pluton - Delphine Nguyen

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Club Cassini
Lycée La Bruyère
Versailles
PLUTON
Une découverte sur le papier
Nous sommes en 1930 et le système solaire compte 8
planètes : Mercure, Vénus, la Terre, Mars, Jupiter, Saturne,
Uranus et Neptune. La dernière a été découverte en 1846 par Le
Verrier. Très vite, la trajectoire de Neptune est étudiée en
détail et là, on découvre que, tout comme Uranus, son
mouvement présente des anomalies qui ne peuvent être dues aux
planètes connues. En 1905, deux astronomes, Percival Lowell et
William Pickering, suggèrent indépendamment l’existence d’une
planète située au-delà de Neptune. Malgré leurs calculs de
position et des recherches intensives, la planète ne fut pas
découverte.
Un astronome amateur engagé à
l’Observatoire
Clyde Tombaugh est né en 1906,
dans une famille de fermiers de
l’Illinois. Encouragé par son père et
son oncle, il s’intéresse tôt à
l’astronomie et il reçoit une lunette
avec laquelle il fera ses premiers dans
le ciel. En 1925, il décide de
construire son propre télescope (il en
fera plus de 30 dans sa vie !). Pour
payer le matériel
nécessaire, son père
est obligé de prendre
un deuxième travail.
En 1928, Clyde finit
la construction d’un
télescope de 23 cm
avec lequel il fait de nombreuses esquisses, très détaillées,
de Mars et de Jupiter.
Il envoie ses dessins au Lowell Observatory afin d’avoir des
suggestions. Au lieu de cela, il reçoit une proposition qui ne
se refuse pas, surtout quand on a 23 ans : devenir astronome.
Sa mission : trouver la planète inconnue.
Il photographie deux fois
de petites parties du
ciel nocturne avec un
intervalle de 2 à 6 jours
et compare une à une les
positions de centaines de
milliers points lumineux,
dans l’espoir de
découvrir un astre
errant. Il va ainsi
photographier 65% du ciel
et passer des milliers
d’heures à scruter les clichés. Après dix mois de nuits
blanches, les nuits du 23 et 29 janvier 1930, Clyde fait deux
photos de la région de delta des Gémeaux. Et le 18 février,
lorsqu’il dépouille les plaques photographiques, un point
lumineux s’est déplacé. Il le vérifie et l’annonce est faite
le 13 mars 1930.
Pendant 13 autres années, il va continuer à scruter le ciel,
car la nouvelle planète ne suffit pas à expliquer les orbites
anormales d’Uranus et de Neptune. Il découvre pendant ces
années : 6 amas d’étoiles, 2 comètes, des centaines
d’astéroïdes, plusieurs dizaines d’amas de galaxies et un
super-amas.
Durant ces mêmes années, il entre à
l’Université du Kansas (1932), se marie
avec Patricia Edson (1934), et obtient
un master d’astronomie en 1939.
Il enseigne dans diverses universités
(Arizona State College, l’Université de
Californie), puis devient, en 1946,
chef du département de mesures optiques
au Laboratoire de recherche balistique.
Il joue un rôle décisif dans la
fabrication de télescopes et, grâce à
des crédits, il en construit un de 600
cm, inauguré en 1967, et qui est
aujourd’hui toujours en service, récoltant des données pour la
NASA.
Lorsqu’il se retire, son équipe et lui ont confirmé la période
de rotation de Mercure, déterminé la nature de la Grande Tache
Rouge de Jupiter et développé une nouvelle technique pour
photographier les petits satellites.
Un peu de mythologie
Pluton, forme latine de Πλουτων, « dieu riche de tous les
biens enfouis sous la terre », euphémisme pour Hadès, nom grec
du dieu des Enfers. Fils de Saturne (Cronos) et de Rhéa, il
est le frère de Zeus et de Poséidon. Lorsque tous trois tirent
au sort leur royaume, il
obtient les Enfers. Ceci
le rend redoutable, sans
être, pour autant, un
ennemi des hommes et des
dieux. Il enlève
Perséphone, fille de
Déméter, alors qu’elle
cueillait des fleurs en
Sicile, et l’épouse.
