Pourquoi les animaux ont-ils une queue ?
LES ENJEUX PHILOSOPHIQUES
L’homme a toujours ressenti le besoin d’expliquer ce qui l’entoure. Ainsi,
dans la plupart des cultures, on rencontre diverses tentatives de rendre
compte de la genèse du monde, que ce soit la création du ciel et de la
terre, celle des plantes et des animaux ou celle des hommes. Ces « expli-
cations » prennent en général la forme d’une narration, d’un conte, d’un
mythe, et non pas celle d’un discours abstrait, de nature plus « scientifi que »
ou « analytique ». Platon, fondateur de la philosophie occidentale, qui tenta
d’instaurer la pratique de l’abstraction face au mythe traditionnel, jugeait
que l’acte créateur peut diffi cilement échapper à la narration : il ne peut pas
prendre la forme d’un discours rationnel puisqu’il s’agit principalement de
décrire ce qui s’est passé, bien qu’il admette aussi que le mythe doit encore
être interprété : il ne présente pas une réalité « objective ». Mais plus récem-
ment, Hegel critiquera le mythe, en disant que seule l’analyse rationnelle
détient une quelconque valeur de connaissance, vision qui reste le discours
moderne dominant.
L’avantage du mythe est sa valeur éducative. Il présuppose une connivence
dans la grande chaîne de l’existence, où tout se fait écho, toute prête à
interprétation : tout est donc source d’enseignement, intellectuel et moral.
Dans ce cas-ci, l’histoire nous explique le principe de l’expérimentation,
la méthode du tâtonnement. Dieu lui-même, dans toute sa perfection ne
pense pas à tout, commet des erreurs et tente ensuite de les réparer. On y
découvre aussi le thème classique de l’âge d’or, celui du paradis perdu : le
monde commence dans l’harmonie et peu à peu émerge la discorde, pour
diverses raisons, assez inévitables. On pourrait expliquer ce thème par un
parallèle psychologique : le passage de la douceur de l’enfance à la bruta-
lité d’une réalité adulte, l’émergence d’une nécessité, le chacun pour soi qui
mène à la confrontation. L’autre thème important, lié à celui de la nécessité
et de la croissance, est comment de cette multiplicité foisonnante émerge
une réalité que son auteur ne saurait totalement contrôler : la perte de la
maîtrise du monde, le deuil de la toute-puissance qu’il nous faut apprendre
à accepter.
DISCUSSIONS ET DIFFICULTÉS
L’enfant lecteur risque de se perdre dans tous les détails de l’histoire. Pour
éviter une compréhension parcellaire et brouillée, il s’avérera utile de lui
demander de porter un jugement sur l’ensemble du texte : questions 1 ou 2.
De manière plus simple, cela se réalisera aussi en effectuant un choix parmi
l’ensemble des personnages, par exemple avec la question 3. Ce choix a
priori subjectif se justifi era à l’aide de diverses raisons, ce qui incitera l’élève
à analyser les enjeux du texte. En engageant une discussion par ce biais, en
l’approfondissant par des « pourquoi ? », la réfl exion devrait peu à peu s’en-
gager sur le terrain de la symbolique, de la métaphore et de l’analyse.
Plus abstraitement, on invitera l’élève à la métanarration à l’aide d’une des
questions de la liste portant sur l’activité du dieu Raluvhimba, ce qui reste
l’axe central du texte. Il cherchera ainsi un fi l conducteur, hypothèse fonda-
trice procurant au texte un sens unifi ant et plus profond. Divers problèmes
pourront ici émerger : celui de la fi nalité du dieu, de sa méthode, de son
imperfection, de sa réalité. Il s’agira de ne pas refuser a priori un angle
d’attaque, mais d’aller le plus loin possible avec chaque hypothèse, de les
analyser et de les problématiser au fur et à mesure des interventions, car
quelles qu’elles soient, elles permettront d’approfondir la compréhension
du texte, quand bien même elles aboutiraient à des « absurdités » inter-
prétatives. Un tel texte a plusieurs facettes et niveaux de lecture, il ne s’agit
pas d’en déterminer à l’avance le « véritable » sens. La discussion devrait
d’ailleurs profi ter de plusieurs « retournements », par exemple celui du
« bien et mal », couple qui semble ne plus tellement s’opposer pour aller
de pair. Ou encore celui de « l‘objectif et le subjectif », puisque la réalité
« scientifi que » se heurte à la fragilité de « l’intention ». L’un est-il toutefois
moins réel que l’autre ? Peut-on concevoir un monde dépourvu d’intention,
privé de subjectivité ?
Activités complémentaires
>
Concepts :
symbole, analogie, métaphore, analyse.
>
Compétences :
interpréter, conceptualiser, argumenter.
La création du monde, c’est la production de la multiplicité.
Tout ce qui est engendré a une signifi cation, tout ce qui existe
est producteur de sens. Ainsi les animaux servent souvent de
symbole, ils sont aussi utilisés pour qualifi er une personne —
par analogie ou métaphore —, afi n de la complimenter, la criti-
quer ou même l’insulter.
