Naissance d`un islam français

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Naissance d’un islam français
Par Jacques Douyau
Un événement, dont l’importance a, sans doute, échappé à l’opinion publique,
parce que la presse n’en a pratiquement pas fait état, vient de se passer en
France. À l’initiative de la mosquée de Paris, quatre cents associations, ainsi que
des personnalités musulmanes venues d’Algérie, du Sénégal, de Mauritanie, de
Turquie, de Tunisie et autres lieux – et, parmi elles, M. Roger Garaudy, présenté
par les organisateurs comme « le plus grand penseur de France » – se sont
rassemblés à Lyon. Ils venaient y parler de l’islam en France, de la nécessité du
rassemblement de la communauté musulmane, et des actions à mener pour « la
reconnaissance de ses aspirations culturelles et religieuses ».
Que cet événement soit important, il faut être aveugle et sourd pour ne pas le
comprendre. Il est, entre mille autres, un des signes de ce que sera, dans la
prochaine décennie, un des plus grands bouleversements historiques qu’aura
connu notre pays : la naissance d’un islam français. Le journal Libération a
parfaitement vu et résumé les données du problème : la grande provocation faite
à la société française est de changer son modèle d’intégration des communautés
d’origine étrangère qui se sont, jusque-là, sédimentées autour du socle gallican,
par pure et simple assimilation. Cette communauté franco-arabe retrouve,
massivement, son « identité » religieuse (islamique). La question est, donc, celle
de « l’intervention de l’islam français » et de la structuration de la communauté
musulmane française.
Tout se joue, donc, sur la capacité d’assimilation et d’intégration de la société
française et dans la volonté d’être assimilés des immigrants arabo-musulmans. La
machine à assimiler française avait, jusqu’à ce jour, parfaitement fonctionné,
intégrant, au début du siècle, la vague des immigrants de l’Europe centrale, puis la
vague italienne et polonaise. Tous ces immigrants, de souche et de culture
européenne, ressentaient comme un honneur et un privilège de devenir français.
La dernière vague d’immigration, massivement maghrébine, elle, ne rêve plus
d’assimilation, bien au contraire! Elle proclame violemment sa différence et
réclame son «identité» arabe et musulmane.
Pour nombre d’hommes politiques et d’intellectuels, il s’agit donc, pour la France,
de recevoir une communauté porteuse d’une culture et d’une identité « autres »,
et irréductibles, et d’accepter de devenir, à la fois, pluri-ethnique et bi-culturelle.
C’est ce que dit M. Chevènement : La France du XXIème siècle, que vous le
vouliez ou non, aura une composante islamo-méditerranéenne. C’est un fait et
un bienfait. La logique de cette non-assimilation de la communauté arabo-
musulmane – de plus en plus nombreuse, dans une France de plus en plus
vieillissante – exige que ce soit la France qui se modifie et qui renonce à son
identité d’origine. Et cette «modification» doit commencer à l’école. C’est là que
se prépare la mutation historique d’où naîtra une France islamo-chrétienne et
arabo-franque. C’est à l’école que les nouveaux petits Français se fondront dans le
moule de la double culture nationale. C’est ce que propose le rapport demandé
par le ministre de l’Éducation nationale à Jacques Berque, professeur au Collège
de France et islamologue distingué. Ce rapport veut une pédagogie
interculturelle, car, explique-t-il, la culture à laquelle nous avons à former tous
les élèves doit, désormais, s’enrichir de l’apport des cultures autres, dont les
enfants sont les vecteurs. Il faut, donc, faire entrer la culture des enfants et
l’immigration dans le système de l’enseignement, et cela, dès la maternelle,
dans les chants, les jeux et les contes... Il faut ouvrir la culture nationale,
notamment à travers l’enseignement de l’histoire et du français, aux cultures
islamo-méditerranéennes.
Et quiconque refusera ce projet sera, bien entendu, taxé de racisme et sidéré,
devra se taire. Comme l’a dit, superbement, Yvan Levaï, lors d’une réunion de «
S.o.s Racisme » : Quand le bruit de la cloche ne sera pas plus normal que le
muezzin, cette société ne sera plus raciste. Or, l’erreur – ou le piège – est de
poser le problème de l’immigration en terme de racisme, alors qu’il est religieux et
culturel – qu’il s’agit, en fait, d’un immense problème de civilisation. Fernand
Braudet, qui a passé sa vie à étudier les civilisations et la Méditerranée, va au
cœur du problème quand il écrit dans son livre « L’identité de la France » : Je n’ai
rien contre les mosquées qui s’élèvent en France, de plus en plus nombreuses et
fréquentées. Mais elles sont le signe de l’assimilation refusée, impossible, pour
le moins très lente et difficile, de musulmans d’Afrique du Nord qui ne viennent
chercher chez nous que du travail. Car l’islam n’est pas seulement une religion,
c’est une civilisation plus que vivante, une manière de vivre.
Que la civilisation, « la manière de vivre » de l’islam, même devenu français, soit
compatible avec la civilisation et la manière de vivre de la vieille nation judéochrétienne que nous sommes, il faut vivre dans les nuées pour le croire. L’islam, «
civilisation plus que vivante », n’a jamais toléré une autre religion, une autre
culture, d’autres mœurs, que les siennes. L’islam convertit et assimile. Partout,
dans notre siècle, le monde musulman a soit rejeté, soit « converti » les religions
minoritaires. La Turquie a éliminé les Arméniens et les Grecs. Le christianisme n’a
plus de réalité en Afrique du Nord. Alexandrie est désormais uniquement arabe.
Le Liban, ultime pays de coexistence pacifique, éclate sous nos yeux. Pas d’églises
en Arabie saoudite, mais on va élever une mosquée colossale à Rome. La seconde
religion de France est, d’ores et déjà, l’islam.
Or, le jour où, selon la péroraison de M. Levaï, « le cri du muezzin sera aussi
normal, en France, que le bruit de la cloche ». Quand, alors, cette très vieille
nation appelée France aura vécu.
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