La Vie des tardigrades

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ERRATA
Planche I, ligne 1.
Lire muscicoles, au lieu de musi-
coles.
ligne 3.
Lire Milnesium, au lieu de Milhesium.
Planche II, ligne 4.
Lire Baker, au lieu de Backer.
Planche VI, ligne 3.
Lire pore, au lieu de porc.
Planche VIII, ligne 11.
Lire sécrété, au lieu de se-
crété.
ligne 20.
Lire chitineuse, au lieu de chitineus.
Planche IX, ligne 2.
ligne 11.
Lire Rio, au lieu de Rio.
Lire ventrale, au lieu de ventral.
Planche X, ligne 6.
ganglion et I.
Supprimer le point virgule entre
Planche XI, ligne 5.
Lire Rio, au lieu de Rio.
Planche XV, ligne 3.
ligne 5.
Lire X avant environ.
Lire II-V ganglions, au lieu de gan-
glion.
Planche XVI, ligne 3.
Lire X environ, au lieu de X
Environ.
ligne 5.
Lire pédieux, au lieu de pédieuse.
Planche XVII, ligne 3.
Lire Macrobiotus, au lieu de
Macrobionus.
Planche XVIII, ligne 1.
Lire Macrobiotus, au lieu de
Macrobionus.
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Tous droits de reproduction et de traduction réservés
pour tous les pays y compris la Russie.
Copyright by Librairie Gallimard, 1948.
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Au grand zoologiste
LUCIEN
CUÉNOT
Membre de l'Instilut
dont l'œuvre sur le groupe des Tardigrades
est toute d'originalité et de lumineuse clarté.
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I
UN MICROCOSME SUR UNE TUILE
Quiconque observe tant soit peu le monde qui
l'entoure se rend compte que bien peu de milieux
naturels sont inhabités. Les eaux, marines, saumâtres
ou douces constituent un habitat de choix pour une
infinie variété d'êtres vivants l'examen à la loupe ou
au microscope d'un peu d'eau provenant de la surface
de la mer ou d'une mare révèle une foule d'organismes
embryonnaires ou adultes. L'humus, en surface ou en
profondeur, est également un lieu de choix pour un
nombre immense de végétaux et d'animaux. Mais des
milieux en apparence moins aptes à supporter la vie
en contiennent pourtant des représentants variés, spécialement adaptés. Les cavernes et grottes naturelles,
obscures et humides, donnent asile à divers Invertébrés et Vertébrés. Les torrents, les neiges même abritent des végétaux qui nourrissent un certain nombre
d'espèces animales. Les sables brûlants du désert sont
peuplés par des végétaux, comme les Cactées et les
Euphorbes, qui sont spécialement organisés pour
emmagasiner l'eau en en laissant évaporer le moins.
Extrait de la publication
LA
VIE DES
TARDIGRADES
possible, et armés de redoutables défenses contre les
animaux qui habitent ces lieux peu hospitaliers. Plus
près de nous, les pierres, les briques, les tuiles, qui
subissent d'énormes écarts de température, qui sont
desséchées par les vents et inondées par les pluies,
constituent, malgré ces conditions extrêmes, dans tout
lieu où existe la moindre humidité occasionnelle, le
substrat de Mousses, d'Hépatiques et de Lichens. Ces
végétaux,à leur tour, sont habités par un certain nombre d'Invertébrés qui s'accommodent de ce singulier
milieu.
Singulier, en effet, car les plantes qui le constituent
passent par des alternances de vie active et latente,
d'après l'humidité qu'elles contiennent, pendant lesquelles elles se gonflent ou se réduisent à l'extrême,
croissent ou
cessent de
le faire,
en
un
mot sont
vivantes ou inanimées. Les animaux qui sont leurs
hôtes passent obligatoirement par les mêmes états successifs car, au risque de périr, ils doivent eux aussi
profiter, pour vivre, de l'humidité passagère, puis se
réduire à l'extrême, cesser toute activité, et se protéger
contre la déshydratation fatale pendant les périodes
de sécheresse.
