Traitement actuel du psoriasis

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LE PSORIASIS : TRAITEMENTS ACTUELS
D. TENNSTEDT
Service de Dermatologie, Cliniques Universitaires Saint-Luc
B-1200 Bruxelles (Belgique)
INTRODUCTION
Le psoriasis est une affection extrêmement fréquente puisqu'en moyenne, il atteint 1 à 2 % de
la population. En Belgique et en France, la prévalence estimée du psoriasis est de l'ordre de
1,6 %.
Il existe cependant de très larges variations de fréquence du psoriasis en fonction des groupes
ethniques ainsi que de la latitude. Par exemple, les esquimaux et les aborigènes australiens
sont totalement indemnes de cette affection. De même, en Afrique, le psoriasis est
relativement rare sur peau noire.
Parmi les patients atteints de psoriasis, 21 % présenteraient des signes radiologiques aux
articulations sacro-iliaques alors que 22 % en présenteraient aux mains (arthrite
interphalangienne). Seuls 7 % auraient des lésions tant aux mains qu'aux articulations sacroiliaques.
- prévalence de ± 0,1 à 0,3 % en Afrique de l'Ouest,
- prévalence de 0,7 % en Afrique de l'Est.
PATHOGENIE
L'anomalie fondamentale retrouvée dans le psoriasis consiste en un accroissement important
du nombre de mitoses des cellules de l'épiderme. Ces mitoses se retrouvent dans les couches
inférieures de l'épiderme.
L'épiderme vivant ainsi que la couche cornée (parakératose) s'épaississent parallèlement. Les
noyaux persistent de manière anormale au sein de la couche cornée et les kératinocytes
perdent rapidement leur desmosomes.
Cette situation explique la desquamation importante à mettre en relation avec l'accélération du
renouvellement épidermique (celui-ci ne dure que 4 jours par rapport aux 28 jours d'une peau
normale).
Toutes ces anomalies sont sous la dépendance de mécanismes biochimiques et
immunologiques extrêmement complexes. Cependant les perturbations initiales majeures
paraissent être d'origine dermique.
ETIOLOGIE ET GENETIQUE
Une transmission multifactorielle semble être l'hypothèse la plus vraisemblable pour le
développement d'un psoriasis. L'origine génétique du psoriasis est démontrée par des études
réalisées sur des jumeaux qui, s'ils sont univitellins, sont pratiquement toujours atteints de
manière simultanée.
Par ailleurs, la fréquence des antécédents familiaux de l'affection s'observe très fréquemment.
En fait, le psoriasis se transmet sur le mode héréditaire autosomique dominant avec
pénétrance variable et paraît être conditionné par plusieurs gènes associés. Le nombre de
gènes codant pour le psoriasis n'est pas totalement connu mais il semblerait que plusieurs
d'entre eux soient localisés sur la 6ème paire chromosomique porteuse des gènes du système
d'histocompatibilité majeur (HLA) : augmentation des antigènes HLA B13 ainsi que B17 sur le
2ème locus, CW6 sur le 3ème locus et DRZ sur le 4ème locus. Il semble également exister une
1
augmentation de la fréquence des antigènes HLA B27 retrouvés essentiellement dans les cas
de psoriasis accompagnant une arthropathie de type pelvispondylite (50 % des cas). Une
augmentation de l'HLA B13 se retrouve spécifiquement dans les psoriasis pustuleux.
FACTEURS DECLENCHANTS
Les infections des voies respiratoires supérieures (angine en particulier) d'origine
streptococcique sont classiquement rapportées comme un des principaux facteurs déclenchant
l'apparition d'un psoriasis en gouttes chez l'enfant. Il est vraisemblable que l'intervention de
superantigènes corresponde au mécanisme pathogénique du déclenchement du psoriasis dans
ce cas de figure.
Certains médicaments peuvent également déclencher, voire aggraver un psoriasis :
β-bloquants, antimalariques de synthèse, sels de lithium, et peut-être les anti-inflammatoires
non stéroïdiens.
Le phénomène de Kœbner s'observe fréquemment : déclenchement de psoriasis suite à un
traumatisme local (brûlure, intervention chirurgicale, tatouage, …).
Une composante psychologique est également classiquement rapportée par les patients et il
est très difficile d'apprécier si cet élément psychologique est cause ou conséquence de
l'affection psoriasique.
