De l’information génétique aux phénotypes Les échelles de définition du phénotype Objectif Le phénotype définit l'ensemble des caractères apparents d'un individu. Certains caractères sont directement observables, tandis que d'autres sont présents au niveau des cellules et des molécules. Quelles sont les différentes échelles du phénotype ? 1. Au niveau de l'organisme Ce sont les caractères morphologiques de l'individu : la couleur de la peau, des yeux et des cheveux, la taille, la forme du nez, etc. Chez certains individus malades ou atteints d'une maladie génétique (comme la drépanocytose, par exemple), rien ne permet sur le plan morphologique de distinguer un individu malade d'un individu sain. Cependant, l'individu atteint présente des symptômes liés à sa maladie qui définissent son phénotype. 2. Au niveau cellulaire L'exemple classique est le cas de la drépanocytose, ou anémie à hématies falciformes. Elle se traduit par une anémie chronique et des douleurs articulaires. Observées en microscopie électronique, des hématies (globules rouges) humaines normales ont la forme de disques biconcaves. En revanche, chez les sujets atteints de drépanocytose, elles prennent une forme de faucille, entravant ainsi la circulation dans les capillaires sanguins. Il s'agit ici d'un deuxième niveau de définition du phénotype. 3. Au niveau moléculaire Des analyses variées rendent accessibles les caractères physiologiques et biochimiques d'un individu. Elles s'intéressent aux groupes sanguins, aux marqueurs du soi, à la présence ou non de telle enzyme... On cherche à expliquer un caractère du phénotype en étudiant différentes molécules de l'organisme, essentiellement des protéines. Chez les albinos, par exemple, leur aspect est dû à l'absence d'un pigment, la mélanine. Dans le cas de certaines maladies et d'affections génétiques, l'analyse au niveau moléculaire permet de mieux comprendre l'origine de la maladie et d'expliquer les effets observés. L'essentiel Le phénotype se définit à différentes échelles : morphologique, cellulaire et moléculaire. Relations ADN – Protéines Il existe une relation étroite entre phénotype et protéines. En effet, la réalisation du phénotype nécessite de nombreux processus biochimiques où les protéines sont directement impliquées : elles ont un rôle biologique fondamental. L'information nécessaire à la synthèse d'une protéine est portée par l'ADN : comment se fait la synthèse des protéines ? Ce sont des macromolécules, de haut poids moléculaire. Elles sont appelées polymères d'acides aminés, car elles sont composées d'une multitude de ces éléments de base. Le nombre d'acides aminés varie d'une protéine à l'autre (de quelques dizaines à plusieurs centaines). 2. Protéines et ADN L'ADN est le support de l'information génétique. Cette information est constituée d'un grand nombre de gènes à l'origine de caractéristiques cellulaires précises. Un gène est porteur d'une information génétique codée par une succession de nucléotides. Cet enchaînement précis code pour la nature et l'ordre des acides aminés de chaque protéine. La séquence des acides aminés est déterminée par l'ordre des nucléotides dans le gène correspondant. Vingt acides aminés différents composent les protéines. Les protéines sont très diverses. La moindre modification de la séquence peptidique d'une protéine peut avoir des conséquences importantes au niveau du phénotype. Diversité protéique et variabilité des phénotypes sont liées. 3. Gène et allèles Chaque gène existe sous différentes versions : les allèles. Au sein d'une population, le nombre d'allèles par gènes est très variable. Les modifications de la séquence de nucléotides du gène ou mutations sont à l'origine des allèles. Ils ne diffèrent les uns des autres que par des détails de leur séquence en nucléotides. Les différents allèles d'un gène sont à l'origine de séquences peptidiques différentes, qui peuvent affecter la fonction de la protéine. Cas de l'albinisme Cette affection héréditaire se caractérise par une absence de pigmentation (de la peau, des poils, des yeux) due à l'absence de synthèse de mélanine. La synthèse de ce pigment se fait à partir d'un précurseur : la tyrosine. Cet acide aminé est normalement présent chez les sujets albinos, mais l'enzyme nécessaire à la transformation de ce précurseur est absente ou non fonctionnelle. C'est donc une protéine, plus particulièrement une enzyme, qui contrôle un aspect du phénotype, la pigmentation. Cas de la mucoviscidose C'est une maladie génétique grave qui se traduit par des troubles digestifs et respiratoires, dus à une protéine membranaire qui ne remplit pas correctement son rôle (problèmes d'échanges avec le milieu extérieur). Le gène responsable de cette maladie a été identifié : il a subi une mutation qui provoque l'absence d'un acide aminé au niveau de la protéine. Il existe deux allèles d'un même gène, l'un normal, l'autre anormal, à l'origine de la maladie. L'essentiel L'information nécessaire à la synthèse des protéines est conservée par les gènes localisés dans les chromosomes des cellules. Elle est codée et toute modification pourra affecter la séquence polypeptidique ainsi que la fonction des protéines. Il existe donc une véritable relation entre protéines et phénotype. Exemple : la drépanocytose Objectif La drépanocytose est une maladie de l'hémoglobine. Elle touche des millions de personnes dans le monde, notamment en Afrique équatoriale, ainsi que dans les populations noires aux Etats-Unis et quelques milliers de personnes en France. 