Cédant aux supplications
de Déméter, Zeus obtient
que la jeune femme passe
six mois sur terre et le
reste de l’année sous
terre, soit aux côtés
d’Hadès. Le royaume de
Pluton est séparé du monde
des vivants par le Styx,
le fleuve de la haine mortelle ou par l’Achéron, le profond
fleuve de la douleur. Trois autres fleuves le sillonnent : le
Phlégéthon -le fleuve de feu-, le Cocyte –le fleuve des
gémissements- et le Léthé –le fleuve de l’oubli. Si les morts
ont été enterrés selon les règles, avec une obole entre les
dents pour le péage, Charon les fait traverser dans sa barque.
A l’entrée des Enfers, Cerbère, un chien avec une crinière ou
une queue de serpents, et dont le nombre de têtes varie entre
trois et cinq selon les textes, empêche
tout mort d’en sortir. Plus loin, trois
juges, Minos, Eaque et Rhadamanthe,
assignent à résidence les morts dans les
diverses parties des Enfers.
On remarque également que les deux premières lettres de Pluton
sont les initiales de Persival Lowell.
Que savons-nous de Pluton ?
Données orbitales
La dernière colonne recense les données terrestres.
Excentricité
Distance maximale au
Soleil
Distance minimale au
Soleil
Inclinaison de
l’orbite
Vitesse orbitale
moyenne
Période de révolution
0,246
0,0167
7 400 000 000 km = 152 100 000 km
49,5 ua
4 425 000 000 km = 147 100 000 km
29,6 ua
17°10’
0° par définition
4,74 km/s
29,79 km/s
247 ans 249 jours
365 jours 6 h 9 min
et 9,5 s
Une collision entre Neptune et Pluton ? Aucune chance !
A cause de la forte excentricité de l’orbite de Pluton,
entre le 21 janvier 1979 et le 11 février 1999, c’est Neptune
qui fut la planète la plus éloignée du système solaire. Ce
phénomène ne se reproduira pas avant septembre 2226.
En réalité, les orbites des deux planètes ne se croisent
jamais : lorsque Pluton est au plus près du Soleil
(périhélie), la planète est à 17°10’ en dessous de Neptune et
ceci à cause de la forte inclinaison de son orbite sur le plan
de l’écliptique. La plus courte distance entre les deux
planètes est 18 ua, soit 2,7 milliards de km. Sur les vues
suivantes, nous avons essayé de le montrer, mais la
perspective nous joue un mauvais tour. De plus, l'orbite de
Pluton est en résonance 2:3 avec celle de Neptune : cela
signifie que, lorsque Pluton effectue 2 révolutions, Neptune
en fait 3.
Vue de côté des deux orbites :
Orbite de Neptune
Orbite de Pluton
Vue du dessus :
Autre vue :
Caractéristiques physiques
Diamètre équatorial
Aplatissement
Masse
Densité moyenne
Accélération de la pesanteur
Vitesse de libération
Période de rotation
2 200 km
?
0,002*MT
2,03
0,29 m/s2 (0,03*g)
1,1 km/s
6 jours 9 h 18 min
Inclinaison de l’équateur sur 118°
l’orbite
12 756 km
0,0034
5,98*1024 kg
5,52
9,78 m/s2
11,2 km/s
23h 56 min
04s
23°26’
Un couple exceptionnel
Pluton a un
satellite : Charon (le
passeur des Enfers à
qui il faut payer une
obole pour ne pas
devenir une âme
errante), découvert en
1978, par l’Américain James Christy. Le rapport de taille entre
Charon et Pluton en fait un couple tout à fait exceptionnel du
système solaire : Charon a un diamètre de 1 200 km, soit à peu
près la moitié de Pluton. Pour comparer, le rapport de taille
entre la Terre et la Lune est 3,7.
