Actualités 12 23/07/04 14:39 Page 12 Pra tique Soins Psychiatrie Le premier entretien est un acte de référence A l’ i n star de ses autr es co l l è g u es infirmiers du ce ntr e, Pascal Petiqueux exerce aussi en qualité de psychothérapeute au sein du centre médico-psychologique (CMP) Le Figuier (Paris). Il accueille les patients en premier entretien. A l’heure où la fameuse Mission Berland... Il planche activement sur la délégation des compétences. I Focus ... La psychiatrie de secteur La mission Berland planche activement sur la délégation des compétences. Le projet de centre médico-psychologique est une recomposition des secteurs de Paris-Centre et une tentative pour mettre en place une réelle psychiatrie de secteur. C’est-àdire une psychiatrie extrahospitalière, avant tout orientée vers le patient et le maintien de celui-ci dans son environnement au plus proche de son domicile. nfirmier de secteur psychiatrique (ISP), Pascal Petiqueux est aussi titulaire d’un DESS de psychologie clinique. Il a été infirmier de secteur psychiatrique à CharlevilleMézières (08) dans un service de patients psychotiques pour la plupart. Pendant plus d’une dizaine d’années, il a emmené des groupes de patients en haute montagne. Cette expérience a été assez médiatisée et un film a même été diffusé à la télévision en 1989. Après avoir suivi un cursus universitaire, il s’est orienté vers la prise en charge spécifique des adolescents en soinsétudes à la Fondation des étudiants de France. Aujourd’hui, il participe au projet Paris-Centre. Qu’est-ce que le projet Pa r i s Centre ? Pascal Peutiqueux : Ce projet de centre médico-psychologique est une recomposition des secteurs de Pa r i s -Centre et une tentative pour mettre en place une réelle psychiatrie de secteur. C’est-à-dire une psychiatrie extra-hospitalière, avant tout orientée vers le patient et le maintien de celui-ci dans son environnement au plus proche de son domicile. Le diplôme d’ISP de 1976 spécifie bien que l’infirmier de secteur psychiatrique n’intervient pas uniquement dans le champ hospitalier. Quelles sont vos fonctions ? P.P. : Je fais partie de l’équipe infirmière qui est composée de 7 s o ignants. J’ai d’abord une fonction d’infirmier classique de suivi des patients qui sortent de l’hôpital. Ce suivi est d’intensité variable. Le suivi proche sert à consolider une stabilisation post-hospitalisation. Dans ce cas, le patient vient tous les jours pour recevoir son traitement ; il faut aussi Professions Santé Infirmier Infirmière N° 56 • juin-juillet 2004 expliquer et faire preuve de pédagogie par rapport à ce traitement. Nous avons, par ailleurs, des entretiens réguliers, hebdomadaires avec certains patients pour évaluer la stabilisation des troubles et surtout maintenir le lien. Nous participons également à des entretiens pluridisciplinaires avec des psychiatres et des assistantes sociales dans le cadre d’un suivi plus lointain. Bien entendu, nous administrons les injections retard de neuroleptiques. Et nous effectuons des visites au domicile du patient dans le secteur, toujours pour maintenir le lien et éventuellement pour administrer le traitement. Une autre partie importante de mon travail consiste à accueillir les patients en premier entretien. Certains patients nous sont adressés par des confrères. D’autres nous sont signalés par la police ou le voisinage... Enfin, il y a des patients qui se présentent d’eux-mêmes. Il nous faut les accueillir dans des délais très c o u rts. Certains infirmiers, dont je fais p a rtie, sont aussi psychothérapeutes de par leurs compétences et leur formation spécifique en psychologie, thérapie familiale ou psychodrame analytique. Comment réagissent les patients devant l’accueil infirmier ? P.P. : Lors de l’entretien téléphonique ou à l’accueil du secrétariat, nous expliquons bien que le premier entretien est effectué par un infirmier. Certains patients sont étonnés, mais rares sont ceux qui manifestent une opposition. En fait, ils redoutent surtout d’avoir à répéter leurs troubles ou leurs symptômes, dans la perspective de plusieurs entretiens. Pour bénéficier de la gratuité des soins de ce secteur public, les patients doivent s’adresser au CMP correspondant à leur zone géogr aphique et accepter ce premier entretien préalable. Les patients l’acceptent en général sans trop rechigner car ils ont déjà fait la démarche dans leur tête. En quoi consiste concrètement ce premier entretien ? P.P. : Ce 1er entretien a lieu dans un délai relativement court, au plus tard dans la semaine qui suit. L’accueil infirmier permet ainsi de réduire considérablement le délai d’attente pour un 1er entretien. L’objectif principal est de faire en sorte que le patient puisse exprimer l’étendue et l’intensité de ses difficultés. Nous essayons d’évaluer les ressources personnelles et individuelles du patient face à l’événement traumatique. Certains patients n’ont besoin que d’un soutien temporaire, ce qui n’est pas a priori le cadre réel d’exercice de la psychothérapie. Ces patients, nous continuons à les recevoir pour affiner notre évaluation des difficultés et des troubles avant de les diriger soit vers un psychiatre soit vers un psychothérapeute du centre. Le 1er entretien est un acte de référence, c’est un palier important dans la prise en charge et dans l’accès aux soins, car il détermine l’orientation future du patient. Cette fonction d’accueil infirmier semble se généraliser dans les autres CMP. De par ce 1er entretien préalable, nous avons un rôle d’évaluation diagnostique et d’orientation des patients soit vers un psychiatre, soit vers un psychothérapeute. Cette orientation se fait toujours avec l’accord du patient. Si l’orientation psychothérapeutique est retenue, nous donnons au patient toutes les informations nécessaires sur la psychothérapie. Après le 1er entretien d’orientation, nous essayons malgré tout de maintenir un lien avec le patient, car son devenir est toujours import a n t pour nous. Propos recueillis par François Cohen