Stimulation de l’ovulation, jusqu’ou aller, pourquoi stimuler ? Betty Rossin Introduction faut-il continuer à stimuler les patientes ou passer à des protocoles « soft » ou « mild » voir pseudospontané est un sujet d’actualité dans le cadre d’une politique de santé ayant pour objectif de diminuer le taux de grossesses multiples et le coût des traitements. Les protocoles légers ont pour avantages théoriques de diminuer les effets secondaires de le réponse à l’induction (pénibilité des traitements, disponibilité, hyper stimulation) Inconvénients : moins d’ovocytes, moins d’embryons, moins de congélation et donc moins de chance additionnelle, moins de grossesse et donc plus de tentatives et donc au final plus de souffrance pour la femme et le couple et plus d’effort financier puisque nous sommes limités à quatre tentatives remboursées par la sécurité sociale La solution ; évaluation de la balance ; bénéfices/risques, afin d’être le plus performant pour la mère et l’enfant à naître. Réflexions : Quelle que soit la stimulation choisie, les taux de grossesses multiples est lié à la politique de transfert, et non à la l’induction. Inversement le nombre d’ovocytes et d’embryons obtenus est étroitement corrélé au taux de succès (FIVNAT2003) (1) Matériels et Méthodes Pour valider l’intérêt de recourir à une induction suffisamment tonique en 2008 à la lumière des possibilités actuelles sur le plan technique de nos laboratoires et des produits pharmaceutiques qui sont à notre disposition, nous prendrons comme matériels et méthodes : D’une part l’exemple italien qui depuis la loi de 2004 limite à trois le nombre d’ovocytes mis en fécondation associé à une interdiction de congélation des embryons (sauf exception) ce qui devrait conduire nos confrères à limiter leurs protocoles d’induction D’autre part les résultats comparatifs entre induction classique et protocole « soft » ou « mild » et de maturation in vitro, ainsi que les études comparatives sur la qualité embryonnaire entre cycle stimulé et cycle naturel Enfin l’intérêt des TEC (transfert d’embryon congelé) 1/6 L’exemple Italien Quelle a été l’impact de cette loi ? Est ce que les cliniciens italiens ont modifié profondément leurs protocoles ? L’équipe de Palermo (2) rapporte une étude multicentrique sur sept centres italiens de FIV. L’étude porte sur 1861 cycles (961 avant la loi et 900 après) Elle objective un plus recours aux protocoles antagonistes mais le protocole long agoniste reste dominant, le nombre d’unité de FSH a diminué mais reste tonique puisqu’il se situe entre 225 et 300ui /j Tableau I : Caractéristiques des cycles en fonction de la période étudiée : protocoles de stimulation caractéristiques Protocole long antagonistes Autre protocole FSH recombinante FSH urinaire Total UI FSH Duré stimulation Avant la loi 588(81.7) 115(16) 17(2.3) 714(99) 7(1) 3207±1669 11.6±2.4 Après la loi 612(68.3) 256(28.5) 29(3.2) 888(99.1) 8(0.9) 2987±1552 11.4±2.4 p <0.001 1.00 0.007 0.06 Les taux de grossesses entre les deux périodes ne montrent pas de différence significative par contre le recours à l’ICSI augmente par rapport à la FIV classique ainsi que le taux de fécondation Tableau II : caractéristiques des résultats en fonction de la période étudiée caractéristiques FIV ICSI n°ovocytes utilisés n°E obtenus tx fécondation fiv tx fécondation icsi Tx G/ponction Tx G/T Tx d’implantation HSO sévère Avant la loi 202(21.1) 729(76.3) 7.4±4.7 4.8±3.5 62.7 65.6 259(27.0) 259(30.5) 340(16.2) 5(0.5) Après la loi 96(10.7) 787(87.7) 2.6±0.8 2±1.0 76.4 78.6 218(24.2) 218(27.2) 270(15.4) 4(0.4) p <0.001 <0.001 <0.001 0.18 0.14 0.48 1.00 L’absence de congélation diminue le taux cumulatif de grossesse par ponction (33.7 versus 26.3% p=0.009) soit une perte de 6% les taux de grossesse restent cependant stables grâce à une meilleur sélection des ovocytes mis en fécondation. Néanmoins l’auteur montre que le taux de grossesse augmente avec le nombre d’ovocytes obtenus malgré la nouvelle législation, probablement car une réponse forte est un indicateur d’ovocyte de bonne qualité et ou de bonne réponse et que cela donne l’opportunité au biologiste de choisir ceux de meilleur qualité. Protocoles classiques versus protocoles « légers » 2/6 Si l’hyperstimulation est de principe à éviter, un recrutement suffisant permet de sélectionner le ou les embryons de « top » qualités à transférer. Quels sont les arguments qui permettent de dire que les embryons obtenus après stimulation classique sont meilleurs ou moins bons que ceux obtenus par une induction légère ? La réponse n’est pas simple, elle est