La Réunion face aux risques naturels gouvernance locale et coopération régionale Reunion Island facing natural hazards local governance and regional cooperation 18 - 19 septembre 2006 September 18th - 19th 2006 Résumés Abstracts Résumés Abstracts Séminaire Seminar La Réunion face aux risques naturels : gouvernance locale et coopération régionale Reunion Island facing natural hazards: local governance and regional cooperation La Région Réunion et l’Université de La Réunion organisent un séminaire sur le thème «La Réunion face aux risques naturels : gouvernance locale et coopération régionale», les 18 et 19 septembre 2006, à Saint-Denis de La Réunion. The Regional Council of La Réunion and the University of La Réunion are organising a seminar “Reunion island facing natural hazards: local governance and regional cooperation », 18-19th September 2006, Saint-Denis, Reunion Island. Le risque « Tsunami » et la mise en place du Système d’Alerte aux Tsunami dans l’Océan Indien (SATOI) La Réunion : Laboratoire d’étude sur les risques naturels, moyens d’intervention et coopération régionale 4 Le risque de tsunami à La Réunion Emile OKAL, Northwestern University – Evanston, USA • 6 Le tsunami du 26 décembre 2004 dans l’océan Indien et ses conséquences Hermann FRITZ, Georgia Institute of Technology, USA 8 Tsunami en contexte volcanique insulaire L’exemple de l’arc des Petites Antilles : événements récents et implications Anne LEFRIANT, Institut de Physique du Globe de Paris 10 Genèse de tsunami par avalanches et effondrement de flanc dans les îles volcaniques : le cas de Stromboli, Italie Stefano TINTI, Université de Bologne, Italie 12 Aléas et tsunami liés à une éventuelle déstabilisation du Piton de la Fournaise Karim KELFOUN, Laboratoire Magmas et Volcans, CNRS Université de Clermont- Ferrand 14 Le Système d’Alerte et d’atténuation des effets des Tsunamis dans l’Océan Indien (SATOI) François SCHINDELE, Commissariat à l’Energie Atomique 16 Pan d’action post-tsunami du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Jean-Paul MONTAGNER, Agence Nationale pour la Recherche Le risque cyclonique 26 La modélisation des cyclones tropicaux Samuel WESTRELIN, Météo France, Cellule Recherche Cyclones 28 La surveillance opérationnelle des cyclones tropicaux dans le Sud-Ouest de l’océan Indien Philippe CAROFF, Météo France, Responsable de la division Cyclones 30 Les conséquences du cyclone Katrina sur les côtes du golf du Mexique et les îles barrières Hermann FRITZ, Georgia Institute of Technology, USA • Le risque mouvements de terrain 32 Aide à l’élaboration de scénarios de crise dans le domaine des risques naturels - Réflexions générales et exemples de développement potentiel Jean-Louis NEDELLEC, Bureau de Recherches Géologiques et Minières de La Réunion 34 Evaluation et cartographie de l’aléa mouvements de terrain (MVTs) Jean-Louis NEDELLEC, Bureau de Recherches Géologiques et Minières de La Réunion • Le risque volcanique 18 Pourquoi un système d’alerte tsunami est-il nécessaire en Méditerranée et dans la partie Nord-Est Atlantique: les plans ICG/NEAMTWS Stefano TINTI, Université de Bologne, Italie 36 Exemples de La Réunion et des Comores. Retour d’expériences et programmes de recherches pour une meilleure connaissance et gestion du risque volcanique Nicolas VILLENEUVE, Université de La Réunion 20 Le programme GEOSCOPE et le CNATOI Geneviève ROULT, Institut de Physique du Globe de Paris 38 Les avancées de la surveillance en volcanologie Georges BOUDON, Institut de Physique du Globe de Paris 22 Apports de la télédétection spatiale à la connaissance du Piton de la Fournaise Valérie CAYOL, Laboratoire Magmas et Volcans, CNRS Université de Clermont- Ferrand Les relations Scientifiques / Protection civile / • Politiques / Populations 24 Le Pacific Tsunami Warning Center François SCHINDELE, Commissariat à l’Energie Atomique 40 Le volcan Stromboli (Italie): de la gestion de la crise éruptive 2002-2003 à la naissance d’un système opérationnel permanent de la protection civile sur l’ile Mauro ROSI, Université de Pise, Italie 42 Expériences en matière d’information, de sensibilisation et d’éducation des populations : le cas du volcan Misti au sud Pérou Anthony FINIZOLA, Université de La Réunion - Institut de Physique du Globe de Paris • Le rôle régional de la Réunion en matière de gestion de crise 44 Le réseau régional de protection civile Lieutenant Colonel Patrick DELFORGE, Sécurité Civile – Préfecture de La Réunion Le risque de tsunami à La Réunion Emile A. Okal Department of Geological Sciences Northwestern University Evanston, IL 60208, USA [email protected] Okal Lors du tsunami du 26 décembre 2004, l’île de la Réunion a souffert des dégâts excédant le million d’euros, mais se limitant à la destruction d’embarcations de pêche ou de plaisance et à des dommages aux infrastructures portuaires, l’inondation verticale ne dépassant pas 2.5 m, et aucune perte de vie humaine n’ayant été déplorée. Par contre, à une distance épicentrale comparable, la côte somalienne a subi des vagues de plus de 7 mètres, détruisant des dizaines de villages et occasionnant 300 victimes. Ce contraste souligne l’importance d’agents géophysiques subtils sur le danger présenté par un tsunami lointain. Dans ce contexte, nous donnons une évaluation du risque posé par des tsunamis transocéaniques à la Réunion sur la base de scénarios possibles ou probables dans les décennies à venir. Sur le pourtour de l’Océan Indien, on peut retenir trois zones principales capables d’engendrer un mégaséisme approchant ou dépassant la magnitude 9 : le Sud de Sumatra, le contact Andaman-Birmanie, et la zone de subduction du Makran sur la côte pakistanaise. Les deux premières zones sont généralement considérées comme subissant un surcroît de contraintes dû aux dislocations imparties en 2004 et 2005 à Sumatra (Nord), devenant ainsi dangereusement «mûres» pour un séisme futur qui pourrait atteindre la taille catastrophique des évènements historiques de 1833 (sumatra Sud) et 1762 (Birmanie), récemment identifiés et estimés à des magnitudes M ≥ 9 par des méthodes géologiques. La zone du Makran a, elle, subi un très fort séisme (M = 8) en 1945, dont la faille est bordée, à l’Est comme à l’Ouest par des segments comparables ayant rompu en 1851 et 1765. Cette géométrie suggère l’éventualité d’une rupture simultanée des trois segments, le séisme résultant atteignant la magnitude 9, dans une région qui semble subir unséisme majeur tous les 100 ans. La simulation hydrodynamique du tsunami transocéanique pour chacun de ces scénarios confirme la directivité à la source de la vague, dans la direction perpendiculaire à la faille sismique, ainsi que l’influence focalisatrice de certaines structures bathymétriques. Si le tsunami d’Andaman-Birmanie subit une rapide atténuation hors de la Baie du Bengale, la Réunion se trouve exposée dans les deux autres cas de figure à des amplitudes sensiblement supérieures à celles observées en 2004, qui pourraient donner lieu localement à des inondations verticales dépassant 5 m, mettant en péril vies humaines et infrastructures. L’expérience du tsunami de 2004 au Port de la Réunion mais aussi à Toamasina (Madagascar) et Salalah (Oman) a montré que les zones portuaires sont vulnérables à des effets différés pouvant se produire jusqu’à six heures après l’arrivée des vagues principales, au cours desquels des navires de fort tonnage ont brisé leurs amarres et dérivé de manière incontrôlable dans les eaux portuaires. Ces phénomènes seraient dûs à la mise en résonance des ports par des composantes à courtes périodes (typiquement 100 à 300 s) de l’onde de tsunami, dont l’arrivée tardive est, en théorie, parfaitement prévisible. Il est donc impératif d’étudier, pour chaque zone portuaire, les fréquences d’oscillations propres des bassins, qui conditionnent les délais d’arrivée des ondes les plus nocives et donc les durées d’alerte pour un tsunami lointain. Finalement, en l’absence d’une sismicité locale de magnitude suffisante (M ≥ 6) à déclencher un tsunami destructeur à l’échelle régionale, la Réunion est exposée à un risque peuvent engendrer localement des vagues gigantesques, qui avaient atteint 15 m en 1998 en PapouasieNouvelle-Guinée. 5 Figure 1. Le tsunami du 26 décembre 2004 dans l’océan Indien et ses conséquences Hermann M. Fritz(1) Jose C. Borrero(2) Costas E. Synolakis(2) Emile A. Okal(3) (1) Civil & Environmental Engineering, Georgia Institute of Technology, Savannah, GA, USA (2) Civil & Environmental Engrg, Univ. of Southern California, Los Angeles, CA, USA (3) Geological Sciences, Northwestern University, Evanston, IL, USA, emile@earth. northwestern.edu On Sunday December 26th, a great earthquake with a moment magnitude of 9.0 – or possibly greater (Stein and Okal, 2005) – occurred off the North tip of Sumatra, Indonesia. Large tsunamis were generated and severely damaged coastal communities in countries along the Indian Ocean, including Indonesia, Thailand, Sri Lanka, India, Maldives and Somalia (Fig.1). The tsunami death toll reached 300,000. Near Field – Sumatra, Indonesia The highest runup values were recorded near the earthquake epicenter along the west coast of Aceh Prvoince on Sumatra Island. Tsunami runup values were measured to be in excess of 30 m in the area of Lhok-Nga (Borrero, 2005). Tsunami waves capsized the 100 m cargo ship Sinar Andalas, which was fully loaded with 10’000 tons of cement at the [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] Figure 1. MOST-tsunami model simulation: maximum offshore wave heights [cm] (Titov et al. 2005). Fritz After the Indian Ocean tsunami survey teams were deployed to determine local flow depths, run-up heights, inundation distances, sediment erosion and deposition, and eyewitness acounts. The author was a survey team member on surveys on Sumatra Island (Indonesia), Sri Lanka, the Maldives, Somalia, Oman and Madagascar. Typical flow depth measurements are shown in Fig.1. Figure 1. Flow depth measurements: (a) wash-out damage on steel frame structures at the La Farge cement factory in Lhoknga (Sumatra, Indonesia); (b) clothing rafted into trees by the Indian Ocean tsunami in Hambantota (Sri Lanka). time. Waves also inundated the LaFarge Cement factory, debris traces indicating 16 m of flow depth at a distance of 300 m from shore (Borrero et al, 2006). The massive washout damage at the La Farge cement factory in Lhoknga on Sumatra’s West Coast is shown in Fig. 1a. In Banda Aceh, on the northern tip of Sumatra Island, the tsunami flow depths were measured up to 10 m at the shoreline with inundation extending to 3 km inland. Mid-Indian Ocean – Sri Lanka, the Maldives Sri Lanka at a distance of 1600 km from the earthquake epicenter reported the 2nd highest death toll behind Sumatra Island. The east, south and southwest coasts of Sri Lanka were similarly impacted due to the tsunami wave refraction around the island. In Sri Lanka, the highest runup heights of more than 10m were measured on the southeast coast in the towns of Yala and Hambantota. Runup values and overland flow depths were generally in excess of 4 m around the Island (Liu et al. 2005). third of the distance from the epicenter (Liu et al., 2005). In contrast the maximum flow depths in Hambantota along Sri Lanka’s Southeast coast roughly doubled the few flow depth measurements in Xaafuun (Somalia). The measured inundation distances of up to 700m are somewhat shorter than in Sri Lanka. Figure 4. Massive structural damage in Xaafuun (the eastern most town on the African Continent): a destroyed mosque and classic washout failure on cement stone houses. Borrero, J.C. (2005). Field Data and Satellite Imagery of Tsunami Effects in Banda Aceh, Science, 308 (5728):1596. Borrero, J.C. (2005). Field Survey of Northern Sumatra and Banda Aceh, Indonesia after the Tsunami and Earthquake of 26 December 2004, Seismol. Res. Letts., 76:312-320. Borrero, J.C., C.E. Synolakis, H.M. Fritz (2006). Field Surveys northern Sumatra after the Tsunami and Earthquake of 26 December 2004. Earthquake Spectra 22(S3):S93-S104. The bulk of the Maldives at a distance of 2500 km from the epicenter were Figure 3. completely submergened during the main tsunami waves. In the Maldives, the maximum tsunami heights only reached up to 4 m above sea level on Vilufushi Island (Fritz et al. 2006). Although the terrain elevations of the entire island chain are lower than 2 m, the tsunami had limited impact on the Maldives, because of the characteristic bathymetry with deep ocean channels separating the individual atoll. The human loss (82) was orders of magnitude smaller than in Sri Lanka, and a third of the death toll that was reported in Somalia along the same ray path but on steep shores (Fritz and Borrero 2006). Far-Field – Somalia Numerical simulations of the tsunami propagation across the Indian Ocean (Fig. 1) show areas of tsunami waves focusing (Titov et al., 2005). One such area is the northern coast of Somalia. The Puntland coast in northern Somalia was by far the area hardest hit to the west of the Indian Subcontinent by the December 26, 2004 tsunami (Fritz and Borrero, 2006). The run-up heights of 5 to 9m are in the same order of magnitude as observed in Sri Lanka, which is at a Fritz, H.M., J.C. Borrero (2006). Somalia field survey of the 2004 Indian Ocean Tsunami. Earthquake Spectra 22(S3):S219-S233. Fritz, H.M., C.E. Synolakis, B.G. McAdoo (2006). Maldives field survey of the 2004 Indian Ocean. Earthquake Spectra 22(S3):S139-S154. Okal, E.A., H.M. Fritz, P.E. Raad, C.E. Synolakis, Y. Al-Shijbi, M. AlSaifi (2006). Oman Field Survey after the December 2004 Indian Ocean Tsunami. Earthquake Spectra 22(S3):S203-S218. Figure 4. Map of Somalia’s Puntland coast with bathymetry contours, the GPS-track of the expedition with surveyed locations and the maximum measured tsunami flow depths and run-up heights. The human loss was limited primarily because the Puntland coast is one of the least populated coastlines along the shores of the Indian Ocean. The bulk of Somalia’s 300 casualties occurred in the low lying town of Xaafuun. The highest runup heights were observed further south in Eyl and Bandarbeyla. Significant structural damage was observed in all surveyed towns. This is in sharp contrast to the far field tsunami impact observations along the Arabian Peninsula in Oman (Okal et al. 2006) and on the Island of Madagascar (Okal et al. 2006). Okal, E.A, H.M. Fritz, R. Raveloson, G. Joelson, P. Pančošková, G. Rambolamanana, G., Madagascar Field Survey after the December 2004 Indian Ocean Tsunami. Earthquake Spectra 22(S3):S263-S283. Liu, P.L.