mon séjour, j'ai
découvert des traces colorées plus subtiles encore et j'en
souriais, la lumière est espiègle.
Enfin, je quitte les hautes-terres et descends vers la côte
nord, retrouvant le goudron, les fermes, les chevaux,
l'océan.
ÞÞÞÞ
La côte est raide pour rejoindre Skagafjörður. Ondées,
nuages et soleil rivalisent pour caresser les collines
verdoyantes vers lesquelles je monte. Ce soir-là je campe
près de l'eau par une soirée humide et brumeuse.
L'écume balaye les gros galets de la plage ; les ternes
arctiques voient mon approche d'un mauvais oeil ; la tête
d'un phoque surgit d'entre deux vagues.
Le lendemain, après quelques kilomètres, j'entends un
sifflement qui ne trompe pas et en quelques secondes,
mon pneu arrière est plat. Il a une déchirure qui va
s'élargissant sur le côté et cela a finit par pincer la
chambre à air. Je fais une réparation de fortune,
colmatant la brêche avec du gros scotch et transférant du
poids vers les sacoches avant. Je poursuis mon chemin,
espérant que cela tienne, et ressent toutes les aspérités
de la route, pourtant bien goudronnée, telle une princesse
un petit pois.
A Siglufjörður, je visite le musée de l'ère du hareng,
“l'argent de la mer”, qui du début du XXème siècle au
années 60 a apporté travail et revenus au nord de
l'Islande. Dans un bâtimement construit en 1907, j'ai pu
visiter à l'étage les logements prévus pour les filles du
hareng qui venaient de tout le pays saler les prises dans
l'espoir de gains importants. Le lendemain je prends le
bus pour Akureyri, la deuxième ville d'Islande, pour
acheter un nouveau pneu et continuer mon périple.
Akureyri
ÞÞÞÞ
L'Islande est une terre volcanique du fait qu'elle se situe
sur la dorsale médio-atlantique qui sépare les plaques
techtoniques eurasiennes et nord-américaine. Il s'ensuit
qu'il y a une foule de phénomènes intéressants à
observer: des soulèvements rocheux (1) ; des champs de
lave encore fumants (2) ; des failles où se cachent des
piscines d'eau chaude (3) ; de la lave solidifié et plissée,
témoignant du passé liquide de la roche (4) ; des sources
chaudes dont les vapeurs sentent le souffre (5) et qui
déposent des minéraux de couleurs variées (6), des pieds
de colones de basaltes (7), et bien entendu les colonnes
elles-mêmes (8). L'activité géothermique est bien sûr
exploitée par l'homme et par endroit, des tuyaux d'eau
chaudes s'entrecroisent à flan de colline et on se croirait
presque sur Vinéa (9).
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(1)
cataracte d'une puissance fascinante. Elle se trouve sur
la rivière Jökulsá á Fjöllum qui prend sa source auprès du
glacier Vatnajökull. Le canyon dans lequel la rivière
s'écoule au niveau de la chute été formé par érosion,
parfois accélérée lors de crues titanesques causées par
l'éruption d'un volcan sous la glace. Un peu au nord de
Detifoss, la Jökulsá a mis à nu les formation basaltique
du coeur d'un volcan - photo (7).
(2)
Detifoss
(3)
(4)
(5)
(6)
(7)
(8)
(9)
L'un des lieux les plus touristiques en matière de volcan
est auprès du lac Mývatn au nord de l'Islande où je me
rends après Akureyri. De là, j'ai pris le bus jusqu'au
cratère de Víti, formé par une unique explosion en 1724.
Il y a là un lac bleu ciel aux reflets turquoises encerclé
d'une terre ocre et rougeâtre ; non loin se trouve
Leirhnjúkur, une étendue de lave de 1975-84 - photos (2)
et (4). Puis je suis redescendue au village à pieds
longeant et traversant la coulée de lave des années
1720, une rivière rocheuse qui a suivit la ligne de moindre
résistance et qui, comme.par miracle, s'est arrêtée juste
au bord de l'église. Elle n'est pas la seule. Au sud de
l'Islande, non loin de la ville de Kirkjubærjarklaustur, le
volcan Laki est entré en éruption entre le 8 juin 1783 et le
7 février 1784. Le 20 juillet, le pasteur Jón Steingrímsson,
maintenant connu sous le nom de “pasteur du feu”,
rassembla ses paroissiens dans l'église pour ce qu'ils
pensaient être la dernière messe en ce lieu, mais leur
ferveur, semble-t-il, arrêta le flot de la lave. L'éruption de
Laki et la pollution atmosphérique qui l'accompagnait eut
de graves conséquences en Islande et à l'étranger.
L'Islande est aussi célèbre pour ses chutes d'eau, et en
retournant vers la côte, je passe voir Detifoss, une
ÞÞÞÞ
Suite à cet interlude volcanique, je repars vers la côte
pour faire le tour de la péninsule de Melrakkaslétta, en
forme de tête d'ours, loin des sentiers touristiques.
Kópasker est un village très accueillant où je visite l'
Earthquake Centre, situé dans l'ancienne école (même
dans ses sautes d'humeur, la nature a de l'humour: suite
au tremblement de terre de 1976, des habitants on
retrouvé le plafonnier de la cuisine dans le réfrigérateur).
