Les Fiches Pédagogiques du Service Éducatif de la Scène Nationale de Châlons en Champagne Les Passagers de La Comète N°2 Le Roi se meurt – 3 fév. 06 IONESCO - WERLER - BOUQUET J’y emmène mes élèves ! Un hymne à la vie qu’Eugène Ionesco écrivit alors qu’il venait d’échapper à la mort… Dans un royaume imaginaire, un vieux roi qui a régné toute sa vie en despote et se croit immortel, apprend qu’il n’a plus qu’une heure trente à vivre. Autour de lui tout se défait, son royaume se réduit, se ratatine en un intérieur bourgeois lézardé. Lui qui avait l’habitude d’être obéi de tous, même du soleil, perd tout pouvoir et la lente rencontre avec la mort se fait inéluctable. Mais le roi ne veut pas mourir, il se cramponne à la vie, se révolte… Une farce macabre et comique qui tente d’exorciser l’angoisse de la mort et nous dit le bonheur absolu de la vie dans ce qu’elle a de plus ordinaire… Un humour noir, plus noir et plus désespéré que jamais et le rire comme rempart ultime à l’angoisse métaphysique pour un face à face avec l’absurde de l’humaine condition. Entre Surréalisme et apologue, sophismes et dérision du langage creux, Ionesco pousse l’homme et son langage dans l’ultime retranchement : celui du non-sens de la mort. Michel Bouquet donne à ce vieux roi des accents à la fois innocents et transcendants. Ionesco nous fait rire de nous-mêmes, de nos angoisses, voire de nos terreurs. Le comble de l’art. Rien de tel que le génie de Michel Bouquet pour rendre Bérenger – dérangé et impotent, dans tous les sens des deux termes ! – à la fois détestable et terriblement proche de nous, adultes et adolescents. Un grand texte devenu classique parmi les classiques, où l’argumentation se prend à son propre piège langagier : Bérenger se persuadera-t-il assez pour convaincre les autres qu’il n’est justement pas comme les autres ? Une mise en abyme fascinante de l’ego démesuré de chacun à se croire assez différent des autres pour refuser leur regard miroir annonciateur de la mort qui rôde. Tant qu'on est vivant, tout est prétexte à littérature. (Le Roi se meurt, p.78, Folio n°361) Ionesco par Werler Michel Bouquet Né le 6 Novembre 1925 à Paris. Pendant sept ans, il subit le sévère enseignement de l'école libre. Incapable de travailler, de s'exprimer, il se réfugie dans un monde de rêves. Lorsque sa mère l'emmène à la Comédie Française à l'âge de quatorze ans, il découvre la magie du théâtre, cette extraordinaire possibilité de faire de l'imaginaire une réalité. N'ayant rien pu apprendre en pension, le théâtre va devenir son école : il va découvrir l'immense richesse du répertoire avec pour professeurs, les plus grands dramaturges du vingtième siècle : Albert Camus, Jean Anouilh, Samuel Beckett, Eugène Ionesco et Harold Pinter. Puis, il aborde le cinéma grâce à son rôle dans La Collection de Pinter où "les gens de cinéma le découvrent tout à coup, contemporain de lui-même". IONESCO-WERLER-BOUQUET Eugène Ionesco, balises 1912 Naissance d’Eugène Ionesco le 26 Novembre à Slatima (Roum anie). Son père est un avocat roumain et sa mère est française. 1913 La famille Ionesco vient s’installer à Paris afin de permettre au père d’Eugène de préparer son doctorat de droit. Période difficile d’instabilité et de pauvreté. 1929 Ionesco est étudiant à l’Université de Bucarest. Il obtient un diplôme lui permettant de devenir professeur de français. 1936 Ionesco se marie. Il épouse une étudiante en philosophie. 1938 Le couple part pour la France. Il travaille à une thèse sur Les thèmes du péché et de la mort dans la poésie française depuis Baudelaire. Problèmes financiers et petits métiers. Le couple rentre en Roumanie en 1940 et revient en France, à Marseille, en 1942. 1948 Mort de son père. Ionesco est correcteur dans une imprimerie. Il se lie d’amitié avec André Breton, Luis Buñuel, Adamov et Cioran. 1950 Il est naturalisé français. La Cantatrice chauve est créée au Théâtre des Noctambules. La pièce est accueillie froidement par la critique. 1951 La Leçon au Théâtre de Poche. La critique classique manifeste son hostilité. Les salles restent vides. Mais un cercle d’admirateurs commence à se créer : Ils saluent ce comique né de l'absurde où l’insolite fait éclater le cadre quotidien. 