Maladies virales, bactériennes, parasitaires et intoxications

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Maladies virales, bactériennes, parasitaires et
intoxications chimiques
transmises par les animaux marins.
La mer n'est pas un simple élément liquide composé d'eau salée.
Il suffit d'observer au microscope une simple goutte d'eau de mer, pour être stupéfait
de constater la densité et la diversité des micro-organismes vivants qui y grouillent.
Dans ce milieu riche en éléments organiques et minéraux, bactéries, zooplancton et
phytoplancton, se développent en harmonie et créent une source de vie indispensable
à l'ensemble des animaux, marins et terrestres et à l'Homme. Rappelons le encore une
fois et ce n'est jamais trop de le faire, en plus de son rôle de ressource alimentaire, le
phytoplancton en captant le gaz carbonique dissous dans l'eau, produit plus de 50 %
de tout l'oxygène de l'atmosphère que nous respirons. Sa présence en quantité et en
qualité est nécessaire à l'existence et à la vie de l'homme sur terre !
Mais ce milieu est fragile, nous ne nous en rendons pas assez
compte. Pollution et démographie, en extension constante, ont des répercussions non
négligeables sur les mers et les océans, avec de nombreuses conséquences néfastes :
modifications et dérèglements climatiques, acidification et eutrophisation des eaux,
efflorescence de planctons toxiques, contamination par des virus, bactéries, parasites
et éléments chimiques polluants, tels que les métaux lourds.
Tous ces éléments pathogènes finissent un jour par être incorporés, par filtration dans
les coquillages et les mollusques, et dans d'autres animaux marins, dévorés à leur tour
par des plus gros, pour arriver à l'Homme au sommet de la chaîne alimentaire, chez
qui ils sont susceptibles de provoquer diverses maladies.
La plupart des maladies transmises par les poissons, mollusques
et coquillages autres que les toxi-infections vues précédemment résultent, soit d'une
contamination primaire par des eaux polluées, soit d'une contamination secondaire,
lors du débarquement, de la manutention, de la transformation, du conditionnement
ou du stockage du produit de la pêche, avant sa commercialisation et sa distribution,
mais aussi de sa consommation ultérieure sous forme crue ou insuffisamment cuite.
C'est la réalité malheureusement dans les pays en voie de développement quand les
conditions économiques ne permettent pas d'avoir des mesures hygiéniques strictes et
des moyens de conservation très rigoureux.
Ces maladies sont de nature bactérienne, virale, parasitaire ou
chimique. Intéressons nous à quelques unes parmi les plus communes.
A- Infections bactériennes
En général, pour pouvoir exprimer une maladie et donner des
signes cliniques, les germes doivent être présents en concentration importante dans
les aliments, que la contamination soit primaire ou secondaire. La prolifération des
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éléments pathogènes est par ailleurs plus importante, quand la température du milieu
est élevée et l'eau riche en éléments nutritifs.
De nombreuses bactéries sont responsables de toxi-infections
alimentaires. Les plus fréquemment rencontrées sont les suivantes :
- Vibrio Parahæmolitycum
Habituellement présent dans l'eau de mer, ce vibrion est la cause
de plus de 50 % des gastro-entérites d'origine alimentaire au Japon. Il provoque de la
diarrhée, des douleurs abdominales, des nausées, des vomissements pendant 2 à 5
jours et sévit plus particulièrement sous les tropiques, surtout lors du réchauffement
estival de l'eau de mer.
- Vibrio vulnificus
Cette bactérie, présente uniquement dans l'eau de mer, est connue
depuis 1976. Elle peut se trouver en concentrations importantes dans les coquillages
et surtout dans les huîtres sauvages. Ce serait la première cause de mortalité par fruits
de mer actuellement aux USA. Elle se manifeste par une gastro-entérite isolée, mais
se complique souvent par une septicémie sévère, avec risque de mortalité dans près
de 50 % des cas. Des lésions cutanées de type bulleux évoluant vers la nécrose sont
fréquentes. Ce vibrion très agressif est peu connu en France métropolitaine, mais il a
déjà sévi à plusieurs reprises en Nouvelle Calédonie.