Puis je suis la piste qui parfois longe les plages de galets
où de large morceau de bois ont été rejeté par l'océan.
Les oiseaux sont nombreaux, par moment, il me semble
partager un peu leur liberté. A Raufarhöfn, j'observe
l'Arctic Henge en construction, une sorte de temple en
plain air basé sur la mythologie nordique, avant de
continuer ma route vers les fjords de l'est.
Epouvantails on Melrakkaslétta
Fugleskræmsler på Melrakkaslétta
Ma route passe par Hellisheiði, la colline qui sépare
Vopnafjörður de Héraðsflói. Le temps est au beau, la
montée est longue et rude, mais les vues sont
imprenables, sur une verte vallée qui s'étend vers le sud,
sur la roche que je longe, noire, rouge, multicolore.
Quand j'arrive en haut, je me retrouve au dessus des
nuages à comtempler les sommets escarpés qui s'élèvent
à l'est de Lagarfljót (ci-dessous).
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A mes pieds, l'océan prend des tons bleus, turquoises ;
l'écume brille en rencontrant le sable noir ; la rivière Jökla
forme un ruban gris qui serpente dans la plaine.
Le lendemain, il pleut et la vue est bouchée, puis le soleil
réapparaît avec le vent, un vent si fort qu'il n'est pas la
peine de songer à remonter en selle. Mes hôtes m'invitent
à déjeuner, puis je prends le bus pour continuer ma route.
Mon prochaine arrêt est Skaftafell, où je passe une
journée à marcher auprès de glaciers.
Héraðsflói
Skaftafellsjökull
De retour en bas, je longe des fermes au pieds des
collines. Des chevaux viennent à ma rencontre, curieux,
mais déçus sans doute que je n'aie rien à leur offrir.
Cette nuit-là, une souris s'infiltre dans une de mes
sacoches et tente d'accéder à mes céréales, que je
partage avec un oiseau profiteur le lendemain matin. Les
souris sont en fait une addition récente à la faune locale.
Elles sont arrivées avec la route 1 qui entoure l'Islande et
fut achevée en 1974 par l'ouverture du pont sur le fleuve
Skeiðará au sud de Skaftafell. A cet endroit, la route
s'étend sur une immense plaine de sable noir sillonnées
de rivières dont les crues peuvent encore être
dévastatrices. Avant, cette zone étaient passées à cheval
et à gué avec l'aide des passeurs d'eau, un métier qui de
nos jours sombre dans l'oubli.
Pour rejoindre la partie la plus escarpée de la côte est, je
traverse la ville d'Egilssstaðir, puis longe Fagridalur, une
vallée glacière en forme de U, verte, parsemée de
cascades coulant dans des ravines qui rivalisent de
profondeur. Sur ma droite, une rivière plonge dans un
canyon dont je ne vois pas le fond. Les villes de l'est sont
isolées, situées sur le bord sud des fjords, au pied de
collines arides et crénellées. Une nuit, j'ai la chance
d'apercevoir les timides lueurs vertes d'une courte aurore
boréale.
Atteindre la côte sud n'est pas facile. La matinée pourtant
est belle, le brouillard a laissé place au soleil, des cygnes
d'un blanc éclatants constellent le bleu-gris de la mer. Je
contourne des estuaires marécageux dont les herbes
prennent tous les tons possibles du rouge au vert. Par
moment la route est attachée à flan de colline, au bord de
l'océan. Mais vers midi, un vent du sud-ouest se lève. Il
est 19 heures quand je rejoins enfin un camping à l'est du
Vatnajökull. Le couple âgé qui en a la charge me propose
dormir sur le canapé de la réception, “il va y avoir une
tempête cette nuit”.
Où les rivières Núpsá et Súla (glacière) se rencontrent
Hvor Núpsá og Súla floder mødes
Je poursuis ma route, en vélo ou en bus, vers Reykjavík.
Le traffic croît au fur et à mesure que j'approche de la
capitale, où habitent presque deux tiers des islandais. La
route 1 est un fleuve où se jettent de nombreuses pistes
et routes secondaires. Heureusement je peux rejoindre un
réseau de pistes cyclables dès que j'atteins la banlieue.
Lors de mon dernier jour en Islande, un samedi, je vais à
la piscine (une institution ici, souvent en plein air et avec
jacuzzis), mange un hot dog, visite le marché aux puces
et retourne au Tíu Dropar (les Dix Gouttes), un salon de
café du centre ville. Dans Karitas de Kristín Baldursdóttir ,
le roman islandais qui a accompagné le début de mon
séjour, les maîtresses de maison recevaient leur invités
avec force café et crêpes à la crème. En conséquence,
arrivée à Reykjavík, ma priorité fut de participer à cette
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tradition. Au Tíu Dropar j'ai pu commander café à volonté et
une gauffre “avec beaucoup de crème” avant de m'installer
pour lire La Cloche d'Islande de Halldór Laxness. La
serveuse était très sympathique et je crois bien que j'ai eu
droit à une double ration de crème (en proportion
scandinave), un régal qui satisfit mon palais et ma
gourmandise!
Le Voyageur Solaire,
Reykjavík
Voyez-vous l'arc-en-ciel?
Sólfar ,
Reykjavík
Kan du se regnbuen?
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