1952 Les Chaises 1954 Reprise des Chaises. Jean Anouilh écrit un article élogieux en première page du Figaro, un quotidien qui n’avait jamais pourtant applaudi aux pièces d’Ionesco. 1958 Rhinocéros 1960 Jean-Louis Barrault crée Rhinocéros à l’Odéon. C’est la consécration pour Ionesco. 1962 Le roi se meurt 1966 Création à la Comédie française de La Soif et la Faim 1971 Ionesco est reçu à l’Académie française 1972 Macbett 1989 Ionesco est fêté à la Nuit des Molières 1994 Ionesco meurt le 28 mars Metteur en scène et comédien, Georges Werler Formation Conservatoire National d'Art Dramatique (CNSAD) Metteur en scène : Une quarantaine de spectacles dont 1970 Marie Tudor (Hugo) R. Varte - M. Rayer - M. Cuvelier (Th. Est Parisien) TEP 1971 Le Marchand de Venise (Shakespeare) J. Alric - E. Dandry V. Garrivier ... (TEP) 1972 A ceux qui viennent après nous (Brecht - poésie) troupe du TEP (TEP) 1973 L'Avare H. Virlogeux - D. Kurys puis V. Garrivier - 1. Huppert... plusieurs tournées aux Etats-Unis 1974: Les propriétaires des clefs (Kundera) G. Ségal - G. Mnich - A. Doat - J. Boulva (TEP) 1978: Nekrassov (Sartre) R. Rimbaud - A. Médina - C. Evrard ... (TEP) 1993 : Le Roi se meurt (Ionesco) M. Bouquet - J. Carré - B. Waver ... (Th. Atelier) 1996 : 2 Molières : meilleur auteur et meilleur spectacle subventionné 2004 : Le Roi se meurt avec M. Bouquet - Juliette Carré... (Théâtre Hébertot) 2005 : 2 Molières -meilleur comédien et Meilleur spectacle privé Georges Werler a créé le groupe de poésie «Les Poèmîens » dont un des disques a obtenu le Grand Prix de l'Académie Charles Cros. Il a travaillé pendant 8 ans au TEP où il a participé à la programmation du Théâtre et mis en scène plusieurs spectacles. Professeur au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique pendant 10 ans (CNSAD). Professeur au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris pendant 14 ans (CNSMDP) (classe Art Dramatique). Professeur et fondateur de la classe Art Dram. A l'Ecole Nationale Sup. de Musique de Cachan. Fait partie du Bureau de l'Association Professionnelle des Metteurs en Scène (APMS). Georges Werler est actuellement administrateur (théâtre) de la SACD. Bouquet : ses personnages et lui Vous avez traversé le théâtre contemporain avec Anouilh, Pinter, Ionesco, Beckett, en alternance avec le cinéma. Y-a-t-il une grande différence entre votre travail de comédien au théâtre et celui d'acteur au cinéma ? Oui, il y en a une très grande. On peut dire qu’au cinéma, on travaille sur les secrets d'un rôle et le secret de sa propre nature. Au théâtre, on est obligé de voir le personnage dans toute sa géographie extérieure, dans toutes ses extraversions et moins dans ses secrets, que dans les faits de réalité qui appartiennent à sa personne. Vous savez, il y a une phrase de Pinter qui est magnifique et qui dit : "Vrai, vrai, c'est plus que vrai, c'est un fait! " . Avec un personnage de théâtre, on est dans ce cas de déceler les faits, les actions des rôles qui les définissent, donc on est plus en contact avec I'extériorité du rôle et de montrer l'intériorité par l'extériorité. Au cinéma, c'est le contraire, c'est tout ce qui est non-dit, tout ce qui est gardé pour soi, tout ce qui est secret non dévoilé. C'est le même métier mais c'est une approche complètement différente ! Comment abordez-vous un personnage ? Est-ce que, par exemple, vous vous "nourrissez" beaucoup des écrits de l'auteur ? Tout à fait ! Non seulement de l'auteur mais je ressasse le texte pendant des mois pour comprendre de quelle nature d'homme, il est l'émancipation. Il faut des centaines de lectures pour savoir à qui on a affaire. Par exemple, je travaille depuis quatre mois sur Ionesco. J'ai eu des rencontres avec Ionesco, dans la mesure où il rompait le silence pour parler de son travail. J'ai essayé, en le regardant, de savoir quels sont les secrets que l'œuvre contient et qui sont encore gardés au tréfonds de lui. Ce que je n'oublierai jamais, c'est l'œil qui m'a regardé, c'est le sourire ou la résignation de l'homme qui avait écrit cela et ça c'est une chose qui me hante. Et tant que je n’aurai pas trouvé l'alliage des secrets qui compose toutes ces attitudes physiques, je ne pourrai approcher les secrets de la pièce. Donc, il est possible que la pièce se refuse à moi. J'essaierai alors de