Recherche Information - prévention - dépistage Actions pour les malades et leurs proches G R A N D P U B L I C Les leucémies Les leucémies Les leucémies sont des affections hématologiques malignes caractérisées par la prolifération incontrôlée, dans la moelle osseuse, de cellules qui sont à l'origine des globules blancs du sang. Ces cellules passent le plus souvent dans le sang. Leur pronostic est très variable d’une forme à une autre. En France, en 2005, le nombre de nouveaux cas de leucémies a été de 6.306 (3.513 pour les hommes et 2.793 pour les femmes). La même année, la mortalité par leucémie a été de 3.792 décès (2.035 chez les hommes et 1.757 chez les femmes). La formation des cellules du sang Depuis la cellule souche jusqu'aux globules "mûrs", il se déroule une succession d'évènements biologiques dont l'ensemble est appelé "hématopoïèse*", ou genèse des globules sanguins. Pour comprendre l'hématopoïèse, il est bon de rappeler la nature des globules contenus dans le sang (schéma ci-dessous). Schéma de l’hématopoïèse Cellule souche Lignée myéloïde Lignée lymphoïde Erythroblastes Mégacaryocytes Myéloblastes Globules rouges Polynucléaires (PN) Lymphocytes B PN éosinophiles PN neutrophiles Plaquettes Monocytes Macrophages PN basophiles 1 Thymus Lymphocytes T Le sang est normalement composé de cellules matures qui ne se divisent plus : > Les globules rouges (appelés aussi érythrocytes ou hématies) ; leur fonction principale est le transport de l'oxygène. L'oxygène se lie à une substance contenue dans le globule et qui lui donne la couleur rouge, l’hémoglobine ; > Les globules blancs ou leucocytes : ils ont un rôle important dans la lutte contre les infections. On en distingue deux grands groupes, dont la dénomination a été définie suivant leur aspect au microscope : - les polynucléaires (cellules à noyau irrégulier, comme s’il y en avait plusieurs) qui représentent 60 à 70 % des leucocytes ; - les cellules mononucléées (avec un noyau bien régulier) qui se répartissent en lymphocytes (25 à 30 % des globules blancs) et les monocytes (2 à 10 %). Il existe aussi diverses sous-catégories, aussi bien de polynucléaires (les neutrophiles, les éosinophiles, les basophiles) que de lymphocytes (cellules T et cellules B, différentes dans leurs structures, leurs fonctions physiologiques, notamment immunitaires). Toutes ces cellules ont donc une structure chimique distincte d'où la possibilité de les différencier par des réactions immuno-histochimiques*. > Les plaquettes : elles participent à l’hémostase, c’est-à-dire à l’ensemble des processus qui permettent d’arrêter les hémorragies. La moelle osseuse : il s’agit d’une substance semiliquide, contenue à l’intérieur des os (crâne, vertèbres, bassin…) et où se fabriquent les globules rouges et blancs, ainsi que les plaquettes. A l'origine des globules et des plaquettes, coexistent dans la moelle osseuse des cellules souches, pluripotentes, à des stades divers de maturation. On trouve ainsi des érythroblastes (précurseurs des globules rouges), des lymphoblastes (qui deviennent successivement prolymphocytes puis lymphocytes), des myéloblastes (qui évoluent en promyélocytes, myélocytes puis granulocytes (lignée myéloïde), et enfin des mégacaryocytes (précurseurs des plaquettes). 2 Qu’appelle-t-on leucémie ? Une leucémie est l’accumulation et/ou la prolifération incontrôlée de cellules hématopoïétiques (c'est-à-dire d’une cellule à l’origine d’une lignée cellulaire) dans la moelle osseuse. Dans les leucémies aiguës, la lignée cellulaire, faite de cellules jeunes, immatures, envahissant la moelle osseuse, empêche la fabrication normale des autres cellules sanguines. Suivant qu’il s’agisse de la lignée des lymphocytes ou des polynucléaires, on parle de leucémies lymphoïdes ou de leucémies myéloïdes. Classification des leucémies Les quatre grands types de leucémies Cellules hématopoïétiques Leucémies chroniques Cellules lymphocytaires Leucémie lymphoïde chronique (LLC) Leucémies aiguës Cellules myéloïdes Leucémie myéloïde chronique (LMC) Lymphoblastes Leucémie aiguë lymphoblastique Myéloblastes Leucémie aiguë myéloblastique (ou myéloïde) Il faut distinguer : > les leucémies chroniques caractérisées par une évolution clinique généralement longue (plusieurs années) et par la prolifération ou l’accumulation de cellules originaires de la moelle osseuse, à un stade avancé de leur différenciation en globules du sang. Suivant qu’il s’agisse de cellules lymphocytaires ou myéloïdes, on parlera de leucémie lymphoïde chronique ou de leucémie myéloïde chronique. 