Connaître le passé de S. aureus pour tenter de prédire l

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Une réflexion sur
l’histoire
passée et présente
des Staphylocoques
dorés
multi-résistants
nous permet-elle de
prédire l’évolution à
venir de leurs
résistances aux
antibiotiques
?
Alain Le Coustumier
1 ColBVH Paris 18 juin 2010
Objectif
à l’aide des éléments connus de l’évolution et
de l’histoire des Staphylocoques dorés multirésistants que nous décrivons, nous tenterons
d’expliquer la situation actuelle et de prédire
l’évolution à venir de ces résistances aux
antibiotiques
La vie ne connaît pas la raison,
elle ne cherche que les possibilités
de se transmettre ;
elle en essaye autant
qu’elle en rencontre »
Charles Nicolle,
Prix Nobel Physiologie et Médecine 1928
Le destin des maladies infectieuses
2 ColBVH Paris 18 juin 2010
Introduction :
• « horloges génomiques », env. 55 millions
années.
• 44 espèces et sous espèces différentes
• Staphylococcus aureus commensal fréquent
fosses antérieures nasales,
– chez environ 20-25% des femmes
– et 25-30% hommes
• pouvoir pathogène
• l’incidence croissante des souches
résistantes aux antibiotiques
3 ColBVH Paris 18 juin 2010
Le problème permanent des staph à l’hôpital: Mehtar J of Chemotherapy 1994
4 ColBVH Paris 18 juin 2010
Le Staphylocoque doré
ou
les Staphylocoques dorés ?
a) Un pathogène adapté à l’Homme depuis des millions
d’années,
•
•
•
•
•
•
•
20% porteurs permanents de Sa, 60% intermittents et 20 % jamais
colonisés.
30% de la population + mais septicémie < 2 pour 10 000 / an
l’appellation Sa, sous son aspect uniciste, recouvre en réalité une
extraordinaire variété de populations possédant des assortiments de
facteurs différents de colonisation, de virulence,
brassages de populations
hygiène plus que déficiente
L’immunité des populations et des individus ? => toujours pas de vaccin
« universel »
l’émergence brutale et souvent étendue de souches virulentes au sein
de populations non immunes
5 ColBVH Paris 18 juin 2010
Le Staphylocoque doré
ou
les Staphylocoques dorés ?
b) des complexes clonaux multiples aux talents variés :
•
•



3 groupes génétiques majeurs et deux groupes mineurs
très nombreux facteurs de virulence par ex. toxines endommageant les
membranes, toxines super antigènes,
îlots de pathogénicité: la toxine 1 du syndrome de choc toxique
(TSST1) et certaines entérotoxines,
ou pour des bactériophages lysogènes comme la toxine
synergohyménotrope de Panton et Valentine (PVL),
ou enfin des facteurs déprimant l’immunité innée comme la protéine
inhibant le chimiotactisme et la staphylokinase, qui sont intégrées sur le
chromosome.
6 ColBVH Paris 18 juin 2010
S aureus superbug
7 ColBVH Paris 18 juin 2010
Le Staphylocoque doré ou
les Staphylocoques dorés ?
b) des complexes clonaux multiples aux talents variés :
•
•
•
•
•
•
•
Set International de Bactériophages
Le type prédominant PT (« phage type » = type phagique ) est le
type 53, 77 avec 38% en 1955-1956,
suivi par le type 80, 81 qui devient prédominant de 1957 à 1960, tout en
déclinant année après année de 30% (1957) à 24%, 18 % et 11 % en
1960 pour s’effondrer à 0,4% en 1972.
– propension de cette souche PT 80 à diffuser => diffus. internationale
– un taux élevé de portages mais aussi de lésions cutanées chez les
soignants
En 1964, 1968 et 1977: 2, 2 et 3 nouveaux phages inclus dans le Set
l’émergence du PT 18 qui culmine à 40% en 1965-1966 pour s’effondrer
tout aussi brutalement < 5% en 1968; reste sensible aux pénicillines M
1968 à 1972 le PT 84, 85 émerge et prédomine avec 27 % en 1971.
1972 à 1977 proportion de souches non typables atteint 70 %. L’ajout en
1977 des phages 94, 95, 96 => 40 % des Sa appartiennent à ce PT
8 ColBVH Paris 18 juin 2010
Le Staphylocoque doré
ou les Staphylocoques dorés ?
b) des complexes clonaux multiples aux talents variés : (2)
•
Concomitamment aucune souche résistante à la gentamicine n’avait été
isolée avant septembre 1976 alors que 1,3 % le devient fin 1976 tout en
continuant d’augmenter en 1977. Tous ces isolats genta R sont corrélés
avec le PT 94, 95, 96.