continuer mon travail d'introspection. Il y a dans ma nature des anarchies, des violences qui s'expriment par des besoins de calme, de tranquillité, qui sont des paradoxes et qui sont, je crois, une explication du caractère du Roi ou du Neveu de Rameau de Diderot qui ne trouve dans son destin que la possibilité d'alimenter du tragique que tout le monde véhicule. Les Passagers de la Comète – IONESCO – WERLER - BOUQUET Enjeux de Scène Ionesco - le rire tragique "En 1948, avant d'écrire "la Cantatrice chauve", je ne voulais pas devenir un auteur dramatique, j'avais tout simplement l'ambition de connaître l'anglais". Dans ce but, Ionesco acheta un "manuel de conversation franco-anglaise à l'usage des débutants" qu'il étudia consciencieusement. Mais voilà qu'il y découvrit des vérités qui le surprirent, bien qu'il les connut déjà. Il apprit par exemple que la semaine avait sept jours, que le plancher était en bas et le plafond en haut ; et, dès lors, il comprit qu'il ne recopiait plus de "simples phrases anglaises dans leur traduction française, mais bien des vérités fondamentales, des constatations profondes." L'auteur eut alors une illumination, il voulut communiquer à ses contemporains ce qu'il avait redécouvert et que tout homme a tendance à oublier, après avoir remarqué que les dialogues des Smith et des Martin étaient proprement du théâtre. Il s'agissait donc pour lui de faire une œuvre "spécifiquement didactique" d’où l’aspect argumentatif faussement détaché qui prévaut dans son oeuvre. "...Pourtant, le texte de "la Cantatrice chauve" ne fut une leçon (et un plagiat) qu'au départ. Un phénomène bizarre se passa, je ne sais comment : le texte se transforma sous mes yeux, insensiblement, contre ma volonté. Les propositions toutes simples et lumineuses, que j'avais inscrites avec application sur mon cahier d'écolier, laissées là, se décantèrent au bout d'un certain temps, bougèrent toutes seules, se corrompirent, se dénaturèrent. Les répliques, les unes à la suite des autres se déréglèrent. Ainsi, cette vérité indéniable, sûre : "le plancher est en bas, le plafond est en haut"". Mais le mystère était déjà là, lorsque, en étudiant son manuel d'anglais, il fut comme ébloui de la façon la plus irrationnelle par ces vérités oubliées, et lorsqu'il fut poussé à les communiquer par une force qui le dépossédait de lui, ainsi que le montre le Piéton de l'Air : « - Bérenger : il y avait autrefois en moi une force inexplicable qui me déterminait à agir malgré un nihilisme fondamental. Je ne peux plus continuer. » Et cependant, le simple fait d'exprimer cette impossibilité de continuer à écrire est à l'origine du Piéton de l'Air. Le phénomène de la création est totalement incontrôlé et jaillit des profondeurs les plus secrètes de son être. Dorénavant, il est facile de comprendre l'embarras d’Ionesco, lorsqu'on lui demande pourquoi il écrit. Il voudrait bien le savoir lui-même ! Devant ce que son œuvre lui révèle de lui et de l'homme, son esprit se perd en questions se multipliant à l'infini, sans jamais lui donner de réponse, car l'expression de sa vie ne peut que suivre celle-ci, sans jamais la devancer, et donc sans jamais lui apporter de solution : "L'écrivain est embarrassé par les questions qu'on lui pose parce qu'il se les pose lui-même et parce qu'il s'en pose bien d'autres, parce qu'il se doute aussi qu'il y a d'autres questions qu'il pourrait se poser mais qu'il n'arrivera jamais à se poser ; encore moins à leur répondre " Mais l'interrogation de l'auteur devant son propre mystère s'enrichit des questions que lui posent les réactions du public, et qui le mettent ainsi en contact plus ou moins trouble avec le monde des vivants, extérieur à l'univers stérile qu'il découvre en lui. La gestation de La Cantatrice chauve l'avait fait souffrir dans sa chair, dans ses os, et dans son sang : "En écrivant cette pièce (...) j'étais pris d'un véritable malaise, de vertige, de nausées." Il avait cru "avoir écrit quelque chose comme la tragédie du langage" !... Quel ne fut pas son étonnement de voir et d'entendre rire les spectateurs qui n'y virent rien de plus qu'un canular !... Toutefois, il remarque que « quelques -uns ne s'y trompèrent pas qui sentirent le malaise ». C'est assez dire que l'auteur sentait