3 > les leucémies aiguës caractérisées par une évolution clinique rapide et par la prolifération dans la moelle osseuse (voire dans le sang) de cellules bloquées à un stade précoce de leur différenciation, appelées «blastes». Suivant l’origine des blastes, on parlera de lymphoblastes (cellules normalement destinées à devenir des lymphocytes) ou de myéloblastes (normalement destinées à devenir des polynucléaires, des plaquettes ou des globules rouges) et donc de leucémies aiguës lymphoblastiques ou myéloblastiques. Leur évolution Le pronostic des leucémies aiguës a été progressivement transformé au cours des trente dernières années, avec une réduction remarquable du taux de mortalité, principalement pour les leucémies lymphoblastiques de l’enfant, dont le taux de guérison atteint près de 80 %. Toutefois ces progrès se font au prix de traitements lourds et agressifs. Les leucémies ont-elles des causes connues ? Dans la grande majorité des cas, on ne connaît pas la cause exacte d’une leucémie. Mais certains facteurs ont pu être identifiés comme pouvant favoriser, dans certaines circonstances, la survenue d’une leucémie : > une exposition massive à des radiations ionisantes, > des anomalies du fonctionnement de certains gènes*, > des anomalies d'un chromosome* donné (chromosome Philadelphie), > l'exposition prolongée à des substances chimiques comme le benzène, 4 > certains virus (éventualité très rare), > des traitements antérieurs par certains médicaments anticancéreux. Comme pour tout cancer, il n'y a qu'exceptionnellement une cause unique. Les leucémies chroniques C’est la prolifération et/ou l’accumulation d’une lignée cellulaire dans la moelle osseuse (on parlera de syndrome myéloprolifératif ou lymphoprolifératif) se traduisant par un taux anormalement élevé de globules blancs (lymphocytes ou polynucléaires) dans le sang mais sans présence de cellules blastiques, c'està-dire de cellules immatures. On en distingue deux formes principales : 1/ Les leucémies lymphoïdes chroniques (LLC) Il s’agit d’une accumulation anormale de la lignée lymphoïde avec un taux anormalement élevé de lymphocytes dans le sang. Les lymphocytes atteints sont dans la grande majorité des lymphocytes de type B, peu différents des cellules normales. Ces LLC sont peu évolutives et, comme elles surviennent le plus souvent après 60 ans, leur pronostic est assez favorable dans la majorité des cas. Les signes d'alarme sont variables : fatigue, adénopathies (augmentation de volume des ganglions) siégeant dans les divers territoires (cou, creux axillaires*, creux inguinaux*). Parfois, c’est le médecin qui, en examinant l’abdomen, découvre une grosse rate ou un gros foie, ou encore, à l'examen de la gorge, de grosses amygdales. Mais bien souvent, le diagnostic est fait par une simple numération de la formule sanguine (N.F.S.) faite en routine. 5 La numération formule sanguine est l'examen microscopique et le comptage des éléments du sang, prélevés par une simple prise de sang. En cas de LLC, cette numération va montrer un taux très élevé de lymphocytes. La ponction de moelle osseuse n’est pas nécessaire au diagnostic, celui-ci pouvant se faire sur le sang. Le traitement de la LLC dépend du degré d’évolution de la maladie, défini selon trois stades : > A : asymptomatique (simple excès isolé de lymphocytes sanguins), > B : moins de 3 aires ganglionnaires atteintes, > C : atteinte ganglionnaire diffuse, anémie, chute des plaquettes. Dans les formes simples, asymptomatiques (stade A), on se contente d'une simple surveillance. Le traitement ne s'impose que dans les formes plus sévères (stades B et C). Il repose sur la chimiothérapie : > chez les sujets âgés : chlorambucil, médicament donné par voie orale, durant plusieurs mois. Ce traitement est en général bien supporté, mais demande une surveillance régulière de la numération sanguine car il peut aussi affecter les autres lignées cellulaires. > chez les sujets jeunes : on a recours à d’autres chimiothérapies par voie orale comme la fludarabine associée au cyclophosphamide, ou à l’association de divers produits par voie veineuse. Les traitements les plus actifs peuvent être toxiques pour les globules du sang et les défenses immunitaires. Ces traitements freinent la maladie un certain temps mais ne sont pas curatifs. Plus récemment, une nouvelle classe de médicaments est apparue : il s'agit d'anticorps monoclonaux comme le rituximab donné en association avec la fludarabine et le cyclophosphamide, et comme l’alentuzumab, commercialisé en France pour les patients en échec de la chimiothérapie, et provoquant la destruction spécifique des lymphocytes. 