Dante et l`Humanisme - Association ALDERAN

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CONFÉRENCE DU FORUM DES SAVOIRS
“Plus l’être humain sera éclairé, plus il sera libre.”
Voltaire
LA DIVINE COMÉDIE DE DANTE
Premier “manifeste” de l’Humanisme ?
CONFÉRENCE DE ROMAIN BOUVET
Dante et Virgile en Enfer, Eugène Delacroix, Musée du Louvre.
Association ALDÉRAN Toulouse
pour la promotion de la Philosophie
MAISON DE LA PHILOSOPHIE
29 rue de la digue, 31300 Toulouse
Tél : 05.61.42.14.40
Email : [email protected]
Site : www.alderan-philo.org
conférence N°1000-210
LA DIVINE COMÉDIE DE DANTE
Premier manifeste de l’humanisme ?
conférence de Romain Bouvet donnée le 07/12/2007
à la Maison de la philosophie à Toulouse
La célèbre œuvre de Dante, écrite dans la Florence médiévale au début du XIVème siècle,
n'en finit pas de nourrir l'imaginaire de l'humanité. Mais elle suscite également de
nombreuses recherches et réflexions. Ce roman initiatique constitue une véritable exploration
de la mentalité médiévale mais inscrit surtout son propos de manière universelle, à travers
une synthèse de connaissances en prônant implicitement leur accès et leur diffusion. Quel
était le projet de Dante à l'origine de la Divine Comédie ? Ne peut-on voir dans ce récit une
allégorie de notre évolution, marquée par le désir de s'affranchir de notre condition en
élaborant nos propres outils de connaissance ? Et si la Divine Comédie était, par l'ambition
de son contenu et l'innovation de sa forme, le premier manifeste de l'humanisme ?
Association ALDÉRAN © - Conférence 1000-210: “Dante et lʼHumanisme” - 07/12/2007 - page 2
LA DIVINE COMÉDIE DE DANTE,
PREMIER « MANIFESTE » DE L'HUMANISME ?
PLAN DE LA CONFÉRENCE PAR ROMAIN BOUVET
I
LA DIVINE COMÉDIE, LA QUÊTE DE L'ÊTRE ET DE L'AUTRE
1. L'enfer comme périple de l'identité
2. La réinvention du purgatoire et la rencontre de la liberté
3. L'exploration du paradis pour atteindre sa vérité
==> une entreprise pour inscrire l'homme comme mesure de toute chose.
II
LA DIVINE COMÉDIE ET LE PROJET DE LA CONNAISSANCE
1. Une encyclopédie des savoirs disponibles
2. Un monument écrit dans une matière friable
3. Une conscience au service de la science de l'éternel
==> Une œuvre écrite comme support culturel et intellectuel de la connaissance.
III
LA DIMENSION UNIVERSELLE DE LA DIVINE COMÉDIE
1. Une œuvre chargée de symboles
2. Réinterpréter et repenser le monde
3. « Aider les hommes à se tirer de l'état malheureux où ils sont »
==> Une langue, un contenu et une ambition : Penser au-delà de soi comme philosophie de vie.
ORA ET LABORA
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RAISONS D'UN COUP DE CŒUR…
Étudiant et titulaire d'un master 2 recherche en Histoire, la proposition d'une conférence
sur la Divine Comédie n'est pas issue de mon domaine de recherches mais d'un goût
personnel pour l'œuvre de Dante. Ce qui sera dit au cours de cette conférence n'engage
que mon analyse qui ne prétend ni se faire le relais d'interprétations officielles (pour peu
qu'elles soient clairement établies) ni constituer une étude exhaustive et approfondie de
l'œuvre de Dante. Néanmoins, je m'appuierai sur quelques études portant sur la Divine
Comédie afin de rendre complémentaires les travaux existant et la lecture que chacun
peut se faire de l'œuvre de Dante. Ce que je propose à travers cette conférence est un
regard sur ce texte qui constitue aujourd'hui encore une inspiration essentielle pour notre
culture.
