Les bâtiments d`élevage perspectives et évolutions

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Les bâtiments d’élevage
perspectives et évolutions
P
our répondre à la question « Quel bâtiment d’élevage de porc dans 10 ans ? »,
il convient de préciser à quelles contraintes doit répondre cet outil de travail qu’est
le bâtiment.Ces impératifs peuvent être pour certains d’entre eux identifiés à l’heure
actuelle. Ainsi, la problématique environnementale ou bien l’organisation du travail
sont des enjeux déjà présents dans l’élaboration des projets. D’autres contraintes peuvent être envisagées sans connaître l’échéance précise de leur mise en application.
Il en est ainsi de la possible évolution en terme de bien-être animal (augmentation des
surfaces, liberté de la truie à la mise-bas) ou de traitement sanitaire (diminution du
nombre de molécules autorisées, interdiction de traitement collectif,…).
Globalement, le bâtiment doit permettre d’être
le plus adaptable possible en cas d’évolution
des contraintes réglementaires et économiques.
C’est dans ce contexte qu’a eu lieu la réflexion
sur le « bâtiment de demain » dans le cadre
plus large du projet « Quels modèles d’élevage
d’avenir pour la production porcine française »
porté par l’IFIP.
Les contraintes retenues La problématique environnementale
concerne essentiellement les rejets gazeux
et la consommation d’énergie. La gestion
des effluents n’est pas prise en compte dans
la mesure où le bâtiment seul ne peut pas en
assurer la maîtrise.
Le travail en élevage est un facteur important
tant du point de vue du coût (2ème poste) que
par la difficulté à recruter de la main d’œuvre,
voire à motiver des jeunes pour choisir la production porcine.
Dans les évolutions possibles en matière de
législation, le changement de la surface par
animal en engraissement en fonction de la
température ambiante, impose des systèmes
de refroidissement.
La possibilité de faire évoluer les cases de
mises-bas a été retenue.
Concernant l’aspect sanitaire, pour limiter les
épisodes de pathologie, les bâtiments imagi-
nés mettent tout en œuvre pour assurer une
ambiance protégée et élever ainsi les animaux
dans les meilleures conditions.
Les solutions proposées
Le volet environnemental
Les bâtiments proposés sont équipés de laveur
d’air. Ceci suppose une ventilation centralisée
qui de plus permet de récupérer l’énergie qui
sort des salles. Les deux techniques actuellement utilisées (échangeur air/ air et pompe
à chaleur) sont retenues. Mais dans notre cas,
elles sont mises en place de façon simultanée
alors qu’actuellement les deux technologies ne
sont pas placées ensemble dans les bâtiments
(Figure 1).
Cela doit théoriquement permettre de récupérer davantage d’énergie, chaque technologie
revendiquant une capture de 30 % de l’énergie
rejetée dans l’air. L’échangeur répond aussi à la
problématique sanitaire car il permet de préchauffer l’air neuf ce qui limite beaucoup les risques de courants d’air au niveau des animaux
et l’apparition de pathologies.
L’utilisation de pompes à chaleur pour capter
l’énergie présente dans l’eau du laveur d’air
suppose un aménagement des salles avec des
systèmes de chauffage à eau chaude. Nous
avons retenu des dalles en maternité et des
ailettes en post sevrage. L’engraissement n’est
Résumé
L’IFIP a mené dans le cadre
d’un appel à projet CASDAR
une réflexion sur les modèles
d’élevage d’avenir pour la
production porcine française.
Dans ce cadre, une partie du
travail a consisté à déterminer
les structures qui vont être
prédominantes dans les 10 ans
Résumé
à venir. Ce volet a été publié par
L’arti
Christine Roguet (Ifip 2009).
La partie concernant le bâtiment
proprement dit est présentée
dans cet article.
Les contraintes et les défis
auxquels vont devoir répondre
les bâtiments d’élevage ont
été analysés. Des solutions
techniques (existantes ou à
rechercher) ont été proposées
ou identifiées pour relever
au maximum les challenges
auxquels va être confrontée la
production porcine à échéance
de 10 ans.
Globalement, les bâtiments sont
en panneaux isolés porteurs.
La ventilation est centralisée
avec lavage d’air et récupération
d’énergie. L’air est préchauffé
en hiver et refroidi en été.
L’alimentation est apportée sous
forme humide à tous les stades.
Les opérations à faible
valeur ajoutée comme les
déplacements d’animaux
ou le lavage des salles sont
automatisées ou repensées.
Patrick MASSABIE
Dans le cadre d’un Appel
à Projet, cette étude a été
financée par le CASDAR.