Dans cet exercice, l’élève est invité à conceptualiser l’animal
mentionné en indiquant un ou plusieurs adjectifs qui
pourraient le remplacer lorsqu’ils servent à quali er une
personne. Il s’agira de justi er ces interprétations, qu’elles
soient d’usage courant ou inventées pour l’occasion.
Que signifi e cet animal si on l’utilise pour qualifi er
quelqu’un ou le comparer à une personne ?
• singe ;
• renard ;
• cochon ;
• rhinocéros ;
• araignée ;
• souris ;
• gazelle ;
• lièvre ;
• mouche ;
• éléphant ;
• ornithorynque ;
• castor ;
• écureuil ;
• girafe ;
• moustique ;
• serpent ;
• autruche ;
• moineau.
Pourquoi les animaux ont-ils une queue ?
L’homme a toujours ressenti le besoin d’expliquer ce qui l’entoure. Ainsi,
dans la plupart des cultures, on rencontre diverses tentatives de rendre
compte de la genèse du monde, que ce soit la création du ciel et de la
terre, celle des plantes et des animaux ou celle des hommes. Ces « expli-
cations » prennent en général la forme d’une narration, d’un conte, d’un
mythe, et non pas celle d’un discours abstrait, de nature plus « scientifi que »
ou « analytique ». Platon, fondateur de la philosophie occidentale, qui tenta
d’instaurer la pratique de l’abstraction face au mythe traditionnel, jugeait
que l’acte créateur peut diffi cilement échapper à la narration : il ne peut pas
prendre la forme d’un discours rationnel puisqu’il s’agit principalement de
décrire ce qui s’est passé, bien qu’il admette aussi que le mythe doit encore
être interprété : il ne présente pas une réalité « objective ». Mais plus récem-
ment, Hegel critiquera le mythe, en disant que seule l’analyse rationnelle
détient une quelconque valeur de connaissance, vision qui reste le discours
L’avantage du mythe est sa valeur éducative. Il présuppose une connivence
dans la grande chaîne de l’existence, où tout se fait écho, toute prête à
interprétation : tout est donc source d’enseignement, intellectuel et moral.
Dans ce cas-ci, l’histoire nous explique le principe de l’expérimentation,
la méthode du tâtonnement. Dieu lui-même, dans toute sa perfection ne
pense pas à tout, commet des erreurs et tente ensuite de les réparer. On y
découvre aussi le thème classique de l’âge d’or, celui du paradis perdu : le
monde commence dans l’harmonie et peu à peu émerge la discorde, pour
diverses raisons, assez inévitables. On pourrait expliquer ce thème par un
parallèle psychologique : le passage de la douceur de l’enfance à la bruta-
lité d’une réalité adulte, l’émergence d’une nécessité, le chacun pour soi qui
mène à la confrontation. L’autre thème important, lié à celui de la nécessité
et de la croissance, est comment de cette multiplicité foisonnante émerge
une réalité que son auteur ne saurait totalement contrôler : la perte de la
maîtrise du monde, le deuil de la toute-puissance qu’il nous faut apprendre
L’enfant lecteur risque de se perdre dans tous les détails de l’histoire. Pour
éviter une compréhension parcellaire et brouillée, il s’avérera utile de lui
demander de porter un jugement sur l’ensemble du texte : questions 1 ou 2.
De manière plus simple, cela se réalisera aussi en effectuant un choix parmi
l’ensemble des personnages, par exemple avec la question 3. Ce choix a
priori subjectif se justifi era à l’aide de diverses raisons, ce qui incitera l’élève
à analyser les enjeux du texte. En engageant une discussion par ce biais, en
l’approfondissant par des « pourquoi ? », la réfl exion devrait peu à peu s’en-
gager sur le terrain de la symbolique, de la métaphore et de l’analyse.
Plus abstraitement, on invitera l’élève à la métanarration à l’aide d’une des
questions de la liste portant sur l’activité du dieu Raluvhimba, ce qui reste
l’axe central du texte. Il cherchera ainsi un fi l conducteur, hypothèse fonda-
trice procurant au texte un sens unifi ant et plus profond. Divers problèmes
pourront ici émerger : celui de la fi nalité du dieu, de sa méthode, de son
imperfection, de sa réalité. Il s’agira de ne pas refuser a priori un angle
d’attaque, mais d’aller le plus loin possible avec chaque hypothèse, de les
analyser et de les problématiser au fur et à mesure des interventions, car
quelles qu’elles soient, elles permettront d’approfondir la compréhension
du texte, quand bien même elles aboutiraient à des « absurdités » inter-
prétatives. Un tel texte a plusieurs facettes et niveaux de lecture, il ne s’agit
pas d’en déterminer à l’avance le « véritable » sens. La discussion devrait
d’ailleurs profi ter de plusieurs « retournements », par exemple celui du
« bien et mal », couple qui semble ne plus tellement s’opposer pour aller
de pair. Ou encore celui de « l‘objectif et le subjectif », puisque la réalité
« scientifi que » se heurte à la fragilité de « l’intention ». L’un est-il toutefois
moins réel que l’autre ? Peut-on concevoir un monde dépourvu d’intention,
LES ENJEUX PHILOSOPHIQUES
DISCUSSIONS ET DIFFICULTÉS
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LE PETIT ATELIER DE PHILO Manuel
« À nous le français ! »
pages 8 à 13