1. L'hémoglobine (Hb) C'est une protéine formée de quatre chaînes polypeptidiques identiques deux à deux : deux chaînes alpha et deux chaînes bêta. Cette protéine est chargée du transport du dioxygène dans le sang. Elle se combine de façon réversible au dioxygène selon l'équation suivante : Hb + O2 ⇔ HbO2 HbO2 est nommée oxyhémoglobine. 2. Gènes codant pour l'hémoglobine Ces deux paires de chaînes polypeptidiques ont pour origine deux gènes : un gène codant pour la chaîne alpha et un gène codant pour la chaîne béta. Plusieurs centaines d'allèles du gène codant pour la chaîne ß sont actuellement connus, certains très répandus et d'autres très rares. L'allèle considéré comme normal est le plus répandu dans la population. L'allèle à l'origine de la drépanocytose est actuellement connu et identifié. Sa séquence de nucléotides ne diffère de celle de l'allèle normal que par un nucléotide : le gène codant pour la chaîne ß a donc subi une mutation ponctuelle par substitution. La chaîne ß anormale possède simplement un acide aminé différent de celui de la chaîne normale, qui affecte la fonction de l'hémoglobine : l'acide glutamique est remplacé par de la valine chez les personnes atteintes. L'hémoglobine normale est appelée HbA, la forme anormale est appelée HbS. Quelles sont alors les conséquences ? 3. Phénotype à l'échelle de l'organisme et de la cellule • Phénotype à l'échelle de l'organisme : les signes morphologiques. Un individu atteint de drépanocytose est, sur le plan morphologique, identique à un individu sain. Les seules manifestations sont une grave anémie due à un taux d'hémoglobine trop bas et des crises douloureuses au niveau ddes articulations. C'est une maladie mortelle qui touche aussi bien les enfants que les adultes. • Aspect des globules rouges : les signes cellulaires. Les hématies d'un sujet atteint de drépanocytose ont une forme de faucille (hématies falciformes). Ces globules rouges sont beaucoup plus raides et plus fragiles que les globules rouges normaux : ils se cassent facilement dans les vaisseaux sanguins, l'hémoglobine est alors libérée et éliminée, créant ainsi l'anémie. De plus, ces hématies circulent difficilement dans les capillaires sanguins, car elles sont moins souples et moins déformables. Les capillaires sont des vaisseaux d'un diamètre minuscule, par conséquent les hématies falciformes se bloquent dans les capillaires et entravent la circulation, provoquant les crises douloureuses au niveau des articulations. La déformation des hématies est liée à la présence de HbS : les molécules de HbS tendent à s'unir entre elles (elles se polymérisent) pour donner de longues fibres qui déforment les globules rouges. L'essentiel La drépanocytose illustre parfaitement la relation protéine-phénotype. Cette maladie provoque en effet des signes cliniques tant au niveau de l'organisme, que de la cellule et de la molécule. À l'origine, un gène muté provoque la transformation de la protéine responsable du transport du sang, l'hémoglobine. Celle-ci, en se déformant, fait perdre ses qualités aux hématies, les cellules du sang. Moins mobiles, elles n'assurent plus normalement le transport du dioxygène dans l'organisme, ou se cassent. Anémie et douleurs articulaires sont les signes visibles de la maladie. La transgénèse Objectifs La molécule d'ADN est une molécule universelle tant du point de vue de sa structure que de sa fonction. Le code génétique qui permet de décoder l'information portée par la molécule d'ADN est lui aussi universel. Aussi, un organisme qui a reçu un gène provenant d'une autre espèce est capable de produire une protéine qui lui est totalement étrangère. Quelles sont les applications biotechnologiques possibles de l'universalité de la molécule d'ADN et du code génétique ? 1. La modification du génotype par transgénèse La transgénèse consiste en l'introduction d'un gène étranger provenant d'une espèce donneuse dans le matériel génétique d'une autre espèce dite receveuse. L'organisme obtenu est un organisme transgénique. Le gène transféré est appelé transgène ou encore gène d'intérêt. Doc. 1. Principe de la transgénèse. Une fois introduit dans le génome de l'espèce receveuse, le transgène s'exprime, ce qui conduit à la production d'une nouvelle protéine par l'organisme transgénique. Il permet l'acquisition par l'espèce receveuse d'un nouveau caractère. 2. Exemples de transgénèse a. Dans une bactérie Ici, une protéine humaine, l'interleukine, va être sécrétée par des bactéries : Doc. 2. Transgénèse bactérienne. b. Dans une cellule végétale Dans notre exemple, il s'agit de plants de maïs génétiquement modifiés, qui vont produire une substance d'origine bactérienne. Cette substance est toxique pour la pyrale, un insecte ravageur des cultures de maïs. Doc. 3. Transgénèse végétale directe. c. Dans une cellule animale Doc. 4. Transgénèse animale. L'essentiel L'universalité de la molécule d'ADN et du code génétique sont à la base d'applications biotechnologiques importantes telles que la transgénèse. Cette technique conduit à la modification du génotype d'une espèce et à l'acquisition par cette espèce de la capacité de produire une protéine étrangère.