TechniPorc, Vol. 32, N°3, 2009 - la revue technique de l’IFIP
Synthèse 19
pas chauffé dans la mesure où
l’air neuf est déjà réchauffé. Pour
des contraintes climatiques plus
rigoureuses, il peut être envisagé
un préchauffage complémentaire
de l’air neuf par des batteries d’eau
chaude pour l’engraissement ainsi
que pour les truies sevrées.
Ces déplacements concernent les
truies qui vont de la maternité en
attente saillie puis en gestation
Laveur
Échangeur
avant de retourner en maternité.
air-air
Bâtiment
Il y a parallèlement les mouvements concernant les porcelets
Chauffage
au sevrage puis au passage en
eau chaude
engraissement et enfin vers le local
de départ.
La mise en place de systèmes de Dans le premier cas, les reproducBac laveur
Air extérieur
chauffage à eau chaude répond teurs restent sur l’exploitation (mis
Pompe
Maternité
Gestation en groupes
aussi à Maternité
la problématique
de réacti- à part les réformes) et le circuit
à chaleur
1
2
vité face à des évolutions comme peut s’organiser par un cheminele prix de l’énergie. En effet le ment en cercle. Dans le deuxième
Figure 1 : Schéma échangeur air/ air et pompe à chaleur
chauffage par eau chaude laisse cas, il s’agit d’une marche en avant
Attente-saillie
toutes les possibilités en
matière
truies
bloqués jusqu’au départ des porcs vers
de source d’énergie.
l’abattoir (ou un autre élevage
dans le cas d’un sélectionneur ou
L’aspect travail
multiplicateur).
La chaîne de bâtiment et surtout
Bâtiment gestation
L’automatisation est poussée à son implantation doit tenir compte
l’extrême notamment pour les de ces déplacements pour optimiMaternité
tâches ayant une faible valeur ser ce poste de travail.
Air vicié
Air
ajoutée (lavage des salles, dépla- En ce qui concerne les truies, le schéchaud
Préchauffé
cement des animaux,…). Ceci a ma type est celui de la Figure 3.
Post-sevrage
une implication au niveau de la
réalisation des bâtiments.
Pour les porcelets sevrés et les
Engraissement
Les salles doivent être organisées porcs charcutiers, l’aménagepour limiter les déplacements ment serait du type de celui de
d’animaux (temps et fatigue). Cet la Figure 4.
Eau chaude
aspect est peu évoqué pour les
Préchauffage eau chaude
structures actuelles mais devient La réflexion sur les déplacements
Laveur / échangeur / pompe à chaleur
une activité à part entière pour des d’animaux amène à une strucFigure 2 : Schéma
ateliers importants ou un grand ture avec deux couloirs latéraux
échangeur air/ air et pompe à chaleur
nombre d’animaux par bande.
plutôt qu’un couloir central. Cet
De Post-sevrage à engraissement
Maternité
1
Maternité
2
Case de
30 porcs
Gestation en groupes
Engraissement 1
Attente-saillie
truies bloqués
Figure 3 : Schéma du déplacement des truies
20 Synthèse
De maternité à Post-sevrage
Post-sevrage Post-sevrage Post-sevrage
6
2
1
Figure 4 : Schéma du déplacement des porcs
TechniPorc, Vol. 32, N°3, 2009 - la revue technique de l’IFIP
Maternité
verin pneumatique
agencement modifie la charpente puisqu’une poutre porteuse est
nécessaire au milieu du bâtiment
à l’image de ce qui existe déjà
pour de grandes salles de truies
gestantes. Dans le même temps,
ces couloirs en périphérie permettent d’isoler les salles par rapport
à l’extérieur et contribuent à une
meilleure isolation (absence de
ponts thermiques).
L’automatisation du lavage des
salles par robot implique de
n’avoir pas à intervenir lors des
opérations. Ceci suppose une
liberté de manœuvre du robot
et l’accès aux salles sans entrave.
Pour cela, les portes sont de type
coulissant (Figure 5).
Le lavage des truies avant l’entrée en maternité pourrait aussi
être délégué à un automate ce
qui diminuerait le temps passé au
déplacement des truies. Ce travail
est réalisé manuellement par les
intervenants et peut prendre du
temps en fonction de l’état des animaux. Cette opération sans valeur
ajoutée pourrait être dévolue à
un automate. Aucune recherche
n’a été effectuée pour l’instant,
mais les technologies employées
dans d’autres domaines comme
le robot de traite pour les vaches
laitières montrent qu’il est tout à
fait possible de prendre en charge
des animaux dans des procédés
automatiques.
