Actes du Colloque organisé le 24 novembre 2006 par les Groupes

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« L’ESTHETIQUE : COMMENT EVITER LES DERIVES ? »
Vendredi 24 novembre 2006, les Groupes parlementaires MR de la Chambre et du Sénat
organisaient un colloque ayant pour thème « L’Esthétique : comment éviter les dérives ».
L’objectif de ce colloque était de rencontrer les différents acteurs concernés par la chirurgie
et la médecine esthétique afin de nous informer sur ces disciplines médicales souvent
surmédiatisées. Nous souhaitions également sensibiliser le grand public sur les dangers qui
peuvent être liés au domaine de l’Esthétique. En effet, nous pensons qu’il est essentiel de
protéger le patient et donc d’encadrer au mieux le secteur esthétique. Dès lors, nous espérons
que des initiatives parlementaires pourront germer de cette matinée de réflexion.
De nombreux membres du secteur médical, des représentants d’associations mais aussi des
citoyens ont participé à cet événement. Le panel des intervenants était constitué de
chirurgiens plasticiens, d’un médecin esthétique et de dermatologues. Après les exposés de
ces derniers, nous avons pu assister à un débat très enrichissant.
Le présent document rassemble les actes de ce colloque, nous vous en souhaitons bonne
lecture.
Daniel Bacquelaine
Président du Groupe MR
Chambre
Christine Defraigne
Présidente du Groupe MR
Sénat
2
Dominique Tilmans
Députée
3
I. ALLOCUTION DE BIENVENUE ET INTRODUCTION
Madame Dominique Tilmans, députée
Mesdames, Messieurs,
Votre présence ce matin démontre combien les dérives de la chirurgie esthétique sont au cœur
du débat, de vos préoccupations. Nous sommes heureuses, Christine Defraigne et moi-même,
de vous accueillir ici au Parlement.
L'évolution des connaissances, de la médecine, des techniques, des implants, du matériel, de
l'hygiène, des conditions de sécurité permet à l'homme, la femme, de réaliser ce dont il a
toujours rêvé, modifier son apparence.
Depuis longtemps déjà, on corrige les oreilles, un nez… On modifie le volume des seins, de la
taille des hanches, des cuisses… On gomme les rides d'un visage ou d’un corps que le temps a
abîmé. Et c'est tant mieux, si la médecine nous permet aujourd'hui à la femme, à l’homme,
d'être mieux dans notre peau.
Mais ce n'est pas tant l'ampleur du phénomène, devenu un véritable produit de consommation,
véritable business qui nous interpelle ce matin, mais surtout, l'absence de législation, de
normes, d'encadrement qui nous amène à réfléchir, à réagir et à organiser le colloque
d’aujourd’hui.
Pas de statistiques fiables mais des estimations :
Entre 20.000 et 30.000 liposuccions seraient pratiquées chaque année en Belgique et 10.000
femmes auraient recours aux implants mammaires.
Ce phénomène ne touche pas uniquement les adultes, mais aussi les ados. Selon une enquête
menée par le magazine britannique « Sneak », si 13% des adolescents se disent satisfaits de
leur corps. A contrario, 87% sont insatisfaits et en 2003 : 331.886 ados américains auraient eu
recours à la chirurgie esthétique.
Je ne m'attarderai pas sur les dérives du tourisme esthétique pour lequel de plus en plus
d’européens se rendent en Tunisie ou au Maroc pour se faire opérer.
Ni sur la chirurgie esthétique qui va jusqu'à modifier les organes génitaux pour s'identifier aux
derniers canons des médias pornographiques.
Je ne m'attarderai pas non plus sur les différentes causes de l'engouement pour la chirurgie
esthétique qu'elles soient notre mode de vie, nos standards, la surmédiatisation par la presse
écrite et télévisée, les émissions de voyeurisme où l'on peut gagner deux ou trois interventions
esthétiques lors d'un concours!
Je m'en tiendrai aux objectifs de notre colloque en me réjouissant de la qualité du panel des
intervenants qui ont accepté avec nous (Chambre et Sénat) de consacrer cette matinée à
analyser les dérives de la chirurgie esthétique, afin de réfléchir aux avancées législatives bien
indispensables.
4
Les compétences médicales sont au cœur du débat.
On estime entre 450 et 600 médecins qui pratiquent aujourd'hui la médecine esthétique.
Mais :
-
Seuls 200 chirurgiens plasticiens sont reconnus par la Société Royale belge de
Chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique ;
-
Sans oublier les spécialistes : dermatologues, ORL, ophtalmologues…
praticiens qui réalisent également des actes esthétiques ;
-
Mais également les médecins esthétiques qui comptent 60 membres et qu'une
charte éthique rassemble ;
-
Ensuite, il y a les autres non reconnus, peu ou pas expérimentés, peu ou pas
formés, peu ou mal équipés et souvent mal encadrés qui procèdent à des actes
qui échappent à des compétences réelles et légales et qui sont la cause de bon
nombre de dérives et de dangers. Dans ce cas, la sécurité des patients n'est plus
assurée.
Dès lors, beaucoup de questions se posent :
Que faire pour assurer les conditions maximales de sécurité aux patients?
Quelles sont les limites de la chirurgie esthétique? Quels sont les actes qui relèvent de cette
discipline?
Les médecins spécialistes doivent-ils suivre une formation complémentaire? Quels actes
peuvent-ils réaliser?
Quel statut réserver aux médecins esthétiques? Sont-ils complémentaires aux chirurgiens
esthétiques?
Ne devrait-on pas créer une spécialisation en médecine esthétique dans nos universités?