Si ce milieu ainsi constitué ne peut être classé parmi
les plus riches en espèces animales, on est pourtant
étonné de la diversité des Invertébrés qui y élisent
domicile.
Pour s'en rendre compte il n'est nécessaire que de
prélever sur un mur ou sur une tuile, soit un petit
groupe végétal constitué par une Mousse comme une
Barbula ou un Bryum, soit un peu de Lichen tel
qu'une Xanthoria, d'un beau jaune orangé vif. On
prend soin de ne pas prélever trop de sable, et l'on
place la Mousse ou le Lichen, en les dilacérant quelque
Extrait de la publication
UN
MICROCOSME
SUR
UNE
TUILE
peu, dans des coupes plates de verre ou des boîtes de
Petri contenant de l'eau de pluie ou de rivière. Après
quelques heures on enlève la masse végétale avec des
pinces ou une cuiller percée de plusieurs trous et faisant fonction de passoire, et l'on examine soit avec une
forte loupe, soit au microscope avec un très faible
objectif.
On voit alors toute une faune qui s'agite au milieu
des débris végétaux et des microbes qui constituent
leur pâture. Cetle faune est constituée par des Protozoaires
Amibiens le plus souvent nus, quelque-
fois à carapace, Flagellés, Infusoires ciliés
des Rotifères, des Nématodes, enfin des Tardigrades. Tous ces
organismes possèdent un mécanisme qui leur permet
d'une part de résister à l'extrême sécheresse, d'autre
part de passer rapidement à une vie active lorsque la
pluie ou la rosée ont bien détrempé leur habitat. Ce
mécanisme est soit l'enkystement à l'état desséché,
suivi à l'état actif de la rupture du kyste et d'une reformation des organites et organes perdus pendant
l'enkystement, soit l'état latent pendant la sécheresse,
suivi de reviviscence lorsque le milieu redevient humide. Nous verrons plus loin la différence entre ces
deux mécanismes.
En plus de ces animaux qui font partie intégrante
de leur milieu et qui en subissent toutes les vicissitudes, on observe également un certain nombre d'espèces animales qui sont moins directement influencées
par lui. Ce sont en général des larves d'Insectes, des
Insectes primitifs comme les Collemboles, des Acariens, qui vivent dans les Mousses, Hépatiques et Lichens humides. De taille beaucoup plus grande que
les formes que nous avons énumérées plus haut, ce
sont des espèces vraiment terrestres, et que l'absence
LA
VIE
DES
TARDIGRADES
d'humidité prive peut-être partiellement de leur
pâture, mais non pas de la possibilité de subsister à
l'état actif.
Assez curieusement, en effet, les premiers groupes
que nous avons énumérés
Protozoaires, Rotifères,
Nématodes, Tardigrades
ne sont terrestres qu'en
apparence. Ce sont en réalité des espèces aquatiques
qui vivent dans la mince couche aqueuse qui, par
temps humide, demeure entre les tiges et les feuilles
des Mousses et Hépatiques, entre les éléments du thalle
des Lichens. Elles sont donc toutes forcées, lors de
l'assèchement de leur habitat, soit de s'enkyster, soit
de prendre la forme dormante qui deviendra reviviscente lorsque cet habitat-sera à nouveau humecté
par la pluie ou la rosée.
Nous ne parlerons pas ici des Protozoaires. Ils constituent des embranchements extrêmement importants
mais leurs représentants muscicoles et lichenicoles ne
semblent pas avoir un mode de vie très différent, dans
la couche aqueuse de leur milieu végétal, de celui
qu'ont les Protozoaires semblables dans n'importe
quelle autre petite accumulation d'eau où ils peuvent
se trouver.
Par contre les trois autres grands groupes zoologiques muscicoles (fig. 1) et lichenicoles
Rotifères,
Nématodes, Tardigrades, de taille plus grande et de
même ordre pour tous, sont obligés par leur mode de
vie d'avoir un comportement semblable vis-à-vis des
variations physiques de leur habitat. Une étude plus
poussée des deux premiers groupes ne saurait donc
être inutile pour la compréhension du troisième.
Les Rotifères mesurent environ un tiers à un demi-
millimètre de long. Ceux qui nous intéressent par
leur habitat dans les Mousses, Hépatiques et Lichens
Pl.