6 Etre atteint d’une L.L.C. est compatible pendant très longtemps, la plupart du temps, avec une vie normale. Il faut souligner chez ces sujets la fréquence de certaines maladies virales comme le zona et le danger des vaccins vivants. Dans le passé, la vaccination antivariolique a entraîné chez de tels patients des accidents mortels. Certaines affections proches de la LLC, comme la maladie lymphoplasmocytaire de Waldenström ou la leucémie à cellules chevelues (hairy cell leukemia ou tricholeucémie) ont une symptomatologie propre et des traitements spécifiques. 2/ Les leucémies myéloïdes chroniques (LMC) Elles sont bien différentes des LLC dans leur mécanisme, leur traduction clinique et surtout leur évolution. En effet, la leucémie myéloïde chronique, prolifération des globules blancs de la série des granulocytes (polynucléaires) est associée à une anomalie chromosomique précise (le chromosome de Philadelphie) où une partie du chromosome 22 se fixe sur le chromosome 9, entraînant ainsi des perturbations génétiques à l’origine de la LMC. Les signes d'alarme Le patient peut être alerté par une fatigue, une fièvre inexpliquée, une pesanteur abdominale. A l'examen, le médecin peut palper une grosse rate, mais ce signe est inconstant. Dans 50 % des cas, c'est une numération sanguine systématique ou faite pour une toute autre cause qui découvre l'importante leucocytose (élévation du taux de leucocytes), associée à la présence de cellules normalement présentes dans la moelle mais pas dans le sang. Le diagnostic sera fait à partir de l'examen des chromosomes (par un caryotype), montrant le chromosome anormal (sur le sang, voire éventuellement sur un prélèvement de moelle osseuse) et par un examen de biologie moléculaire objectivant la translocation. 7 L'évolution est plus ou moins longue, mais va se faire inexorablement vers une aggravation, avec fatigue, état fébrile, montée importante du taux de leucocytes, puis passage à la forme aiguë, marquée par le passage dans le sang de cellules immatures de la moelle, les blastes. Le traitement est systématique et plus agressif que dans la LLC car le pronostic vital est menacé. Une vraie révolution dans les traitements anticancéreux est survenue au cours de ces dernières années avec les "thérapeutiques ciblées" : il s'agit de médicaments agissant sur certains signaux commandant la croissance des cellules et qui sont hyper-exprimés dans certains cancers. L'imatinib est l'une de ces molécules, très efficace dans le traitement des leucémies myéloïdes chroniques, y compris en transformation aiguë. Elle est à présent systématiquement proposée en première intention, car plus efficace, mieux tolérée et plus aisée d’administration (voie orale) que l’interféron. Les sujets jeunes, résistants à l’imatinib, peuvent se voir proposer une greffe de moelle (s’il y a un donneur compatible dans leur fratrie ou au sein des banques de donneurs). 3/ Autres syndromes myéloprolifératifs La fibrose médullaire avec hématopoïèse splénique et la polyglobulie de Vaquez font également partie des syndromes myéloprolifératifs mais ne comportent pas la même anomalie chromosomique. Ces maladies s’accompagnent par contre souvent d’une anomalie génétique caractéristique, la mutation (V617F) du gène JAK2. 8 Les leucémies aiguës Elles sont caractérisées par la prolifération incontrôlée dans la moelle osseuse de cellules souches d’une lignée hématopoïétique avec un arrêt de leur différentiation. Des cellules immatures sont alors déversées dans le sang. Une leucémie aiguë peut toucher la lignée lymphoïde (leucémie aiguë lymphoblastique) ou la lignée myéloïde (leucémie myéloïde aiguë ou myéloblastique). Les leucémies aiguës lymphoblastiques atteignent plus souvent le jeune enfant (80 %) alors que la leucémie myéloblastique est le fait de l'adulte et peut survenir à tout âge. Dans 95 % des cas, on ne retrouve pas de cause précise. Dans de rares cas, on peut incriminer une maladie génétique prédisposante (trisomie 21, ataxie-télangiectasie), une exposition à des radiations, ou encore une infection par certains virus très particuliers. Le diagnostic repose impérativement sur l’examen de la moelle osseuse (myélogramme*) obtenue par ponction au niveau du sternum ou de l’os iliaque. 1/ Les leucémies aiguës lymphoblastiques de l’enfant Le pronostic des leucémies aiguës lymphoblastiques de l’enfant est plutôt favorable puisque le taux de guérison dépasse actuellement 80 %. Les signes d'alarme sont plus ou moins sévères, souvent d'apparition plus ou moins rapide : > atteinte de l'état général (fatigue, fièvre, amaigrissement), > angines à répétition, bronchites, > tendance aux saignements répétés du nez, apparition de «bleus» ou ecchymoses spontanés, saignements des gencives, saignements divers, > tuméfaction des ganglions lymphatiques, > douleurs osseuses. 