Chapitre 3 Révolution et Empire

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Chapitre 3
Révolution et Empire
Dans les années/décennies ayant précédé 1789, Réflexion européenne sur ses propres
institutions. Les abus commis par les Nations européennes dans des terres lointaines – en
premier lieu la traite des Noirs – sont ainsi dénoncés par certains (Condorcet dans Réflexions de
1780) dans un double sens : désignés comme des abus, désignés comme des symptômes
nécessitant des réformes en Europe. N’empêche cependant pas l’Europe d’explorer le reste du
monde (Alexandre Humboldt arpentent les Andes au début du XIXe siècle, La Pérouse qui se
perd en 1788). Ces découvertes sont motivées par diverses causes, mais l’une d’entre elles sont les
gains économiques : l’Angleterre voit son commerce extérieur doubler entre les années 1780 et le
début des années 1790.
En Europe même, la partie occidentale voit son agriculture devenir de plus en plus
productive (France, Angleterre, Provinces-Unies). Dans cette même région, ponctuellement en
France, plus largement en Angleterre, commence (dès 1760) l’industrialisation. Les transports
s’améliorent nettement tout au long du XVIIIe siècle.
Or ce développement est en décalage avec le cadre politique et social. À l’Est et au centre
de l’Europe, des régimes seigneuriaux de servage existent encore. Le cadre politique du Saint
Empire et la division de l’Italie entravent le développement de ces deux régions.
Dans ce paysage, un pays paraît affaibli. La France a brillamment aidé les États-Unis dans
leur indépendance, mais elle est indécise dans plusieurs régions : les troubles en Hollande, le
conflit entre Russie et Turquie. Cependant, ce pays dispose d’atouts qui n’ont alors pas été perçus
comme tels :
Sa population : 26 millions de Français, qui dépasse largement les États
allemands, l’Italie et l’Angleterre.
Pensée politique vigoureuse, un État-Nation arrivé à maturité,
La paysannerie est active et la Révolution arrive, dès 1789-1790, à l’intégrer à la
Nation,
La bourgeoisie fournit des cadres à cette Nation, envie d’arriver au pouvoir,
montée en puissance politique bloquée par l’aristocratie (contrairement à
l’Angleterre).
France subit alors une crise économique certaine : à Lyon en 1788, la moitié des ouvriers
sont au chômage.
INTRODUCTION A L’HISTOIRE DES RELATIONS INTERNATIONALES – 27 FEVRIER 2007
1ère phase : Révolution juridique et pression populaire. L’un des problèmes
est budgétaire et fiscal. Sous pression depuis 1788, Louis XVI convoque les
États-Généraux pour le 1er mai 1789. Dès son ouverture, opposition sur la
nature de cette assemblée, qui finit par abolir la différence entre la noblesse, le
clergé et le tiers-état et par se proclamer en Assemblée nationale constituante :
serment du Jeu de paume (juin). Après cette révolution juridique, arrive la
révolution populaire, ie la prise de la Bastille. Le roi doit évacuer les troupes
encerclant Paris. Puis Grande Peur dans les campagnes : l’Assemblée réagit par
l’abolition des privilèges dans la nuit du 4 août 1789. Le 26 août, vote de la
Déclaration universelle des Droits de l’Homme.
2nde phase : l’échec de la monarchie constitutionnelle.
Liberté économique, réorganisation administrative (département),
réglementation religieuse, nationalisation des biens du clergé.
Ces mesures, surtout la nationalisation des biens du clergé, provoquent
une hostilité à la Révolution. Si en 1790, le roi prête serment à la
Constitution, Louis XVI louvoie entre différents clans et essaye de
récupérer son pouvoir perdu. Se termine mal, par la fuite à Varennes
(juin 1791). La réaction des modérés (La Fayette : monarchie
constitutionnelle) qui tirent sur la foule sur le Champ de Mars,
provoque une rupture dans la Révolution entre monarchiste modéré et
Républicains (Danton, Robespierre). Louis XVI finit par accepter la
nouvelle constitution écrite de septembre 1791 (exécutif, véto).
1792 : problème de l’exportation de la révolution. Modifie les rapports
de force, et aboutit à l’abolition de la monarchie, en août 1792. Élection
d’une Convention pour rédiger une nouvelle constitution.
3e phase : la Terreur. Juillet 1793 : nouvelle constitution, très démocratique,
jamais appliquée. Mise en place d’un gouvernement d’exception : le Comité de
Salut Public. Jusqu’en juillet 1794.