plurifactorielle car intervient comme nous allons le voir de nombreux facteurs L’obtention d’un nombre suffisant d’embryons permet une culture prolongée : l’équipe de P Devroey dans une étude randomisée, prospective montre un taux d’accouchement significativement plus élevé dans les transfert d’un blastocyste versus un embryon de « top » qualité (3) La maturation in vitro (MIV) en cycle naturel ou pseudo spontané est justifiée dans certaines PCO très sévères mais en dehors de ces indications, elle ne peut se comparer aux résultats de la FIV avec taux d’implantation de seulement 10 à15%. Ces résultats s’expliquent par les effets délétères de la MIV sur le fuseau méiotique et l’alignement chromosomique dans l’ovocyte (4), sans vouloir polémiquer certaines équipes affichent des résultats spectaculaires mais sur des toutes petites séries (Kadoch (5)43% /cycle dans les PCO) Les minimales stimulations (introduction de l’antagoniste parallèlement à l’apparition du follicule dominant + gonadotrophines et déclenchement par HCG et autres variantes de ce protocole) dans une étude multicentrique de Pelinck (6) sur 336 patientes réalisant 844cycles (2.5par patiente) le taux de grossesse/cycle débuté est de 8.3% seulement et passe à 20.8% en 3 cycles cumulés avec un taux d’annulation de 17.7% avec un taux de transfert/cycle de37.3%. Heijnen (7)rapporte une étude randomisée comparant une « mild » stimulation avec transfert de un embryon à une stimulation standart agoniste long FSH avec transfert de deux embryons (tableau III) :Les résultats montrent un taux d’annulation important (18%) un nombre total de dose de gonadotrophine qui reste élevé, et des taux de grossesses et d’accouchement d’enfant vivant à terme plus bas dans le protocole « mild » Tableau III : Résultats de l’étude de Heijnen stimulation Durée stimulation Dose totale FSHui annulation n d’ovocyte/ponction G évolutive/cycle débute Enfant vivant/cycle débuté Mild n=444 8.3 1307 18% 6.9 17.6% 15.8% Standart n=325 11.5 1832 8.3% 8.5 28.6% 24% P <0.0001 <0.0001 <0.0001* <0.0001 <0.0001 0.003 Cette équipe rapporte quelques mois plus tard (8) à propos de cette même étude un taux plus bas d’aneuploïdie chez les patientes bénéficiant d’une mild stimulation .Cependant, l’impact de la stimulation sur l’ovocyte et ses conséquences sur la qualité embryonnaire est sujet à controverse .Ziebe (9) dans une étude rétrospective compare 177 patientes en protocole long agoniste FSH, ces patientes en cas d’échec seront transférer lors des cycles suivants sur un cycle pseudo naturel au cours duquel sera ponctionné et mis en fécondation le follicule dominant. Les embryons du cycle naturel et du cycle stimulé sont comparés. Tableau III : résultats étude de Ziebe Les taux de clivage sont comparables, le nombre d’embryons de 4 cellules et les taux de fragmentation sont également comparables 3/6 1) Toutes les patientes Ovulation avant ponction Ponction blanche 2) Patientes avec ovocyte /cycle naturel Taux de clivage% 3) Patientes avec embryon dans cycle naturel N°embryons>4cellules N°embryons<10%fragmentation Cycles stimulés 177 125 70.4 85 355 (53) 411 (61) Cycles naturels 177 35 17 125 66.4 p=0.34 85 50 (59) p=0.31 59(69) p=0.15 La congélation La cryoconservation est un facteur important d’évaluation de nos résultats en FIV/ICSI Le rapport de l’ESHRE publié en 2007(10) sur 28 pays, fait état de 365103 cycles d’AMP avec : 132932 FIV avec un taux de grossesse clinique par ponction et transfert respectivement de 26.1 et 29.6%, 162149 ICSI avec un taux moyen de grossesse par ponction et par transfert de 26.5 et28.7%, enfin un nombre de TEC(transferts d’embryons congelés) de 60412 avec un taux moyen de 18.6% de grossesse par transfert avec des variations selon les équipes de 11 à 31.8 % et un taux d’accouchements par transfert de 11à 23.5% ( les meilleurs résultats reviennent à l’Island) Le TEC réalise des chances supplémentaires de grossesse. D’autant que cette procédure n’est pas comptabilisée dans les rangs autorisés de tentatives mais pour avoir des embryons congelés, faut- il encore suffisamment stimulé. D’autant que dans certains pays comme la Suisse ou l’Allemagne, la loi restreint la sélection des embryons transférables (culture d’un maximum de trois embryons au-delà du stade de 2PN et congélation immédiate des embryons surnuméraires au stade pro nucléaire) il est donc nécessaire de tenir compte des résultats cumulés des transferts d’embryons frais et congelés Germond et al (11) ont montré sur l’analyse dans leur centre de 4122 cycles en FIV/ICSI , 30% de tous les accouchements proviennent