En pratique courante, il n'est pas exceptionnel que les patients décrivent un événement
psychologique important comme facteur de déclenchement d'une poussée de psoriasis.
Il est évident que les conséquences psycho-affectives de cette affection sont importantes et
peuvent entraîner un état de stress, voire de véritable névrose, étant donné l'aspect
inesthétique important lié au psoriasis lui-même.
CLINIQUE : LESIONS CLASSIQUES DU PSORIASIS
La lésion élémentaire du psoriasis est caractéristique : tache arrondie érythématosquameuse
d'allure nacrée avec présence occasionnelle de pustules.
Les lésions sont en général non prurigineuses (à l'exception du cuir chevelu), en nombre
variable et de taille très diverse. Elles sont situées essentiellement aux coudes, aux genoux, à
la région prétibiale, au sacrum ainsi qu'au cuir chevelu.
Parfois, les placards sont disséminés sur l'ensemble du tégument, soit en petits éléments
(psoriasis en gouttes), soit de manière diffuse (psoriasis érythrodermique). L'évolution est
souvent imprévisible mais classiquement entrecoupée de poussées et de rémissions plus ou
moins totales (fig.1,2).
Fig.1 : Psoriasis : lésions classiques
Fig.2 : Psoriasis : lésions classiques
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HISTOPATHOLOGIE
La plupart du temps, le diagnostic clinique de psoriasis est facile, et la biopsie n'est que
rarement indispensable. Cependant, dans certaines formes atypiques, l'examen
anatomopathologique peut rendre de grands services.
Pour les paumes et les plantes, la biopsie devrait être réalisée en bordure des lésions.
L'épiderme est épaissi. La parakératose est la règle au niveau de la couche cornée. La
couche granuleuse est réduite, voire absente. L'acanthose épidermique est souvent majeure
avec crêtes épidermiques en battant de cloche à leurs extrémités inférieures. Il existe des
abcès contenant des polynucléaires dans les couches sous-cornées (abcès de MunroSabouraud). L'activité mitotique est importante, surtout au sein des couches basales et
suprabasales. Le derme superficiel est œdématié. Les capillaires sont dilatés et de nombreux
polynucléaires en exocytose sont visualisés dans la zone suprapapillaire. Le diagnostic
histopathologique de psoriasis palmo-plantaire n'est pas aisé. Il est conseillé de procéder à la
biopsie à la jonction entre le dos de la main et la paume ou le dos du pied et la plante.
En cas de psoriasis pustuleux, l'aspect histologique est celui de pustules spongiformes
multiloculaires.
FORMES PARTICULIERES
Le psoriasis des plis ou psoriasis inversé : il atteint essentiellement l'ombilic, les aisselles, la
région inguinale ou les plis sous-mammaires. Les lésions sont la plupart du temps
essentiellement érythémateuses et très peu squameuses.
Le psoriasis du cuir chevelu : il est extrêmement fréquent et n'atteint parfois que cette région. Il
est souvent très épais et déborde classiquement la lisière du cuir chevelu (fig.3).
Fig.3 : Psoriasis du cuir chevelu
Le psoriasis palmo-plantaire : il est caractéristique et associe des placards arrondis, bien
localisés, recouverts de squames jaune-brun, sèches. L'hyperkératose est souvent importante.
Le diagnostic différentiel doit se faire avec une dermatite hyperkératosique palmaire, certains
eczémas de contact ou encore une mycose.
Il faut reconnaître que la clinique du psoriasis des mains ou des pieds est souvent
d'interprétation délicate, et nécessite la plupart du temps des examens complémentaires afin
d'exclure une eczématisation de contact, soit primaire, soit surajoutée.
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L'examen attentif des ongles est primordial (voir ci-après) (fig.4, 5, 6).
Fig.4 : Psoriasis du dos de la main
Fig.5 : Psoriasis palmaire
Fig.6 : Psoriasis palmaire
Le psoriasis des muqueuses et du gland en particulier est caractéristique par la présence de
placards érythémateux ± fixes (fig.7) qui ne sont pas squameux (sauf chez les circoncis). Une
biopsie est souvent utile.
Fig.7 : Psoriasis du gland
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FORMES GRAVES DU PSORIASIS
L'érythrodermie psoriasique correspond à un érythème squameux généralisé à l'ensemble du
tégument. Il existe fréquemment des arthropathies, une atteinte unguéale, ainsi qu'une
alopécie. Un prélèvement biopsique est souvent indispensable.