9 Parfois même, la maladie est découverte du fait de la localisation à divers organes comme les méninges ou les testicules. Le diagnostic sera évoqué à partir de la numération formule sanguine montrant des anomalies majeures : anémie, granulopénie, thrombopénie et surtout une prolifération de la lignée lymphocytaire avec passage dans le sang de formes jeunes, les lymphoblastes. L'examen de la moelle osseuse (myélogramme) est l'examen clef qui confirme et précise le diagnostic en montrant un envahissement massif de la moelle par les cellules malignes. La ponction sternale est la ponction du sternum, un os plat où la moelle est abondante. Superficiel, juste sous la peau du thorax, et donc facilement accessible, cet os sera ponctionné à l'aide d'un "trocart" (aiguille creuse) après une anesthésie locale et, si possible, sous analgésie par inhalation au masque d’un mélange de gaz (oxygène et protoxyde d’azote), le MEOPA. Il s'agit d'un geste simple, bref, ne nécessitant pas d’hospitalisation. Cette ponction montrera une prolifération anormale de cellules dans la moelle. Enfin, une étude du caryotype, c'est-à-dire de la constitution des chromosomes, permet de déceler diverses anomalies possibles, dont certaines ont une valeur pronostique. Les signes défavorables sont cliniques (âge, grosse rate, ganglions volumineux, nombre élevé de lymphoblastes dans le sang) et biologiques (variétés d’expression des antigènes à la surface des blastes, anomalies chromosomiques). Des infiltrats leucémiques viscéraux seront recherchés au niveau des poumons (radiographie du thorax), des testicules, du système nerveux central (méninges) se traduisant par des maux de tête, des troubles oculaires, des vomissements, une somnolence, diverses paralysies. Le diagnostic de ces localisations neurologiques est porté par l'examen du liquide céphalorachidien (effectué par ponction lombaire). 10 Au terme de ce bilan, on peut évaluer la gravité, en fonction de l'âge de l'enfant (plus grave si moins de 2 ans ou plus de 10 ans), du taux de lymphoblastes, dans le sang, du degré de gravité hématologique, des signes cliniques et biologiques, ainsi que de certaines anomalies chromosomiques. Les traitements Adaptés en fonction du type de leucémie aiguë lymphoblastique, ils sont déterminés par les examens du bilan. L'élément majeur du traitement est la chimiothérapie associant plusieurs produits. Le traitement comporte 4 phases majeures : > Induction-rémission : elle comprend divers agents, dont plusieurs antimitotiques (vincristine, daunorubicine, L-asparginase) et cortisone, par cures successives, jusqu'à obtention d'une rémission complète, c'est-à-dire la normalisation des examens du sang et de la moelle. Celle-ci est le plus souvent obtenue en quelques semaines. Mais par prudence, il est nécessaire de poursuivre le traitement par une phase de consolidation. > Prévention de l'atteinte du système nerveux central par des injections dans l'espace méningé, par ponction lombaire, de produits chimiothérapiques, associées ou non à une irradiation crânienne à dose modérée. > Consolidation : poursuite de la chimiothérapie sur un mode moins intense. Après quelques semaines, elle sera elle-même réduite pour passer au > Traitement de maintenance durant plusieurs mois. Au total, il s'agit d'un traitement d'environ 18 mois. La période de traitement actif sera suivie d'une surveillance régulière durant au moins 5 ans pour dépister une éventuelle rechute. 11 Une rechute peut : - soit se manifester par le retour de certains signes cliniques, - soit être décelée par des examens systématiques (anomalie sanguine). Une des complications relativement fréquente est une localisation méningée, ou encore testiculaire. Le traitement est alors, chaque fois que possible, une greffe de moelle allogénique, c'est-à-dire d'un donneur dit compatible, qui est le plus souvent l'un des frères et sœurs. La greffe de moelle, pour pouvoir "être acceptée" par le malade, nécessite un conditionnement de celui-ci, c'est-à-dire la suppression de toutes ses défenses immunitaires par une chimiothérapie courte et intense (± radiothérapie). La conséquence en est donc une "aplasie" (arrêt de fonctionnement de la moelle) jusqu'à ce que la moelle injectée ait eu le temps de repeupler la moelle du malade receveur. Durant cette période, ce dernier est en état de moindre défense face aux