- Vibrio choleræ
Le vibrion cholérique n'existe pas à l'état naturel dans le milieu
marin. Il se transmet lors du lavage des fruits de mer ou du poisson avec de l'eau
contaminée ou lors de leur manipulation sans hygiène par des mains porteuses du
germe. Mais la contamination primaire de coquillages ou de crevettes par de l'eau de
mer dans laquelle se déversent des égouts est possible en zone d'épidémie de choléra.
Sur des animaux pêchés et conservés dans du sel, le vibrion peut survivre deux à cinq
jours à la température ambiante et près de deux semaines dans un réfrigérateur.
Cliniquement le choléra se traduit par des diarrhées profuses et des vomissements
entraînant une déshydratation rapide responsable des décès. Quand une réanimation
hydro-électrolytique est possible, la guérison est assurée.
- Salmonelloses
Les salmonelles sont très répandues et se retrouvent facilement
dans les eaux littorales, via les égouts et les eaux de ruissellement des sols. Quand
leur taux est important, elles se concentrent dans les coquillages filtreurs et peuvent
provoquer chez les sujets qui les consomment des maladies de gravité variable. En
fonction du type de Salmonelle il s'agira soit d'une simple gastro-entérite, soit d'une
typhoïde ou de para-typhoïdes, associant à de la fièvre, des troubles digestifs, un état
d'abattement ou ''tuphos'' (torpeur en grec), des maux de tête et exceptionnellement
des complications hémorragiques parfois létales. Les formes graves sont rares dans
les pays développés. Une antibiothérapie adaptée en guérit rapidement et un vaccin
existe pour s'en prémunir, si on doit se rendre dans un pays à risques : le Typhim Vi.
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- Botulisme
Maladie rare et grave, elle entraîne des paralysies le plus souvent
mortelles. Elle est due à une neurotoxine synthétisée par des bactéries, en forme de
bâtonnet (ou bacille), se développant uniquement dans un milieu sans oxygène (ou
anaérobie), du genre Clostridium botulinum. Ubiquitaire, cette bactérie est présente
partout dans la nature, y compris dans l'eau de mer, sous forme de spore quiescente et
végétative. Quand les conditions environnementales s'y prêtent, elle reprend sa forme
active productrice de toxine. Parmi sept espèces de Clostridium connues, le type E est
le plus souvent en cause, lorsque la source contaminante est d'origine marine.
Clostridium botulinum : bacilles, spores et bacilles en voie de sporulation
La toxine botulinique est sensible à la chaleur et détruite par dix minutes de cuisson.
L'homme se contamine habituellement en mangeant des poissons crus ou fermentés,
des œufs de poissons ou des conserves mal préparées et mal stérilisées.
Après quelques heures d'incubation, la maladie débute par des troubles visuels avec
une vision floue, des difficultés d'accommodation et par une sécheresse de bouche.
Apparaissent ensuite des troubles de la déglutition, de l'élocution, puis des paralysies
progressives des muscles du visage, des muscles des membres supérieurs et enfin des
muscles respiratoires, aboutissant à la mort par asphyxie.
- Toxi-infection alimentaire à Clostridium perfringens
Après consommation d'un aliment contaminé, l'acidité gastrique
tente dans un premier temps de neutraliser et de détruire les germes, mais s'ils sont
trop nombreux, ils vont parvenir dans l'intestin grêle, proliférer, sporuler et sécréter
une entérotoxine, responsable alors de violentes douleurs abdominales et de diarrhées
profuses. Vomissements et fièvre sont absents du tableau clinique. La guérison est
obtenue quelques jours plus tard, et spontanément, sans traitement spécifique.
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- Toxémie staphylococcique d'origine alimentaire
Cette toxi-infection est due au staphylocoque doré, producteur
d'une toxine thermostable, l'entérotoxine A. Ce germe particulièrement résistant peut
se trouver partout dans la nature, y compris dans les produits de la mer. L'intoxication
débute, après un temps d'incubation de 2 à 4 heures, par des douleurs abdominales, de
la diarrhée, des vomissements, mais il n'y a jamais de fièvre. L'évolution est le plus
souvent favorable même sans traitement. Cependant dans le cas d'une intoxication
massive, un choc toxique staphylococcique avec septicémie et complications multiviscérales mettant en jeu le pronostic vital est toujours possible. Cette éventualité
nécessitant l'hospitalisation urgente en réanimation et une antibiothérapie adaptée est
heureusement exceptionnelle. Selon les données épidémiologiques le staphylocoque
doré serait présent dans 10 à 30 % de l'ensemble des toxi-infections alimentaires.
