Rouge-gorge Mésange charbonnière Introduction Qui ne s’est un jour demandé le nom de cet oiseau qui défend à grands cris notre bout de jardin pas plus grand qu’un mouchoir de poche, ou ne s’est intéressé à tel autre qui, année après année, revient nicher sous la toiture comme s’il s’agissait de sa résidence secondaire ? L’urbanisation galopante déroule continuellement son tapis sur ce qui était nommé il y a peu encore la « campagne » ou la « nature ». Ce processus d’extension des zones urbaines, engagé sur tous les continents et sous toutes les latitudes, est un phénomène social et un problème environnemental d’ampleur planétaire, parmi les plus significatifs du xxie siècle. Dans nos pays, cette évolution s’est aussi accompagnée d’une réflexion sur l’organisation du milieu urbain, périurbain ou des petites cités rurales : des espaces ont été réservés pour les parcs publics, les plaines de sports, les aires de loisirs, la création de nouvelles rues ou de boulevards ne se conçoivent plus sans une végétalisation des bordures, les bâtiments publics récents intègrent parfois des parcelles de verdure. Tous les habitants des villes, comme de la « campagne », ont suivi ce modèle, gardant ainsi un lien ténu avec un lointain passé campagnard, et chacun « cultive » l’art du jardin qui commence par quelques plantes accrochées à un balcon pour s’étendre jusqu’au potager, cultivé plus par amour d’un rapport intime à la terre que pour un quelconque profit pécuniaire. 2 Chouette hulotte Fauvette à tête noire Huppe fasciée Les oiseaux sauvages ont subi cette évolution de nos sociétés et de nos paysages avec plus ou moins de bonheur : si les espèces les plus sensibles se sont retirées dans les quelques espaces encore préservés du phénomène d’urbanisation galopante, d’autres se sont adaptées à cette situation, voire en ont largement profité… C’est de ces oiseaux que traite cet ouvrage, dont l’objectif est à la fois de les identifier, de mieux les connaître, mais aussi d’aider à leur protection. Car tout un chacun, qu’il possède un simple bout de balcon en centre-ville ou un très grand jardin à la campagne, peut prendre un infini plaisir à observer des oiseaux sauvages et à agir pour leur rendre la vie moins rude au contact de l’homme. Quelques petites actions très simples peuvent ainsi engager la transformation d’un balcon ou d’un jardin en un havre de paix pour les oiseaux : certaines espèces en déclin le méritent bien, et il est possible de réellement agir pour elles chacun à son niveau. Cette attitude n’est pas à sens unique, car en améliorant la qualité de son petit espace vert pour les oiseaux, on ne fait pas seulement œuvre de citoyenneté, on enrichit aussi son quotidien de ces chants mélodieux, de ces mouvements colorés, de ces comportements singuliers qu’il est si fascinant d’observer, de cette dimension éminemment vivante que seuls la présence des oiseaux peut apporter à notre environnement immédiat. Un balcon, une terrasse, un jardinet, un parc arboré : des espaces où les oiseaux sauvages peuvent encore passer, revenir, s’installer, se développer. Il ne tient qu’à vous d’en décider… D’aucuns s’étonneront de ne pas trouver le Rossignol dans notre ouvrage. C’est qu’il fréquente bien plus les haies et les lisières que les jardins. Cependant, nous ne pouvons résister au plaisir de vous faire écouter son chant si mélodieux... 3 Accenteur mouchet Prunella modularis Longueur : 15 cm ; poids : 19 g Identification : de la taille du Moineau, mais de forme élancée, l’Accenteur emprunte aussi au piaf des villes la livrée brune qui colore son manteau. Poitrine et ventre sont de couleur gris-bleu assez sombre, le bec est très fin. Petit oiseau discret et souvent solitaire, l’Accenteur explore en sautillant au sol le dessous des buissons, la lisière des tas de feuilles et les bordures des pelouses. C’est seulement au moment des parades qu’il se laisse admirer, quelques mâles se réunissant alors autour d’une demoiselle et rivalisant de vibrations d’ailes pour séduire la belle. tire parti de l’aménagement des jardins et des parcs, tant à la campagne que dans les villes. En France, cette espèce a diminué de 15 % durant les 20 dernières années, et il semble que cette espèce à affinité plutôt septentrionale pâtisse de l’élévation progressive des températures. Dans le jardin : explore le sol et les parties basses des plantations à la recherche des insectes, mais ne dédaigne pas non plus les petites graines de plantes sauvages qu’il avale sans les broyer (son bec n’est pas adapté). Niche à faible hauteur dans un buisson épais ou une haie touffue ne laissant passer que peu de lumière, et comme c’est un nicheur précoce (dès les premiers jours de mars), il va privilégier les essences persistantes dont le feuillage camouflera mieux son nid. Favoriser sa présence : un jardin peu entretenu lui convient bien. Fréquente le dessous des mangeoires, pour y récupérer les miettes des graines broyées