Le psoriasis pustuleux est caractérisé par la présence de pustules amicrobiennes, soit isolées,
soit regroupées au sein d'une nappe érythémateuse. Le psoriasis pustuleux peut être
généralisé et souvent fébrile, pouvant mettre en jeu le pronostic vital. Cette forme est souvent
favorisée par une corticothérapie par voie générale.
Le psoriasis pustuleux localisé
(essentiellement aux extrémités) atteint essentiellement les paumes et/ou les plantes. Il s'agit
d'une affection très invalidante, la plupart du temps douloureuse et difficile d'un point de vue
thérapeutique (fig.8, 9).
Fig.8 : Psoriasis pustuleux palmaire
Fig.9 : Psoriasis pustuleux plantaire
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Ongles et psoriasis (fig.10)
Fig.10 : Psoriasis unguéal et du périonyx
Siège de l'atteinte
Partie proximale de la matrice
Clinique
- Dépressions ponctuées isolées, souvent
irrégulières, diffuses ou ordonnées en "files
indiennes", longitudinales (fig.11)
Fig.11 : Psoriasis unguéal : dépressions ponctuées
Partie distale de la matrice
- Leuconychie à surface lisse
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Siège de l'atteinte
Matrice dans sa totalité
Clinique
-
Criblures importantes
Sillons transversaux
Leuconychie à surface rugueuse
Rugosité de l'ongle (trachyonychie)
Effritement ± important de la tablette
Onychomadèse proximale (fig.12)
Fig.12 : Psoriasis unguéal : onychomadèse proximale
Lit de l'ongle
- Taches ovalaires rougeâtres : salmon patch
(fig.13)
Fig.13 : Psoriasis unguéal : tache ovalaire rougeâtre :
salmon patch
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Siège de l'atteinte
Lit de l'ongle et hyponychium
Clinique
- Onycholyse distale blanc-jaunâtre, parfois
cernée d'une bordure érythémateuse
inflammatoire proximale ("tache d'huile")
(fig.14)
Fig.14 : Psoriasis unguéal : onycholyse
et dépressions ponctuées
- Hyperkératose sous-unguéale
TRAITEMENT
Le but est de faire disparaître les lésions existantes (ce qui est généralement aisé) mais surtout
d'éviter les rechutes (ce qui est nettement plus problématique). L'observance thérapeutique sur
une peau redevenue "apparemment" normale est difficile à obtenir.
Les traitements locaux et généraux dont nous disposons actuellement sont les suivants :
TRAITEMENTS LOCAUX
Ils seront réservés aux psoriasis localisés et discrets. Néanmoins, le blanchiment obtenu est
rarement complet et le traitement d'entretien, indispensable au maintien du résultat est difficile
et ennuyeux pour le patient. Idéalement, ce traitement doit être agréable, hydratant, applicable
sur toute la surface corporelle et bon marché.
Les excipients
Avant un traitement local, il semble utile de décaper les lésions.
Par contre, on ne pourra jamais insister assez sur l'importance de l'hydratation cutanée. Ainsi,
un bon excipient seul, grâce à son effet émollient, pourra obtenir jusqu'à 60 % d'amélioration du
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PASI. Il peut freiner de moitié le renouvellement épidermique et jouer ainsi un rôle important
dans le traitement d'entretien du psoriasis.
En conclusion, l'excipient n'est pas une substance neutre et la recherche en ce domaine devrait
le confirmer ultérieurement.
Les goudrons
On ne les utilise pratiquement plus et on y associe souvent 1 % d'acide salicylique.
Il faut définitivement oublier ceux qui sont salissants.
Le seul utile est le dioxyanthranol. Il est particulièrement intéressant chez les enfants.
Exemple :
R/ Dioxyanthranol 10 à 40 mg
Acide salicylique 1 g
Cold cream ad 100 g
Cette préparation est à appliquer sur toutes les lésions à l'exception des plis et du visage,
durant 3 heures à toute une nuit.
Les dérivés de la vitamine D : calcipotriol (Daivonex®), calcitriol (Silkis®), tacalcitol
(Curatoderm®)
Ce traitement local peu toxique mériterait d'être essayé en premier lieu.
Il satisfait jusqu'à 30 % des patients.
Le calcipotriol est commercialisé sous la forme de pommade, de crème et de lotion,; cette
dernière forme est particulièrement adaptée au traitement du cuir chevelu.