4e phase : le Directoire. Reflux de la Révolution, car largement moins
démocratique que la constitution de 1793. Régime politique rigide, Parlement
bicaméral, stricte séparation des pouvoirs, exécutif assuré par 5 Directeurs.
Entente entre l’exécutif et le législatif impossible, mésentente entre les 5
Directeurs. Régime immobile, sorti de la crise par le général Bonaparte.
Fin de la Révolution : le coup d’État du XVIII Brumaire an VIII
(novembre 1799). Mise en place du Consulat : régime autoritaire dirigé par
trois Consuls, dont le 1er est Bonaparte lui-même.
Consulat fait place à l’Empire en 1804 et Bonaparte devient Napoléon Ier.
Début du Ier Empire, qui s’écroule en 1815.
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INTRODUCTION A L’HISTOIRE DES RELATIONS INTERNATIONALES – 27 FEVRIER 2007
I. LES RELATIONS INTERNATIONALES ET LA REVOLUTION
À l’Est de l’Europe :
Empire Ottoman, considéré comme décadent, coupé du reste du monde.
Guerre contre la Turquie (1787-1792) de l’Autriche et de la Russie, Prusse étant
en embuscade en cas de nouvelle agression contre la Pologne. Permet à la
Russie de renforcer ses positions en Mer Noire.
Diplomatie française effacée, en raison de la Pologne,
Autriche, engagée dans le conflit contre la Turquie, se retire d’une part en
raison de la Révolution Française, d’autre part à cause de la crise de Pologne.
Inquiétude de l’Angleterre, notamment pour son approvisionnement en blé
(William Pitt étant alors Premier Ministre, George III, roi, étant à peu près fou).
De plus, succès de la Russie sur la Turquie peut menacer la route de l’Inde.
Intervention anglaise permet à l’Empire Ottoman de céder relativement peu
que la situation militaire n’aurait dû le permettre.
1. La Contre-Révolution
a. Notion de Contre-Révolution
Fuite des nobles à l’étranger les plus favorables à la monarchie dès la prise de la
Bastille, mais attention
Se traduit d’une part par la mise en place d’une idéologie (Joseph de Maistre,
Louis de Bonald : théocratie, restauration des valeurs traditionnelles, Edmund
Burke : lutte contre les extrêmes),
Elle est également action, en France même et à l’étranger.
b. En France
En France, par une activité de presse, par des débats, etc, quand ils sont
possibles, parfois par une activité de conspiration,
Par l’activité militaire ou de guerre civile, notamment en Vendée, populaire et
religieuse,
Mise en place à l’étranger, par les émigrés, de troupes armées.
Activité conspiratrice est aussi soutenue par ces milieux : à Turin
d’abord puis, surtout, à Coblence. Reste très futile.
Activité militaire faible : participation à la campagne de Valmy en 1792.
Émigrés sont des nobles, des prêtres réfractaires, mais aussi des
paysans, venant de Vendée, Bretagne, du Midi et de l’Alsace.
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INTRODUCTION A L’HISTOIRE DES RELATIONS INTERNATIONALES – 27 FEVRIER 2007
En France, cette contre-révolution a finalement échoué, avant même que
Bonaparte ne prenne le pouvoir.
c. Dans le reste du monde
La Révolution française n’est pas une révolution unique et isolée. Elle s’inscrit dans une
ère des révolutions :
La révolution américaine,
Irlande, Pays-Bas, Genève connaissent des troubles en 1789,
La Révolution française essaime dans le reste de l’Europe. Cette période dure
jusqu’en 1820 environ. Ne pas oublier non plus l’Amérique du Sud
(indépendances bolivariennes) et les Antilles : Haïti (1804) lutte pour son
indépendance.
Cette tendance de long terme explique que la Révolution française ait été un phénomène
majeur en Europe et dans le reste du monde. Se dégage des autres par le fait qu’il soit le royaume
le plus peuplé, et qu’elle s’inscrit elle-même dans une perspective universelle. Remise en cause
très profonde de l’ordre européen, en tant qu’exemple ou objet de rejet.
Plusieurs phases dans les relations entre la France et le reste de l’Europe :
La Constituante (monarchie constitutionnelle est encore possible) : Révolution
française proclame son pacifisme.
La diplomatie est confiée au roi, qui doit compter avec l’Assemblée.
Ainsi, refus de participer à un conflit entre l’Espagne et l’Angleterre,
malgré les liens dynastiques avec les Bourbons d’Espagne. Changement
diplomatique majeure.