des cycles congelés Les progrès de la biologie conforte encore ses résultats, Takahashi (12) rapporte des taux de grossesse après vitrification des blastocystes de 44.1% comparable à au taux de grossesse en transfert de blastocystes frais 44.4% Résultats et discussion Si l’HSO ne nous semble jamais justifiée mais et reste une complication liée au dérapage du traitement, l’induction raisonnable entre 5 et 8 ovocytes, est nécessaire pour asseoir des taux de grossesses correctes - Les cycles stimulés donnent en moyenne des taux de grossesse de 29% et des taux d’annulation très faibles, les résultats en cycles naturels et les « mild » stimulations sont de 8.3% par cycle débuté et de 20.8% en taux cumulé sur 3 cycles avec des taux d’annulation élevés de17.7% sans compter les ponctions blanches et les absence de transfert par échec de fécondation ou de clivage. Ainsi les avantages certes des inductions naturelles ou légères ( simples, pas HSO,coût financier faible) sont contre balancés par des inconvénients lourds :il faut plusieurs cycles pour arriver au même résultats que la FIV en induction, le rapport bénéfice/risque devient négatif. Il est certain que ces protocoles gardent un intérêt dans des situations particulières comme les grossesses après cancer, en cas de mutation BCRA, de troubles de la 4/6 coagulation et pour certain chez les mauvaises répondeuses ou plus rien n’est efficace et où l’augmentation des doses de gonadotrophines n’apporte rien de plus :( Bassil : 0% versus8% de grossesse) (13) - Quant aux risques de grossesses multiples qui restent un problème sérieux de santé publique, et une des raisons avancée par les défendeurs des cycles naturels ou pseudo naturels,ils sont réglés le transfert d’un embryon où d’un blastocyste avec congélation des embryons surnuméraire - La qualité embryonnaire ne semble pas altérée par l’induction, le taux de fragmentation est identique entre cycles stimulés et cycles naturels .Par contre.,le nombre total d’embryon obtenu de bonne qualité de est un facteur prédictif indépendant pour le taux cumulatif de grossesse ;un embryon de bonne qualité multiplie les chances de grossesse et de naissance d’enfant vivant par3.1, deux embryons de bonne qualité multiplient respectivement les chance par 3.7 et 3.6, trois embryons de bonne qualité par7.4 et6.7 et cela dans le cadre d’un transfert de un embryon par cycle(14 - Les HSO sont la complication la plus difficile à jugulée notamment dans les PCO, les protocoles doivent être adaptés chez ces patientes, cela n’est pas facile car elles répondent trop où pas, là il existe effectivement une place pour la MIV dans des équipes rompues à cette technique. Pour les autres, il reste en cas de réaction tardive explosive,la congélation préventive de tous les embryons avec un transfert TEC différé dans le temps et cela avec des résultats un taux de grossesse par TEC très satisfaisant( FIVNAT 2006) (15)En effet,il est exceptionnel que des accidents graves apparaissent si le transfert est différé,en général ces derniers sont en rapport avec une grossesse débutante source d’HCG. -En dehors de toute HSO, la possibilité de réaliser des TEC grâce à un nombre suffisant d’embryons obtenus, permet d’augmenter les chances de grossesse de plus de 20% en taux cumulatif Conclusion Le parcours des couples est lourd dans les méandres de la FIV. Il convient de rester efficace et de répondre au mieux à l’attente des couples. La stimulation doit rester raisonnable pour éviter les accidents d’hyper stimulation, inutiles et préjudiciables pour la femme et l’enfant à naître. Bibliographie [1]FIVNAT 2003 [2] Ragni .G, Allegra. A, Anserini.P, Causio.F, Ferraretti.A.P, Greco.E, Palermo.R and Somigliana.E: The 2004 Italian legislation regulating assisted reproduction technology: a multicentre survey on the results of IVF cycles.Hum reprod vol 20, N°8, pp.2224-2228,2005 [3]Papanikolaou.E,Camus.M, Kolibianakis.E, Van Landuyt.L, Van Steirteghem.A, Devroey.P. In Vitro Fertilization with Single Blastocyst-Stage versus Single Cleavage-Stage Embryos. N Engl J Med 2006;354:1139-46 [4]Li.Y, Feng .H,Cao.Y,Zheng.G,Yang.Y,Mullen.S,Crister.J,Chen.Z. Confocal microscopic analysis of the spingle and chromosome configurations of human oovoctes matured in vitro:Fertil Steril, vol85,N°4, pp827-832,avril2006 [5]Kadoch.J. Controlled natural cycle IVF:a novel approch for a dominant follicle during an in vitro maturation 5/6 cycle.RBM Online vol14.N°5.2007 598-601 Service de Médecine et de biologie de la Reproduction Hôpital saint- joseph Marseille 26 boulevard de Louvain 13008 Marseille 6/6