-F., P. Lynett, J. Fernando, B.E. Jaffe, H.M. Fritz, B. Higman, R. Morton, J. Goff, C.E. Synolakis (2005). Observations by the International Tsunami Survey Team in Sri Lanka, Science 308 (5728):1595 Stein, S., and E.A. Okal (2005). Size and speed of the Sumatra earthquake, Nature, 434:580-582. Titov, V.V., Rabinovich, A.B., Mofjeld, H.O., Thomson, R.E., González, F.I. (2005). The Global Reach of the 26 December 2004 Sumatra Tsunami, Science 309 (5743), 2045–2048. Références 7 Tsunami en contexte volcanique insulaire L’exemple de l’arc des Petites Antilles : événements récents et implications Anne Le Friant(1) Georges Boudon (1) Philippe Heinrich (2) Jean-Christophe Komorowski (1) Sara Bazin (3) François Beauducel (4) (1) Institut de Physique du Globe de Paris & CNRS, Equipe volcanologie, Case 89, 4 Place Jussieu, 75252 Paris Cedex 05, France. (2) Laboratoire de Détection et de Géophysique, CEA, Bruyères-LeChâtel, France. (3) Observatoire Volcanologique et Sismologique de Martinique, Institut de Physique du Globe de Paris, Fonds St Denis, Morne des Cadets, Martinique, France. (4) Observatoire Volcanologique et Sismologique de Guadeloupe, Institut de Physique du Globe de Paris, Gourbeyre, Le Houëlmont, Guadeloupe, France. [email protected]. Le Friant L’activité volcanique est généralement le premier danger auquel on pense sur les îles volcaniques quelque soit le contexte géodynamique dans lequel elles se trouvent (arc insulaire, points chauds…). En revanche, bien que les tsunamis semblent moins fréquents et dangereux comparés à l’activité volcanique, leurs conséquences peuvent être catastrophiques sur ces îles ou la majeure partie de la population vit le long des côtes. Les tsunamis peuvent êtres générés par : 1/ des séismes qui se produisent en mer (avec ou non des glissements sous-marins associés) ; 2/ l’entrée en mer de matériel volcanique tel que des avalanches de débris qui résultent des déstabilisations de flancs des volcans ou des écoulements pyroclastiques associés à l’activité explosive des volcans ; 3/ des éruptions volcaniques sous-marines à faible profondeur entraînant l’écroulement partiel de l’édifice ; 4/ des glissements sousmarins non-volcaniques. Si l’on prend l’exemple de l’arc des Petites Antilles, plusieurs tsunamis historiques se sont déjà produits tel que récemment le 21 novembre 2004 lors d’un séisme de magnitude 6.3 qui s’est produit près des îles des Saintes au large de la Guadeloupe, l’épicentre du séisme étant situé entre le sud de la Guadeloupe et l’île de la Dominique. C’était le séisme historique le plus important dans cette zone. Les études de terrain complétées par des enquêtes auprès de la population ont permis de caractériser le petit tsunami associé à ce séisme et qui s’est propagé le long des côtes de l’archipel des Saintes, du Sud de la BasseTerre et du nord de la Dominique. La recherche des dépôts de tsunamis passés est un travail délicat car la probabilité de les conserver est extrêmement faible et nécessite des conditions exceptionnelles. En effet, ces dépôts sont caractérisés soit par la présence de bois cassés ou de troncs amenés par la mer dans des zones habituellement non recouvertes par l’eau, soit par la présence de coraux cassés mélangés à des sables grossiers et à des galets, retrouvés à des altitudes anormales. Ces dépôts sont par conséquents de nature très friable, facilement érodables et peuvent disparaître très rapidement si ils ne sont pas piégés dans une cavité ou immédiatement recouverts par des écoulements pyroclastiques. Le séisme de 2004 a ainsi fourni une excellente opportunité d’étudier ces dépôts, de mesurer directement les hauteurs de run-up et les zones d’inondations associées à cet événement. Ces données nous ont ensuite aidés à contraindre les simulations numériques de ces événements et devraient ensuite nous aider dans l’évaluation des risques dans la région. Pour la partie simulation numérique, nous utilisons un modèle numérique qui a été développé au Laboratoire de Géophysique du CEA et qui simule la propagation de tsunamis. Ce modèle, rapide en temps calcul, permet une utilisation adaptée à l’évaluation des risques. Il a déjà été utilisé pour simuler différents tsunamis (Heinrich et al., 1998, Piatanesi et al., 2000). Les déstabilisations de flanc représentent une seconde menace particulière pour les populations vivant sur les îles car les avalanches de débris peuvent atteindre rapidement la mer et provoquer des tsunamis parfois très dévastateurs. Les exemples récents les plus connus sont les tsunamis liés à l’éruption du Krakatau (Indonésie) en 1883 (36000 victimes) ou du volcan Unzen (Japon) en 1792 (15000 victimes). De tels événements ont des faibles probabilités d’occurrence mais sont à l’origine de très grandes catastrophes naturelles. Le 30 décembre 2002, le petit glissement de terrain qui s’est produit à Stromboli (20 Mm3) a lui aussi généré un tsunami qui a en partie détruit des habitations construites le long de la côte (jusqu’à 2 m au dessus du niveau de la mer), l’île avait heureusement été évacuée. Dans le cas de l’arc des Petites Antilles, des petits tsunamis ont déjà été observés liés à l’entrée brutale en mer de produits volcaniques (5 mai 1902, Montagne Pelée (Martinique) ; 26 décembre 1997 (Sparks et al., 2002), 12 juillet 2003, 2006, Soufrière Hills (Montserrat)). Dans le cas de Montserrat, où le volcan de Soufrière Hills est en éruption depuis 1995, les tsunamis ont à chaque fois étaient générés par l’écroulement du dôme en pleine croissance. De petites vagues ont alors affecté les côtes sud de Montserrat ainsi que les côtes nord de Guadeloupe. De plus, depuis quelques années, en travaillant conjointement sur les parties aériennes et sous-marines des édifices, nous avons reconnu une quarantaine de grandes déstabilisations de flanc sur les volcans de l’arc des Petites Antilles, mettant en jeu des volumes du dixième de km3 à plusieurs dizaines de km3 (Boudon et al., 2003, Deplus et al., 2001 ; Le Friant et al., 2002, Le Friant et al., 2003, Le Friant et al., 2004). Les déstabilisations de flanc sont beaucoup plus fréquentes qu’on ne le pensait auparavant et peuvent se produire de manière récurrente sur certains volcans comme la Soufrière de Guadeloupe (8 déstabilisations dans les 8500 dernières années). Ces événements sont donc susceptibles de se produire à nouveau dans l’histoire future des édifices volcaniques (Le Friant et al., 2006) et pourraient à nouveau produire des tsunamis importants le long des côtes de ces îles. Les tsunamis ne sont pour le moment pas pris en compte dans l’évaluation des risques aux Antilles or la majeure partie de la population est localisée en bord de mer et serait donc directement exposée en cas de vague importante. Il est donc essentiel de considérer et d’étudier ces événements aux Antilles pour déterminer: quels grands glissements ont provoqué des tsunamis aux Antilles ? Quelles étaient les volumes mis en jeu ? Quelles étaient les zones concernées et les hauteurs de vagues observées ? Quelles seraient les zones susceptibles d’être affectées par un tsunami lors d’une potentielle déstabilisation de flanc d’un volcan de l’arc, en tenant compte de la stabilité actuelle des volcans ?.... Boudon, G. Le Friant, A., Komorowski, J.C., Deplus, C., Semet, M., 2003, Instabilité des volcans de l’arc Antillais: origine et implication sur les risques volcaniques. Rapport quadriennal 1999-2002, CNFGG, 23ème assemblée internationale de l’UGGI, Sapporo, Japon, 2003. Deplus, C., Le Friant, A., Boudon, G., Komorowski, J.-C., Villemant, B., Harford, C., Ségoufin, J., Cheminée, J.-L., 2001, Submarine evidence for large-scale debris avalanches in the Lesser Antilles Arc, Earth Planet. Sci. Lett., v. 192, 2, p. 145-157. Heinrich Ph., Mangeney A., Guibourg S., Roche R., Boudon G. and Cheminée J. L., 1998. Simulation of water waves generated by a potential debris avalanche in Montserrat, Lesser Antilles, Geophys. Res. Lett., 25, 19, 3697-3700. Le Friant, A., Boudon, G., Deplus, C., Villemant, B., 2003. Large scale flank-collapse events during the activity of Montagne Pelée, Martinique, Lesser Antilles, J. Geophys. Res., v. 108(B1), 2055, doi:10.1029/ 2001JB001624. Le Friant, A., Boudon, G., Komorowski, J.-C., Deplus, C., 2002, L’île de la Dominique, à l’origine des avalanches de débris les plus volumineuses de l’arc des Petites Antilles, C. R. Geoscience, v. 334, p. 235-24. Le Friant A., Boudon G., Komorowski J-C., Heinrich, P., Semet, M., Potential flank-collapse of Soufrière volcano, Guadeloupe, Lesser Antilles ? Numerical simulation and Hazards? 2006, Natural Hazards, in press. Le Friant, A., Harford, C., Deplus, C., Boudon, G., Sparks, S., Herd, R., Komorowski, J.C., 2004 Geomorphological evolution of Montserrat (West Indies) : importance of flank-collapse and erosional processes, Journal of the Geological Society, London, v. 161, p. 1-14. Piatanesi A., Heinrich Ph. and Tinti S., 1999. The October 4, 1994 Shikotan (Kuril Islands) tsunamigenic earthquake : an open problem on the source mechanism, Pageoph,154, 555-574. Sparks, R.S.J., Barclay, J., Calder, E.S., Herd, R.A., Komorowski, J.C., Norton, G.E., Ritchie, L., Voight, B., Woods, A.W., Montserrat Volcano Observatory, 2002, Generation of a debris avalanche and violent pyroclastic density current : the Boxing Day eruption of 26 December 1997 at the Soufriere Hills Volcano, Montserrat, dans Druitt, T.H., and Kokelaar, B.P., eds., The eruption of Soufriere Hills Volcano, Montserrat, from 1995 to 1999, London, Geological Society Memoir, 21, 409-434. Références 9 Genèse de tsunami par avalanche et effondrement de flanc dans les îles volcaniques le cas de Stromboli, Italie Tsunami generation by avalanches and flank collapses in volcanic islands: the case of Stromboli, Italy Stefano Tinti (1) Alberto Armigliato (1) Gianluca Pagnoni (1) Filippo Zaniboni (1) (1) Department of Physics, Sector of Geophysics, University of Bologna, Italy Volcanic islands are known to be prone to mass instabilities, both in the form of medium and small volume landslides and in the form of huge sector collapses (see the famous cases of the Minoan-era Santorini caldera collapse in the Mediterranean and the 27 August 1883 Krakatau explosion in the Sunda Straits that had a global character). These may pose serious threats to the coasts of the volcanic island itself as well as to the coasts of the entire surrounding sea. An interesting example of such instabilities is provided by the Stromboli volcano which forms one of the islands of the Aeolian group, NE of Sicily, Italy. Stromboli shows a well identified scar (the so-called Sciara del Fuoco) of a Holocene collapse that occurred on the NW flank of the island. In modern times the scar is affected by frequent mass failures since it is the preferential channel of all volcanic ejecta. On the 30th of December 2002 Stromboli was attacked by two tsunamis, generated by two distinct landslideepisodes that took place in the northern part of the Sciara del Fuoco, the first submarine and the second subaerial. The seismic network recorded two main landslides, at 13:14:05 and 13:22:38 local time. The total volume of the failure, though difficult to ascertain, was estimated by means of bathymetric and aerophotogrammetric surveys that were performed before and after the event: it was roughly between 20-30 million cubic meters, with the submarine slide being much larger than the subaerial one. Both mass failures produced a tsunami. Tinti The landslides and tsunamis occurred unexpected. The instrumental data available are insufficient to allow a precise reconstruction of the events. To this, invaluable contributions come from the accounts of the eyewitnesses that were collected through specific interviews (Tinti et al.,2005b). The tsunami waves were most violent along the northern and north-eastern coast of Stromboli where a maximum run-up height of about 11 m (see Figure 1) was measured during the post-event field surveys (Tinti et al., 2006a). Figure 1. Runup heights measured in the north-west coast of Stromboli (Tinti et al., 2006a) The events have been studied by means of numerical simulations that make use of two distinct models, one for the landslide, a Lagrangian model, and one for the tsunami propagation that is based on a finite-element technique. Numerical simulations of the landslides and of the consequent tsunamis provide results that are in agreement with observations (Tinti et al., 2005a and 2006b; see Figure 2). The simulations explain how the tsunamis, that were generated in the Sciara del Fuoco area, attack the entire coastline of Stromboli with effect larger on the northern coast, as observed in field surveys. In the frame of the studies aimed at assessing the tsunami risk in Stromboli, a very large number of possible scenarios have been analysed with mass failures taking place in the Sciara. The effect of the initial slide position, volume, thickness, etc. on the tsunami generation has been explored and posed in synoptic plots that reveal very interesting features. Tinti, S., Armigliato, A., Manucci, A., Pagnoni, G., Zaniboni, F., 