qu'il y avait autre chose dans cette pièce que dans une simple comédie : « Je ne pensais pas que cette pièce était une véritable comédie. En fait, elle n'était qu'une parodie de pièce, une comédie de la comédie ». Il avait aussi l'impression que ce comique était le fruit de tout cela qui en lui restait trouble, et dont il souffrait : « Il n'y a pas toujours de quoi être fier : le comique d'un auteur est, très souvent, l'expression d'une certaine confusion. On exploite son propre non-sens, cela fait rire. Cela fait aussi dire à beaucoup de critiques dramatiques que ce qu'on écrit est très intelligent. (...) Si je comprenais tout, bien sûr, je ne serais pas "comique" ». Pourtant, Ionesco cherche à tout comprendre et il devient souvent comique, quand, précisément au moment où il croit pouvoir être le maître du monde par son imagination et son esprit, il se heurte à un obstacle imperceptible, qui le fait retomber dans la réalité... d'une corbeille à papiers, par exemple ! comme c'est le cas pour Choubert dans Victimes du Devoir. Le rire libère alors les spectateurs de l'angoisse obscure de l'individu désirant échapper à la finitude de sa condition, ce rire est aussi en Ionesco qui se moque de lui à travers ses personnages, mais il devient de plus en plus discret : "Oh, je me suis toujours moqué de moi-même dans ce que j'écris ! Il faut d'ailleurs avouer que j'y arrive de moins en moins, et que je me prends de plus en plus au sérieux quand je parle de ce que je fais... Je finis par tomber dans une sorte de piège" Il ne parvient plus à se libérer de lui-même, s'enfonçant dans la souffrance. N'est-ce pas parce qu'il se comprend de mieux en mieux, qu'il ne peut plus rire de lui ? Et d'ailleurs, par cette cruauté tournée contre soi inhérente au rire, ne cherche-t-il pas à se déchirer et ne trouve-t-il pas finalement ce qu'il cherche ? Disant au sujet du comique : "Je crois que c'est une autre face du tragique", il semble que, là seulement, il aille au cœur du problème : l'œuvre de Ionesco n'est comique que, lorsqu'en cherchant à se délivrer de ce qu'elle révèle de l'homme, le spectateur, le lecteur, ou même l'écrivain lorsqu'il se moque de lui, la fuient. Il ne paraît possible de trouver sa véritable richesse, qu'en tentant de la regarder lucidement, elle devient alors profondément tragique, mais d'un tragique qui n'est pas irrémédiable, car l'auteur, après de nombreuses années de douloureuses pérégrinations en lui-même, développe progressivement, jusqu'à la Soif et la Faim , au fond de ses ténèbres, un foyer de chaleur et de lumière que rien n'a pu éteindre : l'amour, solution du tragique, dans la mesure où l'on accepte de faire vers lui le pas difficile qu'il nécessite. Les Passagers de la Comète - IONESCO Mémento En classe « Théâtre de l’Absurde » : terme générique employé pour la première fois par le critique Martin Esslin en 1962 pour classer les œuvres de certains auteurs dramatiques des années 1950, principalement en France, qui rompaient avec les concepts traditionnels du théâtre occidental. Il désigne essentiellement le théâtre de Beckett, Ionesco, Arrabal, les premières pièces d'Adamov et de Genet. Sources philosophiques et esthétiques : Cette conception trouva appui dans les écrits théoriques d'Antonin Artaud, le Théâtre et son double (1938), et dans la notion brechtienne de l'effet de distanciation (Verfremdungseffekt). L'apparente absurdité de la vie est un thème existentialiste que l'on trouvait chez Sartre et Camus mais ceux-ci utilisaient les outils de la dramaturgie conventionnelle et développaient le thème dans un ordre rationnel. Sans doute influencé par Huis clos (1944) de Sartre, le théâtre de l'absurde ne fut ni un mouvement ni une école et tous les écrivains concernés étaient extrêmement individualistes et formaient un groupe hétérogène. Ce qu'ils avaient en commun, cependant, outre le fait qu'ils n'appartenaient pas à la société bourgeoise française, résidait dans un rejet global du théâtre occidental pour son adhésion à la caractérisation psychologique, à une structure cohérente, une intrigue et la confiance dans la communication par le dialogue. Héritiers d'Alfred Jarry et des surréalistes, Samuel Beckett (En attendant Godot, 1953, Fin de partie, 1957) ou Ionesco introduisirent