B- Infections virales
- Hépatite A
Le risque de contamination par le virus de l'hépatite A est élevé
dans les pays où les conditions d'hygiène sont mauvaises, notamment dans les zones
où les eaux d'égouts non traitées se déversent directement dans l'eau de mer. Le virus
peut ainsi être transmis par les fruits de mer, mais aussi par les produits marins frais
ou transformés et tous les objets en contact avec les mains de personnes malades ou
apparemment saines, porteuses du virus ou souillées par des fèces. On considère que,
dans les pays à niveau socio-économique bas, à l'age de 40 ans, toute la population a
déjà pratiquement contracté le virus, que seul un faible pourcentage (10%) a présenté
des signes cliniques de la maladie et que parmi les malades, seuls 40 % à peine ont eu
la jaunisse. Les autres ont guéri spontanément, ou sont porteurs sains du virus sans le
savoir, sans aucun signe clinique, mais restent potentiellement contagieux.
Les formes graves d'hépatite A sont rares et l'infection évolue généralement vers une
guérison sans séquelle en quelques semaines. Il est conseillé cependant, surtout chez
les adultes jeunes ou fragilisés, désirant se rendre dans un pays à risques sanitaires
élevés, de se faire vacciner avant le départ.
- Entérovirus, rotavirus, norovirus et autres
La liste est longue et probablement incomplète à ce jour. On s'en
dispensera... par pitié pour le lecteur ; cette partie de l'ouvrage étant déjà un peu ardue
à suivre pour les non-initiés ! Signalons simplement que plus d'une centaine de virus
intestinaux humains, excrétés dans les matières fécales, peuvent se retrouver dans les
eaux usées et survivre plusieurs mois dans des fruits de mer, l'eau salée et les fonds
boueux ou vaseux des estuaires et du littoral. Certains peuvent même résister aux
méthodes classiques de traitement et d'épuration des eaux et vivre en concentration
non négligeable dans des mollusques, sans que le consommateur en soit pour autant
rendu malade. Parfois la contamination provoque une simple diarrhée isolée, parfois
une gastro-entérite aiguë bénigne, surnommée pudiquement ''tourista'' dans les guides
de voyage. Pour déclencher une maladie, la contamination virale doit souvent être
importante, mais pas toujours. Des facteurs humains individuels, environnementaux
et d'autres propres aux virus semblent également entrer en jeu.
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C- Infections parasitaires
Ces dernières années en Europe, après l'extrême Orient et les
États-Unis, une nouvelle tendance culinaire est arrivée dans nos assiettes : le poisson
cru. Sous forme de sushi, maki, sashimi, carpaccio, tartare, de nombreux poissons de
mer sont mangés crus. Les Français en raffolent ! Mais une parasitose jusqu'alors peu
connue, sauf de quelques japonais et scandinaves avertis, fait progressivement parler
d'elle : l'anisakiase.
Tous les poulpes, seiches et pieuvres et tous les poissons des eaux
tempérées et froides de l'hémisphère nord peuvent être parasités : hareng, maquereau,
flétan, morue, lieu, bonite, églefin, lotte, merlan, merlu, grondin...mais aussi ceux du
Pacifique. Et même préparés à la Tahitienne ou en ''ceviche'' sur les côtes du Pérou,
mangés crus et marinés dans du jus de citron et du piment, les poissons peuvent être
vecteurs de contamination. Le cycle de vie du parasite débute dans l'intestin des
grands mammifères marins, baleines, phoques, dauphins, où vivent des vers Anisakis
adultes et où ils vont se reproduire. Leurs œufs sont ensuite libérés dans l'eau de mer
avec les excréments, donnent des larves dont se nourrissent les petits crustacés du
zooplancton, lui-même base de l'alimentation des poissons et des céphalopodes. A ce
stade, les larves d'Anisakis vont se développer, se transformer en ver adulte et rester
dans l'intestin ou franchir la barrière intestinale et s'enkyster dans la chair, les viscères
ou le foie des poissons hôtes. Certaines espèces marines sont plus particulièrement
parasitées. Le long de nos côtes, ce sont plus de 50 % des maquereaux, 70 % des
merlans, 80 % des merlus, 85% des grondins et en mer Baltique, près de 90 % des
harengs !