Le calcitriol existe sous la forme de pommade, le tacalcitol sous la forme de pommade et de
lotion.
L'association d'un dérivé de la vitamine D avec une corticothérapie locale est intéressante. Il
est classique de recommander l'association suivante : 5 jours dérivé de la vitamine D / 2 jours
corticoïdes locaux en veillant à commencer par ceux-ci pour leur effet anti-inflammatoire.
L'association calcitriol – betaméthasone dipropionate (Dovobet®) est particulièrement efficace
(sous forme de pommade)
Chez l'enfant, ils peuvent être utilisés à partir de 6 ans.
Le dérivé des retinoïdes : tazarotène (Zorac®)
Il est peu employé car relativement irritant et donc difficile d'emploi (sauf en cas
d'hyperkératose franche). Il est formellement contre-indiqué en cas de grossesse.
Les corticoïdes locaux
Comme pour la corticothérapie générale, il ne faut jamais interrompre brutalement l'application
des corticoïdes locaux : on risque d'induire une récidive par effet rebond.
Au départ, on conseillera l'application quotidienne d'un corticoïde de classe I (Dermovate®,
Diprolène®, Diprosone®, Nerisona® forte) sous forme de pommade jusqu'à disparition des
lésions et ensuite un espacement progressif des applications sur une période de un an.
Les effets secondaires (surtout locaux) doivent être bien connus afin d'être dépistés à temps. Il
ne faut pas oublier que la résorption des corticostéroïdes est particulièrement importante au
visage ainsi qu'aux plis cutanés et sous pansement occlusif. En outre, un phénomène de
tachyphylaxie peut s'observer.
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Stratégie de traitement du psoriasis isolé du cuir chevelu :
en premier lieu, on essaiera le calcipotriol lotion;
en cas d'échec, on suivra le schéma suivant : application d'un corticoïde
de classe I 1 x/nuit durant un mois, puis 1 nuit/2 durant 2 mois, puis 2
nuits/semaine durant 3 mois, ensuite 1 nuit/semaine durant un an. En
outre, il faut recommander l'application quotidienne de quelques gouttes de
corticoïde classe II en lotion, matin et à vie.
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TRAITEMENTS GENERAUX
Quant les proposer ?
1. Altération sévère de la qualité de vie.
2. Trop de lésions pour un traitement local.
3. Echec des traitements locaux.
4. Traitement local trop ennuyeux, inefficace ou impossible à réaliser.
5. Surveillance clinique et biologique bien négociée avec le patient.
La PUVAthérapie
On prescrit le 8-méthoxypsoralène ou méthoxsalène (Mopsoralen®) à la dose de 0,5
mg/kg/jour. On donne le nombre de comprimés de la dose juste inférieure. On recommande 3
séances/semaine durant 2 mois, puis 1 séance/semaine durant 1 à 2 mois.
Règles pratiques à rappeler :
augmenter les doses UV aussi vite que possible à la limite de l'érythème.
ne jamais faire de traitement d'entretien.
ne jamais dépasser une cure annuelle (voire exceptionnellement deux)vu la
toxicité cumulative des UVA.
ne pas oublier qu'au-delà de 2000 J/cm2, le risque de carcinome spinocellulaire
est multiplié par 30.
Les contre-indications à instaurer la PUVAthérapie sont notamment :
patients ayant présenté d'un cancer de peau préalable.
patients dont le psoriasis est aggravé par le soleil.
patients de moins de 10 ans.
L'arrêt de la PUVAthérapie se justifie quand :
la dose cumulative est de 2000 J/cm2 pour un phototype 3 et de 1000 J/Cm2 pour
un phototype 2.
des lentigines apparaissent.
à l'apparition d'un cancer cutané.
Profil idéal du patient pour la PUVAthérapie :
> 50 ans.
phototype 3 ou +.
pas de lentigines ni d'éphélides.
pas de traitement génotoxique préalable.
pas de cancer de peau préalable.
amélioré par le soleil.
patient pouvant se libérer 3 x/semaine et se rendre dans un centre PUVA.
L'acitrétine (Neotigason®)
3 remarques préalables :
l'acitrétine peut être toxique pour les zones kératinisées et pour les os. Il faut
donc être prudent chez les enfants. Par contre, il est bien toléré en ce qui
concerne les muqueuses et semi-muqueuses.
on recommande d'instaurer de très faibles doses de départ car des aggravations
par effet Koebner ne sont pas rares. On commence idéalement par 10 mg/jour
et au augmente très progressivement jusqu'à la dose optimale.
il faut de la patience car l'amélioration peut être tardive et ce traitement doit être
prévu pour un long cours (parfois plusieurs années).