infections bactériennes, virales, parasitaires. Il est nécessaire de l’isoler en chambre stérile durant plusieurs semaines. En l’absence de donneur compatible, on peut avoir recours au sang du cordon ombilical, plus facile à accepter au plan immunitaire mais moins riche que la moelle en cellules souches et réservé par conséquent au jeune enfant. S’il est impossible de trouver un donneur compatible, on peut aussi pratiquer une "autogreffe" de moelle prélevée sur le patient lui-même lorsqu'il est en phase de rémission complète ou une greffe de cellules jeunes dites "cellules souches" prélevées sur le sang du patient lui-même. 12 2/ Les leucémies aiguës lymphoblastiques de l’adulte Leur évolution est moins favorable que chez l’enfant. Leur biologie est souvent différente puisqu’on retrouve le chromosome Philadelphie dans une proportion non négligeable de leucémies apparemment lymphoblastiques de l’adulte. 3/ Les leucémies myéloïdes aiguës Plus rares chez l'enfant (20 % des leucémies), elles s'observent plus volontiers chez l'adulte. Elles sont caractérisées par la prolifération des cellules jeunes normalement destinées à devenir des polynucléaires, des monocytes, des plaquettes ou encore des globules rouges. La classification des différents types de leucémies myéloïdes aiguës repose sur l’aspect des blastes et l’expression variée d’antigènes à leur surface (définissant divers sous-types : M0, M1, M2… à M7) mais aussi sur la présence de certaines anomalies chromosomiques. Le caractère inaugural de la maladie, ou sa survenue au décours d’une maladie chronique de la moelle osseuse, intervient également. Le diagnostic est suspecté à partir de la numération de la formule sanguine qui peut montrer soit un chiffre de globules blancs très élevé, avec présence de formes jeunes anormales, soit un taux très bas de leucocytes (leucopénie), mais aussi des plaquettes (thrombopénie) et des globules rouges (anémie). Le diagnostic sera affirmé par le myélogramme, montrant une infiltration de cellules "blastiques". Le traitement de base est une chimiothérapie souvent lourde, associant divers produits. Elle comportera successivement une phase d'induction, suivie d’une consolidation, voire d'une intensification par greffe de moelle d’un donneur compatible, ou de cellules souches prélevées chez le patient, chez les patients jeunes si une rémission complète est obtenue. 13 Le pronostic dépend principalement de l’âge, du type cytologique des blastes, des anomalies chromosomiques, de l’existence d’une maladie pré-existante de la moelle osseuse et bien sûr de la réponse aux traitements. 4/ Les leucémies à promyélocytes Elles sont caractérisées par des anomalies génétiques et des signes cliniques spécifiques : leur traitement se distingue de celui des autres leucémies myéloblastiques. 5/ Les myélodysplasies Chez l’adulte, en particulier chez l’adulte âgé, on observe des dysfonctionnements de la moelle ou myélodysplasies qui se traduisent par une anémie réfractaire, une diminution dans le sang des polynucléaires et des plaquettes, alors même que le pourcentage de cellules morphologiquement anormales dans la moelle parait modeste. Ces maladies, de traitement difficile, nécessitent souvent des transfusions répétées et peuvent évoluer vers une leucémie aiguë. Les différents types de greffe de moelle osseuse Le principe est de réimplanter chez le malade des cellules jeunes hématopoïétiques capables de "prendre la place" des cellules malades que l'on aura préalablement détruites par chimiothérapie (plus, éventuellement, par radiothérapie) et de repeupler la moelle osseuse du receveur avec ces cellules saines. De plus, la greffe de moelle a une action antileucémique par elle-même, du fait des propriétés de défense immunitaire des cellules injectées. 14 1/ Les transplantations de moelle osseuse. Elles peuvent être allogéniques (greffe de cellules d’un donneur) ou autologues (greffe de cellules du malade) : > transplantation de greffe allogénique : la moelle est prélevée chez un donneur pour être réinjectée par voie intraveineuse à un receveur. Donneur et receveur doivent être compatibles, ce qui veut dire que leurs cellules doivent être aussi semblables que possible. Toutes nos cellules portent sur leur membrane des substances appelées "antigènes d’histocompatibilité" dont il existe de multiples variétés : c’est le système HLA, comme il existe le système ABO pour les globules rouges. Ce sont ces antigènes d’histocompatibilité qui provoquent de la part du receveur des réactions de rejet ou, au contraire, d’attaque du greffon* (les cellules du donneur) contre