La Divine Comédie est l'œuvre d'un temps mais elle a traversé les espaces et les siècles
pour devenir un récit universel aux multiples échos. Ouvrage résolument engagé, écrit
fondateur d'une langue, projet de connaissance et d'identités, description d'une
philosophie de vie, le texte de Dante est tout cela à la fois. J'aime la Divine Comédie
parce que derrière le récit de la quête se profile le désir d'exploration et de
connaissances de l'histoire humaine. La Divine Comédie est avant tout une expérience
de soi, une connaissance de l'autre et une aventure aux contours universels. Je crois que
l'œuvre de Dante nous invite à une réflexion qui interroge nos origines, nos
représentations et la variété de nos actes.
La lecture de Dante invite à constater que nous n'avons jamais été aussi nombreux mais
que notre sentiment d'unité n'a jamais été aussi rare. La Divine Comédie est une œuvre
qui rassemble, qui recrée du lien, qui fait corps avec le passé et raconte son présent pour
envisager l'avenir. La Divine Comédie nous offre un horizon dans lesquels nos
imaginaires construisent ces rêves dont l'homme tire sa vérité. La Divine Comédie nous
montre que dans nos temps de suffisance et de fausse grandeur, il est nécessaire
d'affronter des chutes et des égarements pour donner du sens à nos vies. Et que ces
erreurs ne nous interdisent pas d'espérer un jour habiter ensemble une terre plus
fraternelle.
Romain Bouvet
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Document 1 : Éléments biographiques sur Dante et la divine comédie.
DANTE ALIGHIERI
(Florence, 1265- Ravenne, 1321)
Grand poète italien du Moyen Âge. Partisan des Guelfes*, favorables au pouvoir du Pape
en Italie, Dante participa à l'administration de Florence. Finalement écarté du pouvoir, il
finit ses jours en exil à Vérone, à Lucques, puis à Ravenne. Sa Divine Comédie, écrite à
partir de 1306 - grande épopée mystique inspirée par son amour pour Béatrice - constitue
le premier chef-d'œuvre de l'humanisme chrétien du XIVe siècle et l'une des œuvres
majeures de la littérature mondiale.
* Faction rivale des Gibelins dans l'Italie médiévale. Ces deux factions tiraient leur nom de
celui de deux grandes familles allemandes rivales, les Welf (Guelfes) et les Hohenstaufen
(Gibelins). Par extension, le nom de Guelfes désigna les partisans du pouvoir du Pape
en Italie, et celui des Gibelins les partisans de l'Empereur.
Leurs rivalités ensanglantèrent les villes italiennes.
RÉSUME DE LA « DIVINE COMÉDIE »
La Divine Comédie a été rédigé, selon l'aveu de Dante, à la suite d'un rêve. Ce dernier
mettait en scène le voyage de Dante pour atteindre Béatrice, l'amour de sa vie,
tragiquement disparue en pleine jeunesse. Pour accéder à Béatrice, reposant au bout du
Paradis, Dante doit traverser trois mondes qui correspondent à la structure ternaire de
l'œuvre : l'Enfer, le Purgatoire et le Paradis.
Dans l'Enfer, Dante parcourt le catalogue effrayant des péchés et des châtiments
possibles. Au sein du Purgatoire, Dante expérimente la lumière et les manifestations de
l'art pour atteindre les portes du Paradis. Dans ce dernier, le voyageur céleste, guidé par
Béatrice, parcourt des ciels multiples et y connaît des épreuves. Au terme de la vision, le
héros s'absorbe dans l'enfance.
Document 2 : À propos de l’humanisme.
HUMANISME
Nom donné au mouvement d'idées né en Europe sous la Renaissance*, contemporain de
la Réforme** protestante et des Grandes Découvertes***. L'Humanisme élabora une
nouvelle conception de l'homme libéré par la redécouverte des valeurs morales et
intellectuelles puisées dans la littérature de l'Antiquité. L'Humanisme compta d'éminents
représentants (Didier Erasme, Michel de Montaigne, François Rabelais…) dont les chefsd'œuvre sont encore aujourd'hui une référence.