Doit faire face à des dilemmes : en Alsace, certains territoires
appartiennent à des princes allemands ; Avignon appartient au Pape. Or
peuples de ces régions demandent le rattachement à la France : droit
monarchique contre le droit des peuples. Débats jusqu’en 1791 tranche
en faveur du rattachement.
Assemblée se penche sur le droit de paix et de guerre. Mais le roi mène
une diplomatie parallèle. Le 3 décembre 1790, Louis XVI écrit au roi de
Prusse pour demander une coalition des puissances monarchiques pour
le restaurer dans ses pouvoirs.
Les monarchies sont inquiètes : fort impact intellectuel de la Révolution
française.
Mais la révolution bénéficie dans un premiers temps des guerres à l’est :
La guerre russo-turque ;
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INTRODUCTION A L’HISTOIRE DES RELATIONS INTERNATIONALES – 27 FEVRIER 2007
Le second partage de la Pologne, en 1793, entre la Russie et la
Prusse. Un soulèvement contre ce règlement mène au troisième
partage de la Pologne (Prusse, l’Autriche et la Russie) en 1795
et, ainsi, à la disparition de cet État jusqu’en 1919.
Dès 1791 cependant, souci de la Révolution de se protéger : premières
levées de troupes populaire, émigrés considérés comme une menace.
Un débat se développe, stimulé par la fuite à Varennes, entre les Jacobin
et les Girondins : Brissot (favorable à la guerre) et Robespierre (évoque
l’émergence d’un sauveur militaire qui viendrait à la rescousse de la
Révolution en perdition).
L’État de guerre.
Ce débat se termine par l’ouverture des hostilités : le 20 avril 1792 contre
l’Empereur autrichien. Ce dernier reçoit toute de suite le soutien des États
allemands et du roi de Prusse.
Catastrophe militaire française jusqu’à l’été 1792, avec invasion au nord et à l’est
(Lyon), qui a deux conséquences :
L’abolition de la monarchie ;
Le redressement de Valmy : 20 septembre 1792.
Le redressement permet une expansion militaire de la Révolution :
Conquête de la Belgique (novembre 1792) et de la rive gauche du Rhin.
Annexion de la Savoie et de Nice (définitivement française 1860).
Ces conquêtes mélangent expansion de la Révolution (on déclare
apporter « fraternité et secours » aux peuples le 19 novembre 1792) et
considérations plus pragmatiques : ouverture de marchés pour la
bourgeoisie et milieux d’affaires, notion de frontière naturelle (le Rhin),
etc.
Reflux révolutionnaire au cours de l’année 1793 :
Aboutit à une nouvelle menace d’invasion sur les frontières françaises,
Nouveaux ennemis : l’Angleterre et l’Espagne (car exécution du roi).
Le partage de la Pologne libère aussi les mains de la Russie, Prusse et
Autriche (le dernier partage mobilise moins de troupes).
Cependant, les combats ne sont plus menés par les Girondins, mais les
Jacobins : répudiation de l’expansionnisme Girondin. La guerre se fait
d’une part aux frontières et d’autre part sur le front intérieur
(reconquête de Lyon et Toulon contre les Anglais).
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INTRODUCTION A L’HISTOIRE DES RELATIONS INTERNATIONALES – 27 FEVRIER 2007
Idée du « pré carré » prévaut au CSP : frontières naturelles comme
condition de la sécurité du pays, reprise de la doctrine d’Ancien Régime
(Meuse et Rhin)
Cette idée, mise en avant par Lazare Carnot (CSP) qui devient ensuite
directeur à partir de 1795, reste une idée phare de la Révolution
jusqu’en 1799.
Cette politique des frontières naturelles mène à un débat : création d’États
satellites ou rattachement à la France ?
Bâle, d’abord État satellite, devient département,
Belgique reconquise en 1795 est annexée,
Mais la Hollande, conquise en 1795, est transformée en Républiquesœur (Constitution à la française).
Ces trois éléments sont acceptées par la Prusse par le traité de Bâle
(octobre 1795).
Pendant l’an IV et V (1796-1797) : solution des Républiques-sœur l’emporte.
Échecs sur le Rhin : l’empereur ne veut pas accepter comme la Prusse
les frontières de 1795,
Mais victoires italiennes de Bonaparte :
Or Bonaparte réorganise lui-même ces conquêtes en 1797 en négociant
avec l’empereur.
République cispadane de la Plaine du Pô,
République cisalpine,
République de Gênes devient république ligurienne.
Puis création d’une République romaine (contre le pape), puis
autour de Naples.