par les Verdiers et les Bouvreuils. Statut : espèce sédentaire en France largement répandue dans le pays, sauf sur le pourtour méditerranéen, la Corse et sur les bordures méridionales du Massif central. Partout ailleurs, il est considéré comme un commensal de l’homme, car il 4 5 Bergeronnette grise Motacilla alba Longueur : 20 cm ; poids : 23 g Identification : petit oiseau à la forme élancée et d’une taille inférieure à celle du Moineau. Le manteau du plumage est gris, la tête noire avec un masque blanc qui couvre les joues et le front, la gorge et la poitrine sont noires et le ventre blanc. La queue, longue et étroite, est hochée fré- 6 quemment, et ce même au repos (motacilla se traduit du latin par : « qui remue la queue »). Le mâle possède un plumage beaucoup plus contrasté que celui de la femelle. Se déplace avec aisance en marchant. Statut : espèce très commune en Europe, et répartie dans presque tous les milieux naturels en France (mais ne niche pas en Corse). Sans doute l’un des oiseaux qui s’adapte le mieux à toutes les situations de vie (on appelle cela la « plasticité écologique »). Aussi peut-on rencontrer la Bergeronnette grise nichant en montagne jusqu’à 2 500 m, sur les côtes dans les falaises maritimes ou au cœur des dunes, à la campagne comme au centre des plus grosses agglomérations modernes. En France, les effectifs semblent stables, avec néanmoins un fléchissement ces dernières années, ce qui augure peut-être de ce qui se passe à l’échelle de l’Europe entière où ils sont considérés en déclin. Dans le jardin : se nourrit au sol en explorant les pelouses, les terres retournées et les allées de gravier. Capture aussi en vol, avec beaucoup d’adresse, les insectes aériens depuis des secteurs particulièrement favorables (bords de plans d’eau, de fossés). Niche sur le rebord des murs et dans des cavités dissimulées par la végétation, dans la charpente d’un appentis ou derrière un volet à jamais entrouvert. Favoriser sa présence : fréquente volontiers le dessous des mangeoires en hiver où elle récupère les miettes qui tombent au sol. Les nichoirs de type « boîte à lettres semi-ouverte » fonctionnent bien, ils sont à installer contre un mur paisible. Attention, cette espèce qui se nourrit au sol est très sensible à la prédation qu’opèrent les chats, tant à la campagne qu’en ville ; il faut donc surveiller les matous et ne pas hésiter à les convaincre d’aller voir ailleurs, à grandes rasades de jets d’eau. 7 Bouvreuil pivoine Pyrrhula pyrrhula Longueur : 15 cm ; poids : 25 g Identification : plus gros que le Moineau, le Bouvreuil est un oiseau au plumage rutilant, mais au comportement très discret. Le manteau du mâle est gris souris, la poitrine et le ventre d’un rouge orangé magnifique. Chez la femelle, ces couleurs sont plus ternes et tirent vers le beige et le brun pâle. Tous deux arborent cependant un beau capuchon noir de jais, une couleur que l’on retrouve sur les ailes lorsque l’oiseau décolle. Impossible à confondre avec une autre espèce du jardin, le Bou- 8 vreuil est cependant assez farouche et reste généralement perché dans les hautes frondaisons. Se signale principalement par son cri aigu et doux qui porte bien à travers l’épaisseur du couvert végétal. Statut : assez largement réparti en Europe du Nord, cet oiseau est moins fréquent dans le Sud. Cela se traduit en France par une occupation homogène des territoires situés au nord de la Loire, et beaucoup plus morcelée au sud : le Bouvreuil est ainsi absent comme nicheur de Corse, du littoral méditerranéen et des vallées du Rhône et de la Garonne. Cependant en hiver, toutes ces régions peuvent accueillir l’oiseau. Migrateur partiel, des individus d’Europe centrale et nordique passent l’hiver en France. Fréquente les boisements denses et les parcs avec de grands arbres serrés. Ne semble pas amateur de l’agitation caractéristique des centres-villes. Cette espèce vit depuis 20 ans une forte régression, de l’ordre de 68 % de baisse dans l’effectif nicheur ! Il serait particulièrement sensible au réchauffement climatique qui provoque un débourrage trop précoce des bourgeons, de plus en plus décalé avec les habitudes de l’oiseau. plaisirs (voir des oiseaux et manger des fruits) il faut planter un merisier à grappes pour tous ces oiseaux dits « ébourgeonneurs », qui devraient ainsi se rabattre sur cet arbre précoce et vous laisser le temps de protéger vos précieux cerisiers (protection qui sera de toute façon indispensable plus tard, à la maturation des fruits). Dans le jardin : s’alimente de graines diverses, de baies (alisier, sorbier) et, lorsque l’hiver est rude, se rabat sur les bourgeons d’arbres fruitiers sur lesquels il peut faire des gros dégâts. Niche à faible hauteur dans un roncier discret ou une plante grimpante, ne fréquente que rarement les mangeoires. Favoriser sa présence : magnifique espèce, mais à risque si l’on possède des fruitiers. Si l’on veut satisfaire ses deux 9