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La tolérance est en général excellente.
La surveillance du bilan lipidique est indiquée mais l'élévation des triglycérides peut être
corrigée par un régime alimentaire associé à une diminution de la dose d'acitrétine.
En cas de douleur du dos, il faut réaliser une radiographie, et la présence importante
d'ostéophytes peut nécessiter l'arrêt du traitement.
La découverte fortuite de calcifications ligamentaires ne nécessite pas l'arrêt du traitement en
l'absence de symptômes subjectifs. Par contre, on arrêtera l'acitrétine si des douleurs sont
rapportées.
En fait, la seule contre-indication absolue est liée à la tératogénicité et on exclut d'emblée
toutes les femmes en âge de procréation.
Devant un psoriasis pustuleux récalcitrant chez une jeune femme, on pourrait envisager un
traitement par isotrétinoïne (Roaccutane®)
Profil idéal du patient pour acitrétine :
sexe masculin.
jeune.
mince.
sans anomalie lipidique et/ou hépatique.
Le méthotrexate (Ledertrexate®)
C'est probablement le meilleur traitement anti-psoriasis dont nous disposons. Il est commode,
connu depuis plus de 30 ans et bon marché.
Sa tolérance est excellente si au départ :
il n'y a pas de macrocytose.
la fonction hépatique est normale.
la fonction rénale est normale.
le patient ne consomme pas (trop) de boissons alcoolisées.
On le prescrit per os : en général une prise unique hebdomadaire à la dose de 10 à 20 mg
suivant le poids et la tolérance.
La tolérance digestive surtout, est fortement augmentée par la prise quotidienne de 5 mg
d'acide folique chaque jour à l'exception du jour du traitement. La dose hebdomadaire
recommandée est de 20 mg/semaine.
La surveillance biologique est simple et bien connue : le premier mois on surveille NFS et
plaquettes chaque semaine, puis le mois suivant tous les 14 jours, puis les mois suivants 1
x/mois. On contrôle aussi les transaminases hépatiques tous les mois.
Le mécanisme d'action du méthotrexate est multiple :
Effet antiprolifératif au niveau cellulaire surtout sur les lymphocytes (sur les
kératinocytes dans une moindre mesure).
Effet anti-inflammatoire par inhibition du chimiotactisme des polynucléaires
neutrophiles et par diminution de l'activité pro-inflammatoire de l'IL1.
Effet immunosuppresseur sans affecter le nombre des lymphocytes B et T.
On constate une diminution de la densité des cellules de Langerhans dans
l'épiderme.
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Toxicité – Intoxication accidentelle – Effets secondaires du méthotrexate :
Effets secondaires réversibles – doses dépendants :
30 % : nausées – stomatite → R/ acide folique
15 % : problème hématologique
5 % : alopécie
Intoxication sévère par surdosage :
Stomatite – exanthème bulleux – pancytopénie parfois mortelle →
hospitalisation d'urgence → R/ folinate de Ca++ en IV
Effets secondaires rares :
Prurit
Ulcération cutanée
Réactions phototoxiques (! PUVA)
Néoplasies :
. rares lymphomes B (EBV +)
N.B. : rémission possible à l'arrêt du traitement . cancers
cutanés (! PUVA)
Infections opportunistes (herpès, histoplasmose, …)
Elles ne sont décrites qu'en cas d'association à la corticothérapie
générale.
Pneumopathies :
. fibrosantes : traitement au long cours
. interstitielles fébriles, immunoallergiques et gravissimes
décrites seulement dans le traitement de la P.R. (le poumon
psoriasique n'est pas le poumon rhumatoïde).
DD : pneumonie à germes opportunistes.
En cas de fragilité pulmonaire, il convient de réaliser une
radiographie thoracique annuelle.
Effets sur la reproduction :
Chez l'homme, on constate une diminution de la fertilité, de l'oligospermie
avec des anomalies chromosomiques. Il faut donc attendre un cycle
complet de spermatogenèse, soit 3 mois.
Chez la femme, le méthotrexate pourrait être tératogène. On décrit de
l'hypotrophie fœtale. Il faut donc recommander une contraception stricte.
Si une grossesse est souhaitée, il suffit d'attendre 1cycle.