Contrôlée par la mise en place d’un protectorat. Cependant,
fondement de ce contrôle sont minces.
Surtout, bafoue les principes mêmes de la Révolution française. Aucune
considération des aspirations des peuples.
Sur le Rhin, rive gauche est réoccupée à partir de 1795 : annexion de la
rive gauche du Rhin, forte pression sur la République helvétique.
Dès 1798, l’édifice craque. Bonaparte part en Égypte. En 1799, une seconde
coalition se forme : Angleterre, Autriche, Russie et Empire ottoman. Perte de
l’Italie, battus en Allemagne, débarquement anglo-russe en Hollande :
sauvegarde de la Révolution tient uniquement à la victoire de la bataille de
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INTRODUCTION A L’HISTOIRE DES RELATIONS INTERNATIONALES – 27 FEVRIER 2007
Zurich (vendémiaire an VIII – septembre 1799). L’intégrité du territoire
français est préservée, les République sœur ont disparu. Bonaparte revient en
France un mois après la bataille de Zurich.
Concernant la manière de faire la guerre, introduction, comme en politique, des masses :
devant l’invasion, levée en masse est proclamée en 1793. Les « soldats de l’an II » sont des
volontaires. L’armée n’est plus celle du roi mais celle de la Nation. Mise en place de la
conscription : la différence est qu’elle n’est plus volontaire, à partir de 1798. On défend
désormais la Nation et non plus les intérêts du roi. Dans ce cadre qu’émerge La Marseillaise : il y a
de lourdes résistances à la levée de masse mais également un réel élan collectif. Forme d’école
pour la République : permet de former des jeunes gens de 20 ans, de les imprégner de l’idéologie
révolutionnaire.
L’armée est moins bien formée (les soldats sont des volontaires) mais utilise le nombre et
l’offensive. Puissance du choc des masses, attaque frontale.
NPO : d’autres décisions ont une importance mondiale : l’abolition de l’esclavage,
l’indépendance de Haïti, etc. Mais, esclavage réintroduit par Bonaparte.
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INTRODUCTION A L’HISTOIRE DES RELATIONS INTERNATIONALES – 27 FEVRIER 2007
II. La stabilisation des premières années du Consulat
Décembre 1799 : mise en place du Consulat. Première œuvre du Consulat est la
pacification de l’Europe. Peut se faire grâce à plusieurs facteurs :
1. Les Nations impliquées sont économiquement et financièrement affaiblies.
Affaiblissement de la coalition à cause de l’Autriche. Elle est isolée de ses alliées
par une politique d’expansion : tente de faire pression sur la Bavière, sur le
Piémont, sur le conclave qui doit élire le nouveau pape.
Résultat : Russie se retire des combats, mécontent de l’appétit
autrichien.
Angleterre soutient financièrement l’Autriche,
Mais n’empêche pas les Autrichiens d’être défaits en Italie, à Marengo.
Bonaparte propose immédiatement la paix.
Négociations, échec, reprise des combats : Autriche est défaite sur le
Rhin et en Italie,
Donc traité de 1801 permet la paix : traité de Lunéville.
Italie du Nord sous influence française, Toscane également. Provinces
de Belgique restent françaises. Rive gauche du Rhin est sortie du Saint
Empire Romain Germanique. France obtient des droits de cet Empire.
2. Second point de cette stabilisation, les relations franco-russes
Jusqu’en 1815, les relations entre États en Europe sont dominées par la possibilité d’un
partage d’influence entre la France et la Russie. Après Lunéville, Bonaparte envoie une
proposition d’entente au tsar qui envisage ce partage. Tsar prêt à un rapprochement car voit en
Bonaparte celui qui a mis fin à la Révolution. De plus, intérêts communs avec la France sur deux
fronts : Baltique et Méditerranée (dissolution de l’Empire ottoman). Maîtriser l’Empire ottoman
nécessitait d’exclure les Anglais de la Méditerranée orientale, car ils protègent la route de l’Inde :
problème de Malte.
D’où négociations entre Français, Anglais, Russes et Turcs. Napoléon et le Tsar
(Alexandre, venant de succéder à Paul, assassiné. Alexandre plus anglophile) obtiennent
notamment en 1801 que Londres cède Malte à l’ordre des chevaliers de Malte.
3. Autres facteurs de stabilisation
Troisième point de cette stabilisation, rapprochement entre la France et l’Espagne :
échange de concessions en Italie pour l’Espagne et de la Louisiane pour la France (1801).