l'absurde au sein même du langage, exprimant ainsi la difficulté à communiquer, à élucider le sens des mots et l'angoisse de ne pas y parvenir. Ils montraient des antihéros aux prises avec leur misère métaphysique, des êtres errant sans repères, prisonniers de forces invisibles dans un univers hostile (Parodie d'Adamov, 1949 ; les Bonnes de Genet, 1947 ; la Cantatrice chauve de Ionesco, 1950). Par des processus de distanciation et de dépersonnalisation, ces pièces, démontent les structures de la conscience, de la logique et du langage. Nouvelle dramaturgie : Nourris de Freud, ces auteurs dramatiques créèrent des personnages marqués par le traumatisme de la guerre chez qui la vie psychique a pris le pas sur la réalité et qui dominent mal leurs fantasmes et leurs névroses. À la suite de l'expérience historique des camps de concentration et d'Hiroshima, la conviction selon laquelle le monde a un sens fut ébranlée : on prit conscience de l'abîme entre les actes humains et les principes nobles. Les pièces obéissent à une logique interne, fondée sur le caractère et le statut des personnages, sur l'intrigue (souvent circulaire, sans but, ne tendant jamais vers un dénouement esthétique), sur les objets (pouvant proliférer au point d'effacer les caractères, comme chez Ionesco, ou bien réduits au strict minimum, comme chez Beckett, mettant en exergue les thèmes récurrents du vide et du néant) et sur l'espace, identifié au personnage; ainsi dans Oh les beaux jours (1963) de Beckett, Winnie s'enlise dans le sable et le monologue. Exprimant un état d'esprit propre à la période de l'après-guerre, le théâtre de l'absurde présentait le rapport de l'Homme au monde comme immuable, par opposition à la théorie brechtienne qui le suppose transformable. Notes de mise en scène Plutôt souffrir que mourir, C’est la devise des hommes. La Fontaine C’est une fable qu’Eugène Ionesco nous raconte avec Le Roi se Meurt. Il y avait bien dans un pays imaginaire un vieux Roi solitaire qui sentait dans sa poitrine battre un cœur qu’il croyait immortel. Il y avait dans un pays imaginaire un vieux Roi solitaire qui croyait tenir dans son poing un pouvoir éternel. Puis un jour, alors qu’il était très vieux, alors qu’il était très jeune, tout bascula dans l’anarchie et dans l’horreur : le territoire se mit à rétrécir, à se rabougrir, les frontières à reculer ; la population se réduisit en une nuit à quelques vieillards, à quelques enfants goitreux, débiles mentaux, congénitaux. Tout s’effondra. Ce fut la fin du monde et la fin d’un long règne. Cet univers qui se détruit, c’est la projection du mental d’un Roi qui se désagrège, entraînant tout dans son néant. Pour que la vie reprenne, il faut que le Roi passe, que le Roi meurt afin que tous puissent hurler ensemble à nouveau : « Vive le Roi ! » La Royauté, les Courtisans, l’Armée, le Peuple ne peuvent survivre et se régénérer qu’en abreuvant la nouvelle royauté de la mort de l’ancienne. C’est donc à cette cérémonie, farce métaphysique du grand départ du Roi, que nous convie Ionesco. Il nous oblige à regarder de face ce qui nous fait si peur. Peu à peu, Béranger Ier va se détacher de tous les liens matériels qui le nouent à la vie ; il va se libérer de toutes les entraves de ce monde et pourra ainsi entreprendre le dernier voyage. Il a accepté l’inéluctable, le grand rendez -vous avec la mort - mais va-t-il mourir ? Un jour que Michel Bouquet et moi lui rendions visite, Ionesco nous a affirmé qu’il ne savait pas si Béranger mourait, mais avec un sourire malicieux et tendre, il a ajouté ce qui est sûr, c’est qu’il disparaît. Oui, Béranger Ier disparaît et avec lui disparaissent un peu de nos inquiétudes, Ionesco nous fait rire de nousmêmes, de nos angoisses, voire de nos terreurs. Georges Werler Textes, voir sources, conception et réalisation : Pascal Vey Sources : Tous droits réservés. Arkepix Ionesco.org montceaulesmines.fr poesies.be France Inter SACD Boutey Vey Pour joindre le service éducatif : La Comète, Scène Nationale de Châlons en Champagne Direction Philippe Bachman Service éducatif Pascal Vey, Professeur détaché Pascal Vey est présent le mercredi après-midi de 14h00 à 17h00 à La Comète Joséfa Gallardo et Nadia Hmouche vous répondent tous les jours au 03 26 69 50 80