* Terme désignant l'effervescence intellectuelle et culturelle qui naît en Toscane dès le XIVe
siècle et s'épanouit en Europe occidentale aux XVe et XVIe siècles. Elle s'inspira des valeurs
de l'humanisme et se libéra des préjugés dogmatiques du Moyen-âge. Si la Renaissance
toucha tous les domaines de la pensée, elle s'exprima avec génie dans les arts plastiques.
Léonard de Vinci demeure la figure de proue de la Renaissance.
** Nom donné au mouvement de renouveau évangélique apparu dans le
christianisme au
XVIe siècle, et qui donna naissance à des Eglises séparées : protestantisme luthérien ou
calviniste, et anglicanisme. La Réforme du XVIe siècle répondit au problème religieux des
chrétiens déçus de l'église institutionnelle. Son succès s'expliqua par la sensibilité religieuse
très vive de l'époque, hantée par le problème de la mort et du salut, l'aggravation des abus
dans l'Eglise largement dénoncés par les humanistes, et enfin le développement de
l'imprimerie qui assura à la fois la diffusion de la Bible mais aussi la diffusion en milliers
d'exemplaires des écrits réformateurs.
*** Nom sous lequel on désigne généralement les grands voyages de découvertes
des XVe et
XVIe siècles, auxquels participèrent Portugais, Espagnols, Français, Anglais et Hollandais. À
partir de la fin du XVe siècle, le monde connu par les Européens s'est considérablement élargi
par les découvertes successives de l'Amérique, de la route des Indes et de l'Océan Pacifique.
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La Divine Comédie, manuscrit original du XIVe siècle, Chant I de l'Enfer.
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COMPLÉMENTS SUR L'HUMANISME
L'Humanisme est avant tout un mouvement historique, une force socioculturelle qui
n'exprime pas une philosophie déterminée. Une phrase issue de De Dignitate hominis de
Pic de la Mirandole (1486), précise un aspect essentiel de cet idéal humaniste, incarné
dans des œuvres et dans une action sociale et spirituelle qui leur est associée : « J'ai lu
dans les livres des Arabes qu'on ne peut rien voir de plus admirable dans le monde que
l'homme ». S'il fallait retenir quelques grands traits de l'humanisme, il faudrait l'entendre
comme un système qui affirme la valeur de la personne humaine, visant à
l'épanouissement de celle-ci, et qui accorde une place fondamentale à la connaissance
et aux savoirs sur la base de la redécouverte de la culture gréco-latine .
Deux expressions sont concurremment employés pour désigner l'effort de résurrection
des écrits gréco-latins (leur traduction, leur imitation, leur adaptation, leur commentaire) :
studia humanitatis ou litterae humaniores. On pourrait traduire la première par « science
de l'esprit » [humanitas exprime l'idée que l'homme se fait de lui-même dans son plus
grand accomplissement intellectuel, moral, religieux…] et la seconde correspond aux «
humanités » d'hier, dans une synthèse harmonieuse de l'érudition et de la vertu : ces
sciences qui nous rendent « plus humains » sont précisément celles qui doivent nous
permettre de réaliser en nous l'accomplissement de ce modèle anthropologique.
L'Humanisme s'inscrit dans tous les champs qui touchent à l'être humain. Il façonne tout
d'abord une pédagogie nouvelle : puisqu'il s'agit de réaliser un modèle humain, il faut que
l'enfant soit formé d'une manière continue et progressive, de sa naissance à l'âge adulte,
et même au-delà, par un maître qualifié. Dans la Divine Comédie, le maître de Dante est
Virgile. Tout cela favorise l'édification d'une véritable culture scientifique par lesquels les
grands établissements d'enseignements humanistes finirent par se substituer à la plupart
des universités médiévales. À côté des trois langues anciennes, ils dispensèrent des
matières non seulement nouvelles par leur contenu, mais aussi par leur esprit.