Quatrième point : l’Angleterre. Dès Noël 1799, Napoléon envoie un message de paix à
George III. Ce dernier et William Pitt sont très hostiles à Napoléon. Refus anglais. Peu se fonder
sur puissance de son capitalisme commercial, financier et industriel. Dépasse désormais
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INTRODUCTION A L’HISTOIRE DES RELATIONS INTERNATIONALES – 27 FEVRIER 2007
largement celle de la France. Mais en 1801, signes indiscutables de fatigue financière et
ralentissement industriel. Coût de la vie a nettement augmenté.
Bref, pas trop le choix : Pitt, Premier Ministre, démissionne, laisse la place à Addington,
plus faible. Paix conclue en 1802 (paix d’Amiens), après de nombreux incidents sur mer entre
l’Angleterre d’un côté et la majeure partie des pays à puissance navale de l’autre, le tout
soigneusement attisé par Bonaparte (constitution d’une ligue des Neutres). Cette paix n’est pas
très favorable à Bonaparte, notamment pour son influence en Allemagne (au profit de la Prusse)
ou dans les colonies (au profit de l’Angleterre). Bonaparte réussit à troquer l’Égypte, déjà perdue
mais importante aux yeux Anglais pour la voie vers l’Inde et le commerce en Mer rouge, contre
Malte, d’où les Anglais se retirent.
Cette stabilisation montre que la Révolution française a changé l’Europe, mais la clôt
diplomatiquement. Achèvement de la mise en place de la Nation en France, poussant désormais à
l’intervention de l’opinion publique comme acteur de la diplomatie. Les oppositions entre
Révolution et Europe d’Ancien Régime introduisent cependant un facteur d’incertitude dans les
RI, pouvant mener à un retour de la guerre.
III. LES GUERRES NAPOLEONIENNES
1. Les compétitions pendant la paix
Compétition économique
Compétition économique.
développement économique.
Angleterre
démobilise
et
favorise
son
Problème de Bonaparte, devenu consul à vie en 1802, c’est que son pouvoir
charismatique fondé sur la victoire. Donc paix pas favorable à son régime
politique. Cependant, il peut se reposer sur certains cadres et de la Révolution et
de l’Ancien Régime. Peut aussi compter sur le soutien des masses : pratique du
plébiscite par exemple : devient Consul à vie sur une extrêmement large
majorité. Bourgeoisie ne s’oppose pas à lui : initiatrice de la révolution, en a
ensuite peur, mais garde avec Bonaparte la liberté économique.
Bonaparte engage alors une compétition économique avec l’Angleterre. Oriente
bourgeoisie vers industrialisation. Main d’œuvre compétitive. France n’est pas
désavantagée dans cette compétition. Engage pour soutenir la compétition
l’expansion outre-mer, influence ou domination politique sur le continent.
Compétition en Allemagne
En Allemagne, traité de Lunéville prévoyait des changements territoriaux importants.
Autriche et France vont s’affronter sur ce terrain.
Se regroupent autour de la France les États du sud (Bavière, Wurtemberg,
Bade).
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Prusse se rapproche de la France par prudence.
Russie soutient la France.
Autriche reste isolée. Obtient quelques compensations en Italie en 1802.
La conséquence est une simplification de la carte de l’Allemagne : fin des
principautés ecclésiastiques, fin de la plupart des villes libres. Nombreux princes
ou chevaliers ayant petits territoires disparaissent.
Prusse, Bade, Bavière et d’autres s’étendent largement. Permet pour la France
de brider l’Autriche en Allemagne.
Lignes de force française
Parallèlement, Bonaparte cherche à sortir des frontières : créer une ceinture d’États
inféodés autour de la France, pour la protéger militairement et en faire des marchés
économiquement. Influence notamment l’Allemagne, la Hollande et les États d’Italie. Le
Piémont, par exemple, est divisé en départements français. Hollande : République batave : assoit
les intérêts français, Suisse : sous surveillance par la mise en place d’un pouvoir fédéral faible face
aux cantons.
Avantage de cette ceinture :
Envoi de troupes loin des frontières : des satellites proches, il obtient des
troupes. Envoie des troupes alors à Saint Domingue. Autre avantage de
Atouts commerciaux et militaires, notamment Piémont, et surtout Suisse : la
France contrôle les routes suisses.
Appui commercial : Piémont permet par exemple un ravitaillement en bétail et
céréales, ainsi que riz.
Opposition commerciale avec l’Angleterre s’exacerbe. Expansion dans les colonies
(répression de Saint-Domingue) inquiète l’Angleterre. Paix de plus en plus menacée.