2005a. Landslides and tsunamis of December 30, 2002 at Stromboli, Italy: numerical simulations. Bollettino di Geofisica Teorica e Applicata, 46: 153-168. Tinti, S., Manucci, A., Pagnoni, G., Armigliato, A., Zaniboni, F., 2005b. The 30 December 2002 landslide-induced tsunamis in Stromboli: squence of the events reconstructed from the eyewitness accounts. Natural Hazards and Earth System Sciences, 5: 763-775. Tinti, S., Maramai, A., Armigliato, A., Graziani, L., Manucci, A., Pagnoni, G, Zaniboni, F., 2006a. Observations of physical effects from tsunamis of December 30, 2002 at Stromboli volcano, southern Italy. Bulletin of Volcanology, 68: 450-461. Figure 2. Runup heights measured in the north-west coast of Stromboli (Tinti et al., 2006a) Tinti, S., Pagnoni, G, Zaniboni, F., 2006b. The landslides and tsunamis of the 30th of December 2002 in Stromboli analyzed through numercal simulations. Bulletin of Volcanology, 68: 462-479. Références 11 Aléas et Tsunami lié à une éventuelle déstabilisation du Piton de la Fournaise Thomas Giachetti(1) Kelfoun Karim(1) Philippe Labazuy(1) (1) Laboratoire Magmas et Volcans, OPGC, Université Clermont II – CNRS – IRD, 5, rue Kessler, 63038 ClermontFerrand [email protected] L’environnement sous-marin de l’île de la Réunion présente de nombreuses évidences que de grands épisodes destructifs, dépassant parfois la centaine de km3, ont affecté l’île. Ces avalanches de débris ont pu donner naissance à des tsunamis potentiellement destructeurs pour l’île elle-même mais aussi pour les côtes avoisinantes. A l’aide de modélisations numériques, nous avons évalué la hauteur de vagues liées à d’éventuelles déstabilisations du Piton de la Fournaise ainsi qu’à des déstabilisations sousmarines du plateau insulaire. Nous avons quantifié cet aléa tsunami sur les côtes réunionnaises et mauriciennes. Notre modèle, basé sur un moyennement vertical des équations de conservation de la masse et de la quantité de mouvement sur topographie réaliste, est issu du modèle développé par Kelfoun et Druitt (2005) pour les effondrements aériens et les écoulements pyroclastiques. Il a été modifié pour prendre en compte deux «fluides» (avalanche de débris et eau de mer) qui interagissent simultanément. Dans un premier temps, nous avons simulé d’anciennes avalanches de débris réunionnaises afin de déterminer le comportement rhéologique de ces événements. Nous montrons que les lois de comportement que nous avions déterminées pour les avalanches de débris aériennes permettent de simuler très correctement les avalanches sous-marines : la présence d’eau semble ne semble donc pas avoir un rôle fondamental sur leur dynamique. Kelfoun Dans le scénario le plus catastrophiste, où nous avons considéré l’effondrement de toute la zone du piton de la fournaise comprise dans l’Enclos, soient 90 km3 de roches, des vagues pluridécamétriques toucheraient St Denis 11 minutes après l’initiation de l’effondrement. L’eau pourrait entrer jusqu’à 5 kilomètres à l’intérieur des terres, touchant des villes comme St André. Des vagues encore plus importantes pourraient toucher l’île Maurice, située dans l’axe de l’effondrement. K. Kelfoun and T.H. Druitt, 2005a. Numerical modelling of the emplacement of the 7500 BP Socompa rock avalanche, Chile. sous presse au J. Geophys. Res., B12202, doi : 10.1029/2005JB003758, 2005. Figure 1. Avalanche de débris liée à l’éventuelle déstabilisation du Piton de la Fournaise et tsunami associé, 300 et 1000 secondes après l’initiation de la déstabilisation. Références 13 Le Système d’Alerte et d’atténuation des effets des Tsunamis dans l’Océan Indien (SATOI) François Schindelé (1) Hélène Hébert (1) (1) Département Analyse Surveillance Environnement (DASE) du CEA, Bruyères-leChâtel, France [email protected] [email protected] Après la catastrophe du 26 décembre 2004, la Commission océanographique Intergouvernementale (COI) de l’Unesco a été mandatée pour coordonner la mise en place du Système d’Alerte et d’atténuation des effets des Tsunamis dans l’Océan Indien. Elle a organisé plusieurs réunions et a décidé en juin 2005 de mettre en place un Groupe Intergouvernemental de Coordination du système d’alerte et d’atténuation des effets des tsunamis dans l’Océan Indien (GIC/SATOI). Ce Groupe s’est déjà réuni deux fois, à Perth en août 2005 et à Hyderabad en décembre 2005. Plusieurs groupes de travail ont été mis en place pour traiter les différentes composantes du système d’alerte : l’évaluation de l’aléa et du risque et la modélisation ; la surveillance géophysique ; la surveillance du niveau de la mer ; la préparation et la prévention. Plusieurs pays ont offert des équipements dont des stations sismiques et des stations de mesure du niveau de la mer. La France a mis en place un centre opérationnel à la Réunion où sont réceptionnés les messages d’alerte du PTWC et du Japon. Si nécessaire, il peut retransmettre ces messages aux autres pays de la région. Les données des stations sismiques du réseau Geoscope de l’océan indien sont réceptionnées à la Réunion ainsi que celles des stations marégraphiques du réseau mondial permanent d’observatoires du niveau de la mer GLOSS coordonnées par la COI. Une station marégraphique de la Réunion va être modernisée et une autre installée sur l’île de Madagascar. Météo-France a également mis à niveau les systèmes de télécommunication au Kenya, à Madagascar et en Tanzanie. Le système d’alerte au tsunami dans l’océan indien est composé d’un réseau de centres d’alerte nationaux où sont transmises les données géophysiques et de mesure du niveau de la mer. Le Département Analyse Surveillance Environnement du CEA a modernisé en Indonésie trois réseaux régionaux et installé trois systèmes d’alerte aux forts séismes et aux tsunamis TREMORS® dans trois régions différentes. Les données d’une vingtaine de stations sismiques sont traitées automatiquement et envoyées au centre d’alerte national de Jakarta. La COI a été chargée de moderniser une vingtaine de stations du réseau GLOSS qu’elle coordonne et d’en rajouter une dizaine, essentiellement dans les régions les plus exposées que sont l’Indonésie, la Thailande, la Malaisie (Figure 1). Schindelé Depuis avril 2005, le PTWC assure avec le centre japonais d’alerte aux tsunamis la mission de centre provisoire d’alerte pour l’océan indien. Il reçoit les signaux d’une quarantaine de stations sismiques et d’une trentaine de stations de mesure du niveau de la mer situées dans et autour de l’océan indien. Les données de ces stations sont envoyées à d’autres centres d’alerte nationaux. Les critères d’alerte sont identiques à ceux Ces équipements et systèmes de transmission et de traitement font parti du système international d’alerte aux tsunamis de l’Océan Indien auxquels ils contribuent à son efficacité et à sa rapidité. Le DASE a également mené une étude d’évaluation de l’aléa tsunami au niveau de l’océan indien a été réalisée par simulation numérique. Les résultats, dus à la particularité du phénomène tsunami que les vagues partent avec une énergie maximale perpendiculairement à la zone de rupture du tremblement de terre , et minimales dans la direction de la zone de rupture, expliquent pourquoi les côtes du Nord de Sumatra, de Thailande, du Sri-Lanka, du Sud- de l’Inde et des Maldives ont été très touchées par le tsunami, alors que les côtes du sud de Sumatra, de Java et de l’Australie n’ont as été affectées. En déplaçant les zones de rupture le long des côtes de l’Indonésie, on s’aperçoit que les côtes touchées par un éventuel tsunami concernent selon les cas différents pays. Les résultats montrent en particulier que certaines parties de la zone de subduction de la sonde sont dangereuses pour les îles Mascareignes alors que d’autres le sont beaucoup moins (Figure 2). Ces résultats doivent être pris en compte dans le plan de secours spécialisé tsunami de chaque région. H. Hébert, F. Schindelé, A. Sladen, Comprendre et prévenir les tsunamis. Les apports de la simulation numérique. Annales des Mines, n°40 « Les Catastrophes naturelles », 35-47, 2005 F. Schindelé, Alerte au tsunami, METMAR, N°210, pp 10-13, mars 2006. F. Schindelé, H. Hébert., La surveillance des tsunamis trans-océaniques, Pour La Science, dossier N°51, pp. 66-69, 2006. Figure 1. Carte des stations de mesure du niveau de la mer contribuant au SATOI en août 2006 (marégraphes en rond rouge et stations en eau profonde en triangle bleu) Figure 2. Hauteur maximale des vagues de tsunami calculées dans l’océan Indien pour deux séismes : à gauche celui du 26 décembre 2004 au nord de Sumatra, d’une magnitude de 9,2, à droi e un séisme de même magnitude attendu au sud-ouest de l’île. Les vagues les plus hautes (en rouge) associées au premier séisme se dirigent vers l’ouest au sud du Sri Lanka et de l’Inde, aux Maldives, et vers l’est vers le nord de Sumatra et la Thaïlande, conformément aux dégâts observés. Pour le second, elles se propagent vers le sud-ouest de l’océan Indien, et frappent l’île Maurice, la Réunion puis Madagascar. Références 15 Plan d’action post-tsunami du MESR Jean-Paul Montagner(1) Institut de Physique du Globe, 4 place Jussieu, 75252 Paris Cedex 05 [email protected] Montagner Le 26 Décembre 2004, le séisme de forte magnitude de Sumatra et le tsunami qui s’en est suivi (figure 1) ont rappelé l’imprédictibilité à ce jour des tremblements de terre, les effets naturels secondaires qu’ils peuvent engendrer et leur caractère meurtrier et dévastateur. La faible occurrence de ces phénomènes associée à une forte intensité les rendent d’autant plus redoutables que leur mémoire s’estompe rapidement. L’océan Pacifique, siège de manifestations tsunamiques importantes, a été doté depuis longtemps d’un dispositif de surveillance des tsunamis (PTWC : Pacific Tsunami Warning Center), regroupant vingt six pays dont la France et auquel contribue fortement le CEA/DASE. Rien de tel n’existait dans l’Océan Indien et d’autres zones directement exposées comme les Antilles et la Méditerranée, suite à divers géohasards naturels ou résultant de l’action de l’Homme (séismes, volcanisme, instabilité des marges, glissements de terrains, etc ;). Cependant, alors qu’il est impossible à l’heure actuelle, de prédire les séismes sur une échelle de temps de la journée, de la semaine et même de l’année, des solutions techniques existent pour constituer des réseaux de surveillance et de participer au développement in fine des systèmes d’alerte précoces opérationnels qui limiteront les pertes en vies humaines et les dégâts matériels, notamment dans le cas où le séisme engendre un tsunami. Cette catastrophe a provoqué une immense émotion dans le monde entier et le plan d’action du Ministère de la Recherche, lancé dès janvier 2005, a proposé des éléments de réponse de la communauté scientifique nationale à cet événement majeur, et précisé sa contribution à l’effort national et international. Ce plan d’action visait à améliorer: • la compréhension des phénomènes ; • la capacité de prédiction et de prévention ; • la rapidité de la prédiction Il avait pour objectif de dégager les actions concrètes pouvant être lancées à court, moyen et long termes, à la fois en identifiant les thématiques scientifiques et technologiques transversales, et en sélectionnant les chantiers où des efforts de recherche importants doivent être entrepris. Il doit permettre d’identifier, quantifier et cartographier les failles à terre et en mer, de modéliser et approfondir la compréhension des phénomènes de rupture, de glissement de terrain et de volcanisme à l’origine de tsunamis. Il s’agit de définir les zones présentant un risque majeur vis à vis des séismes et des effets d’un tsunami et d’élaborer des scénarios et des cartes prévisionnelles de hauteur de vagues attendues ainsi que des cartes de submersion pour les régions ou sites les plus menacés. La mise en œuvre de moyens logistiques lourds est envisagée (réseaux de capteurs à terre et en mer, navires, satellites….). La première étape porte essentiellement sur l’état des données existantes et leur mise en commun, l’élaboration d’une feuille de route, les observations post tsunamiques de l’océan indien. Les actions de moyen et long termes concernent la constitution des partenariats internationaux qui seront nécessaires pour atteindre, région par région, les objectifs précités. La réalisation de systèmes de surveillance opérationnels pérennes doit être envisagée sous l’égide de l’UNESCO par exemple (réseau de capteurs à terre et observatoires de fond de mer, centre de traitement des informations), probablement dans le cadre de GMES et de GEOSS. Ce plan d’action a dors et déjà permis de lancer dès 2005, des campagnes de terrain à terre, en mer dans l’océan indien en vue de mieux comprendre le contexte géodynamique dans lequel se sont produits le tremblement de terre et le tsunami de Sumatra (campagnes d’été du Marion Dufresne en 2005 et 2006). Par ailleurs, plusieurs régions géographiques sont identifiées l’océan Indien, en distinguant le nord-est et le sud-ouest où la France dispose de plusieurs stations d’observation géophysiques et une bonne présence régionale dans l’île de la Réunion et les terres australes (ainsi que les stations malgaches), notamment grâce au Réseau GEOSCOPE et bien sûr la Méditerranée occidentale et les Antilles (figure 2). Ces deux dernières régions constituent les zones hautement sismiques qui concernent le plus directement la France. Enfin, il a permis de lancer en 2005 un programme ambitieux à l’ANR (Agence Nationale de la Recherche), « Catastrophes Telluriques » doté d’environ 5M€, ce qui constitue un saut quantitatif important comparé aux anciens programmes de l’INSU ou du FNS (Fonds National de la Science). Sur le long terme, ce plan propose le développement de systèmes de survellance dans ces 3 régions. De tels systèmes, pour être efficaces, nécessitent des moyens humains et financiers qui s’apparentent aux Très Grands Equipements, d’un ordre de grandeur très supérieur à ceux mis en place jusqu’à présent. Figure 1. Localisation des séismes de Sumatra du 26/12/04 et du 28/03/2005 et de leurs répliques (document du Laboratoire de Tectonique/IPG paris) Figure 2. Sismicité historique aux Antilles (Document Laboratoire de sismologie, IPG) La réussite de ce plan d’action ambitieux nécessite de réunir plusieurs conditions : Il faut réussir à mobiliser la communauté scientifique sur ces programmes, développer l’interaction entre recherche amont et recherche finalisée (en distinguant mais en coordonnant réseaux de surveillance et systèmes opérationnels), la synergie entre les segments terre-mer-espace (GMES/GEO), la coordination interministérielle (MR, MEDD, MAE, DOM-TOM, MI, ….) et la coopération internationale (UNESCO, G8). 