l’hôte (le receveur). La totale identité n'existe que pour les jumeaux homozygotes*. Mais on peut s'en rapprocher au sein d’une fratrie. Il est également possible de greffer de la moelle provenant de personnes volontaires non apparentées, dont les cellules sont antigéniquement proches de celles du receveur. Pour ce faire, les personnes volontaires doivent remplir certaines conditions (âge, sécurité sanitaire) et subir un bilan préalable pour éliminer, comme pour les dons de sang, toute suspicion de maladie transmissible : hépatites, VIH, etc. Le donneur sera hospitalisé durant 48 heures au total pour les prélèvements qui seront effectués sous une brève anesthésie générale. Afin que le receveur ne rejette pas la moelle greffée, il doit recevoir un traitement immunodépresseur, qui va par ailleurs le rendre plus sensible aux infections. D'où cette période difficile de post-greffe, d'une durée de 6 à 8 semaines durant lesquelles le patient extrêmement fatigué, fébrile, est exposé aux infections. Il doit donc être très protégé, isolé en milieu stérile, et sous antibiothérapie* massive. 15 > Transfusion du sang du cordon : le sang du cordon ombilical contient des cellules souches en quantité bien moindre que la moelle osseuse. Cependant, en l’absence de donneur compatible l’injection de cellules souches du sang du cordon peut être envisagée s’il s’agit d’un petit enfant à faible masse corporelle. > Transplantation de moelle autologue : la moelle est prélevée chez le patient alors qu'il est en rémission complète. Elle est ensuite congelée et injectée de nouveau après un traitement «myélo-ablatif» par chimiothérapie (± radiothérapie). Dans certains cas, la moelle du patient peut encore contenir des cellules tumorales. 2 / Les greffes de cellules souches autologues Elles consistent à recueillir des cellules souches «poussées» hors de la moelle osseuse vers le sang grâce à l'injection de "facteurs de croissance hématopoïétiques". Ces cellules sont collectées chez le patient alors qu'il est en rémission complète, lors d’un prélèvement de sang effectué par circulation extracorporelle ; les cellules souches provenant de la moelle sont alors recueillies grâce à un séparateur de cellules qui restitue ensuite le reste du sang au patient. Cette technique est également applicable aux donneurs sains. Les cellules souches prélevées seront conservées au grand froid, jusqu'à leur utilisation. La greffe de ces cellules souches, une fois décongelées, se fait par une simple perfusion intraveineuse. 3 / Les complications des greffes de moelle osseuse Les complications initiales majeures sont liées à l'aplasie (arrêt de production de cellules médullaires entraînant la chute des globules sanguins) due à la chimiothérapie réalisée juste avant la greffe (que l’on appelle le conditionnement myélo-ablatif). En effet, entre la greffe et la restauration sanguine, il se passe un certain temps (2 à 6 semaines suivant le type de greffe). Durant cette période, le malade reste très 16 fragile et vulnérable à toutes les infections, bactériennes, virales ou dues à des champignons. Il doit donc être mis en milieu protégé : chambre et environnement stérile sous flux laminaire*, isolement, alimentation stérile, souvent par voie veineuse car il peut exister une mucite (inflammation de la muqueuse de la bouche) très douloureuse. Il reçoit aussi une antibiothérapie massive et multiple. Mais un autre type de complications guette les patients qui ont reçu une greffe allogénique : c'est la réaction des cellules immunitaires greffées qui réagissent contre les cellules du receveur : c'est la réaction du greffon contre l'hôte. Aléatoire, elle peut survenir à partir de la 2e semaine. Elle est d'autant plus fréquente et sévère que les cellules du donneur et du receveur diffèrent et que l'âge du receveur est élevé. Elle peut se marquer par une éruption cutanée (rash), une diarrhée, une atteinte hépatique. Elle justifie un traitement préventif systématique par des agents immunodépresseurs comme la ciclosporine. Après quelques semaines d'hospitalisation, lorsque la formule sanguine sera à peu près normalisée et l'état du patient amélioré, la sortie sera autorisée, mais sous couvert de grandes précautions et d'une surveillance médicale rigoureuse. Des complications tardives et chroniques peuvent encore survenir, notamment cutanées, oculaires… Mais toutes ces difficultés et risques ne doivent pas faire oublier que les greffes de moelle osseuse permettent de guérir bien des enfants et des adultes, qui mèneront ensuite une vie normale. 