Compte rendu de la conférence de Jean-Pascal van Ypersele Les défis des changements climatiques et le rôle des bioénergies Mardi 20/05/2014 Introduction du président et du représentant du Ministre Jean-François Gosse, président de ValBiom, pense qu’il est intéressant de prendre du recul sur les objectifs de ValBiom. Il souligne le potentiel des bioraffineries de première et seconde génération, convaincu que ces raffineries fonctionneront à la manière des 4 F. Le GIEC ne manque pas de lister la biomasse comme une des solutions au mix énergétique. François Ghysel, représentant du Ministre des Travaux publics, de l’Agriculture, de la Ruralité, de la Nature, de la Forêt et du Patrimoine prie d’excuser l’absence du Ministre, Carlo Di Antonio. En termes de biomasse, Nous nous situons dans une phase de transition. Il faut s’en donner les moyens, tout en sauvegardant l’environnement. Notre modèle énergétique est dépendant et émet des gaz à effet de serre (GES). Le ministre se félicite des résultats de la convention. Le ministre soutient ValBiom en mettant l’accent sur le développement et la structuration des filières. Cela constitue une source de revenu (produit/ énergie économisée) pour les agriculteurs. Remerciements à l’équipe ValBiom pour cette année 2013. Les défis des changements climatiques et le rôle des bioénergies par JeanPascal van Ypersele Introduction. Y a-t-il changement climatique ? Certains disent qu’il y fluctuation ces 15 dernières années, qu’il n’y a pas de tendance à l’augmentation. C’est du « cherry picking » : choisir un plateau d’une période de 10-15 ans. Or le climat se défini sur une période d’au moins 30 ans. Il y a bien réchauffement global sur une longue période : augmentation d’1 degré sur 150 ans. Trois grandes questions sont posées par le GIEC, qui s’est réparti en trois groupes de travail distincts pour y répondre (working group –WG) : 1. Que se passe-t-il dans le système climatique ? WG1 (290 auteurs) 2. Quels sont les risques ? WG2 3. Comment gère-t-on ces risques ? WG3 1. Que se passe-t-il dans le système climatique ? 1 Nombreuses observations Réchauffement d’un degré Réchauffement sur l’ensemble de la planète Les continents s’échauffent plus vite que les océans Le réchauffement est plus important près des pôles Multiples indicateurs Température de l’air Recul des glaciers Niveau des mers (fonte de glacier, volume de l’eau plus chaude, fonte des pôles) Concentration de CO2 dans l’atmosphère. Record de la concentration de 400 ppm ce mois d’avril. + 40% par rapport aux 1000 dernières années. Le cycle du carbone naturel Photosynthèse : 120 Gt de flux (stock : 2300 Gt) Océans : 70 Gt de flux (stock : 38.000 Gt) Le cycle anthropique du carbone + 8 Gt (émission) – 2,6 Gt (biomasse) – 2,2 Gt (océans) = 3,2 Gt/ ans Cela semble peu : les émissions humaines ne sont qu’une fraction des émissions naturelles. Mais le problème est celui du stockage. Le rayonnement La vapeur d’eau, le CO2 et le méthane absorbent peu le rayonnement visible mais beaucoup plus le rayonnement infrarouge lointain, qui correspond au rayonnement émis par la terre suit à l’absorption du rayonnement solaire. Les causes du réchauffement climatique Le dernier rapport du GIEC confirme à 95% qu’il y changement climatique, et que celui-ci est imputable aux activités humaines. Les facteurs naturels comprennent notamment les éruptions solaires et les éruptions volcaniques, mais ne parviennent pas à expliquer à eux seuls l’augmentation des températures (figure 1). Nouveauté du dernier rapport : le total des émissions cumulées détermine dans une large mesure la moyenne globale du réchauffement (500 Gt). 2 Figure 1: évolution de la température terrestre et du contenu thermique des océans durant le XX° siècle. Conséquences Augmentation des températures Changement des répartitions des précipitations Augmentation du niveau des mers Augmentation du nombre d’événements extrêmes 2. Quels sont les risques ? On gagne 4 à 5 degré en 100 ans, au lieu des 5000 ans de la sortie de la période glaciaire. Carte des principaux impacts attribués au changement climatique Amérique du Nord : milliers d’hectares qui brulent en Californie. On s’attend à une augmentation de la fréquence. Amérique du sud : fonte des glaciers. Gestion difficile Feux de forêt Agriculture Vitesse de développement des espèces pour coloniser un écosystème Arbres trop lent pour recoloniser, en comparaison à la vitesse du changement climatique 5 principales classes de risques ont été définies Risques sur les systèmes uniques et menacés 3 Risques associés aux événements climatiques extrêmes Risques associés à la distribution des impacts Risques associés aux impacts agrégés Risques associés aux événements singuliers de grande échelle 3. Qu’est ce qui peut être fait ? On constate une accélération des émissions de CO malgré les efforts de réduction. Le secteur de l’agriculture et des forêts est responsable d’un quart des émissions (déboisement, bétail, gestion des sols) Distribution