17 Pourquoi un système d’alerte tsunami est-il nécessaire en Méditerrannée et dans la partie Nord-Est Atlantique : les plans ICG/NEAMTWS Stefano Tinti (1) (1) Department of Physics, Sector of Geophysics, University of Bologna, Italy Tsunamis are rare events that occur in all basins of the globe: in the Pacific Ocean, in the Indian Ocean, in the Atlantic and even in the Mediterranean. The NGDC, USA, catalogue counts about 2000 tsunami events over the last 4000 years. Of course, quantity and quality of data increase with time: data on ancient-time events are scarce and come only from regions with long historical and archiving tradition. Restricting to the last century data, one observes that 77% of tsunamis occurred in the Pacific, 10% in the Atlantic, 9% in the Mediterranean and 4% in the Indian Ocean. Before the 26 December 2004 catastrophic tsunami of Sumatra, only the Pacific Ocean was protected by a Tsunami Warning System consisting of a basin-wide system based in Hawaii and of a series of national systems operating in several countries like Japan, Chile, Alaska, etc. The activities of the TWS are coordinated by an Intergovernmental Coordination Group (ICG/PTWS) in the frame of the IOCUNESCO (Intergovernmental Oceanographic Commission). In 2005, the IOC created three more ICG covering the other main basins: the IOC/IOTWS for the Indian Ocean, the ICG/NEAMTWS for the region embracing the North-East Atlantic and the Mediterranean, and the ICG/CAREWS for the Caribbean sea. Tinti Considering the catalogue of the tsunamis in the Euromediterranean region (see Figure 1), one notes that tsunamis are mostly clustered in the latitude belt between 35°-45° involving northern Africa and southern Europe coasts, though relevant tsunami cases have occurred also in the north Europe seas, both in prehistoric and historical times. Figure 1. Map of tsunamis in the Euro-mediterranean region (Integrated GITEC catalogue spanning the period from the Holocene Storegga slide tsunami up to present time) The main motivations for the creation of the ICG/ NEAMTWS are that: • No effective regional tsunami early warning system was in place in the north-eastern Atlantic, in the Mediterranean and connected sea in June 2005, when the ICG was established. • The effects of a large tsunami in the area would be more disastrous than in the case of historical events, given the huge increase in coastal development in modern times. • These areas include countries with different levels of resources and development and the assistance to disasterprone developing countries to set up national strategies and plans of actions is to be considered as a high-priority task. The main objectives of the ICG are: • To organize and facilitate, as appropriate, the exchange of seismic, geodetic, sea-level and other data in or near real-time and information required for interoperability of the ICG/NEAMTWS. • To promote the sharing of experience and expertise related to tsunami warning and mitigation for the northeastern Atlantic, the Mediterranean and connected seas. • To promote the establishment and further development of national tsunami warning and mitigation capacities in accordance with standard protocols and methods; • To develop, adopt and monitor implementation of work plans of the ICG/NEAMTWS, and to identify required resources. • To promote implementation of relevant capacitybuilding. • To liaise and coordinate with other tsunami warning systems. • To liaise with other relevant organizations, programmes and projects. • To promote the implementation of the ICG/NEAMTWS within a multi-hazard framework. • To keep under constant scrutiny the status of the system and how it satisfies the needs. The main milestones of the ICG can be summarised as: • Formulation of the “Action Plan” within 2006. • Implementation of the first core of the TWS within 2007. 19 Le programme GEOSCOPE et le CNATOI Geneviève Roult Institut de Physique du Globe de Paris, 4 place Jussieu, 75232 PARIS [email protected] Roult GEOSCOPE fut le premier réseau à développer des stations sismiques numériques large-bande, dès 1982, bénéficiant de la mise sur le marché du sismomètre STS1 à contre-réaction, caractérisé par une grande dynamique, un large domaine de fréquences permettant d’abolir la frontière traditionnelle en sismologie entre longues et courtes périodes. GEOSCOPE avait pour but l’installation d’un réseau mondial de 25 stations sismologiques large bande à 3 composantes et à enregistrement numérique. Ce programme est sous la responsabilité de l’IPGP de Paris, l’EOST de Strasbourg et l’IRD de Bondy. Des organismes extérieurs, l’IPEV, les Universités de Californie, de Mexico, du Chili, du Brésil, le CNES, le CEA/DASE, l’USGS/IRIS participent également à l’installation et la maintenance des stations. A ce réseau est associé un Centre de Données situé à l’IPGP, chargé de la gestion des données des stations GEOSCOPE et de leur mise à disposition à la communauté scientifique internationale. Aujourd’hui le réseau comprend 28 stations opérationnelles. Depuis 1982, d’autres projets ont vu le jour (USA, Japon, Italie, Chine, Allemagne..) et nous unissons nos efforts au sein d’une Fédération, la FDSN (Fédération des Réseaux Digitaux Mondiaux) pour fournir le plus rapidement possible à la communauté scientifique des données de grande qualité. Les sismomètres STS1 ne sont plus fabriqués ni même réparés par Streckeisen, malgré d’excellentes performances, ce qui les rend ‘précieux’ au niveau scientifique, en particulier pour les études à basse fréquence. L’importance de GEOSCOPE au sein de la FDSN réside dans le fait qu’actuellement 80% de nos stations sont toujours équipées de STS1, de qualité supérieure à la seconde génération de sismomètres, les STS2. En 2002, lors d’un ‘Conseil Scientifique’ réunissant nos autorités de tutelle, tous les partenaires du programme, les représentants de la FDSN (Federation of Digital Seismograph Networks) et du Centre de Données européen ORFEUS ainsi que des chercheurs français utilisateurs des données GEOSCOPE, les objectifs de GEOSCOPE ont été clairement redéfinis : • redéploiement l’hémisphère Sud des • modernisation d’acquisition et stations, en particulier standardisation • transformation des stations observatoires multi-paramètres de la dans chaîne sismologiques en • transmission de données en temps quasi-réel En 2002 nous avons initié ces changements et commencé la modernisation du réseau, avec en particulier l’installation de nouveaux numériseurs 24 bit, de microbaromètres et de thermomètres. Depuis 2004 l’effort se poursuit avec en plus la transmission des données en temps quasi-réel vers le Centre de Données de Paris. Nos objectifs sont de : • coordonner le choix des sites, équiper prioritairement l’hémisphère Sud moins instrumenté • maintenir un standard de qualité (24bits, très large bande, 20pts/s...) • faire évoluer le format d’échange des données (SEED / Standard for Exchange of Earthquake Data) • transmettre les données en temps quasi-réel dans les différents Centres de Données • valider rapidement la qualité des données (temps, réponses instrumentales) • mettre en réseau les différents Centres de Données, en particulier au niveau européen • favoriser plus encore la circulation libre des données. La présence de stations GEOSCOPE dans l’Océan Indien est stratégiquement importante pour le fonctionnement d’un centre d’alerte dans cette région. L’IPGP et le programme GEOSCOPE se sont engagés à participer au CNATOI (Centre National d’Alerte aux Tsunamis dans l’Océan Indien). Notre contribution consiste d’une part à tout mettre en œuvre pour une mise à disposition en temps quasi-réel des données de nos stations actuelles (7 stations) et d’autre part, si cela est possible, à installer 1 ou 2 stations supplémentaires dans la région. Figure 1. Map of tsunamis in the Euro-mediterranean region (Integrated GITEC catalogue spanning the period from the Holocene Storegga slide tsunami up to present time) 21 Apports de la télédétection spatiale à la connaissance du Piton de la Fournaise Valérie Cayol(1) Yo Fukushima(1) Pierre Tinard(1) Jean-Luc Froger(1) Philippe Durand(2) Thierry Souriot(1) Didier Massonnet(2) (1) Laboratoire Magmas et volcans, CNRS-UMR 6524, Univ. B. Pascal, OPGC, Clermont-Ferrand, (2) Centre National d’études spatiales, Toulouse, France [email protected] Cayol Depuis le début des années 90, une technique satellitaire, basée sur la comparaisons d’images radar, est utilisée pour mesurer les déplacements du sol. Cette technique, appelée interférométrie radar, fournit des mesures avec une résolution spatiale de la dizaine de mètres sur des surfaces de plusieurs dizaines de kilomètres et avec une précision de l’ordre du centimètre. Au Piton de la Fournaise, l’interférométrie radar est utilisée depuis 1998 pour détecter les mouvements liés à l’activité magmatique. Ainsi, on a pu enregistrer les déplacements associés aux 5 éruptions survenues entre 1998 et 2000 (satellite canadien RADARSAT-1), et aux 10 éruptions survenues depuis l’été 2003 (satellite européen ENVISAT). Au cours des éruption, l’interférométrie permet aussi de suivre la mise en place des coulées de lave. Récemment, des inflations liées au remplissage d’un réservoir ont été détectées avant les éruptions. L’interférométrie radar permet aussi de déceler les mouvements post-éruptifs liés par exemple au refroidissement des fissures éruptives ou à la compaction des coulées de lave. Outre l’activité volcanique, l’île de la Réunion est le lieu de nombreuses avalanches de débris et glissements de terrains (Oelher et al., 2004). La surveillance systématique du volcan réalisée par interférométrie depuis 2003 a permis de mettre en évidence un glissement lent de la bordure nord-est du cirque de Mahavel. Pour interpréter les mouvements de surface, on s’appuie sur des modèles qui reflètent notre vision de la réalité. Si ces modèles sont suffisamment simples, ils peuvent être décrits par quelques équations et calculés en peu d’opérations (ils sont dits analytiques), mais dès qu’ils sont plus complexes, des procédures informatiques sont nécessaires (les modèles sont dits numériques). Lorsque les mesures de déformations consistent en quelques points à la surface du sol, notre visions des phénomènes est simple et on peut se contenter de modèles analytiques dans lesquels les réservoirs sont supposée sphériques, les fissures éruptives sont assimilées à des rectangles et la surface du sol est plane. L’interférométrie radar a montré que les déplacements du sol sont complexes et variés, si bien qu’ils ne peuvent être interprétés avec ces modèles simples souvent encore utilisés. Pour interpréter les interférogrammes co-éruptifs du Piton de la Fournaise, nous avons développé une méthode qui combine une modélisation numérique des déplacements en 3D et une procédure d’inversion des données (Fukushima et al., 2005). L’inversion consiste à déterminer les modèles qui se rapprochent le plus des données. En utilisant cette méthode pour les éruptions de 1998 à 2000, nous avons déterminé que le magma se propage dans le volcan dans des fissures peu profondes (moins de 1000 m) et allongées latéralement (Figure 1). Ceci est cohérent avec les observations visuelles et les données d’inclinométrie continues (Staudacher et al., 2000) qui indiquent que les fissures éruptives se propagent depuis la région sommitale vers l’aval du volcan. On peut donc en déduire que, superficiellement, le magma se propage latéralement depuis la région sommitale vers l’aval du volcan. D’autre part, avant les éruptions des essaims sismiques allongés verticalement (Battaglia, 2001) se produisent à des profondeurs variant entre 2500 m sous le sommet et la base des fissures déterminées grâce aux données satellitaires (Figure 1). Simultanément aux essaims sismiques des variations d’inclinaison sont enregistrées. Ces deux types de signaux sont dus au passage du magma. Nous avons montré qu’un conduit ayant la forme d’une fissure allongée verticalement pouvait expliquer l’amplitude du signal d’inclinaison, tandis qu’un conduit en forme de cylindre ne le pouvait pas. Ce conduit n’est pas visible sur les données d’interférométrie soit parce qu’il est trop étroit, soit parce qu’il s’est refermé après le passage du magma. Le transfert du magma est donc vertical en profondeur et latéral Battaglia, J., Quantification sismique des phénomènes magmatiques sur le Piton de la Fournaise entre 1991 et 2000, thèse de doctorat, Université Paris 7 Denis Diderot, 2001. Fukushima Y., V. Cayol and P. Durand, Finding realistic dike models from interferometric synthetic aperture radar data: The February 2000 eruption at Piton de la Fournaise, J. Geophys. Res., 110, Figure 1. Vue de l’est des différentes fissures éruptives créées au Piton de la Fournaise entre mars 1998 et juin 2000. Ces dykes ont été déterminés par la modélisation numérique des déplacement de surface enregistrés par le radar du satellite Canadien RADARSAT-1. Les hypocentres des séismes ayant précédé l’éruption sont aussi représentés en vert. B03206,doi: 10.1029/2004JB003268, 2005. Oehler J.F, P. Labazuy, J.F. Lénat, Recurrence of major flank landslides during the last 2-Ma-history of Reunion Island, Bull. Volcanol., 66, 585-598, 2004. Staudacher T., N. Villeneuve, J.