• Cependant le nouveau PT 83A, 85 fait irruption et en moins de deux
trimestres passe de quasi zéro à 5% au 2éme trimestre 10% au 3éme et
55 % au 4éme trimestre de 1977.
•
Cette souche ne met qu’un an à acquérir la résistance à la gentamicine
qui lui manquait (cette souche avait une résistance acquise à la plupart
des antibiotiques disponibles) alors que paradoxalement elle perd celle
au chloramphénicol qu’elle avait acquise simultanément.
•
9 ColBVH Paris 18 juin 2010
Le Staphylocoque doré
ou les Staphylocoques dorés ?
b) des complexes clonaux multiples aux talents variés : (3)
On constate que :
• 1) l’émergence spontanée des différents PT de Sa à l’hôpital est suivie
par un rapide pic d’incidence, son maintien à un plateau élevé pendant 2
à 5 - 6 ans puis sa décroissance brutale et même sa quasi disparition.
• 2) Quand un PT disparaît un nouveau PT émerge et suit le même
schéma.
• 3) Les profils de résistance de chaque nouveau PT émergent changent
de façon significative.
• 4) La relation causale de ce phénomène est inconnue et en particulier
l’équipe de Cincinnati ne retrouve pas de corrélation claire entre les
antibiotiques utilisés à ce moment là et l’émergence et surtout la
disparition de ces PT
(Altemeir 1981).
• 5) Le potentiel épidémique de ces PT varie
10 ColBVH Paris 18 juin 2010
Antibiotic: Use it and loose it !
•
•
•
•
L’ère pré-antibiotique
Les premiers antibiotiques: l’optimisme
Les premières alertes
SAMR l’émergence
SA
MR
ST250
SA
MS st250
ST250
SASM
ST8
11 ColBVH Paris 18 juin 2010
1961
Des complexes clonaux à l’assaut.
12 ColBVH Paris 18 juin 2010
Des complexes clonaux à l’assaut
13 ColBVH Paris 18 juin 2010
Des complexes clonaux dans une
spirale infernale de multi-résistance
14 ColBVH Paris 18 juin 2010
Des complexes clonaux dans une
spirale infernale de multi-résistance
suite transfert 1 patient => SAMR genta R
épidémique dans les hôpitaux GB
15 ColBVH Paris 18 juin 2010
Des complexes clonaux dans une
spirale infernale de multi-résistance
16 ColBVH Paris 18 juin 2010
4.Des complexes clonaux dans une
spirale infernale de multi-résistance
•
Multi locus sequence type (MLST)
SARM
ST250
SCCmec I
CC30
1961
SASM
ST250
CC5
CC8
CC45
SCCmec IVA
1980’s
CC22
SAMR gentaS
17 ColBVH Paris 18 juin 2010
Le tournant de 1993
Evolution des différents clones au CHU de Créteil 1969 - 1995
Tétra =>
Péflo
Genta=>
Chloram=>
Source Aubry-Damon 1997
Rifamp=>
Genta=>
Tétra =>
Rifamp=>
<=Péflo
18 ColBVH Paris 18 juin 2010
Le Tournant de 1993
Evolution des différents clones au CHU de Rennes
1992 - 2002
• SARM KT-R GentaS
SCC portant le gène mecA
(SCC mecA) de type IV
SARM KTG R
SCC mec A de type I
19 ColBVH Paris 18 juin 2010
7. Rôle de la pression de
sélection antibiotique
<= amika
<= genta + siso
Source Aubry Damon 1997
20 ColBVH Paris 18 juin 2010
Rôle de la pression de
sélection antibiotique
• concept de seuil global d’utilisation d’un
antibiotique, introduit en 1994 par Stuart Levy
• Daniel Talon (Besançon) montre que l’utilisation
actuelle des aminosides ( 3.7 % du total) des
antibiotiques utilisés et des macrolides ( 5 %) est
probablement en dessous de ces seuils et donc
que les variations de leur utilisation n’affectent
plus l’évolution des profils de sensibilité des
SAMR, alors que
– les bêta- lactamines représentent 72 %
– et les fluoroquinolones 14 % !!!….