1.
I.
La faune des Métazoaires musicoles.
Deux Rotifères en haut, une Anguillule à droite, un Echiniscicn à gauche, un Jlacrobiute (Milliesium) en bas, (Figure originale.
d'après le vivant).
Extrait de la publication
Pl.
II.
2.
Le Rotifère Bdelloïde Philodina roseola.
A, B, rampant avec la trompe étendue; C, D, E, fixé avec l'appa-
reil rotateur en action; F, fixé avec la partie antérieure rétractée.
(Backer).
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UN MICROCOSME SUR UNE TUILE
appartiennent à l'ordre des Arpenteurs ou Bdelloïdes.
Ce nom leur vient du fait que, capables de se mouvoir
exceptionnellement en nageant avec leur couronne
ciliée, ils rampent d'ordinaire à la manière des
Sangsues (grec
Bdella, Sangsue; eidos, aspect)
(fig. 2).
ils sont allongés, vermiformes, et nettement divisés
en anneaux au nombre de seize, dont quatre pour le
pied, et deux au-dessus de la bouche pour une sorte
de prolongement très particulier appelé trompe qui
continue le corps au delà de l'anneau buccal (fig. 2,
A, B, fig. 3,1). Ils sont fixésà l'état de repos par un
pied terminé d'ordinaire par deux doigts.
Pour se déplacer ces Rotifères lâchent prise et rampent comme les Sangsues ou les Chenilles arpen.leuses
en plaçant leur trompe le plus loin possible, puis en
mettant leur pied près de leur trompe
ils s'étendent
ensuite et recommencent ce mouvement. Pour se fixer
ils font saillir le quatrième anneau de leur pied, sécrètent du liquide adhésif par les orifices de glandes
pédieuses, et lorsque ce liquide a pris consistance ils
rétractent le quatrième anneau en sorte que les
« orteils » viennent embrasser le support.
Pourvus de muscles rétracteurs puissants, les Bdelloïdes sont extrêmement contractiles
lorsqu'ils sont
inquiétés, ils télescopent leurs anneaux les uns dans
les autres et se réduisent à une petite masse froncée de
moins de un dixième de millimètre de haut (fig. 3,3).
Ce sont les anneaux extrêmes qui entrent dans les
anneaux moyens. Quand ils sont étendus sans être en
état
d'activité
ils
sont
effilés
aux deux
bouts
et
la
trompe continue la direction du corps. Mais quand ils
se développent pour s'alimenter, on voit la trompe se
rejeter en arrière, l'orifice d'entrée des voies diges-
LA
VIE DES TARDIGRADES
tives se dilater, se placer sur l'axe du corps, à son
extrémité supérieure, et laisser sortir une couronne
avec la bouche à son intérieur (fig. 3,2). Cette couronne est munie d'un double anneau ciliaire, remarquable appareil rotateur caractéristique du groupe des
Rotifères et qui leur donne leur nom.
En effet, lorsque ces animaux sont étendus et manœuvrent activement les cils de leur appareil rotateur,
ceux-ci se meuvent dans un plan vertical, non ensemble, mais successivement, en sorte que leur mouvement se propage de l'un à l'autre, circulairement et
avec une grande vitesse. Il en résulte, par une illusion
bien connue, l'impression de deux roues en mouvement,
d'où le nom de Rotifères ou Rotatoria.
Ce
mouvement détermine un tourbillon qui attire les
petits organismes, aliments des Rotifères, et les précipite dans la bouche.
Dans l'organisation interne des Bdelloïdes (figs. 4
et 5) nous pouvons noter quelques structures intéressantes.
L'épiderme est revêtu d'une mince cuticule chitineuse. L'annulation du corps est exclusivement limitée
aux téguments et ne s'étend en rien aux organes
internes ni à la cavité générale. Elle n'est qu'une
adaptation des téguments aux nécessités de la protection chez un animal dépourvu de cuirasse et de tube.