-L. Cheminée, K. Aki, J. Battaglia, P. superficiellement. Ce changement de direction de transfert est mécaniquement cohérent avec un niveau d’équilibre du magma situé au niveau des fissures éruptives superficielles. Ce niveau d’équilibre pourrait correspondre à une zone de stockage superficielle du magma dans l’édifice. Catherine, V. Ferrazzini and P. Kowalski, Piton de la Fournaise, Bull. Global Volcanism Network, 25(7), 14-16, 2000. Références 23 Le Pacific Tsunami Warning Center (PTWC) François Schindelé (1) Charles McCreery (2) (1) Département Analyse Surveillance Environnement (DASE) du CEA, Bruyères-leChâtel, France (2) Pacific Tsunami Warning Center (PTWC) , NOAA, Honolulu, Hawaii, USA [email protected] [email protected] Schindelé Le Centre d’alerte aux tsunamis du Pacifique (PTWC) a été mis en place dès 1965 par le Groupe Intergouvernemental de Coordination du système d’alerte aux tsunamis dans le Pacifique (GIC/SATP) de la Commission océanographique Intergouvernementale (COI) de l’Unesco, créé en 1965. Ce centre, centre national d’alerte aux tsunamis américains pour les îles Hawaii, constitue le centre opérationnel du SATP et est hébergé par la NOAA à Honolulu. Sa mission est de fournir aux centres d’alerte nationaux et à tous les Etats Membres des messages d’information et d’avis en cas de fort tremblement de terre et de risque de tsunami dans l’océan Pacifique, en accord avec le Plan de Communication défini par le GIC/SATP. La décision de mise à l’abri de la population ou d’évacuation est du ressort des autorités nationales de protection civile, de même celle de permettre à la population de retourner au bord de mer. Le PTWC est opéré par deux géophysiciens 24h/24, 7j/7, l’un de permanence et l’autre d’astreinte. Ce centre réceptionne les données sismologiques temps-réel d’une centaine de stations implantées autour et dans le Pacifique, maintenues par plusieurs pays. Des logiciels traitent automatiquement les signaux, détectent les ondes sismiques, localisent les épicentres et calculent la magnitude et le moment sismique. Dès qu’un séisme dépasse la magnitude 6.5, les résultats sont analysés par les géophysiciens. Les données temps-réel d’une centaine de stations de mesure du niveau de la mer implantées le long des côtes et dans l’océan Pacifique et maintenues par plusieurs pays parviennent également au PTWC (Figure 1). Les signaux de ces stations sont les seules mesures in situ du tsunami qui permettent de confirmer si un tsunami a été induit par un séisme ou non. En fonction des résultats et en accord avec le plan de communication mis en place par le GIC/SATP, un ou plusieurs messages d’information et alerte sont disséminés. Les critères d’alerte ont été définis à partir des données historiques (Figure 2) et tiennent compte qu’un tsunami local peut être induit par un séisme de magnitude 7.0, un tsunami régional à partir d’une magnitude 7.5, et un tsunami à l’échelle de l’océan peut être induit dès que la magnitude dépasse 7.9. Dès réception de nouvelles données qui confirment qu’un tsunami est entrain de se propager, de nouveaux messages sont envoyés incluant les mesures d’amplitude des vagues ainsi que le temps d’arrivée prévu du tsunami en certains points le long des côtes du Pacifique. Enfin, lorsque le tsunami a traversé le Pacifique et que son amplitude est devenue négligeable, un message de fin d’alerte est envoyé. Depuis avril 2005, le PTWC assure avec le centre japonais d’alerte aux tsunamis de Tokyo (Japan Meteorological Agency) la mission de centre provisoire d’alerte pour l’océan indien. Il reçoit les signaux d’une quarantaine de stations sismiques et d’une trentaine de stations de mesure du niveau de la mer situées dans et autour de l’océan indien. Les données de ces stations sont envoyées aux centres d’alerte nationaux de l’Océan Indien. Les critères d’alerte sont identiques à ceux définis pour le Pacifique. Depuis mai 2006, le PTWC assure la mission de centre provisoire d’alerte pour les Caraïbes et les mers adjacentes. Il reçoit les signaux d’une vingtaine de stations sismiques et d’une dizaine de stations de mesure du niveau de la mer situées dans et autour des Caraïbes. En Polynésie française, le laboratoire de géophysique (LDG) du CEA de Tahiti a mis en place dès les années soixante le centre polynésien de prévention des tsunamis. Il a comme mission de prévenir les services de protection civile de Polynésie française en cas de fort séisme qui pourrait induire un tsunami dangereux pour les côtes de Polynésie française. Le LDG a implanté le réseau sismique polynésien (Figure 1) qui lui permet de surveiller l’activité sismique importante du Pacifique et a mis au point le système d’alerte au fort séisme TREMORS®. Le CEA qui participe à la mise en place du Plan de Secours Spécialisé tsunami et au Plan de Prévention des Risques a défini des critères d’alerte adaptés au contexte de la Polynésie française située au centre de l’océan sud de l’Océan Pacifique. La Polynésie peut être atteinte entre 3 heures et 10 heures par des tsunamis en provenance de tout le pourtour du Pacifique. La zone de subduction des Tonga constitue la zone la plus proche de la Polynésie et celles d’Amérique du sud et des Aléoutiennes les zones les plus fréquemment dangereuses, en particulier pour les îles Marquises non protégées par une barrière de récif corallien. C. MCCREERY, Impact of the National Tsunami Hazard Mitigation Program on Operations of the Richard H. Hagemeyer Pacific Tsunami Warning Center, Natural Hazards, Vol. 35, pp. 73 – 88, 2005 F. SCHINDELÉ et al, Analysis and automatic processing in near-field of eight 1992-1994 tsunamigenic earthquakes : improvements towards real-time tsunami warning, in Pure and Appl. Geophys., vol. 135, pp. 361-382, 1995. F. SCHINDELÉ, D. REYMOND, H. HÉBERT et al., Les risques naturels d’origine géophysique aux îles Marquises (Polynésie française), Géologie de la France, vol. 2, pp. 37-50, 2002. Figure 1. Carte du réseau de mesure du niveau de la mer contribuant au SATP ; en agrandit, carte du Réseau Géophysique et marégraphique de Polynésie française implanté et maintenu par le DASE. Figure 2. Critères de magnitude et profondeur pour l’envoi des messages d’information et d’alerte Références 25 La modélisation des cyclones tropicaux Westrelin Samuel Météo-France, Laboratoire de l’Atmosphère et des Cyclones, UMR CNRS – Météo-France – Université de la Réunion Les cyclones comptent parmi les phénomènes naturels les plus dévastateurs. Ce sont des perturbations atmosphériques tourbillonnaires occasionnant, en particulier, des vents violents et des pluies diluviennes. Le cyclone se caractérise par une énorme masse nuageuse d’un diamètre moyen de 500 kilomètres avec un oeil, zone centrale « d’accalmie », d’un diamètre de l’ordre de 40 km en moyenne où les vents sont faibles et le ciel peu nuageux (figure 1). L’activité nuageuse est organisée en bandes spiralées qui convergent vers un anneau central entourant l’oeil, constituant un véritable « mur de l’oeil », où les pluies sont torrentielles et les vents maximaux (intensité du cyclone), proches de la surface et d’une violence extrême. Face à ce danger, l’ensemble des pays concernés a mis en oeuvre des moyens de surveillance, réunis au sein des services météorologiques nationaux et s’appuyant sur des technologies de pointe parmi lesquelles figure la modélisation. La modélisation des cyclones permet de se projeter dans le futur et de prévoir leur évolution, en particulier de leur trajectoire et de leur intensité. Westrelin Les prévisions opérationnelles de trajectoire, issues de l’expertise humaine, enregistrent des progrès réguliers depuis une vingtaine d’années, parallèlement aux progrès des modèles qui constituent le principal support du prévisionniste. Celles d’intensité, quant à elles, ont vu leur qualité quasiment stagner sur la même période. Dans les modèles utilisés opérationnellement de nos jours, l’atmosphère est représentée par des boîtes d’échelle horizontale environ 40 kilomètres et d’échelle verticale de l’ordre de 100 mètres. Cette représentation permet de bien appréhender les phénomènes de grande échelle, typiquement le flux qui va gouverner la trajectoire du cyclone, mais de manière très schématique un cyclone et les processus physiques et dynamiques dont il est le siège. Cependant, une nouvelle génération de modèles capables de tourner à haute résolution (typiquement de l’ordre du kilomètre horizontalement) et couplés à des modèles océaniques arrive à maturité dans le monde de la recherche. Ils décrivent mieux les processus physiques et dynamiques clés ayant lieu au coeur du cyclone et sont prometteurs pour les prévisions d’intensité (figure 2). Les progrès informatiques permettront à ces modèles de fournir des prévisions en temps réel dans un futur proche. Figure 2. Force du vent horizontal de Dina simulée par un modèle météorologique à 4 km de résolution horizontale, le 22 janvier 2002 à 14h UTC (échéance 14h) au niveau 850 hPa soit environ 1500m. L’échelle de droite est en mètres par seconde (1 m/s représente 3,6 km/h). Le modèle représente le cyclone Dina avec un oeil bien identifié, de forme elliptique et de taille réaliste. Le mur de l’oeil est bien visible, figuré par les couleurs chaudes représentant les vents forts, et ses asymétries sont bien représentées avec les vents maximaux qui se situent dans le secteur sudouest. En aval de l’île de la Réunion (le flux cyclonique traverse l’île du sud-est vers le nord-ouest) apparaît nettement un panache correspondant à une zone de vent plus faible. Figure 1. Une image satellitaire classique (composition colorée des canaux infra-rouge et visible) du satellite géostationnaire Météosat 5 du 22 janvier 2002 à 15h UTC montrant le cyclone DINA. L’oeil du cyclone au centre de la masse nuageuse est bien visible. Le mur de l’oeil, zone des vents maximaux, est très proche de l’île de la Réunion: les vents ont soufflé jusqu’à 250 km/h dans les hauts de la Réunion. 27 La surveillance operationnelle des cyclones tropicaux dans le sud-ouest de l’ocean Indien Philippe Caroff (1) (1) Météo-France, Direction Interrégionale de La Réunion [email protected] La Direction Interrégionale de Météo-France à La Réunion a été désignée officiellement comme Centre Météorologique Régional Spécialisé (CMRS) / Cyclones Tropicaux pour le Sud-Ouest de l’océan Indien lors de la 45ème session du Conseil Exécutif de l’Organisation Météorologique Mondiale (Genève, Juin 1993), avec effet au 1er juillet 1993. La principale mission du CMRS de La Réunion est de fournir aux 14 Membres du Comité des Cyclones Tropicaux du Sud-Ouest de l’océan Indien (Afrique du Sud, Botswana, Comores, France, Lesotho, Madagascar, Malawi, Maurice, Mozambique, Namibie, Seychelles, Swaziland, Tanzanie, Zimbabwe), toute l’information possible (analyses, prévisions, discussions,...) sur les différentes perturbations tropicales amenées à évoluer dans sa zone de responsabilité. Cependant, au-delà de cette fonction opérationnelle essentielle, le CMRS a également vocation à être le pôle régional pour toutes les questions touchant aux cyclones tropicaux, par exemple, dans le cadre de la Recherche/ Développement et celui de la formation. En dehors de cette responsabilité internationale, La Direction Interrégionale de Météo-France à La Réunion exerce naturellement une responsabilité locale de prévention du risque cyclonique, dans le cadre de sa mission première de contribution à la sauvegarde des personnes et des biens. Elle est de fait un maillon essentiel de la chaîne de prévention, définie par le « Plan de Secours Spécialisé » Cyclones, notamment au travers du système d’alerte cyclonique. Caroff Pour assurer sa mission opérationnelle, Météo-France s’est dotée des moyens technologiques et humains nécessaires pour pouvoir suivre H24 à l’année toute perturbation tropicale amenée à se former ou à évoluer sur sa zone de responsabilité. Le suivi cyclonique fait appel à des outils et méthodes d’analyse et de prévisions spécifiques, faisant l’objet d’un effort tout particulier de la communauté météorologique internationale. Cette présentation s’en fera succinctement l’écho. 29 Les conséquences du cyclone Katrina sur les côtes du golf du Mexique et les îles Barrières Hermann M. Fritz(1) (1) Civil & Environmental Engineering, Georgia Institute of Technology, Savannah, GA, USA [email protected] Hurricane Katrina (23-30 August 2005) was the costliest and one of the five deadliest hurricanes to ever strike the United States. Katrina made landfall, at the upper end of Category 3 intensity (central pressure 920 mb, the lowest pressure measured in an Atlantic basin storm of equal intensity) with estimated maximum sustained winds of 200 km/h, near Buras, Louisiana at 11:10 UTC 29 August 2005 and its subsequent final landfall at the Louisiana/Mississippi border (Knabb et al., 2005). Katrina struck low-lying coastlines particularly vulnerable to storm surge flooding. The widespread failure of tide gauges along the Mississippi and Louisiana shores required survey teams to collect high water marks to document the surge height. Reconnaissance teams led by the author surveyed the effects of the storm in Florida, Alabama, Mississippi and Louisiana during September and October, 2005. Maximum storm tides, overland flow depths, and inundation distances were measured. Sediment samples from storm deposits were collected and erosion documented. Perishable infrastructure damage was recorded at various scales. The elevations of water marks on buildings, scars on trees, and rafted debris were measured as indicators of the maximum