Dans le même ordre d’idée, la sortie
des animaux en maternité se fait
en marche arrière ce qui ne facilite
pas l’opération. Pour l’instant, chaque case est indépendante. Cela
suppose de prévoir pour chaque
truie l’ouverture et la fermeture de
la case. L’aménagement proposé
ci-contre (Figure 6) reste un schéma de principe sans solution technique actuelle. Il s’agit d’avoir un
portillon arrière dans la case truie
qui s’ouvre pour former avec l’auge
de la case précédente un espace de
circulation entre deux rangées de
porte coulissante
Position ouverte
Position fermée
Figure 5 : Portes coulissantes
cases. Ce système doit se refermer
automatiquement après passage
de la truie. L’ouverture de la cage
à l’arrière et à l’avant de façon solidaire au panneau du tour de case
a déjà été proposé par un équipementier (SPACE 2007). Il faudrait
faire évoluer le concept.
L’aménagement intérieur
La possibilité de faire évoluer
l’aménagement intérieur n’a été
retenu qu’en maternité.
L’aménagement proposé est un
peu différent de celui existant
pour permettre, le cas échéant, de
Passage des truies vers saillie
Mouvements
des truies à l'entrée
Passage des truies
depuis les gestantes
Mouvements
des truies à la sortie
Portillon et auge
sur pivots
fermeture
automatique
Figure 6 : Transformation des maternités
de la contention à la liberté des truies
TechniPorc, Vol. 32, N°3, 2009 - la revue technique de l’IFIP
Synthèse 21
0,65
0,60
0,65
0,60
Cases de truies en contention
1,30
2,50
1,30
2,50
1,70
Cage à truie
1,70
Cage à truie
Figure 7 : Cases de truies en contention
Plaques pour porcelets
1,50
Plaques pour porcelets
1,50
2,50
Cases de truies en liberté
Position
ouverte
L’alimentation
Position
ouverte
Pour faire face aux défis en
matière d’alimentation des animaux, la distribution sous forme
liquide semble la solution la plus
Figure 8 : Cases de truies en liberté
2,50
Auge double
L’alimentation humide
présente l’avantage
d’être évolutive
en cas d’extension
de l’élevage.
Cases de truies en contention
passer
à un système de truies en
liberté si la réglementation l’imposait. Ainsi, une case actuelle a
une largeur de 1,70 m pour une
longueur de 2,50 m (Figure 7). Une
possibilité de système en liberté
nécessite 2,50 m de large. Il faudra
donc prévoir des juxtapositions de
cases à même d’être transformées
en cases en liberté. La solution est
de toujours juxtaposer 3 cases ou
des multiples de 3 pour en faire
de truies
liberté
par Cases
la suite
2 ouen
des
multiples de
2 (Figure 8).
Barrière sur auge
Marquage
adaptée pour répondre à la fois à
l’utilisation de diverses matières
premières qu’elles soient solides,
semi-liquides ou liquides, et à la
possibilité de rationner des groupes d’animaux. De plus, même
si actuellement ce type de présentation de l’aliment concerne
peu le stade post-sevrage, il sera
certainement la solution dans les
années à venir. Ainsi à partir d’une
installation, il est possible de nourrir l’ensemble de l’élevage.
L’alimentation humide présente
aussi l’avantage d’être évolutive
en cas d’extension de l’élevage car
il suffira d’ajouter des canalisations
et des vannes automatiques pour
alimenter les nouveaux locaux.
La mise en place de ce type de distribution conditionne les dimen-
Mouvements des porcs
Pesée par vision
barrière sur auge
Portique de pesée
Couloir plein gaine d'extration
Portillon
Couloir plein pour gaine d’extraction
Auges doubles
Figure 9 : Exemple d’aménagement des cases d’engraissement
22 Synthèse
TechniPorc, Vol. 32, N°3, 2009 - la revue technique de l’IFIP
sions des locaux. En effet, pour
des raisons techniques, les auges
recevant l’aliment liquide doivent
avoir des dimensions limitées pour
que tous les animaux reçoivent des
quantités équivalentes. Ainsi, audelà de 5 m, la distribution n’est
plus homogène. Ceci conduit à des
cases de profondeur maximum de
5 m pour le post-sevrage ou l’engraissement ce qui correspond
aussi à la distance maximum pour
le robot de lavage.
