Mise en place d’un groupe éthique au sein du centre hospitalier George Sand Alain Vernet Psychologue Assistant de pôle Pôle Médico-Psychologique de l’Enfant et de l’Adolescent Conseil d’Orientation de l’Espace de Réflexion Ethique Régional Ecole Ethique de la Salpétrière BIBLIOGRAPHIE BIBLIOGRAPHIE BIBLIOGRAPHIE BIBLIOGRAPHIE POURQUOI L’ETHIQUE S’IMPOSE-T-ELLE AUJOURD’HUI? • On a l’impression de découvrir une réalité nouvelle alors qu’il s’agit d’une interrogation très ancienne, dont se préoccupait déjà ARISTOTE (Ethique à Nicomaque) • L’existence d’Auschwitz (La technique et la raison au service de la destruction de l’homme, mais aussi de l’humanité en l’homme) – Théodor Adorno : « Hitler a imposé aux hommes un nouvel impératif catégorique : penser et agir en sorte qu’Auschwitz ne se répète pas ». • La toute-puissance de la technique, qui formate, et détermine les modes de pensée, et se développe selon des finalités propres (et qui contraint à une heuristique de la peur – Hans Jonas) • Parle-t-on d’autant plus d’éthique qu’on la pratique moins? L’éthique se fait-elle d’autant plus procédurale qu’on dénigre la sagesse pratique? •Mettre en place des Instances de Réflexion éthique dans les établissements hospitaliers : une obligation légale et réglementaire •Item de certification de la V3 (Manuel de certification des établissements hospitaliers) Chapitre 1 : Management de l’établissement Partie 1 : Management stratégique 1a – Valeur, missions et stratégie de l’établissement Critère 1C démarche éthique ETHIQUE & ETABLISSEMENTS HOSPITALIERS • Loi du 6 août 2004 • Reprise dans l’Article L -1412-6 du Code de la Santé Publique • Mise en place d’ ESPACES DE REFLEXIONS ETHIQUE REGIONAUX OU INTERREGIONAUX (ERERI) • Pilotage par un conseil d’orientation (20 personnes, réparties en 2 collèges; 10 émanant de services de soins; 10 émanant de personnalités qualifiées : juristes, philosophes, etc) Nomination conjointe : Président de l’Université et Directeur du CHU de rattachement • • Arrêté du 4 janvier 2012 • • Formation, documentation, information, appui Organisation de débats publics Observatoire • • Agrément ARS • Adhésion des établissements hospitaliers par convention • Financement MIGAC (Art L 162-22-13 du code de la sécurité sociale) Financement ARS (en 2013 4,4 millions d’euros) On peut vivre sans philosophie, mais moins bien! Et sans éthique ? • La philosophie ne mériterait pas une heure de peine si elle n’aidait pas à mieux vivre Pourquoi une réflexion éthique? • Aristote : « la philosophie ne mériterait pas une seconde de peine si elle ne nous aidait pas à mieux vivre ». • Vladimir Jankélévitch : « on peut vivre sans philosophie, mais moins bien ». • Si on peut vivre sans philosophie (c’est à dire sans penser ou avec du prêt à penser), on peut vivre aussi sans éthique (sans prise en compte de valeurs morales). • Dans l’histoire de la psychiatrie : • XVII ème siècle : le grand renfermement • XIX ème siècle : le panopticon de Jeremy Bentham (idéologie de la transparence). • XX ème siècle : Aktion T4 et le génocide larvé des malades mentaux. • L’éthique : contre la tentation d’oublier l’humanité en l’homme • Prise en compte du complexe et du tragique du monde. L’éthique est une branche de la philosophie : • Philosophie de la connaissance Logique Épistémologie Linguistique (rhétorique) • Philosophie de l’être Ontologie Phénoménologie Métaphysique • Philosophie pratique (l’action des hommes) Philosophie morale ou éthique Philosophie politique Philosophie du droit Schéma des savoirs selon Aristote La métaphysique métaphysique La La philosophie philosophie théorétique théorétique La •Mathématique •Mathématique •Physique •Physique •théologie •théologie La philosophie philosophie pratique pratique La La philosophie philosophie poétique poétique La •Économique •Économique •Éthique •Éthique •politique •politique •rhétorique •rhétorique •Esthétique •Esthétique •poétique •poétique Qu’est-ce que l’éthique • Mot d’origine grecque construit avec : un e ouvert (epsilon) E ε Ou Un e bref (êta) H η • Éthos (E) : habitude, usage, coutume de la cité ( donc règles normatives). C’est ce sens là qui sera traduit par le mot latin moralem (morale). • Êthos : séjour, lieu habituel et par extension caractère, vertu personnelle, sagesse pratique • articulation du collectif et de l’individuel Morale et éthique • Ethos = moralem ( traduction par Cicéron) • Ethos Ethique / moralem morale • Les termes de morale et d’éthique peuvent donc être considérés comme synonymes. • Mais ils ne sont pas chargés des mêmes représentations Ethique : représentation positive Morale : représentation négative Ethique : rigueur de la pensée libre rigueur de la personne (droiture) Positionnement par rapport à un intérêt général ( le télos : une finalité : le Bien, le juste, le vrai …) Morale : Contrainte de la pensée serve Rigorisme de l’individu ( non exempte d’hypocrisie et de tartufferie). Positionnement par rapport à des standards de comportement, des us, des règles de conduites (catéchisme), un deons (Bentham). • Ces différences traduisent la double nature du terme grec ethos (éthos = êthos ), Cicéron privilégiant l’éthos. • Ces différences de représentations d’un