Dans le domaine religieux - et la Divine Comédie en constitue un exemple illustre - une
interrogation s'est forgée : Si l'humanisme définit un mouvement de libération de l'homme
par la redécouverte des valeurs morales et intellectuelles encloses dans la littérature
gréco-latine et leur adaptation à des besoins nouveaux, ne se heurte-t-il pas à la
conception de l'homme, du monde et de Dieu telles que les grandes religions l'ont définie
antérieurement ? À lire Luther, surtout à partir de sa rupture avec Rome et de son conflit
doctrinal avec Erasme, ou les œuvres des théologiens scolastiques de Louvain, de
Cologne, de Paris ou de Tolède, qui accusaient les humanistes de paganisme, qui
répudiaient le grec comme la langue des schismatiques, et l'hébreu comme celle des
juifs, et à qui l'attachement à la lettre de la Tradition ou au ritualisme faisait perdre de vue
l'esprit de l'Evangile, on pourrait croire effectivement que l'amour de Platon et de Cicéron
est incompatible avec celui du Christ. En réalité, ce que les humanistes ont retenu de leur
pèlerinage aux sources de la pensée gréco-latine, c'est que la philosophie platonicienne
ou stoïcienne est une propédeutique à la « philosophie du Christ », c'est-à-dire un
enseignement préparatoire à un enseignement plus complet. Cela signifie que l'étude des
lettres et la fréquentation des grands auteurs du passé ont une finalité ethico-religieuse et
que le monde de la culture est un.
L'humanisme, en ce sens, est une culture du lien entre les choses, entre les domaines du
savoir. Pour cela, il investit l'intimité entière de l'homme pour le sortir de son état naturel
et en faire un homme qui produit de la civilisation. Cet aspect est visible à travers
l'exposé des débats dont rend compte le film de Jean-Jacques Annaud, Le Nom de la
Rose (qui se déroule à l'époque où Dante écrit sa Divine Comédie, en 1311). Outre
l'épisode de la rencontre entre les Franciscains et le Pape sur la controverse de la toge
du Christ, qui éclaire le contexte de la Réforme qui se profile, la scène dans laquelle
Guillaume de Baskerville dialogue avec le vieux moines aveugle sur le « rire » est
exemplaire. Pour le vieux moine, le rire déforme les traits du visage faisant ressembler
l'homme à un singe. Guillaume de Baskerville lui répond en citant Aristote :
« - Aristote, dans son traité sur la Poétique, parle de la Comédie comme un art noble et
en fait un instrument de vérité.
- Vous avez lu ce livre ?
- Non, il a été mis à l'index et détruit.
- Erreur : il n'a jamais été écrit ».
Cette opposition entre les personnages traduit bien cette relation complexe entre
l'humanisme et la religion. Mais elle traduit aussi la profondeur culturelle de l'humanisme
qui lui confère le statut d'une philosophie de vie (le thème et la forme du rire seront
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abondamment utilisés à travers la constitution d'un « gai savoir » si cher à Rabelais).
Dans la Divine Comédie, Dante s'inscrit à la fois dans le dogme catholique (par ses
cadres) mais il s'en départi également (classification des pêchés dans l'Enfer selon
typologie d'Aristote), créant un rapport à la foi complexe et novateur.
Enfin, l'Humanisme investit le terrain politique. Le pacifisme, l'esprit d'œcuménisme
(mouvement visant à l'union de toutes les Eglises chrétiennes en une seule) et parfois de
cosmopolitisme, l'amour du peuple et la volonté d'équilibre et d'harmonie entre les
pouvoirs sont des traits communs aux humanistes du XVe et XVIe siècles. Car cette «
république des Lettres » qu'ils ont fondée ne connaît pas de frontières politiques et
sociales ; et même lorsqu'ils sont au service d'un souverain (Thomas More / Henri VIII ;
Guillaume Budé / François Ier ; et même Erasme / Charles Quint), ils sont incapables de
faire passer les intérêts matériels ou temporels de la cause politique qu'ils servent avant
les intérêts moraux et permanents de l'humanité indivise qui est leur patrie. Les
humanistes sont volontiers réformateurs, comme on peut le voir dans l'Eloge de la folie
d'Erasme (1511), l'Utopie de Thomas More (1515-16), le Gargantua de Rabelais (1534) :
ils sont beaucoup plus rarement révolutionnaires car leur contestation ne va pas jusqu'à
la table rase. Le sens de l'histoire et de la continuité du destin de l'humanité leur fait
préférer une réforme intérieure à un renversement brutal des institutions sociales car ils
restent persuadés du triomphe nécessaire de l'esprit.