La toxicité hépatique est le seul inconvénient réel du traitement.
On décrit des cytolyses aiguës, précoces et réversibles. Elles sont
prévisibles par l'élévation des transaminases. Par contre, la fibrose qui
peut évoluer en cirrhose est tardive, rare mais possible et difficilement
prévisible. Elle concernerait 7-8 % des psoriasiques. Cette toxicité
hépatique est plus souvent décrite chez les patients psoriasiques que chez
les patients souffrant de PCE. Elle dépend de la dose cumulative et du
terrain (! Obésité – diabète – éthylisme et !!!! héroïnomanes + alcool). On
n'envisagera une biopsie hépatique (examen de référence) qu'après une
dose cumulative > 2-3 g chez les sujets sans risque particulier car cet
examen n'est pas dénué de tout danger !
Médications ou signes biologiques augmentant la toxicité du MTX
Hypoalbuminémie : !! sujets âgés et dénutris.
Médicaments déplaçant le MTX de ses protéines plasmatiques :
phénylbutazone, AAS, chloramphénicol, sulfamidés, barbituriques,
phénytoïne.
Médicaments diminuant l'élimination rénale du MTX : AAS, AINS,
sulfamidés, probénécid, agents néphrotoxiques.
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Médicaments modifiant le métabolisme des folates : sulfamidés, sulfones,
phénytoïne, dipyridamole.
En conclusion, on ne peut associer au MTX la prise de :
Acide acétylsalicylique
Phénylbutazone
Sulfamidés
Sulfones
Barbituriques
Hydantoïnes
Médicaments néphrotoxiques comme la ciclosporine
Les contre-indications absolues du MTX sont :
les pathologies hépatiques (virales ou autres)
la consommation d'alcool > 100 g/jour
procréation – grossesse – allaitement
infection sévère
cytopénie
En cas d'insuffisance rénale, il faudra ajuster les doses.
Les indications parfaites sont :
le rhumatisme psoriasique
le psoriasis sévère érythrodermique
le psoriasis pustuleux
Profil idéal du patient pour méthotrexate :
bonne santé
ne désirant pas procréer
ne consommant pas de boissons alcoolisées.
La ciclosporine (Neoral®)
Avant d'instaurer ce traitement, il faut prendre la tension artérielle du patient, réaliser un bilan
biologique et demander 1 à 2 mesure(s) de la créatininémie.
Si ces examens permettent le traitement, on débutera avec des doses faibles de 2 à 2,5
mg/kg/jour en association avec un traitement local.
On peut augmenter la dose
progressivement selon la tolérance en ayant soin de ne jamais dépasser 5 mg/kg/jour.
Surveillance du patient psoriasique sous ciclosporine :
Il faut mesurer tous les mois : la créatininémie, la tension artérielle et éventuellement les
lipides sanguins.
On constate souvent une élévation des triglycérides au début du traitement.
Il est inutile de doser la ciclosporinémie sauf en cas d'inefficacité thérapeutique.
La femme doit se soumettre à un examen gynécologique chaque année car le risque de
cancer du col (HPV ⊕) est accru.
Il faut recommander à ces patients une bonne hygiène bucco-dentaire en prévention de la
gingivite (hypertrophie gingivale → R/ métronidazole).
Une exploration de la fonction rénale est nécessaire au cas où le traitement dépasse une
année et sera répété chaque année. Il comprend la clearance de la créatinine qui
mesure la filtration rénale et le flux sanguin rénal qui évalue la perfusion des reins.
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Effets secondaires de la ciclosporine
Ils seront d'autant plus fréquents :
si le patient est âgé
si le patient est gros
si la TA diastolique de départ est élevée (8 ou +)
si le traitement se prolonge
Le risque carcinogène n'est pas augmenté de façon patente en cas de traitement par
ciclosporine pour du psoriasis. Il est lié chez les transplantés au degré d'immunosuppression et
est retardé (> 5 ans).
Les cancers induits sont :
- cancers cutanés
- sarcome de Kaposi
- lymphomes
- cancer du col utérin
Le risque global de développer un cancer est faiblement augmenté mais la croissance de la
tumeur serait accélérée et la répartition des cancers est modifiée (surtout lymphomes).
L'hypertension artérielle est une complication fréquente et n'est pas toujours réversible. Dans
20 % des cas, cette complication nécessite l'arrêt du traitement. Elle est statistiquement liée à
la néphropathie.