La période de révolution de Charon autour de Pluton est de 6,39
jours terrestres. Ils se présentent constamment la même face,
c’est-à-dire qu’ils sont en rotation synchrone. Ainsi, dans le
ciel plutonien, Charon reste constamment figé. Quant à la
distance entre Charon et Pluton, elle n'est que de 19 640 km
(demi-grand axe de son orbite), soit près de 20 fois moins que
la distance Terre-Lune.
D’autre part, le plan de rotation de Charon autour de Pluton se
fait presque perpendiculairement à la trajectoire de la planète
autour du Soleil. Les simulations montrent que si c’était le
cas de la Lune autour de la Terre, la Lune s’écraserait sur la
Terre.
Chimie et température
Pluton : aux confins du système solaire, la température
glaciale n’offre pas d’amplitude de variation très
importante : elle oscille entre –215°C et –240°C. A cause
de son faible éclat (magnitude moyenne 13.8), les études
de son spectre et de la polarisation de la lumière
qu’elle réfléchit sont difficiles, de sorte qu’on ne
connaît presque rien à propos de son atmosphère ; on
suppose cependant qu’elle est probablement constituée
d'azote, de monoxyde de carbone et de méthane.
L'atmosphère est extrêmement ténue et la pression à la
surface n'est que de quelques microbars. L'atmosphère de
Pluton à l’état gazeux ne peut exister que lorsque la
planète est proche de son périhélie. Pendant la majeure
partie de la longue révolution de Pluton, les gaz
atmosphériques sont gelés. Proche de son périhélie, il
est probable qu'une partie de son atmosphère s'échappe
dans l'espace en interagissant peut-être même avec
Charon.
Charon : D’après des observations terrestres, sa masse
est estimée à 16% de celle de Pluton, pour une densité de
2. Il serait composé à 70% de roches et le reste serait
de la glace. Mais, si l’on en croit le télescope spatial
Hubble, il représenterait seulement 8% de la masse
plutonienne et une densité de 1,3, ce qui voudrait dire,
comme la densité de l’eau est de 1, que le satellite ne
serait presque constitué que de glace.
A quand une mission vers Pluton ?
Jusqu’à présent, nulle sonde ne s’est risquée à
s’aventurer aux alentours de Pluton. En effet, Voyager 1 et 2,
qui sont à présent aux confins du système solaire, ont
dédaigné cette minuscule planète : les dernières planètes
visitées par les Voyager 1 et 2 furent respectivement Saturne
et Neptune.
Après dix ans de projets
infructueux, le 29 novembre 2001, la
NASA a sélectionné la mission baptisée
New Horizons Pluto-Kuiper Belt (PKB),
résultat d’une compétition entre
diverses équipes industrielles et
universitaires. Puis en avril 2003,
elle a autorisé la construction de la
sonde. L’enjeu est double : recueillir
des données sur ces objets mal connus
et trancher sur leur nature de planète
ou de simple objet de la ceinture de Kuiper.
New Horizons devrait décoller en janvier 2006 et atteindre
Pluton courant été 2015. Après un survol de Jupiter, la sonde
d’un poids de 415 kg devra :
déterminer la géologie et la géomorphologie de Pluton et
de Charon,
réaliser une carte de leur composition de surface et de
leurs températures,
étudier en détail l’atmosphère de Pluton.
La sonde visitera ensuite un ou plusieurs
corps de la ceinture de Kuiper et fera les
mêmes tests. D’après les plans établis, New
Horizons devrait être pourvue d’un générateur
radio-isotope thermoélectrique (RTG) qui
devrait fournir plus de 200 watts, les
panneaux solaires étant de faible utilité à
cette distance du Soleil. Malheureusement, les
parlementaires américains ont réduit de moitié
les crédits alloués à cette mission en octobre
2003, ce qui pourrait retarder de beaucoup le
lancement.
De cette petite planète et de son satellite dont nous ne
connaissons que très peu de choses, les années, voire les
décennies, à venir sont pleines de promesses. Entre
l’exploration de la Lune, de Mars et de Pluton, nous entrons
une nouvelle fois dans une période passionnante de la
découverte scientifique.
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