« Au milieu du chemin de notre vie
Je me retrouvai par une forêt obscure (…) »
Dante dans la forêt obscure, Gustave Doré, Illustration pour La Divine Comédie,
Chant I de L'Enfer, 1861.
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Document 3 : Plan détaillé.
I
LA DIVINE COMÉDIE, LA QUÊTE DE L'ÊTRE ET DE L'AUTRE
1 - L'Enfer comme périple de l'identité
Chant I - vers 1 à 6 : Énonciation universaliste : le « nous » et le « moi »
Nel mezzo del cammin di nostra vita
Mi ritrovai per una selva oscura
Ché la diritta via era smarrita.
Ahi quanto a dir qual era è cosa dura
Esta selva selvaggia e aspra e forte
Che nel pensier rinova la paura!
Au milieu du chemin de notre vie
Je me retrouvai par une forêt obscure
Car la voie droite était perdue.
Ah dire ce qu'elle était est chose dure
Cette forêt féroce et âpre et forte
Qui ranime la peur dans la pensée !
Chant VIII - vers 31 à 36 : Arriver à se désigner soi-même et à raconter son
histoire
Mentre noi corravam la morta agora
Dinanzi mi si fece un pien di fango,
e disse: “Chi sé tu che vieni anzi ora?”
e io a lui: “S'i' vegno, non rimango;
ma tu chi sé, che si se' fatto brutto?”
Rispuose: “Vedi che son un che piango”
Comme nous voguions en cette eau morte
Devant moi se dressa un être plein de fange
Disant : « Qui es-tu, toi qui t'en vient avant le temps ? ».
Et moi à lui : « Si je viens, je ne reste pas
Mais toi, qui es-tu, qui es si enlaidi ? »
Il me répondit : « Tu le vois, un qui pleure ».
2 - La réinvention du Purgatoire et la rencontre de la liberté
Chant I - vers 67 à 72 : La continuité du voyage et son objectif
Com'io l'ho tratto, saria lungo a dirti
de l'alto scende virtù che m'aiuta
conducerlo a vederti e a udirti.
Or ti paccia gradir la sua venuta:
libertà va cercando, ch'è si cara,
come sa chi per lei vita rifiuta.
Comment je l'ai tiré serait long à te dire
d'en haut descend une vertu qui m'aide
à le conduire où te voir et t'entendre.
Qu'il te plaise d'approuver sa venue
il cherche liberté, qui est si chère,
comme sait qui pour elle a refusé la vie.
Chant III - vers 118 à 123 : La liberté par la miséricorde divine
Poscia ch'io ebbi rotta la persona
di due punte mortali, io mmi rendei,
piangendo, a quei che volontier perdona.
Orribil furon li peccati miei;
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ma la bontà infinita ha si gran braccia,
che prende cio che si rivolge a lei.
Après que mon corps eut été percé
par deux coups mortels, je me confiai
en pleurs, à celui qui pardonne volontiers.
Horribles furent mes péchés ;
mais l'infinie bonté a de si grands bras
qu'elle y accueille ce qui s'adresse à elle.
Chant XVII - vers 127 à 139 : L'amour comme lieu et accomplissement
de la liberté
Ciascun confusamente un bene apprende
nel qual si queti l'animo, e disira ;
per che di giunger lui cascun contende.
Se lento amore a lui veder vi tira
o a lui acquistar, questa cornice,
dopo giusto penter, ve ne martira.
Altro ben è che non fa l'uom felice;
non è felicità, non è la buona
essenza, d'ogne ben frutto e radice.
L'amor ch'ad esso troppo s'abbandona,
di sovr' a noi si piange per tre cerchi;
ma come tripartito si ragiona,
tacciolo, accio che tu per te ne cerchi.