Échec de la paix
Opposition politique entre dictature et régime libéral, opinion publique anglaise
hostile à la France, hostilité entretenues par la presse, dont les moyens
techniques favorisent de plus en plus la diffusion.
Second point : sort fait aux États dominés par la France est mal considéré par
l’Angleterre. Or 1802 : répression française en Suisse. Contestation britannique.
En conséquence, GB offre à la Russie des négociations qui ont mené à la rupture de la
paix. Russie inquiète des projets hégémoniques de Bonaparte sur l’Empire ottoman, qui ferait de
la France une puissance trop importante en Méditerranée orientale, surtout ses visées sur
l’Égypte. Malte va être à nouveau au centre du conflit : Russes pressent les Britanniques d’y rester
finalement. La situation se tend particulièrement au début de 1803. Malgré la volonté française de
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négocier (expédition à Saint-Domingue est devenue catastrophique, marine française dans un état
lamentable), la guerre se déclenche à nouveau en mai 1803.
2. Première étape des guerres napoléoniennes : les coalitions russes (1803-1807)
Problème essentiel pour Bonaparte : l’Angleterre. Guerre navale donc importante.
Diplomatie importante vers l’Espagne, puissance maritime plus importante que la France, qui
non seulement perd St Domingue mais revend la Louisiane aux États-Unis, car indéfendable sans
Saint-Domingue. Pressions françaises en Italie pour obtenir également des troupes navales. Mais
faiblesse navale reste la faiblesse française essentielle.
En face, Russie est le centre de la troisième coalition (les deux premières sont sous la
révolution). Continue de se rapprocher de Londres. Pendant quatre ans, la Russie est au centre
des coalitions contre la France. Mécontentement à cause de l’Égypte. À partir de 1805, Russie
obtient une aide financière de l’Angleterre, ainsi que signature d’une alliance formelle qui prévoit
de transformer Hollande, Prusse, Autriche et Piémont en État barrières contre la France,
maintenue dans ses anciennes frontières. Dès cette époque, on prévoit la mise en place d’une
entente entre État européen et d’une grande conférence, idée reprise en 1815.
Russie s’adjoint aussi les quelques États italiens qui ne sont pas sous domination de la
France, la Suède. Enfin et surtout, Russie s’adresse à l’Autriche. Cette dernière convoite la
Bavière, la France s’y oppose fermement.
En 1804, Bonaparte devient Napoléon Ier, empereur des Français. Inquiète l’Autriche : en
termes juridiques, il n’y a qu’un seul empereur, celui du Saint Empire Romain Germanique.
Autriche reconnaît le titre d’empereur, mais le roi d’Autriche, qui est Empereur d’Allemagne,
devient empereur d’Autriche, et le Saint Empire romain germanique disparaît.
Napoléon trop menaçant, Autriche finit par accepter de s’allier à la Russie. Tsar somme
Vienne d’agir. Elle adhère au traité anglo-russe.
Cette alliance va être bénéfique à la Russie et à la France, et mauvaise pour tous les autres.
Les premiers à être défaits sont les Autrichiens, dès décembre 1805 (Austerlitz). Prusse rejoint le
camp français. D’autant plus gênant pour l’Autriche que la défaite navale de Trafalgar anéantit
tout espoir de Napoléon d’envahir l’Angleterre : la guerre se tourne exclusivement vers le
continent. L’Autriche est chassée d’Italie et d’Allemagne.
Conséquence de ces victoires, mise en forme juridique de l’Empire : devient une sorte de
fédération impériale dynastique et de parenté : membres de la famille de Napoléon deviennent
rois de divers petits royaumes (en Hollande, en Italie, comme à Naples par exemple, en
Allemagne avec la création de la Confédération du Rhin dont Napoléon est protecteur). Rompt
l’équilibre européen, notamment car Napoléon étend son empire progressivement au-delà du
Rhin.
Tentatives de paix de la part de la Russie, de l’Angleterre et de la France. Échouent.
Russie tente alors d’attirer la Prusse à elle. Or accepte : combats reprennent. Prusse disposait
désormais du Hanovre, mais en guerre contre l'Angleterre, est en mauvaise position. Prusse
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INTRODUCTION A L’HISTOIRE DES RELATIONS INTERNATIONALES – 27 FEVRIER 2007
adhère à la coalition : la quatrième coalition (1806). Déroute militaire de la Prusse : octobre 1806,
victoires d’Iéna et Auerstedt. Prusse est occupée.