storm tide (Figure 1). Fritz Figure 2 shows the measured Katrina high water marks along with the high water profile from Hurricane Camille in 1969 (USACE, 1970). The storm surge was the primary cause of the high water marks. However wave action and wind also contributed and are not separated out. The storm tide peaked to the East of Katrina’s path and was consistently measured between 7 and 10 meters along a 60 km stretch of Mississippi coastline from Lakeview (20 km east of center) to Ocean Springs (80 km east of center). Even along the hardest hit coastline, buildings designed to resist peak hurricane winds were only marginally damaged on upper floors, while walls were blown out on the lower floors. The surge penetrated to at least 10 km inland near Waveland and up to 30 km inland at Pearl River, Mississippi, where the center made landfall. Further to the east along the Alabama coast the high water marks dropped below 5 meters. Nevertheless, more than 2 meter high water marks were measured 240 km east of the Katrina’s track along Florida’s panhandle. The barrier islands 10 to 20 km offshore the Mississippi and Alabama coast were completely over washed by storm tide elevations as measured directly onshore. The high water marks dropped more quickly to the west reaching 2 meters along Lake Maurepas (80 km west of center) resulting in a significant east-west storm tide gradient across Lake Pontchartrain. The high water marks along the intact levee system in New Orleans’s Lakeshore adjacent to the 17th Street Canal did not exceed 5 meters indicating that the 17th Street Canal levee failed prior to overtopping. Hurricanes Katrina’s storm tide exceeded the corresponding envelope of Hurricane Camille at all locations (Figure 2). The massive storm tide produced by Katrina is primarily attributed to the huge size of the storm at landfall with a 50 km radius of maximum winds and hurricane force winds extending 140 km to the east from the center (Knabb et al., 2005). In addition Katrina had already generated large northward-propagating swells as a Category 5 storm in the hours before landfall. Hurricane Camille (1969) was more intense than Katrina at landfall in terms of peak wind velocities (ESSA, 1969). However Camille was far more compact with hurricane force winds extending only 100 km to the east of the center resulting in a narrower storm surge distribution (USACE, 1970). The 6.9 meter maximum high water mark recorded in the aftermath of Hurricane Camille was likely exceeded at Pass Christian (MS) according to eyewitness estimates of 8.5 meters (Hearn, 2004). Another Katrina storm tide enhancing factor is the significant reduction of buffering land area in the Gulf Islands caused by Camille. The combination of land loss due to storms that are increasing in magnitude (Emanuel, 2005) and increasing sea level will likely expose the Gulf of Mexico mainland to higher storm surges than have been recorded in the past. AOML (Atlantic Oceanographic and Meteorological Laboratory, Hurricane Research Division), http://www.aoml.noaa.gov/hrd/Storm_pages/katrina2005/wind.html Emanuel , K. A., Increasing destructiveness of tropical cyclones over the past 30 years. Nature, 436, 686-688 (2005). ESSA (Environmental Science Services Administration). Hurricane Camille - a Report to the Administrator. Washington, DC (1969). Hearn, P.D. Hurricane Camille: Monster Storm of the Gulf Coast. University Press of Mississippi (2004). Knabb, R. D., J. R. Rhome, and D. P. Brown, Tropical Cyclone ReportHurricane Katrina, 23-30 August 2005, National Hurricane Center, http://www.nhc.noaa.gov/pdf/TCR-AL122005_Katrina.pdf (2005) USACE (United States Army Corps of Engineers). Hurricane Camille 14-22 August 1969. Mobile, Alabama (1970). Figure 1. Overland flow depth measurements: (a) bark off tree on East Ship Island (MS, USA); (b) wash-out damage on the steel frame structure of the lighthouse at Beau Rivage Casino in Biloxi (MS, USA). Figure 2. Storm tides of Hurricanes Camille (1969) and Katrina (2005) along the US Gulf of Mexico Coast. Storm tracks and surge elevations from Camille (USACE, 1970) and Katrina are shown, along with areas inundated by Katrina (grey shaded areas). Katrina maximum sustained wind speeds and direction indicators at the time of final landfall (AOML, 2005). Although wind speeds were lower during Katrina, the storm’s massive size caused the higher storm tides. Satellite Imagery modified from Earth Satellite Corporation (EarthSat), ESRI. Références 31 Aide à l’élaboration de scénarios de crise dans le domaine des risques naturels; réflexions générales et exemples de développement potentiel Jean-Louis Nédellec BRGM – Service Géologique Régional de la Réunion [email protected] L’île de la Réunion, du fait de son climat et de son relief, concentre de nombreux phénomènes naturels à risques tels les mouvements de terrain, les inondations, et les cyclones. Afin de limiter les conséquences de ces phénomènes sur les personnes, sur les biens et sur les équipements, l’Etat et les collectivités ont depuis plusieurs décennies engagé une politique de gestion des risques naturels. Traditionnellement, la gestion des risques naturels s’articule autour de 4 axes majeurs : la connaissance des risques, la prévention, la protection et enfin les secours. La connaissance des risques repose d’une part sur l’observation et l’étude dans le milieu naturel des phénomènes dangereux et de leurs conséquences, le retour d’expérience constituant alors un enseignement essentiel, et d’autre part sur la modélisation des phénomènes physiques à l’origine des risques (maquettes, modèles numériques, etc.). Les objectif de ces études sont multiples : identifier les mécanismes à l’origine des phénomènes à risques, définir les paramètres objectifs permettant de localiser les zones exposées, évaluer la vulnérabilité des enjeux menacés. Cette étape, le plus souvent réservée aux techniciens et aux chercheurs, est indispensable pour engager les actions suivantes. La prévention consiste d’abord à identifier les zones exposées aux phénomènes dangereux (cartes d’aléa et cartes de risque). Il s’agit alors d’informer les populations ou les usagers des risques encourus dans ces secteurs (Atlas, Documents Communaux Synthétiques, etc.), mais également d’y réglementer l’urbanisation (Plan Local d’Urbanisme, Plan de Prévention des Risques, etc.). Nédellec Le 3ème axe consiste à mettre en œuvre des mesures de protection, soit empêchant les phénomènes à risques de se développer (ex : murs de soutènement contre les glissements de terrain), soit évitant que des enjeux soient touchés par le danger (ex : fosse piège à blocs), soit en renforçant la vulnérabilité des équipements et des habitations (ex : règles paracycloniques). On soulignera que ces mesures de protection doivent être adaptées aux phénomènes auxquels elles s’opposent et aux enjeux qu’elles protègent. Enfin le dernier axe intervient lorsque la prévention et la protection n’ont pas permis de maîtriser tous les problèmes à l’échelle du territoire. Il s’agit des secours aux victimes et aux biens. Cela passe bien sûr par le réseau d’intervention des sapeurs pompiers et le secteur hospitalier, mais également par l’intervention d’urgence sur les équipement afin de rétablir les réseaux de communication et d’énergie dans les meilleurs délais (EDF, France Télecom, DDE, Conseil Général, etc.). Dans ce contexte, les scénarios de crise sont un lien entre les 3 premières démarches (connaissance, prévention et protection) et les secours d’urgence. En effet, en premier lieu, il s’agit sur une zone d’étude relativement vaste d’identifier les enjeux exposés à des phénomènes à risques. Puis, on applique soit un évènement déclencheur unique de référence, touchant une vaste surface et limité dans le temps (ex : séisme, cyclone, intempéries, tsunami), soit une série d’évènements plus limités sur une durée de temps fixée (ex : mouvements de terrains sur 10 ans). Cette étape a pour objectif d’examiner leur impact sur les enjeux exposés. Les conséquences des phénomènes à risques peuvent être multiples : menaces sur les vies humaines, destruction d’ouvrages, d’habitations, d’équipements, sans abris, dysfonctionnement de réseaux de communication ou d’énergie, pénuries de biens de première nécessité, pertes d’emplois, impact environnemental, etc. Le scénario permettra de quantifier l’impact des phénomènes à risques à l’aide d’indicateurs exploitables (ex : nombre de blessés graves, nombre de sans abris, nombre de foyers non alimentés en électricité, durée coupure de route, montant de réparation, etc.). De plus, ces impacts seront localisés dans espace à l’aide de cartes informatives. Selon le destinataire du scénario, ce dernier peut se focaliser sur un ou plusieurs indicateurs de crises. Par exemple, la protection civile sera en priorité intéressée par les menaces sur les vies humaines et sur les possibilités d’intervention, là où un exploitant routier devra également intégrer les dysfonctionnements sur le trafic. Un distributeur d’énergie sera plus intéressé par la menace directe sur ses installations de production ou de coupure d’alimentation sur des édifices stratégiques. Enfin, l’aspect socio-économique (perturbation du réseau économique, pertes d’emplois) sera essentiel pour des collectivités locales, en plus des menaces sur les vies. L’intérêt des scénarios de risque est multiple : • identifier les secteurs ou les ouvrages les plus problématiques, en intégrant une vision des risques qui va très au-delà des considérations classiques qui s’arrêtent trop souvent à l’aléa. Cela permet de redéfinir les priorités en matière de communication, de prévention et de parades • vérifier si les moyens de secours sont adaptés aux situations de crises : nombre, localisation et nature de ces moyens, réactivité et possibilité d’intervention rapide. Un redéploiement optimal des moyens d’urgence pourra alors être envisagé • examiner les possibilités de mutualisation des moyens de secours sur des secteurs pouvant être débordés • préparer les unités d’urgence d’intervention mieux adaptés à des exercices Dans ce cadre, le BRGM s’engage depuis plusieurs années dans l’élaboration de scénarios dans les domaines des risques naturels. Quelques exemples peuvent être cités: • en matière de risques sismiques, des scénarios ont été réalisés sur les communes de Fort France (Martinique), et de Nice (Alpes Maritimes) – programmes GEMITIS, et sur l’agglomération trans-frontalière entre Nice et Vintimille (frontière franco-italienne) – programme GERIA. De même, un programme transfrontalier entre l’Espagne, la Principauté d’Andorre et la France est en cours d’élaboration – programme Isard. De plus, afin d’optimiser la programmation des PPR sismiques, des scénarios départementaux de risque sismique ont été lancés en métropole, le premier s’achevant sur les Bouches du Rhône • en matière de mouvements de terrain, pour le compte du Ministère de l’Écologie, le BRGM a lancé des pilotes de scénarios départementaux, et des scénarios urbains de risques de mouvements de terrain et d’effondrement de cavités souterraines Sur le territoire de l’île de la Réunion divers programmes peuvent être envisagés pour répondre aux besoins des gestionnaires du risque : • en collaboration avec la protection civile, et sur la base des cartes d’aléa PPR déjà élaborées, il serait possible de mieux intégrer la vulnérabilité physique et fonctionnelle des constructions stratégiques (casernes, hôpitaux, relais télécom, route) et l’exposition des individus en cas de catastrophe majeure (calcul de victimes et de sans abris). Il conviendrait alors d’examiner l’adaptation des moyens de secours à l’urgence virtuellement crée. Plusieurs types de phénomènes pourraient être examinés. Cependant, en plus des risques de mouvement de terrain et d’inondation, traditionnellement envisagés, la prise en compte du risque de Tsunami pourrait induire un nouvel éclairage sur les dangers menaçant le territoire de l’île. A ce titre, le BRGM a développé des modèles de propagation de tsunami tout à fait adaptés à la problématique des scénarios ; • en collaboration avec un gestionnaire routier, il serait possible, en plus de ce qui est fait traditionnellement en matière d’aléa mouvements de terrain, d’intégrer pour une période de temps donnée (par exemple : 5 ans, 20 ans ou 50 ans) la vulnérabilité des éléments à enjeux afin d’évaluer : les secteurs potentiellement les plus dangereux pour les vies humaines, les zones les plus affectées par les coupures de circulation (en fournissant un ordre de grandeur de temps de coupures), et les zones nécessitant le plus de réfection d’ouvrage (avec chiffrage de ces interventions). Ces scénarios permettraient également de proposer des solutions graduelles de mises en sécurité. Grâce à un outil informatique spécifique, il serait possible au gestionnaire routier de tester et de comparer chaque solution de mise en sécurité et d’en vérifier l’impact sur les risques, que cela soit sur un critère de vie humaine, de trafic ou de coût de travaux. Il s’agira alors d’un outil très utile d’aide à la programmation de travaux. 