Chacun apprend confusément un bien
où l'âme se repose, et le désire ;
et chacun s'efforce de l'atteindre.
Si un lent amour vous pousse à le voir,
Où à l'acquérir, cette corniche,
après un juste repentir, vous en punit.
Il est un autre bien qui ne rend pas heureux ;
ce n'est pas le bonheur, ni la bonne essence,
qui est fruit et racine de tout bien.
L'amour qui trop s'y abandonne
se pleure dans trois cercles, au-dessus de nous ;
mais comment il se divise en trois parties,
je le tairai, afin que tu le cherches.
Chant XXVII - vers 1 à 6 : La douceur du Purgatoire et l'éclat de la libre lumière
Si come quando i primi raggi vibra
là dove i suo fattor lo sangue sparse,
cadendo Ibero sotto l'altra Libra,
e l'onde in Gange da nona rïarse,
si stava il sole; onde 'l giorno sen giva,
come l'angel di Dio lieto ci apparse.
Comme quand il darde ses premiers rayons
là où coula le sang de son créateur,
au moment où l'Ebre tombe sous la balance,
et la neuvième heure chauffe l'eau du Gange,
tel était le soleil ; le jour s'en allait donc,
lorsque l'ange de Dieu, joyeux, nous apparut.
3 - L'exploration du Paradis pour atteindre sa vérité
Chant XVIII - vers 4 à 12 : L'intercession de l'amour et de l'expérience divine
(…) e quella donna ch'a Dio mi menava
disse: “Muta pensier; pensa ch'i sono
presso a colui ch'ogne torto disggrava”
Io mi rivolsi a l'amoroso suono
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del mio conforto; e qual io allor vidi
ne li occhi santi amor, qui l'abbandono;
non perch'io pur del mio parlar diffidi,
ma per la mente che non puo redire
sovra sé tanto, s'altri non la guidi.
(...) et la dame qui m'amenait à Dieu
dit : « Change de pensée ; pense que je suis
auprès de celui qui allège tous les torts »
Je me tournai vers le son amoureux
de mon réconfort : et l'amour que je vis
alors dans les yeux saints, je renonce à le dire ;
non que je me défie de ma parole,
mais parce que la mémoire ne peut se retourner
aussi loin sur elle-même, si autrui ne la guide.
Chant XXXIII - vers 137 à 145 : Une vérité restituée au mouvement
de la création
Veder voleva come si convenne
L'imago al cerchio e come si s'indova ;
ma non eran da cio le proprie penne:
se non che la mia mente fu percossa
da un fulgore in che sua voglia venne.
A l'altra fantasia qui manco possa;
ma già volgeva il mio disio e 'l velle,
si come rota ch'igualmente è mossa,
l'amor che move il sole e l'altre stelle.
Je voulais voir comment se joint
L'image au cercle, comment elle s'y noue ;
Mais pour ce vol mon aile était trop faible :
Sinon qu'alors mon esprit fut frappé
Par un éclair qui vint à son désir.
Ici la haute fantaisie perdit sa puissance ;
Mais déjà il tournait mon désir et vouloir
Tout comme roue également poussée,
L'amour qui meut le soleil et les autres étoiles.
II
LA DIVINE COMÉDIE ET LE PROJET DE LA CONNAISSANCE
1 - Une encyclopédie des savoirs disponibles
- Virgile et la culture gréco-latine
- L'expérience de l'art et du livre
- Les allusions aux mythologies et à l'actualité
2 - Un monument écrit dans une matière friable
- Le choix de la « Comédie » contre la tradition de la « Tragédie »
- L'enjeu de la langue : l'Italien contre le Latin
- L'alliage des héritages, des perceptions et des images
3 - Une conscience au service de la science de l'éternel
- Les limites de la connaissance pure
- Le divin comme référence de toute connaissance
- La connaissance de sa liberté et de sa vérité par le voyage et la foi
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III
LA DIMENSION UNIVERSELLE DE LA DIVINE COMÉDIE
1 - Une œuvre chargée de symboles
- Le chiffre 3
- La lumière de la Divine Comédie
- Un univers codé : faune, flore, personnages…
2 - Réinterpréter et repenser le monde
- Un monde soumis à l'interrogation (Et si le salut n'existait pas ?...)