21 ColBVH Paris 18 juin 2010
Hormèse (Hormesis) :
• ce terme est maintenant utilisé pour décrire
les réponses biologiques à des signaux ou
stress environnementaux qui sont
caractérisés par une relation biphasique
dose-réponse montrant
- une stimulation à faible dose (ici
concentration subinhibitrice
d’antibiotiques) et
- une inhibition à dose élevée
22 ColBVH Paris 18 juin 2010
Types de courbes
dose / réponse hormétiques, en U ou en J :
Types de courbes
dose / réponse hormétiques, en U ou en J :
23 ColBVH Paris 18 juin 2010
Hormèse, Historique:
Garrod (1951)
• compare un indicateur simple, la
taille des colonies sur un milieu
contenant de la pénicilline, à un
milieu normal.
• « Il n’y a aucun doute que cette
accélération existe ; elle est causée
par des concentrations appropriées à
la fois pour les espèces sensibles ou
résistantes,
– comme 0,004 Unités Oxford/ml
pour Staphylococcus (haut)
– ou 4 U ou plus pour Ps. pyocyanea
(Pseudomonas aeruginosa). »
(bas)
Source : Garrod : the reactions of bacteria to chemotherapeutic agents, BMJ , 1951
24 ColBVH Paris 18
juin 2010
Influence des Fluoro-Quinolones
sur adhérence des SAMR
ANTIMICROBIAL AGENTS AND CHEMOTHERAPY, Mar. 2005, p. 916–924 Vol. 49, No. 3
25 ColBVH Paris 18 juin 201
Odds ratio SAMR et SAMS et FQ
26 ColBVH Paris 18 juin 201
L’émergence ultime : les Staphs
méti-sensibles multi-résistants
Evolution
des antibiotypes de S aureus méti-R au CHU de Rennes 1992 - 2005
300
VII
SAMR genta S
250
Number of MRSA isolates
200
150
100
Idem VII
mais méti
sensible !
 VII
50
0
1992
1993
Source Donnio 2005
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
Years
I
II
III
IV
VI
2004
2005
28 ColBVH Paris 18 juin 2010
VII
XIV
delta VII
L’émergence ultime : les Staphs
méti-sensibles multi-résistants
• 15 couples SAMR-SAMS
isolés chronologiquement
chez les mêmes patients:
•
St Brieuc
(C.d’Armor)
Belley
(Ain)
Cahors
(Lot)
comparaison par électrophorèse en champ
pulsé après digestion par l’enzyme de
restriction SmaI
• 11 couples avec profils de
restriction différents par
moins de 3 bandes
• Dans la plupart des cas
perte de matériel sur la
bande de ≈ 200 Kb portant
SCCmec
•
Source Donnio 2005
29 ColBVH Paris 18 juin 2010
Fitness, vous avez dit fitness ?
• terme anglo-saxon de fitness pour
désigner cette notion complexe de
compétitivité
« Only the fittest
• au contraire des SAMS, prés de 25 %
will survive »
des SAMR isolés en clinique n’adhérent
Herbert Spencer
pas au fibrinogène et à la fibronectine
Principles of Biology 1864
• les vitesses de croissance de souches
(Laurent 2001): Les SAMR Genta R ont
un déficit de vitesse de croissance
d’environ 20 % (temps de génération de
respectivement 30 et 32 heures) par
rapport aux MSSA (23 h.) et MRSA
Genta S erythro R (23h30).
• co-culture:les MRSA -Genta S sont
capables de surpasser rapidement les
MRSA Genta R et en très peu de temps
seuls les MRSA Genta S sont retrouvés
dans les bouillons des sub-cultures
30 ColBVH Paris 18 juin 2010
Et l’hygiène là dedans ?
•
Source Salmenlina (Finlande 2001)
31 ColBVH Paris 18 juin 201
Conclusion :
• La diminution des résistances chez les staphylocoques
dorés hospitaliers en France depuis 1993 est un fait
historique dont toute la portée doit être prise en
considération
• diminution de la consommation de certains antibiotiques
(aminosides, macrolides)
• Introduction d’autres: fluoro-quinolones
• effets hormétiques ?
• Rôle de l’immunité des populations
• hygiène standard croissante et lutte ciblée
• seuls les clones de Sa à très haut pouvoir de
transmission et de colonisation, (ce qui est généralement
antagoniste du point de vue de la fitness avec la multirésistance), devraient donc pouvoir continuer à diffuser
dans le futur en attendant ...
32 ColBVH Paris 18 juin 2010
. Ainsi dans quelques années
l’acronyme SAMR pourrait
reprendre son sens originel de
S. aureus multi-résistant
au lieu de méti-résistant !
« Prediction is difficult,
particularly
about the future ! »
Niels Bohr
33 ColBVH Paris 18 juin 2010
Merci de votre attention
34 ColBVH
Paris 18 juin 2010
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