17 Glossaire Antibiothérapie traitement par antibiotiques. Chromosome structure située dans le noyau de toutes les cellules et porteuse du capital génétique. Creux axillaires ce sont les aisselles. Creux inguinal creux situé dans le pli de l’aine. Gène unité élémentaire de l'information génétique au sein du chromosome. Flux laminaire appareillage destiné à filtrer l'air d'une pièce. Hématopoïèse ensemble des événements biologiques impliqués dans la genèse des globules sanguins. Jumeaux homozygotes vrais jumeaux, issus du même œuf. Ils sont donc dotés du même patrimoine génétique. A l’opposé, les faux jumeaux (jumeaux hétérozygotes) résultent de la fécondation plus ou moins simultanée de deux ovules par deux spermatozoïdes différents. Myélogramme examen au microscope des cellules de la moelle osseuse ponctionnée au niveau du sternum ou de l’os iliaque. Réactions immuno-histochimiques réactions biologiques effectuées au laboratoire afin d'identifier la nature de cellules suivant leur constitution antigénique. Brochure rédigée par le Dr Alain TREBUCQ et le Dr François LEFRERE, praticien hospitalier en hématologie (Service Hématologie : Hôpital Necker, Paris) – Janvier 2005 Mise à jour Mai 2008 : Dr Marise WEIL, Dr Bruno AUDHUY, Dr Henri BASTIEN 18 Le cancer Le cancer se caractérise par un développement anarchique et ininterrompu de cellules «anormales» dans l’organisme qui aboutit à la formation d’une tumeur ou «grosseur». Cette population de cellules agresse et détruit l’organe dans lequel elle est implantée et peut migrer dans d’autres parties du corps (on parle alors de métastases). Si la prolifération n’est pas stoppée, le cancer se généralise plus ou moins rapidement. Quelques chiffres • En France, le cancer est depuis 2004 la première cause de mortalité générale et prématurée (avant 65 ans) avant les maladies cardio-vasculaires, et 146.000 décès lui sont imputables chaque année. • Environ 320.000 nouveaux cas de cancer sont dia- gnostiqués chaque année. • Actuellement, un cancer sur deux en moyenne (toutes localisations confondues) peut être guéri. Le cancer n’est pas contagieux. Le cancer n’est pas héréditaire, sauf dans de très rares cas, mais il existe des terrains (prédispositions familiales) qui fragilisent le sujet vis-à-vis des facteurs toxiques, notamment ceux liés au mode de vie, qui peuvent le favoriser. Environ 70 % des cancers (plus de 85 % des cancers du poumon) sont attribuables à des modes de vie et aux comportements. La prévention et le dépistage sont donc essentiels. Le rôle du médecin Le médecin généraliste a un rôle fondamental dans les stratégies de prévention et de dépistage. N’hésitez pas à le consulter. Il est là pour vous informer sur les facteurs de risque, les moyens de prévention et de dépistage. En général, plus un cancer sera décelé tôt, plus vite il sera soigné et aura des chances de guérir. 19 Prévention et dépistage La prévention des cancers tend à diminuer ou supprimer l’exposition à des «facteurs de risque». Les actions de prévention ont souvent un caractère éducatif et collectif comme par exemple la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme ; la promotion d’une alimentation saine, d’un exercice physique régulier ; la réduction de l’exposition solaire ou aux cancérogènes lors des activités professionnelles... Le dépistage consiste à détecter des lésions précancéreuses ou cancéreuses à un stade très précoce, avant même que le patient n’en ressente les premiers symptômes. Par exemple, le cancer du sein peut être dépisté au moyen d’examens tels que la mammographie ; le cancer du col de l’utérus par le frottis cervical ; le cancer colorectal par la recherche de sang dans les selles. Plus le diagnostic est précoce, moins les traitements sont lourds et plus les chances de guérison sont grandes. Les connaissances s’améliorent en permanence, il faut donc s’informer régulièrement auprès d’un médecin, en consultant des brochures, le site www.ligue-cancer.net ou Cancer Info Service, sur les facteurs de risque, les examens à pratiquer, les signes d’alarme qui peuvent révéler la maladie. Les signes d’alarme 1. La peau : apparition ou modification de forme, de couleur, d'épaisseur d'un grain de beauté ou d'une tache ocrée. 2. Changements dans le fonctionnement des intestins (constipation, diarrhée) ou de la vessie (fréquente envie d'uriner). 3. Persistance d'une voix enrouée ou de toux. 4. Troubles permanents pour avaler de la nourriture. 5. Une enflure ou une boule non douloureuse et qui ne disparaît pas (dans le sein, au cou, dans l'aine, dans les testicules). 6. Apparition de sang dans les urines, les selles, en dehors des règles chez les femmes. 