Anisakis parasitant le foie, la chair et l'abdomen de poissons
Due à l'ingestion de poisson cru contaminé par les larves du ver
Anisakis, la maladie se traduit, dans les heures suivant le repas, par des nausées, des
douleurs abdominales pseudo-ulcéreuses, des vomissements et de la diarrhée.
Plus tardivement, peuvent apparaître une symptomatologie de
type occlusif et des manifestations de nature allergique : urticaire ou plus rarement
choc anaphylactique.
La prévention du risque consiste à éviscérer les poissons dès leur
capture, à la sortie de l'eau, et à tuer les vers adultes et les larves, par congélation du
poisson à une température inférieure ou égale à moins 20° pendant 24 heures, ou
pendant 7 jours dans un congélateur domestique. L'autre moyen est la destruction par
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cuisson ''à cœur'' du poisson frais, à plus de 60°c pendant au moins une minute ou au
micro-ondes, à 70°c pendant une même durée.
D- Intoxications par les produits chimiques
Indépendamment des maladies et des toxi-infections marines
dues à des organismes vivants, d'autres pathologies plus sournoises et plus insidieuses
peuvent être induites par des produits chimiques au cours d'intoxications chroniques :
cancers, troubles hormonaux, malformations congénitales, etc... On en parle assez
peu, ni des déchets toujours plus nombreux, polluant les mers et les océans.
Sauf en cas de pollution catastrophique comme celle de l'Amoco Cadiz ou du Torrey
Canyon ou lors du nettoyage saisonnier des plages par des volontaires écolos pour les
rendre présentables, avant l'arrivée des estivants et les débarrasser de tous les déchets
accumulés pendant la période hivernale.
Malheureusement, ces agents chimiques s'incorporent dans le
milieu marin, s'accumulent lentement mais sûrement dans les organismes, détruisent
parfois certaines espèces animales et sont même susceptibles à long terme de causer
une intoxication chronique chez les consommateurs réguliers de poissons, mollusques
et coquillages. Il est difficile d'apporter les preuves scientifiques de leur dangerosité,
les études sur des souris de laboratoire n'étant pas toujours une référence reconnue,
comme de lutter contre les sources de ces pollutions aux origines souvent plurielles et
multinationales. Rappelons nous des conséquences gravissimes de la pollution
industrielle des eaux de la baie de Minamata au Japon, par le mercure dans les années
50, avec ses centaines de morts, ses milliers de malformations congénitales, avec ses
handicaps physiques et psychiatriques sévères !
A ce jour on connaît de nombreux produits chimiques, toxiques
et potentiellement cancérigènes, pouvant se retrouver dans les produits de la pêche et
les fruits de mer que nous consommons.
Parmi les plus problématiques, citons :
- le pétrole et ses dérivés : hydrocarbures aromatiques et substances benzéniques,
- les métaux lourds : plomb, mercure, nickel, cadmium, zinc, cuivre, chrome, argent,
vanadium,
- les pesticides, biocides, herbicides, insecticides et autres organochlorés,
- les antibiotiques, hormones, PCB, dioxine...
La liste est longue et s'allonge presque chaque semaine...
Sans oublier la radioactivité, qui n'est pas une substance chimique à proprement
parler, mais qui peut accidentellement être libérée dans l'air et dans l'eau, comme ce
fut le cas très récemment à la centrale nucléaire de Fukushima, après le tsunami.
Surveillance et prévention ne doivent pas rester les grands axes
d'une politique limitée aux seules zones et domaines maritimes à risques et aux états
limitrophes, mais s'imposer à l'échelle mondiale, car toute pollution sur terre finit un
jour par se retrouver dans la mer. Lutter contre la pollution est l'affaire de tous.
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