veterinaire par le Docteur Yves Dutertre La génomique ouvre des perspectives La sélection à l’élevage, utilisée depuis longtemps et avec succès par les éleveurs de chevaux, continue de susciter des interrogations. On ne sait jamais tout sur ce que sera le poulain à naître, quelles seront ses aptitudes sportives et sa sensibilité aux affections liées à sa croissance et à sa discipline, le trot. Grâce à la génomique, étude du matériel génétique, de véritables avancées et espoirs se font jour. Le tableau suivant montre l’incidence de la fréquence de l’allèle A sur des races différentes : Quelques notions génétiques de base - L’organisme du cheval est composé de milliards de cellules dont les caractéristiques de développement et de fonctionnement sont transmises à la descendance par les gènes, unités codant ces caractéristiques et portées par les chromosomes. - Chaque gène peut prendre plusieurs formes, les allèles, appelés A, C, … . n L’ensemble des gènes d’un organisme constitue son génome. n L’ensemble des allèles présents constitue son génotype. - L’ADN, molécule composante du chromosome, peut présenter une variation génétique, appelée une mutation, base de la formation des différents allèles d’un même gène. - Chaque cheval possède deux copies d’un même gène, une copie provient de sa mère, l’autre de son père. Lorsque ces deux copies du gène sont identiques, le cheval est dit homozygote (A/A ou C/C) pour ce gène. Lorsque ces deux copies du gène sont différentes, il est dit hétérozygote (A/C ou C/A) pour ce gène. - Les transmissions génétiques du cheval répondent aux lois de Mendel: voir tableaux L’aptitude au trot identifiée par une chercheuse Suédoise Si le séquençage génétique complet du cheval est connu en France depuis 2006 (INRA), une étude publiée en 2012 dans la revue scientifique « NATURE » constitue une autre avancée. Réalisée par Lisa Anderson, cette étude a été effectuée sur des poneys Islandais, une race qui se caractérise par ses cinq allures. Il y a les trois allures naturelles que sont le pas, le trot et le galop, mais aussi deux allures naturelles complémentaires à vitesse intermédiaire que sont le «tölt», allure symétrique à 4 temps, spécifique de l’Islandais et l’amble, allure symétrique à 2 temps. 1er constat. 70 chevaux Islandais ont été divisés en deux groupes selon l’examen de leur aptitude à se déplacer: - A: pas, tölt, trot et galop, donc à 4 allures - B: pas, tölt, amble, trot et galop, donc à 5 allures. Les chevaux du groupe B, restent à des allures symétriques, l’amble ou le trot, à une plus haute vitesse et sont moins fautifs. L’analyse du génotype de ces 70 chevaux montre que les chevaux du groupe B présentent, sur le chromosome 23, une mutation en allèle A du gène DMRT3. Cet allèle joue un rôle sur le contrôle réflexe de la locomotion par la moelle épinière. Il en est le seul marqueur génétique. 2e constat. Sur 352 chevaux islandais étudiés, - 99 % de ceux qui maîtrisent les cinq allures, à savoir le groupe B, sont homozygotes A/A - Seulement 31 % des chevaux à quatre allures, groupe A, sont homozygotes AA. L’étude suédoise précise l’importance de la précocité des chevaux et du contexte du travail, en particulier de l’entraînement, en illustration de ce nombre significatif de 31 % de mutants, mais du groupe A. Chevaux à 4 ou 5 allures Islandais à 4 allures Islandais à 5 allures Islandais échantillon Chevaux de courses attelées Standardbred, Trotteur (Suède) Standardbred, Trotteur (USA) Standardbred, ambleur (USA) Trotteur Français Cvx avec 3 allures naturelles Arabe Pur-Sang Shetland Cette étude suédoise montre que l’allèle A, - est absent des races naturellement au galop comme le Pur-Sang - est de fréquence maximale, 100 %, pour les Standardbred trotteur (USA) et ambleur (USA). - est de fréquence moins haute pour le Trotteur Français. En fonction du génotype présenté par le cheval, il y aurait une variation importante des gains et des indices génétiques, chez les trotteurs âgés de 3 à 5 ans, comme le prouvent les deux graphes suivants Fréquence de l’allèle A 124 66 162 0,65 0,99 0,89 270 57 40 47 0,97 1,00 1,00 0,7 18 29 20 0,00 0,00 0,00 L’ETAT DES CONNAISSANCES EN FRANCE Ostéochondrose et cornage Dès la connaissance du séquençage du cheval, des travaux ont été menés en France sur l’ostéochondrose et le cornage (Programme GENEQUIN) dans le but d’identifier les marqueurs génétiques de ces affections et d’améliorer la sélection. Dans l’état actuel, l’état des lieux est le suivant -Plusieurs marqueurs génétiques ont été identifiés dans ces deux affections, différenciant, par exemple, l’ostéochondrose du boulet et du jarret. - Un test génétique de détection n’exprimerait que l’augmentation du risque et non l’identification du cheval atteint. Connaître le génome de son cheval : une aide à la décision Génotypes et indices génétiques 62 • TROT infos Nombre de chevaux Génotypes et gains (chevaux de 3 à 5 ans en Kouronnes) Un test génomique, basé sur un prélèvement de crins, est présent en France (www. equibiogenes.com). Connaître l’identité du facteur génétique présent de l’allèle A ou C sur le poulain permet à son éleveur de mieux apprécier son potentiel à l’aptitude au trot, donc d’apprécier une possible précocité et plus tard, en fin de carrière, de rechercher le croisement optimal. Recherches sur l’aptitude à trotter Dans le cadre d’une convention IFCE-INRA et SECF, plusieurs recherches sont en cours sur la fréquence des allèles A et C, donc des homozygotes A/A et C/C et des hétérozygotes C/A chez le trotteur français. Sur la base de statistiques réalisées sur les qualifications, la répartition entre les différentes populations a été la suivante - 45 % de qualifiés sont A/A - 30 % de qualifiés sont C/A - 25 % de qualifiés sont C/C Des études statistiques, plus récentes et basées sur le rapport gains/nombre de courses, montrent que les hétérozygotes C/A remontent au niveau des A/A au fur et à mesure de l’âge des chevaux. EN CONCLUSION, la variabilité des performances dues à la génétique est augmentée chez le trotteur par le rôle du seul marqueur génétique de l’aptitude à la course au trot. Mais cette corrélation diminue avec l’âge et ne saurait être supérieure à 30 %. En effet l’influence du milieu – et notamment de son entraînement, reste importante pour la majorité des caractères qui influent sur les performances. TROT infos • 63