même concept vont aussi être le reflet des controverses doctrinales de toute l’histoire de la pensée, qu’on pourrait résumer par l’opposition: hétéronomie / autonomie Hétéronomie • Notre système de valeurs nous est extérieur. Il nous est donné… ou il résulte de déterminations que nous ne maîtrisons pas, qui s’imposent à nous, malgré nous, et même parfois sans que nous le percevions. • Il est de l’ordre d’une contrainte, même quand nous y adhérons de manière volontaire (identification à l’agresseur) • Les religions sont le parangon de la conception hétéronomique (tout vient d’un autre : Dieu donne à Moïse les tables de la loi). • Mais la main invisible de Stuart Mill ( le marché comme régulateur économique idéal, parfait, fondement du libéralisme) est basé sur le même postulat théorique. HETERONOMIE • • • • • • • • • • HEGEL : Le sens de l’histoire MARX : La lutte des classes; les rapports de production NIETZSCHE : La volonté de puissance BERGSON : L’élan vital CHANGEUX : L’homme neuronal et la chimie du cerveau (biologisme) JONAS : La nature FREUD : L’inconscient LEVI-STRAUSS, LACAN, BARTHES : Les structures du langage FOUCAULT : Les rapports de pouvoir LEVINAS : L’altérité • TOUT CECI SE RESUME A LA « MORT DE l’HOMME », du sujet Autonomie • L’homme est la mesure de toute chose. • Tout ne procède que de sa raison et de sa pensée critique. • C’est une très vieille tradition (Protagoras d’Abdère, vers 450av JC, au siècle de Périclès, en Grèce) • L’homme est sujet • Descartes: « Je pense, donc je suis » Tout ce que je crois et perçois peut n’être qu’illusion, apparence, chimère, mensonge, déguisement, et je dois douter de tout, mais en doutant, j’ai une certitude, celle de penser. Non pas la certitude des contenus de ma pensée, mais de l’existence d’un processus de pensée. C’est cette activité de pensée (substance pensante), qui construit mon existence (substance étendue). Mais il suffit pas d’être un sujet pour être un homme. Ce qui fait l’humanité en l’homme, c’est l’existence en lui de la loi morale. (Kant); et sa capacité, dans l’ordre politique à contracter (Rousseau) C’est à dire de sa capacité à agir par devoir (et non pas seulement en fonction des circonstances, des contextes, des déterminations externes). • Morale : hétéronomie • Ethique : Autonomie • Hétéronomie : Ethique de responsabilité • Autonomie : Ethique de conviction • Morale : téléologie • Éthique : déontologie Deux conceptions de la démarche éthique : • A priori : Réflexion sur des situations générales, abstraites, mais généralisables. Destinée à produire une conduite à tenir, des recommandations, des règles, des protocoles, des références opposables En vue d’une application à des situations concrètes Le groupe est composé d’experts • A posteriori : Réflexion à partir de situations concrètes ayant posé problème, dans lesquelles aucune solution ne s’impose, n’apparaît évidente, qui suscitent des conflits de normes et de valeurs, et dans lesquelles toute décision apparaît comme une équipollence bénéficesrisques. Méthode qui s’apparente à un débriefing, à une catharsis (purgation), Mais qui est en même temps un lieu de débat, de controverse, où chacun est porteur de son expérience, de ses valeurs, de son histoire, de sa formation, de sa culture, de ses idéaux ( ses vertus, sa praxis), ce qui est une forme de sagesse pratique. Le groupe est composé de praticiens • Dans l’un et l’autre cas, les groupes peuvent s’adjoindre des partenaires extérieurs (philosophes, sociologues, juristes, représentants des familles de pensée (religions, spiritualités laïques). • Comme experts, ils sont là comme représentant de…; comme praticiens, ils sont là comme appartenant à… Au CH George Sand Propositions: Perspective de l’éthique de conviction réflexion a postériori (l’intérêt de la réflexion éthique, c’est quand aucune solution évidente et incontestable ne se dégage; quand on est dans l’imprévu, l’incertain, l’incapacité à mettre en œuvre un protocole). C’est à cette occasion qu’il faut faire preuve d’une liberté de penser, c’est à dire : • Faire appel à la sagesse pratique, aux vertus personnelles des individus, • Cette sagesse pratique n’est pas réductible à des fonctions ou des savoirs préalables ( toutes les paroles se valent et en ce domaine la parole d’un soignant n’est pas plus pertinente que celle d’un administratif ou d’un personnel technique). • Cette liberté de penser n’est pas le café du commerce. • Ce n’est pas la négation des savoirs et des connaissances • C’est la confrontation de savoirs diversifiés, de perspectives diverses. • C’est le débat, la controverse, la dialectique • C’est la raison pour laquelle on peut faire appel à des éclairages externes, à des « lumières ». • Cette liberté de pensée est une démarche philosophique • L’éthique n’est qu' un aspect de la philosophie (philosophie morale = opposition à la philosophie de la connaissance). • La philosophie, c’est la contestation même (le doute); c’est de penser que rien ne va de soi, pas même la philosophie. • C’est une démarche avant un contenu • C’est le regard critique sur les contenus, par leur mise en perspective, et l’interaction des pensées philosophiques avec le quotidien de la pratique.