33 Evaluation et cartographie de l’aléa Mouvements de terrains (MVTs) Jean-Louis Nédellec (1) Denis Moiriat (1) (1) BRGM, 5 rue Sainte Anne, 97400 Saint Denis cedex [email protected] La Réunion, de par son relief jeune et son climat tropical humide, est une des régions du globe où l’érosion est la plus active. L’intensité et la brutalité des précipitations qui accompagnent les dépressions cycloniques amplifient l’instabilité naturelle de ces reliefs accidentés. L’aléa «Mouvements de terrains» (MVTs), c’est à dire la probabilité d’occurrence d’un phénomène MVT pour une intensité et une période de retour donnée, est dans beaucoup d’endroits et notamment dans les cirques de niveau très élevé à élevé sur la gamme des cinq niveaux d’aléa MVTs adoptée pour la Réunion (faible, modéré, moyen, élévé, très élevé ou majeur). L’île de La Réunion se découpe en bassins de risques (Fig.1) qui sont des domaines géographiques plus ou moins homogènes au point de vue géomorphologique et où les aléas sont sensiblement de même nature. Ces bassins de risques se regroupent en quatre types : les planèzes régulières (Planèzes ouest, Nord-est et du Sud) ; les planèzes accidentées (Planèzes de La Montagne, Région Est, Grandes Ravines du Sud et Les Makes) ; les trois cirques et leurs embouchures (Mafate, Salazie et Cilaos) ; et le volcan du Piton de la Fournaise. Nédellec Pour chaque bassin, le BRGM réalise des cartographies au 1/ 25 000 de l’aléa MVT depuis 2002 (8 bassins réalisés pour l’aléa MVT). Ces cartographies sont ensuite affinées à l’échelle du 1/ 5 000 et du 1/ 10 000 sur une commune dans le cadre des Plans de Prévention des Risques (P.P.R) ordonnés par l’Etat. Le P.P.R est un document réglementaire et s’inscrit dans une volonté de l’Etat de renforcer la politique de prévention des risques naturels en limitant, dans une perspective de développement durable, les conséquences humaines et économiques des catastrophes naturelles. Que ce soit pour un «porté à connaissance» au 1/ 25 000 ou un «porté réglementaire» tel que le P.P.R. au 1/ 5 000 (secteurs à enjeux) et au 1/ 10 000 (secteurs hors enjeux), l’évaluation de l’aléa MVT à La Réunion se fait toujours par une approche qualitative (type expert). Celle-ci comporte tout d’abord deux phases : une phase analytique consacrée au recueil de l’information de base nécessaire à la mise en œuvre de la seconde phase ou phase de synthèse et d’interprétation qui vise à déduire des données de base ou à produire à partir de celle-ci, une information nouvelle concernant l’aléa. L’analyse du contexte associée à l’expérience acquise sur le terrain, permet d’évaluer les différents facteurs d’instabilités à l’origine des mouvements de terrains. Ces derniers peuvent se produire dans un autre milieu présentant les mêmes facteurs déclencheurs (principe de causalité), et des zones d’aléa homogène peuvent être ainsi identifiées (fig. 2). Figure 1. Carte des onze bassins de risques de La Réunion Figure 2. Extrait d’un zonage de l’aléa MVT réalisé au 1/ 5 000 sur la commune de l’Entre Deux 35 Exemples de La Réunion et des Comores : Retour d’expériences et programmes de recherches pour une meilleure connaissance et gestion du risque volcanique Nicolas Villeneuve(1) Julie Morin(2) Arnaud Van de Casteele(1) Anthony Finizola(2) Hamidou Nassor(2) Hamidi Soulé(3) Le Piton de la Fournaise à La Réunion et le Karthala en Grande Comore sont les deux volcans exondés actifs dans l’ouest du bassin Indo-Océanique (fig.1). Les similitudes et différences sont tout d’abord d’ordre Géomorphologiques. Il s’agit de deux volcans boucliers basaltiques aux pentes moyennes comprises entre 10 et 15° et aux sommets constitués de zones effondrées et caldéras polylobées (Fig. 2). Cependant, un trait morphologique majeur du Piton de La Fournaise, est une dépression ouverte sur la mer, appelée Enclos Fouqué (Fig. 2a). Cette structure canalise plus de 95 % des coulées de lave vers l’est dans un espace exempt de toute activité humaine en dehors d’un axe de circulation. Une telle morphologie n’existe pas au Karthala. Ici les coulées, lorsqu’elles ne sont pas contenues dans la caldéra sommitale s’épandent sur les pentes du volcan, principalement depuis un axe appelé rift zone vers le littoral où est installée la plus grande partie de la population. (1) Centre de Recherches et d’Etudes en Géographie de l’Université de La Réunion (2) Laboratoire des Sciences de la Terre, Université de la Réunion, Institut de Physique du Globe de Paris, La Réunion, France (3) CNDRS, Moroni, République Fédérale Islamique des Comores Dans environ 5% des éruptions observées au Piton de la Fournaise, des fissure se mettant en place à l’extérieur de l’Enclos Fouqué ont pour conséquences l’écoulement de laves en direction des bourgs littoraux. [email protected] Figure 1. Carte des onze bassins de risques de La Réunion Villeneuve sautent également aux yeux et renforcent la pertinence d’établir une étude croisée et comparée entre ces deux volcans d’autant que le degré d’exposition au risque des populations est ici directement lié à ces différences. De nombreuses similitudes concernant la nature des produits et la phénoménologie de certaines éruptions ont été mis en exergue au travers des recherches menées depuis plus de deux décennies. Cependant de grandes différences Les similitudes et différences sont ensuite en terme de phénoménologie et fréquence éruptive. Les deux volcans étudiés sont assez semblables si ce n’est qu’une nappe phréatique perchée très haut dans le massif du Karthala lui confère parfois un caractère explosif ayant pour conséquence le dépôt de cendre volcanique (fig. 3) sur une partie voire l’intégralité du massif. Cette phénoménologie a, de façon moins fréquente, était observée également sur La Fournaise. En revanche il est à noter que la fréquence éruptive est sans commune mesure bien supérieure à La Réunion. En compétences nouvelles, évolution des problématiques et des méthodologies en terme d’études des risques naturels et gestion des crises au cours de ces dernières années. ….) des chercheurs et étudiants de l’Université de La Réunion se sont investis dans la continuité de certaines recherches et ont initiés de nouveaux programmes sur le risque volcanique. La première étape de ce travail, a consisté en deux études distinctes s’appuyant sur les données d’ores et déjà disponibles et structurées. Ainsi, concernant le Piton de la Fournaise ont été imaginées des scénarii de crises majeures, à l’aide de codes de simulations d’écoulements et d’un Système d’Information Géographique (Fig. 4). Le point fort de cette étude est qu’elle a pour vocation de chiffrer les conséquences d’une hypothétique éruption hors enclos. Cette approche se positionne tant en terme de gestion/évacuation de la population qu’en terme de conséquences économiques. Concernant le volcan de la Grande Comore, profitant d’un retour d’expérience lié aux éruptions récentes (avril et novembre 2005 et mai 2006), l’étude s’est focalisée sur la gestion de la crise éruptive et l’analyse de la perception du risque volcanique (Fig. 5). Dans les deux cas, la qualité des résultats laisse présager de la pertinence d’un transfert méthodologique de la Fournaise vers le Karthala et inversement. Cette dernière étape n’est pour le moment qu’au niveau d’un projet de thèse dont la réalisation aurait pour but de développer des outils et supports d’éducation/ information aux risques volcaniques mais également de mettre en place des protocoles de gestion des crises. Figure 2. Morphologies du Piton de la Fournaise (a) et du Karthala (b). Source : Google Earth Figure 3. Nuage de cendre sur Moroni lors de l’éruption de novembre 2005 effet, alors qu’une éruption est observée tous les sept mois environ sur le Piton de la Fournaise, seulement une tous les 5 à 7 ans (selon la fiabilité des sources) est observée au Karthala. De ce fait, le volcan comorien a certainement moins su motivé les actions de recherche durant la dernière décennie. Une des conséquences directes de cet état de fait est l’existence d’un différentiel dans le contenu et la structuration des bases de données directement disponibles et utilisables. Profitant d’une conjoncture favorable (activité importante sur les deux volcans, intégration dans un réseau de chercheurs internationaux, savoir faire, recrutement de Figure 4. Méthodologie de l’étude en simulation d’écoulements (Réunion). Figure 5. Exemple de résultats de l’étude perception (Grande Comore) 37 Les avancées de la surveillance en volcanologie Georges Boudon Institut de physique du Globe de Paris, Equipe de Volcanologie, case 89, 4 place Jussieu, 75252 Paris Cedex 05 [email protected] Boudon C’est pour éviter que des catastrophes humaines, telles que celles de 1902 à la Montagne Pelée en Martinique, ou de 1985 au Nevado del Ruiz en Colombie, ne se reproduisent à nouveau que la surveillance des volcans actifs est indispensable. Le premier observatoire volcanologique fut implanté au Vésuve en 1842 et c’est au cours de l’éruption de 1902 de la Montagne Pelée qu’Alfred Lacroix, Professeur au Muséum d’histoire Naturelle de Paris et en charge du suivi de l’éruption, décida l’implantation d’un observatoire sur ce volcan. Depuis l’implantation de ces premiers observatoires volcanologiques, il y a maintenant plus d’un siècle et demi, la surveillance des volcans a considérablement évolué, principalement au cours des dernières décennies. Le suivi et l’étude extrêmement détaillée d’un certain nombre d’éruptions que ce soit sur des volcans effusifs (Piton de la Fournaise, Réunion; volcans d’Hawaii....) ou sur des volcans explosifs (Mt St.Helens, USA; Unzen, Japon; Pinatubo, Philippines; Soufrière Hills, Montserrat...) et la connaissance détaillée de l’histoire éruptive des édifices volcaniques ont permis de mieux comprendre la dynamique éruptive et le fonctionnement des volcans et d’adapter les méthodes de surveillance. Enfin les énormes progrès techniques que ce soit dans les domaines de la géophysique et de la géochimie que de l’électronique et de l’informatique ont permis d’acquérir des données de plus en plus nombreuses, de plus en plus précises et fiables et dans des domaines de plus en plus nouveaux. Ainsi les méthodes satellitaires se sont particulièrement développées et continuent à évoluer. De nos jours, malheureusement, tous les volcans actifs ne sont pas surveillés et, pour ceux qui le sont, les niveaux d’équipement des observatoires volcanologiques ne sont pas tous similaires. Les observatoires bien équipés sont capables de suivre l’évolution d’une crise éruptive depuis les premiers signes précurseurs jusqu’à la fin de l’éruption. Une éruption volcanique ne se produit jamais brutalement; elle est toujours accompagnée de signes précurseurs. Ces derniers sont variés et peuvent apparaître très tôt et ainsi être suivis par les réseaux de surveillance implantés sur les flancs du volcan. Pour bien comprendre ce que sont ces signes précurseurs et pour bien comprendre le but et l’évolution de la surveillance volcanologique, il faut se replacer quelques kilomètres en dessous de l’édifice volcanique, dans des zones (réservoirs ou chambres magmatiques) où les magmas générés à plus grande profondeur sont stockés sur des périodes de temps plus ou moins longues. Le magma stocké se refroidit très lentement. En se refroidissant, il cristallise et le liquide magmatique devient de plus en plus visqueux et se concentre en éléments volatils tels que l’eau. L’augmentation de la concentration en éléments volatils provoque progressivement une surpression dans le réservoir. Lorsque la surpression se produit, la partie sommitale du réservoir, zone de plus faible résistance, se déforme, se fissure et se fracture, entraînant la remontée de fluides magmatiques puis de magma vers la surface. Ces fluides apparaissent sous forme de fumerolles ou, mélangés aux eaux des nappes phréatiques contenues dans l’édifice, émergent sous forme de sources thermo-minérales. Les moyens de suivre les changements des paramètres de ces émanations (débit, température, acidité, composition en éléments majeurs, composition isotopique...) et donc l’évolution vers une crise volcanique sont nombreux : prélèvements sur site, diverses analyses en laboratoire, enregistrements continu sur site, mesures à distance (FTIR, DOAS…). Les pressions exercées sur les roches au niveau du réservoir magmatique provoquent des séismes qui peuvent être détectés bien avant le début d’une éruption. Des séismes peuvent également se produire au niveau du système hydrothermal, situé dans l’édifice, lorsque les fluides qu’il contient sont mis sous pression, et dans les conduits d’alimentation lorsque le magma remonte vers la surface. Les réseaux de stations sismiques ont évolué au cours du temps : capteurs courte période permettant de détecter les séismes et leur migration vers la surface, capteurs large bande permettant aussi de détecter des signaux de plus faible fréquence liés en particulier à la circulation de fluides (hydrothermaux ou magmatiques sous pression), configuration des réseaux en relation avec une meilleure connaissance de la structure des édifices. Le gonflement de la chambre magmatique, l’injection de magma au niveau du réservoir magmatique ou dans les conduits d’alimentation entraînent des déformations de l’édifice volcanique. Ce dernier peut « gonfler » (on parle alors d’inflation) de quelques centimètres à plusieurs dizaines de centimètres en fonction des contraintes exercées en profondeur. Depuis les mesures d’inclinaison du sol (inclinométrie), d’écartement de fractures (extensométrie), jusqu’aux mesures de distances et aux mesures satellitaires de plus en plus développées (GPS, interférométrie radar…), les méthodes sont nombreuses pour suivre les déformations d’un volcan. Dans le cas des volcans effusifs, il peut être de quelques semaines à quelques mois. Dans le cas des volcans explosifs, la mise en pression des réservoirs, puis la remontée des magmas très visqueux prend beaucoup plus de temps. Il peut se passer de plusieurs mois à plusieurs années entre le début des signes précurseurs et l’arrivée du magma à la surface. L’Institut de Physique du Globe de Paris est en charge de la surveillance des volcans français : le Piton de la Fournaise à la Réunion, la Soufrière en Guadeloupe et la Montagne Pelée en Martinique. Ces volcans disposent d’observatoires et de réseaux de surveillance parmi les plus performants au monde. La configuration des réseaux de surveillance et les méthodes utilisées évoluent continuellement afin de mieux prévoir et de mieux suivre les nombreuses éruptions qui se produisent au Piton de la Fournaise ou de détecter les signes précurseurs d’une prochaine éruption sur l’un des deux volcans des Antilles. Les contraintes exercées sur les roches qui constituent l’édifice volcanique peuvent également entraîner des modifications locales au niveau du champ magnétique terrestre. Elles peuvent également avoir des effets sur les circulations des fluides dans l’édifice (fluides hydrothermaux, nappes phréatiques). Les méthodes électromagnétiques se développent de plus en plus afin de suivre l’évolution des contraintes dans l’édifice et leurs effets sur la circulation des fluides. Enfin, de nouvelles méthodes se développent, principalement au cours des éruptions. Des mesures acoustiques, de mesures de vitesse d’éjection de magma ou de fluides permettent de quantifier des paramètres indispensables à une meilleure compréhension de la dynamique éruptive. En règle générale, les volcans n’entrent pas en éruption brutalement. Il faut un certain temps pour que les surpressions dans les réservoirs magmatiques se produisent et entraînent la remontée de magma vers la surface. Ce temps est très variable d’un système volcanique à un autre. 