des énergies renouvelables (ER) au sein de la consommation mondiale d’énergie ER : 12% Biomasse : 10 % La biomasse est l’énergie renouvelable avec le plus de potentiel pour réduire les émissions de GES. Est-ce que les températures peuvent-elle être maintenues en dessous des 2°C par rapport à l’ère préindustrielle ? Oui, mais les seuls scénarios qui permettent de rester en dessous d’une émission de 2 degrés est le scénario le plus bas (cfr. présentation de Jean-Pascal van Ypersele). Il est possible techniquement et économiquement d’y arriver (66% de chances) Ces scénarios impliquent une réduction de 40 à 70% des émissions d’ici 2050, par : amélioration des économies d’énergie ; augmenter par 4 les sources d’énergies renouvelables dont les bioénergies avec capture du CO2 (60% en 2050). Les conflits dans les différentes utilisations des sols seront un frein à l’utilisation des bioénergies avec capture et stockage de carbone (Bio-energy with carbon capture and storage). La biomasse-énergie peut jouer un rôle à condition que les zones sensibles soient évitées, et que les meilleures pratiques de gestion des sols soient appliquées. Il faudra aussi tenir compte des problèmes de sécurité alimentaire, de ressources en eau, de biodiversité. Les énergies renouvelables et la biomasse vont être elles-mêmes impactées par les changements climatiques. Questions/ réponses Q1 : Précision sur les tonnes : de carbone ou de CO2 ? Quid du marché du carbone, qui a diminué en Europe ? Il s’agit bien d’une tonne de carbone. Le prix de la tonne de CO2 a effectivement diminué. Le système s’est montré efficace : le prix est bas parce que l’objectif a été atteint. L’Europe a bien atteint ses objectifs. Les acteurs économiques se sont rendus compte que ce n’était pas si dur que ça ! Il s’est 4 produit la même chose avec les émissions de soufre aux USA dans les années 70. Ce qu’il faut faire, c’est renforcer les objectifs de réduction. On peut retransformer du CO2 en carbone, mais cela demande beaucoup d’énergie. Q2 : Yves Bertrand, Quays sprl. Vous parlez beaucoup de l’utilisation de la biomasse en énergie. On peut faire de l’électricité à partir d’hydrogène. N’est-ce pas illusoire de vouloir diminuer les émissions uniquement avec la biomasse ? Le problème c’est la quantité d’énergie pour produire l’hydrogène. Jean-Pascal van Ypersele ne se dit pas spécialiste. Réponse dans la salle : problème du prix ! Q3 : Jean Marc Jossart, AEBIOM et ValBiom. L’AEBIOM fait la promotion de la bioénergie, mais beaucoup d’ONG s’opposent à l’utilisation de la biomasse bois pour pouvoir augmenter les stocks de carbone dans les forêts. Que pensez-vous de cette position ? Argument de la biomasse énergie : meilleure gestion des forêts. Le GIEC s’est montré prudent sur la question. Il y a le problème des risques, qui se posent différemment en fonction des régions du monde. Le mandat du GIEC est d’être neutre sur le plan des valeurs. Pas contre le nucléaire, ni la biomasse. Q4 : Guillaume de Moreau. Quel est le pourcentage d’influence du soleil dans le réchauffement climatique? De l’ordre de quelques % comparé aux GES. Q5 : Daniel Rijkmans (FIWAB). Rapport Stern sur le coût des mesures à prendre. Qu’en est-il ? Le GIEC est très prudent sur ses estimations. Combien vaut une espèce ? Que vaut la vie d’un bangladeshi qui s’est noyé ? Valeur des salaires cumulés jusqu’à la fin de vie. Très difficile de calculer le coût des impacts. Du côté des mesures, un petit peu plus facile. Coût des digues, rénovation de tous les bâtiments. (NB : 50.000 morts dus à la vague de chaleur en 2003). On dit que la transformation du système énergétique va couter énormément. Il va de toute façon falloir remplacer des installations existantes. Il y a aussi le problème des liens de causalité. Stern a été fortement critique, non validé par le GIEC. Q6 : Choqué par le stockage souterrain. Ne peut-on pas le recycler par les plantes ou les cyanobactéries ? Le problème, c’est que cela n’est pas significatif. Q7: Thomas Benoit, CO2-Savings. Quel est la valeur que les gouvernements donnent à la biodiversité ? Est-ce que l’Europe compte augmenter sa part de renouvelable ? Est-ce que le rôle du GIEC va se muter vers le choix d’actions à prendre ? Jean-Pascal van Ypersele s’estime pas compétent pour répondre à la question de valeur de la biodiversité. 5 On verra après le 25 mai aux élections européennes. On s’attend à ce que l’Europe confirme ses objectifs en Novembre. Le rôle du GIEC n’est pas d’être prescriptif. Le rôle des choix doit être fait par les politiques. Q 8 : Gaëlle Warnant, Fédération Inter-Environnement Wallonie. Le dernier rapport prend-il en compte des pergélisols ? Y a-t-il une augmentation des études sur le rôle de la biomasse dans le réchauffement ? Dans le budget carbone, on en a déjà émis 550 Gt, il faut rester en dessous de 800. Ce permafrost pourrait libérer entre 50 et 250. Cela accentuera très fort l’impact. Très peu de données sur les quantités réelles de carbone stocké. 6