L'appareil musculaire est très développé. Au fond
du pharynx est un petit gésier appelé ordinairement
mastax, avec une paire de fortes mâchoires et plusieurs
glandes salivaires unicellulaires. Au mastax fait suite
un court œsophage qui conduit à un long et volumineux estomac, puis suivent un intestin et un cloaque
qui s'ouvre du côté dorsal, au-dessus de la base du
pied. Cet orifice cloacal donne issue aux fèces, à
Extrait de la publication
Pl.
3.
III.
Le Rotifère Bdelloïde Philodina roseola
1. Aspect ventral, trompe étendue, appareil rotateur rétracté.
2. Aspect dorsal, appareil rotateur en action. 3: Rétracté. 4. Rétracté
et desséché. an, anus; bl, intestin; br, cerveau; c. b., vésicule contractile
e, œil; eg. œuf; f. g., glande pédieuse; m, mastax; r, cloaque
s. g., glandes salivaires; st. i., estomac; t, mâchoire; t. o., ten-
tacule
v, vitellogène (L. M. Hickernell).
Extrait de la publication
PI.
IV.
4 et 5.
Le Rotifère Bdelloïde Callidina.
4.
Aspect ventral avec l'appareil rotateur dévaginé. b, bouche c, cercle postoral; c, exc. canal excréteur; cet. ggl, cellules ganglionnaires; est, estomac; gl. gt, glandes génitales; gl. m, glandes
salivaires; gl. pd, glandes pédieuses; mcb, mâchoires; n, nerfs ven-
traux; o. pd, orifice des glandes pédieuses; p.r, disques des roues:
r. cl, roue droite; r. g, roue gauche; tr, trompe. (Y. Delage et
E. Hérouard, im. Zelinka).
>.
Coupe sagittale avec la trompe dévaginée et l'appareil
rotateur rétracté, b, bouche; C, cerveau; ggl. tr, ganglion nerveux
de la trompe; gl. gs, glande gastrique; int, intestin; mcl, muscles;
o. orifice d'invagination de l'appareil rotateur; o. cl, orifice du cloaque
ph, pharynx; r, roue; sph. c, sphincter de la couronne; sph. p,
sphincter du pylore; tt, tentacule dorsal
v. p, vésicule contractile.
Les autres abréviations comme dans la figure 4 (Y. Delage et
E. Hérouard).
TIN
MICROCOSME
SUR
UNE
TUILE
l'urine, probablement aux œufs. Une paire de canaux
excréteurs débouche dans une vésicule pulsatile qui
s'ouvre dans le cloaque.
Le cerveau est relativement volumineux et fournit
des nerfs à la couronne, à un ganglion du sommet
de la trompe, à quatre tentacules, courtes papilles
portant quelques soies tactiles et situées dans la partie
antérieure du corps, et, en plus de quelques autres
petits nerfs, une paire de nerfs latéraux qui descendent
dans
le tronc et se distribuent aux muscles et aux
parois. Certains Bdelloïdes, comme Philodina, ont une
paire d'yeux cervicaux, constitués chacun par une
sphérule réfringente enchâssée dans une masse pigmentaire annexée au cerveau.
Le mâle est inconnu chez tous les Bdelloïdes.
La
femelle se reproduit sans son concours par parthénogénèse. Son ovaire est pair. Chaque glande ovarienne
est formée de trois parties 1, l'ovaire proprement dit,
germigène, en dedans, formé de petites cellules rondes
qui grossissent pour devenir des œufs
2, un vitellogène en dehors, formé de quelques grosses et rares
cellules chargées de nourrir les œufs
3, une cavité
en bas où s'accumulent les œufs. Le tout est entouré
d'une enveloppe qui se prolonge en un oviducte qui
se dirige vers le cloaque, probablement pour s'y ouvrir, quoiqu'on n'ait pu voir le fait et qu'on ait décrit
la libération d'embryons de Philodina par rupture de
la paroi du corps de leur mère.
Malgré une structure qui est ainsi assez complexe,
les Bdelloïdes sont à même, lorsque vient à manquer
l'eau de leur habitat, de survivre à ce profond bouleversement. Ils entrent alors en un état particulier,
l'anhydrobiose.
Lorsque le milieu végétal où vivent les Bdelloïdes
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