Il existe 2 formes :
- HTA précoce avant 9 mois de traitement : révélée par la ciclosporine
- HTA tardive après 36 mois induite par la ciclosporine et liée à la toxicité rénale.
La néphrotoxicité est possible. Chez 43 % des patients, on observe une élévation de la
créatininémie supérieure à 30 % de la valeur basale.
Dans un premier temps, on baissera la dose de 25 % mais si le taux de créatinine ne bouge
pas, il faudra renoncer à ce traitement.
En principe, il paraît judicieux de ne pas dépasser 2 ans de traitement.
Le médecin doit toujours penser aux interactions médicamenteuses :
Augmentent la ciclosporinémie :
- oestrogènes et androgènes
- cimétidine
- macrolides
- diltiazem
- kétoconazole
Néphrotoxicité additive :
- AINS
- aminosides
- diurétiques d'épargne potassique
- inhibiteurs de l'enzyme de conversion ?
Autres toxicités potentielles → ne pas associer :
- PUVAthérapie
- immunosuppresseurs
- simvastatine qui induit une myolyse
Pour diminuer la toxicité du traitement, on pourrait envisager des traitements par intermittence :
- 3 mois/ an
- 5 mg/kg – 2 jours/semaine
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Les indications de la ciclosporine doivent être bien connues. On réserve ce traitement à des
psoriasis sévères après échec, intolérance ou contre-indication des traitements précédents. La
sévérité du psoriasis est difficile à établir selon des critères objectivables. Ainsi, on considère
qu'un traitement par ciclosporine ne peut être prescrit que pour des lésions envahissant 40 %
de la surface corporelle. Ceci paraît un critère trop strict lorsqu'on sait que la paume d'une
main représente seulement 1 %.
Les contre-indications de la ciclosporine sont importantes à ne pas oublier
Relatives : grossesse, grands fumeurs (!! Risque cancer poumon accru)
Absolues : infections, HTA, insuffisance rénale
Profil idéal du patient pour ciclosporine :
jeune
mince
peut être une femme (grossesse possible)
lipothymique ou hypotendu
Les inhibiteurs du TNFα
Les nouveaux traitements sont basés sur des anticorps monoclonaux ('-mab), des protéines de
fusion ('-cept), et des cytokines recombinantes. Les '-zumab correspondent à des anticorps
humanisés, au contraire des "-ximab, qui sont des anticorps chimériques. Ceux-ci sont
d'origine partiellement animale et ont gardé plus de 5 % de l'ADN allogène, ce qui induit un
risque accru d'auto-antigénicité. Le but général de ces substances est de diminuer le nombre
de cellules T pathologiques. Ils y parviennent de différentes façons : en diminuant la
prolifération des cellules T, en induisant leur apoptose, en bloquant les interactions cellulaires,
en inactivant des cytokines déjà produites, …
En pratique, ces traitements se distinguent par une différence dans la rapidité et la durée
d'action, mais ils se distinguent aussi par les risques qu'ils occasionnent et par leur mode
d'administration. De même, alors que l'arthrite psoriasisque et le psoriasis cutané partagent de
nombreuses caractéristiques immunologique, il faut les différencier dans l'évaluation des
traitements systémiques.
Leur usage est réservé aux dermatologues habitués à les
"manipuler".
Action anti-TNFα
Protéine de fusion
Infliximab (Rémicade®),
Adalimumab (Humira®)
Etanercept (Enbrel®)
IV 2h
S O-2-6
SC 2x/mois
SC 2x/semaine
L'infliximab donne la réponse la plus rapide et peut-être la plus durable, mais il peut causer des
infections, des réactions locales, une démyélinisation, un risque de choc anaphylactique, … en
outre, il nécessite une injection étalée sur deux heures. L'étanercept est rapide, sûr (enfants >
5 ans); il peut être associé au méthotrexate et ne nécessite pas de suivi particulier. Il
occasionne aussi des réactions locales sur le site d'injection et nécessite certaines précautions.
L'adalimumab n'a pas encore le "feu vert" en Belgique.
La question du risque infectieux est importante. Plusieurs de ces médicaments sont de nature
à augmenter le risque d'infection, éventuellement sévère, mais le niveau d'augmentation du
risque n'est pas connu avec précision. Il n'y aurait pas d'accroissement du risque avec le
temps. Le risque de réactivation d'une tuberculose latente ne serait pas négligeable.
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