Discussions diplomatiques s’ouvrent à ce moment avec la Russie (1807) : Napoléon en
situation militaire difficile : espace, hiver, risque de renversement d’alliance de l’Espagne. Réussit
cependant à battre une armée russe en juin 1807 (Friedland). Entrevue entre tsar Alexandre et
Napoléon.
D’où paix de Tilsit en 1807, avec la Russie et la Prusse. Prusse grande perdante, France
grande gagnante, Russie perd des territoires, mais gagne un soutien contre l’Empire ottoman et
signe un traité secret d’alliance avec Napoléon. Napoléon maîtrise alors suffisamment les cotes
européennes pour mettre en place un blocus contre l’Angleterre (dès 1806, vraiment effectif à
partir de Tilsit).
3. Deuxième étape des guerres napoléoniennes (1806-1810)
Le blocus (1806-1810)
Angleterre : plus d’alliés sur le continent, mais maîtrise la mer, ayant détruit les flottes
françaises. Son arme essentielle est désormais économique. Marine de guerre appuie l’économie
britannique. Angleterre s’assure toutes les sources mondiales de produits coloniaux.
Napoléon, en réaction, fait entrer dans son plan de guerre économique tous les États sous
son joug ou son alliance. Rejoint préoccupation de nombreuses opinions publiques : anciens alliés
amers, Allemands qui veulent abattre l’orgueil des marchands anglais, etc.
Blocus français sur l’Angleterre a pour but de priver l’industrie britannique de ses
débouchés. Blocus mis en place progressivement à partir de 1803, officiel et complet en 1806,
devient particulièrement efficace avec Tilsit. Mène à une guerre économique totale entre le
continent et l’Angleterre. Économie anglaise s’adapte plutôt bien au blocus et son développement
industriel continue.
En face, Napoléon, très bine informé sur l’économie, n’arrive cependant pas à mettre en
place une politique économique satisfaisante, car trop autoritaire, face à une économie qui a
besoin de fluidité. Organisation économique de l’Europe en Système continental, qui consacre
une hiérarchie entre la France et les autres pays européens. France produit, les autres fournissent
des matières premières. But mercantiliste : accumuler de l’or pour entretenir une armée. On met
en place un espace économique hiérarchisé, fermé par un cordon douanier qui doit permettre
blocus contre l’Angleterre. Face au développement anglais, cette politique échoue, d’autant plus
que le blocus bloque toute communication maritime. Les travaux sur les routes restructurent
alors les échanges commerciaux européens, mais insuffisamment.
Enfin, ne peut lutter efficacement contre la contrebande. Industrie française pas
suffisamment puissante pour assumer son rôle dominateur.
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INTRODUCTION A L’HISTOIRE DES RELATIONS INTERNATIONALES – 27 FEVRIER 2007
L’Espagne (1808)
Espagne avait regardé vers la Russie après le mépris napoléonien où elle est tenue à partir
de la défaite de Trafalgar où l’Espagne a perdu de nombreux bateaux. Napoléon veut agir : 1808,
essaye de changer la dynastie qui est sur le trône d’Espagne. Provoque un soulèvement. Soutenus
par les Britanniques. Ce deuxième front ne se ferme qu’en 1813, par la défaite des Français. C’est
une guerre ayant donné lieu à de nombreux massacres.
Autriche (1809)
Émergence d’une personnalité : Metternich. Or, ce dernier, ambassadeur à Paris, constate
que l’alliance entre France et Russie fonctionne mal : cette seconde refuse, en 1808, d’accorder
une garantie à Napoléon en cas de conflit avec l’Autriche. Cette dernière utilise des armes
modernes : mobilise population par la presse, réorganise son armée (mise en place d’armées de
masse). Guerre est à nouveau déclarée contre la France en 1809. Catastrophe autrichienne :
Wagram, troupes françaises occupent Vienne, paix est signée en octobre. En 1810 cependant,
Metternich réussit à obtenir pour les Habsbourg une alliance matrimoniale : remariage de
Napoléon et la naissance des héritiers.
Allemagne et Italie
On y tire des bilans. Cartes géographiques sont simplifiées. Mais esprit national émerge.
Grandes tensions entre les différents États restent. On reproche aux Français leur rapacité
économique. Militaires allemands, principalement, deviennent réticent lorsqu’ils doivent servir
pour Napoléon. Milieux politiques deviennent froids. La Prusse voit un sentiment national fort se
confirmer. Des intellectuels émergent qui théorisent ce réveil : Fichte par exemple en 1808. Bref,
idées nationales allemande et italienne émergent sous Napoléon, en réaction. Prusse se
réorganise, réorganise son armée, souvent de manière clandestine. Ces régions profitent
également de la diffusion de réformes napoléoniennes en leur faveur : la diffusion du Code Civil
dans une grande partie de l’Europe.