Capot relevable
Auges doubles avec sonde
La surveillance
Tubes à eau chaude
Des systèmes d’aide à la surveillance équipent les salles
mais n’ont pas d’incidence sur la
conception hormis l’estimation
du poids des porcs avant abattage. Pour ce cas précis, l’aménagement lié à la distribution de
l’aliment conduit à des loges de
5 m de profondeur pour 2,20 m de
large (0,7 m²/porc). Dans l’objectif
d’utiliser un système optique de
pesée mobile d’une case à l’autre,
ces dimensions rendent difficiles
son utilisation. Ainsi, afin de prendre en compte cette contrainte, un
aménagement différent est proposé. Il laisse un passage de 0,60 m
de large entre deux parties de case
(Figure 9). La longueur d’auge restante permet de recevoir de chaque côté 13 porcs, soit 26 au total.
De cette manière, une vanne continue à desservir un groupe de porcs
conséquent et l’agencement de la
case est à même de recevoir temporairement un système de pesée
par vision avec marquage de l’animal au delà d’un poids défini par
l’utilisateur.
La maîtrise de l’ambiance et
la consommation d’énergie
Dans le contexte de meilleure
maîtrise de l’ambiance et de la
consommation d’énergie, une
solution possible en post sevrage
est l’aménagement de niches
Sol chauffé
Case de 44 porcelets
Figure 10 : Exemple d’aménagement des cases de post-sevrage
Gaine d’amenée d’air principale
Gaine d’amenée d’air secondaire
Volet motorisé pour l’admission d’air dans la salle
Figure 11 : Exemple entrées d’air par gaine avec des volets motorisé
Couloir périphérique plein
Caillebotis
Gaine latérale
Couloir plein dans la salle
Air vicié
Caniveau
Gaine basse dans la salle
Bouche vers gaine latérale
Figure 12 : Exemple d’extraction de l’air vicié en partie basse
TechniPorc, Vol. 32, N°3, 2009 - la revue technique de l’IFIP
Synthèse 23
Vue du bâtiment des truies
Bloc laveur/échangeur
Maternité
Bloc truies
Gaine basse sous couloir
Vue de détail du bâtiment de Post-sevrage
Post-sevrage
Maternité
Gaine basse sous couloir
Bloc laveur/échangeur
Pompe à chaleur
Vue de la jonction Post-sevrage - Engraissement
Bloc laveur /échangeur/pompe à chaleur
Engraissement
Post-sevrage
Gaine basse sous couloir
Vue de la partie Engraissement
Engraissement
Engraissement
Gaine basse sous couloir
Bloc laveur/échangeur
Figure 13 : Exemple de structures pour un élevage 300 truies naisseur-engraisseur
relevables chauffées à la fois au
sol et à l ‘arrière par des tubes sous
caillebotis et en paroi (Figure 10).
Ce type d’aménagement existe
déjà et est même proposé par un
constructeur international d’équipements d’élevage.
Le traitement de l’air (chauffage
- refroidissement) est d’autant
plus efficace que l’air ainsi modifié est amené vers les animaux via
des conduits isolés et ayant peu
de contact avec l’extérieur. Ceci
conduit à préconiser des entrées
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24 Synthèse
TechniPorc, Vol. 32, N°3, 2009 - la revue technique de l’IFIP
d’air par gaine avec des volets
motorisés assurant une vitesse
constante d’admission dans les
salles (Figure 11).
L’extraction de l’air doit être réalisée en partie basse et s’effectue
via des gaines latérales placées
sous les couloirs périphériques de
circulation (Figure 12). L’air collecté de façon centralisé va être ainsi
amené vers des blocs de lavage
récupération de chaleur placés
en pignon des bâtiments, voire
entre deux compartiments pour
les structures de taille importantes. La Figure 13 montre en exemple de structures pour un élevage
300 truies naisseur-engraisseur.
Conclusion
Les différents éléments décrits
existent déjà pour la plupart.
L’innovation consiste à les placer
simultanément dans le même bâtiment et à raisonner globalement
la récupération d’énergie, le travail et l’amélioration de l’ambiance dans les salles.
C’est dans ce contexte qu’a été
menée la réflexion du projet « Quels modèles d’élevage d’avenir pour la production porcine
française ». Tout comme pour
les structures identifiées comme
élevage de demain, le bâtiment
proposé n’est pas le seul modèle
pour répondre aux différentes
attentes des éleveurs et de la
société. Il met en avant des solutions techniques pour répondre
au maximum aux défis de demain
(connus ou supposés).
Il ne prétend pas être la seule
réponse mais une vision de ce que
pourrait être le bâtiment d’élevage
à échéance de 10 ans.
n
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