- Une vision remodelée de l'Histoire
- Un récit réaliste pour une compréhension de l'homme par ses actes
3 - « Aider les hommes à se tirer de l'état malheureux où ils sont »
- L'écoute de l'âme humaine : les sentiments et le portrait d'une époque
- Combattre les maux d'une époque : une œuvre engagée
- Les lectures de la Divine Comédie en temps de crise
Dante et Béatrice devant l'Empyrée, Gustave Doré, Illustration pour La Divine Comédie,
Chant XXXI du Paradis, 1861.
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POUR APPROFONDIR CE SUJET, NOUS VOUS CONSEILLONS
- Les cours et conférences sans nom d’auteurs sont d’Éric Lowen -
Quelques livres sur DANTE
- Dante, R.W.B. Lewis, Québec, Fides, 2002
- Dante : da Firenze all'al di là, E.R. Curtius, Firenze, 2001
- Dante, Malato E. Roma, Salerno, 1999
- Écrits sur Dante, E. Auerbach, Macula, 1998
- Dante : prophète d'un monde uni, P.A. Ladame, J. Grancher, 1996
- Dante Alighieri : la conscience poétique de l'œuvre, P. Pejovic, Édition du Titre, 1996
- Dante, M. Marietti, PUF, “Que Sais-Je?”, 1995
- La tragedia intelletuale di Dante, A. Gagliardi , Catanzaro, 1994
- Dante e la cultura medievale, B. Nardi, Bari, Laterza, 1990
- Vita di Dante, Giorgio Petrocchi, Bari, Leterza, 1983
- Dante, L. Portier, Desclée De Brouwer, 1971
- Dante, P. Renucci, Hatier, 1958
Quelques livres sur LA DIVINE COMÉDIE
- Lectures de Dante, Jean-Pierre Ferrini, Hermann, 2006
- Une lecture de Dante, Catherine Guimbard, Presse Universitaire de la Sorbonne, 2004
- La philosophie de la lumière chez Dante, Didier Ottaviani, Honoré Champion Éditeur, 2004
- La Divine Comédie, Valeria CapellI, Ad Solem, 2003
- Dante, la cité infernale, Marina Marietti, Chroniques italiennes, 2003
- Guida alla Divina Commedia, G. Inglese, Carocci, 2002
- Pour Dante : Dante et l'Apocalypse, Bruno Pinchard, Christian Trottmann, Lectures humanistes de Dante,
Honoré Champion Éditeur, 2001
- Il Dizionario della Commedia, R. Merlante, Bologna, Zanichelli, 2000
- La Divine Comédie, Philippe Sollers, Benoît Chantre, De Brouwer, 2000
- Il Paradiso di Dante, V. Sermonti, Milano, Rizzoli, 1994
- Mythe et symbole dans la Divine Comédie, M. Dozon, Firenze, Olschki, 1991
- Guida alla Divina Commedia, A. Marchese, Torino, SEI, 1990
- Strutture et modulazioni nella Divina Commedia, Aldo Vallone, Firenze, Olschki, 1990
- Il Purgatorio di Dante, V. Sermonti, Milano, Rizzoli, 1990
- La poesia della Divina Commedia, Charles Singleton, Bologne, Il Mutino, 1989
- L'Inferno di Dante, V. Sermonti, Milano, Rizzoli, 1988
- Le Songe d'Enfer, Genève De Houdenc, Slatkine reprints, 1974
- Dante. Storia della Commedia, M. Appollonio, Milano, F. Vallardi, 1964
- Letture dantesche ; Inferno, Purgatorio, Paradiso, G. Getto, Firenze, Sansoni, 1955-1961
- Dante, Minerve et Apollon. Les Images de la Divine Comédie, Yvonne Batard, Les Belles Lettres, 1952
Association ALDÉRAN © - Conférence 1000-210: “Dante et lʼHumanisme” - 07/12/2007 - page 15
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