7. Perte de poids, anémie, fatigue inhabituelle. Qu’est-ce que La Ligue ? Créée en 1918, la Ligue nationale contre le cancer est une association loi 1901 à but non lucratif et reconnue d'utilité publique. Elle est une ONG indépendante reposant sur la générosité du public et sur l’engagement de ses militants. Forte de plus de 728.000 adhérents, la Ligue est un mouvement organisé en une fédération de 103 Comités départementaux qui, ensemble, luttent dans trois directions : - la recherche, - l’information, la prévention, le dépistage, - et les actions pour les malades et leurs proches. • LA RECHERCHE La Ligue est le premier financeur associatif de la recherche sur le cancer en France. Cette dernière s'organise autour de différents pôles : la recherche fondamentale, la recherche clinique (amélioration des traitements), recherche épidémiologique (étude des facteurs de risque pour l'amélioration des conditions de prévention et de dépistage) et la recherche en sciences humaines et psycho-sociales (étude de la qualité de vie des malades pendant et après les traitements du cancer). Elle est pilotée en toute indépendance et transparence par un conseil scientifique national et des conseils scientifiques régionaux et interrégionaux. En labellisant des équipes rigoureusement sélectionnées pour leur excellence par des commissions d’expertise, la Ligue assure le financement de programmes de recherche et suscite des avancées très importantes dans le traitement et la qualité de vie des malades. • L’INFORMATION, LA PRÉVENTION ET LE DÉPISTAGE L'objectif est triple. Sensibiliser chacun au danger de certaines pratiques (consommations de tabac et d'alcool, exposition prolongée au soleil, etc.), alerter sur les facteurs de risque, communiquer sur les avantages du dépistage et informer sur l'identification de certains symptômes. Pour répondre aux publics concernés, de nombreux moyens de communication adaptés sont régulièrement actualisés et disponibles au siège de la Ligue ou auprès des Comités départementaux. 21 • LES ACTIONS POUR LES PERSONNES MALADES ET LEURS PROCHES Les Comités de la Ligue apportent leurs soutiens matériel et financier, moral et psychologique aux personnes malades, aux anciens malades et à leurs proches. En organisant, en 1998, en 2000 et en 2004, en présence du Président de la République, les Etats généraux des malades du cancer et de leurs proches, la Ligue a donné une très forte impulsion pour que les malades soient mieux pris en charge. En leur donnant la parole, la Ligue a mis en lumière, pris en compte et traduit en actes leurs attentes et leurs besoins pour l'amélioration de la qualité des soins et de la qualité de vie. Les moyens donnés pour le dispositif d’annonce, les groupes de parole institués, les espaces d’information installés dans les lieux de soins et dans les lieux de vie pour soutenir et rompre l’isolement des personnes malades et de leurs proches, en sont des exemples. La Ligue leur dédie également un espace d’expression et d’information avec le journal «Les proches». Enfin, la Ligue soutient les patients dans leurs difficultés rencontrées pour défendre leurs droits, retrouver un emploi, bénéficier d’un prêt bancaire… • AU CŒUR DE LA SOCIÉTÉ Parce que le cancer est un problème de santé mais aussi une question de société, la Ligue intervient en communiquant activement sur la nécessité de modifier l’image sociale du cancer. Par le biais de son Ecole de formation, la Ligue facilite l’engagement militant en s’appuyant sur des connaissances validées. Parce que la Ligue nationale contre le cancer est un acteur reconnu et sérieux, elle a créé et développé le numéro de téléphone Cancer Info Service (0.810.810.821) et le gère désormais en collaboration avec l’Institut national du cancer (INCA). Ce numéro azur est à la disposition du public, tous les jours, sauf le dimanche, de 8 h à 20 h. Elle édite également une revue trimestrielle «Vivre», vendue en kiosque, informant ses adhérents et le grand public, sur ses actions et celles de ses Comités départementaux et sur les dernières avancées thérapeutiques contre le cancer. « Contre le cancer, nous avons tous un rôle à jouer ! » 22 La Ligue vous aide et vous informe : LIGUE NATIONALE CONTRE LE CANCER 14 rue Corvisart - 75013 Paris - Tél. : 01 53 55 24 00 www.ligue-cancer.net La Ligue tient à votre disposition les coordonnées des Comités départementaux. Recherche Information - prévention - dépistage Actions pour les malades et leurs proches Réf. : BRK011 - Mai 2008 - Réalisation graphique : www.lafabrique-communication.fr Votre Comité départemental