4. Le retour aux équilibres (1810-1815)
Russie est face à un problème politico-économique : accord de Tilsit était inespéré, mais
la noblesse russe est ruinée par le blocus. Napoléon n’arrive pas à répondre à des demandes de
meilleures relations économiques avec la Russie. Napoléon, de plus, annexe le littoral allemand de
la mer du Nord, y compris principauté reliée à la famille du tsar et théoriquement protégée par le
traité de Tilsit. Russie répond en ouvrant ses ports aux neutres, c’est-à-dire indirectement aux
Anglais. Fin du Système du blocus.
Parallèlement, le tsar se tourne vers la Prusse. Mais n’arrive pas à obtenir l’évacuation de
la Prusse, qu’il voulait. De plus, Napoléon avait favorisé la création d’un grand-duché de
Varsovie, qui pouvait être embryon d’une nouvelle Pologne. Or base militaire problématique
pour la sécurité de la Russie. Enfin, cette dernière voulait Constantinople et Napoléon refusait.
En 1812, Anglais voyant la brèche proposent médiation entre Moscou, Vienne et Constantinople.
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INTRODUCTION A L’HISTOIRE DES RELATIONS INTERNATIONALES – 27 FEVRIER 2007
1812 : guerre reprend en 1812. Napoléon passe les frontières russes. Plus de 600 000
hommes. Six mois après, 500 000 sont morts. Plus d’artillerie, plus de chevaux, trop grande partie
des officiers sont morts. Grand ennemi de Napoléon : l’hiver et la faim. Grande retraite
commence en octobre.
Russie envoie ses troupes en Allemagne en 1813. Napoléon reconstitue des troupes, à
600 000 hommes. Autriche rompt progressivement son alliance avec la France, l’Angleterre se
fait médiateur entre Russie et Autriche et une nouvelle coalition se crée en juin 1813. La guerre
éclate formellement entre l’Autriche et la France en août.
Batailles acharnées, pertes énormes. Effectifs monstrueux. Effectifs de la coalition
augmentent sans cesse. Troupes françaises sont trop jeunes, peu de cadres ne résistent que peu.
Victoire de Napoléon à Dresde, puis défaite à Leipzig (la « bataille des nations »). Retraite vers la
France, avec 200 000 hommes, après les ravages du typhus. L’Allemagne napoléonienne s’est
effondrée. Confédération du Rhin est dissoute.
Napoléon doit alors vaincre en France même, en 1814. Napoléon résiste pendant
quelques temps, car les coalisés s’opposent sur leurs buts. Mais Napoléon finit par échouer en
mars. Le 30 mars 1814, Paris capitule, et l’Empereur abdique le 6 avril 1814. Louis XVIII, héritier
des Bourbons, est appelé sur le trône. Par le traité de Fontainebleau, la France est réintégrée dans
ses frontières de 1792. Elles recouvrent une partie de ses colonies prises par les Anglais. Pour les
territoires conquis puis retirés à la France, est organisé le Congrès de Vienne.
Mais il y eut un bref retour de Napoléon : les Cent Jours, Napoléon revenant de son exil
sur l’île d’Elbe. 20 mars 1815 aux Tuileries. Guerre immédiatement décidée, sur initiative de
Metternich. Le 18 juin 1815, malgré un début à l’avantage de Napoléon, ce dernier perd la bataille
de Waterloo. Le 22 juin 1815, c’est la seconde abdication de Napoléon. Exilé sur l’île de SainteHélène.
Ces Cent Jours ont pour conséquence une paix moins favorable à la France (retour aux
frontières de 1790), cependant, paix reste raisonnable.
CONCLUSION
Napoléon a trouvé soutien d’un peuple, mais aussi, jusqu’en 1808-1810, soutien
d’une partie de l’Europe,
Nouveautés de la Révolution, l’entrée des masses en politique, soutiennent
l’œuvre napoléonienne,
Empire pas possible, car moyens de communication ne le permettent pas,
Émergence de l’Europe des Nations : idée nationale s’ancre fortement dans les
États allemands, italiens, en Pologne qui a disparue.
Parfois, aspects de lutte sociale, revanche contre une sorte de nation prolétaire,
contre les réformes juridiques : émancipation des paysans notamment.
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