39 Le volcan Stromboli (Italie): de la gestion de la crise éruptive 2002-2003 à la naissance d’un système opératif permanent de la protection civile sur l’ile M. Rosi (1,2) G. Bertolaso (2) B. De Bernardinis (2) A. Scalzo (2) R. Colozza (2) (1) Dipartimento di Scienze della Terra, Università di Pisa Via S. Maria, 53 56126 Pïsa. (2) Dipartimento di Protezione Civile, via Vitorchiano, 2 00193 Roma. At the end of 2002 a period during which the activity of volcano Stromboli produced a series of anomalous events, started: an effusive phase lasted seven months, a landslide on the NW volcano’s flank with the genesis of a tsunami, a big explosion that involved the village of Ginostra. The Department of Civil Protection (DPC), took the responsibility of managing the crisis, in close cooperation with scientific institutions, using Stromboli as a test case for actions oriented to a more effective mitigation of volcanic risk and a general updating of the volcanic emergency management procedures. Actions undertaken for the mitigation of risk included: i) the construction of a new pier at Ginostra to speed up evacuation of local inhabitants in case of emergency, ii) the design and positioning of volcanic shelters on the top of the volcano iii) the construction of the trail network on the less exposed mountainside, iv) the carrying out of information campaigns. Activities for risk mitigation were complemented by a civil protection exercise that took place on 19th April 2005. The main heritage of this process was a permanently operating, cutting-edge, volcano and tsunami instrumental monitoring networks, and of an Advanced Operational Centre (COA) on the island, linked in real time with the Central Functional Centre (CFC) of the DPC in Rome. Rosi The effectiveness of the system is ensured by the tight connection with the Competence Centres (CC), mainly the INGV-Istituto Nazionale di Geofisica e Vulcanologia, charged of the volcanic and seismic surveillance and monitoring. The CFC on the basis of pre-defined protocols of analysis of selected parameters and other information provided by the CC, daily issues the assessment of the “level of impending risk”. The continuous exchange of information between CFC and COA guarantees the prompt activation of the operational procedures in case of crisis. 41 Expériences en matière d’information, de sensibilisation et d’éducation des populations : Le cas du volcan Misti au Sud Pérou Guillaume Levieux (1,2) Anthony Finizola (1,3) Joëlle Arnaud (1,4) Geoffroy Avard (1,2) Mhammed Benbakkar (1,2) Laura Bennati (1,5) José Antonio Chávez (6) Nicolas Cluzel (1,2) Vicentina Cruz (1,7) Nicolas Fournier (1,8) Katherine Gonzales (1,9) Marielle Lacarin (1) Patricia Llerena (1,10) Orlando Macedo (10) Magali Moreau (1) Julie Morin (1,3) Adriana Nave (1) Rosella Nave (1,11) Perrine Paquereau (1,2) Pierre-Grégoire Scholl (1,4) Juan Taco (1,10) Edu Taipe (1,10) Jean-Claude Thouret (2) Walter Zezenarro (1,10) Finizola Le Sud Pérou est caractérisé par une grande densité de volcans. L’éruption de 1600 du Huaynaputina, la crise du Sabancaya de 1990-98, celle de l’Ubinas en 2006, et l’activité fumerolienne persistante au Misti sont les témoins d’une menace volcanique prononcée dans cette région. L’éruption du Huaynaputina a été à elle seule la plus importante éruption historique d’Amérique du Sud. Cependant, comme aucune éruption catastrophique ne s’est produite durant le XX siècle, l’attention sur les risques naturels s’est principalement focalisée sur les tremblements de terre, glissements de terrain et catastrophes climatiques. En conséquence, la connaissance, la conscience et les mesures de protection contre les risques volcaniques sont encore trop peu développées. Ce projet a pour objectif d’améliorer la réponse en cas de crise volcanique en rassemblant les différents acteurs et en coordonnant leurs compétences afin de : (1) mieux estimer le risque et améliorer l’instrumentation de surveillance ; (2) créer un groupe de travail sur l’évaluation du risque pour préparer une cellule de gestion de crise, et ; (3) créer un programme de formation pour les journalistes, professeurs, autorités, ainsi qu’un programme d’éducation pour les enfants. L’objectif final de ces actions vise à réduire efficacement le risque volcanique. Compte tenu de son activité éruptive récente et de la haute densité de population à ses pieds, le strato-volcan Misti (5822 m d’altitude) a été considéré comme la menace majeure au Sud Pérou. Son cratère est situé à seulement 17 km du centre d’Arequipa, seconde ville du Pérou avec près d’un million d’habitants, qu’il domine de près de 3500 mètres. Par conséquent, en collaboration entre les institutions péruviennes et le réseau académique franco-péruvien Porras Barrenechea, notre association Volcan-Explor- Action a eu pour objectif de contribuer à : (1) améliorer l’instrumentation de surveillance, (2) organiser des rencontres sur la thématique de la sensibilisation au risque volcanique, mettant en contact autorités, scientifiques, protection civile, ONG et population (Fig. 1 et 2), et (3) ouvrir en libre accès à tout public le « Centro de sensibilización a los riesgos volcanicos » à Arequipa (Fig. 3). Ces activités ont permis de développer une ONG locale – Volcan-Explor-Action Perú – dont le but est de mettre en place en collaboration avec les diverses institutions locales un vaste programme de sensibilisation à l’échelle de la ville et de la région (Fig. 4) et de contribuer à un développement durable. (1) Figure 1. Première journée de sensibilisation au risque volcanique à Arequipa organisée par Volcan-Explor-Action en partenariat avec l’Alliance Française d’Arequipa. Figure 2. Débat sur le risque volcanique entre scientifiques, autorités et population : un concept particulièrement enrichissant pour améliorer les interactions entre les différents acteurs, afin que ces derniers puissent réagir le plus efficacement possible dans un contexte de gestion de crise éruptive. Association Volcan-Explor-Action, FrancePérou (http://www.volcanea.org) (2) Laboratoire Magmas et Volcans, Université Blaise Pascal, CNRS, IRD, Clermont-Ferrand, France (3) Laboratoire des Sciences de la Terre, Université de la Réunion, Institut de Physique du Globe de Paris, La Réunion, France (anthony.finizola@ univ-reunion.fr) (4) Association Terre Comprise, France (5) Institut de Physique du Globe de Paris, Jussieu, Paris, France (6) Universidad Catolica Santa Maria (UCSM), Arequipa, Pérou (7) Instituto Geológico, Minero y Metalúrgico (INGEMMET), Lima, Pérou (8) Seismic Research Unit, University of the West Indies, Trinidad, West Indies, Royaume-Uni (9) Comision Nacional de Investigacion y Desarrollo Aeroespacial (CONIDA), Lima, Pérou (10) Instituto Geofisico del Peru (IGP), Arequipa, Pérou (11) Istituto Nazionale di Geofisica e Vulcanologia, Osservatorio Vesuviano, Napoli, Italie [email protected] [email protected] Volcanic risk mitigation and sustainable development. Application to Misti and Ubinas volcanoes in south Peru. Levieux G., Arnaud J., Avard, G. Bennati L., Chávez, J.A., Cluzel N., Cruz, V. Finizola A., Fournier, N. Gonzales, K. Lacarin M., Llerena P., Macedo O., Moreau Figure 3. Journée d’inauguration du Centre gratuit de Sensibilisation aux Risques Volcaniques (CSRV) à Arequipa. Ce centre a été financé par Volcan-Explor-Action et accueilli gratuitement au sein du Musée archéologique Sanctuarios Andinos géré par le Dr. José Antonio Chávez de l’Universidad Catolica Santa Maria d’Arequipa. M., Nave A., Nave R., Paquereau P., Scholl P.G., Taco J., Taipe E., Thouret J.-C., Zezenarro W. Congrès “Cities on Volcanoes”, Quito, Figure 4. Programmes d’échanges pédagogiques culturels portant sur la thématique volcan entre classes françaises et péruviennes. Ce programme a été mené par Volcan-ExplorAction en partenariat avec la société IBM. Equateur, 23-27 Janvier 2006, résumé et présentation poster. Références 43 Le réseau régional de protection civile LCL Patrick DELFORGE Etat major de protection civile, La Réunion LEVER UNE AMBIGUITE ENTRE PROTECTION CIVILE ET SECURITE CIVILE L’ORGANISATION FRANCAISE DE LA PROTECTION DES PERSONNES ET DES BIENS En France c’est le terme sécurité civile qui a été retenu. Il englobe un concept, des moyens humains et matériels ainsi qu’une doctrine. Protection : Ensemble des mesures destinées à protéger certaines personnes. PROTECTION CIVILE : ORGANISME CHARGE DE L’APPLICATION DE TELLES MESURES. Sécurité : Situation dans laquelle quelqu’un, quelque chose n’est exposé à aucun danger. SECURITE CIVILE : PREVENTION ET SECOURS QUI REQUIERT EN TOUTES CIRCONSTANCES LA SAUVEGARDE DES POPULATIONS. LA DIRECTION DE LA DEFENSE ET DE LA SECURITE CIVILES (DDSC) EST L’UNE DES DIRECTIONS DU MINISTERE DE L’INTERIEUR Delforge Mission des relations internationales. Ecole nationale supérieur des officiers de sapeurs pompiers (établissement public) 4 sous directions : ● Administration et logistique : Affaires financières et juridiques. Soutien logistique opérationnel. Systèmes d’information. ● Gestion des risques : Coordination interministérielle. Risques majeurs. Réglementation. Alerte et planification. Analyse et préparation aux crises. ● Services opérationnels : Moyens aériens. Déminage. Formations militaires de la sécurité civile. LES SERVICES DELOCALISES ● Sapeurs pompiers et acteurs du secours : En particulier un bureau des associations et des réserves communales > 9 états majors de zone EST (Metz) SUD EST (Lyon) SUD OUEST (Bordeaux) OUEST (Rennes) SUD (Marseille) NORD (Lille) ILE DE FRANCE (Paris) ANTILLES (Fort de France) REUNION (Saint Denis) > 3 unités d’instruction et d’intervention de la sécurité civile : Nogent le Rotrou Brignoles Corte > Une direction du déminage et 27 centres (cas particulier de la Réunion) > 4 établissements de soutien logistique : NORD (Méry / Oise) EST (Mort – Mare) OUEST (Jarnac) SUD (La Valentine) > 1 base avions MARIGNANE > 1 groupement et 23 bases hélicoptères Répartis dur l’ensemble des zones de défense (sauf la Réunion) LA ZONE DE DEFENSE « OCEAN INDIEN » • • • • LA REUNION MAYOTTE LES T.A.A.F Les ILES EPARSES LES PAYS RIVERAINS • • • • MADAGASCAR SEYCHELLES COMORES MAURICE PARTICULIARITES DE LA ZONE > VASTE : 3,5 millions de kms² pour la zone française. > ISOLEE/ Des grandes routes aériennes et maritimes. > DIVERSE : Richesse, culture, religion et politique CONSTATS : ● L’île de la Réunion, l’un des 100 départements français est le plus riche de la région. ● Nécessité d’un réseau « sécurité civile » avec les pays riverains. LES OBJECTIFS VISES DU RESEAU DE PROTECTION CIVILE ● En cas de problème(s) majeur(s) il faut entre 24.00 et 48.00 pour bénéficier de l’appui de la métropole. ● Instituer un dispositif favorisant une coopération renforcée dans le cadre des interventions de secours, consécutives à des risques majeurs, qu’ils soient naturels, technologiques ou liés aux transports. Création dans les pays qui n’en disposent pas, d’un centre opérationnel de gestion de crises. L’un de ces centres sera désigné comme centre régional de protection civile. ● Mise en place de procédures pour la communication d’informations. ● Liaison permanente avec les centres chargés de veille et d’alerte concernant les phénomènes météorologiques, volcanologiques et sismiques majeurs de la zone et notamment le futur centre national d’alerte tsunami ainsi qu’avec les acteurs de la veille sanitaire. ● Mise à disposition d’experts. ●Rencontres régulières entre responsables des différents pays pour la mise en œuvre de l’ensemble de ce dispositif. ● Mise en place de ce dispositif devra être complété de programmes de renforcement des capacités d’intervention des pays les plus démunis afin de leur permettre d’organiser une première réponse face à une situation de catastrophe. A CE JOUR Une partie du dispositif est opérationnel depuis septembre 2002. Les cinq pays de la zone sud océan indien ont mis sur pied un dispositif de coopération régionale dans les domaines : ● De la formation. ● De l’équipement. ● De la réglementation. Des schémas d’appui réciproque existent dans les domaines : ● De la pollution maritime. ● Du secours à personne en cas de catastrophes importantes. ● METEO (cas particulier de l’alerte aux tsunamis). ● Secours en mer. AUTRES ACTEURS INDISPENSABLES AU RESEAU DE PROTECTION CIVILE ● CROIX ROUGE, CROISSANT ROUGE ● A.D.R.A.S.E.C 45 La Réunion face aux risques naturels : gouvernance locale et coopération régionale 18 - 19 septembre 2006 Hôtel de Région Pierre LAGOURGUE avenue René CASSIN SAINT DENIS www.regionreunion.com www.univ-reunion.fr/lstur Conception graphique : Guillaume LEVIEUX Photos : © NASA, Muriel LESIEUR, Guillaume LEVIEUX, Aline PELTIER R