Ne devrait-on pas mettre en place une commission d'agréation?
Quant à la liposuccion réalisée aujourd'hui par de nombreux praticiens, devons-nous la
réserver aux seuls chirurgiens plasticiens?
Voilà une batterie de questions sur lesquelles nous souhaiterions vous entendre.
Mais il y en a d'autres, notamment celle relative à la publicité des praticiens esthétiques.
En 2005, j'ai interrogé le Ministre de la Santé sur la dérive mercantile de cette discipline en la
faisant suivre d'une proposition de loi où je propose d'encadrer la publicité relative à la
chirurgie esthétique. En effet, toute publicité devra mentionner dorénavant différents éléments
pour être autorisée dont : le prix, les complications et effets secondaires possibles, la
qualification du praticien et les résultats qui peuvent être attendus.
Notre texte prévoit d'ailleurs des sanctions pénales en cas de non-respect de cette obligation.
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Ici aussi je lance le débat, faut-il encadrer la publicité ou l'interdire comme en France, mais
alors avec quel contrôle et par qui?
N'est-il pas préférable de proposer une publicité bien encadrée qui répondra aux attentes et à
la sécurité des patients?
Autre sujet de débat qui fait suite à une seconde question que j'ai posée en ce début d'année au
Ministre de la Santé et sur laquelle travaille également Christine Defraigne au Sénat.
Elle est relative à la « prolifération » de centres privés de médecine/chirurgie esthétique, non
hospitaliers aujourd'hui hors contrôle.
En effet, sommes-nous conscients qu’il est possible - hypothèse extrême – qu’un médecin
sans formation particulière ouvre un centre privé de chirurgie esthétique grâce à des capitaux
étrangers dans un but essentiellement commercial et ce, sans contrôle en termes
d’encadrement, d’établissement, de formation et d’hygiène ?
Face à la multiplication de ces « cliniques business », il est urgent de réfléchir ensemble à une
législation adaptée qui garantisse la sécurité des patients.
Comme vous pouvez le constater, nos questions sont nombreuses mais je voudrais remercier
la Chambre des représentants et en particulier son Président, Monsieur Herman De Croo ainsi
que mon chef de Groupe, Monsieur Daniel Bacquelaine, d’avoir permis l’organisation de cet
évènement.
En outre, je me réjouis de l’association des deux groupes parlementaires MR de la Chambre et
du Sénat réunis autour de cette problématique.
Notre matinée va se dérouler en deux temps :
Dans un premier temps, nous allons entendre le point de vue des chirurgiens plasticiens.
Dans un deuxième temps, après une pause-café, le point de vue des médecins esthétiques et
des dermatologues que Christine Defraigne introduira.
Laissez-moi vous présenter les trois premiers intervenants.
Le Docteur Denis Goldschmidt, chirurgien plasticien et chef de service de chirurgie
plastique au CHIREC à Bruxelles. Il est, par ailleurs, « President Elect » de la Société
royale belge de chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique.
Le Professeur Albert de Mey qui est professeur de chirurgie plastique à l’ULB et ancien
Président de la Société royale belge de chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique.
Le Docteur Jean-Luc Nizet qui est chirurgien plasticien à Liège et Président de la
Commission d’Agrément francophone.
Je vous souhaite d'ores et déjà un excellent colloque, qui je l’espère, va nous permettre grâce à
votre expertise et vos conseils d’aboutir à une législation efficace et indispensable afin de
combler le vide juridique qui laisse aujourd’hui la porte ouverte à toutes les dérives.
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II. LA CHIRURGIE ESTHETIQUE
Le point de vue des chirurgiens plasticiens par :
Docteur Denis Goldschmidt, Professeur Albert de Mey et Docteur Jean-Luc Nizet
1) INTRODUCTION
Docteur Denis Goldschmidt
Mesdames, Messieurs les Sénateurs, Mesdames, Messieurs les Députés. Je voudrais au nom
de mes collègues vous remercier pour l’organisation de ce colloque. A ma connaissance, il est
le premier du genre concernant notre discipline.
Le sujet du colloque que nous allons aborder ce matin est complexe car il concerne plusieurs
activités humaines fondamentales : la médecine, la sociologie, l’anthropologie, la
communication, le droit, etc.
On pourrait se demander de prime abord quels rapports peuvent exister entre la médecine,
science qui soigne les maladies et les infirmités, et l’esthétique, définie comme la partie de la
philosophie qui a pour objet l’essence et la perception du beau.
L’Organisation Mondiale de la Santé, dans sa charte constitutive, définit : « La santé est un
état de bien être total physique, social et mental de la personne. Ce n'est pas la simple
absence de maladie ou d'infirmité ».
La souffrance psychologique et sociale consécutive à une disgrâce physique « esthétique »
entre donc bel et bien dans le champ de la santé au sens large. Modifier l’aspect physique de
quelqu’un par un acte invasif relève ainsi de la médecine.
Les médecins, et tout particulièrement les chirurgiens se sont intéressés à la transformation et
l’amélioration esthétique de leurs patients dès le début du 20ème siècle avec l’avènement des
techniques d’anesthésie et d’asepsie.
Déclarés marginaux voire frivoles à l’origine (en tout cas certainement dangereux), les actes
de médecine et de chirurgie esthétiques sont progressivement entrés dans les mœurs des
populations occidentales pour constituer actuellement un véritable phénomène de société, et
ce pour plusieurs raisons :
- d’abord, les progrès de la médecine dans tous les domaines (techniques,
technologiques, pharmacologiques….) permettent aujourd’hui de « traiter » un
éventail de « demandes esthétiques » de manière efficace dans de bonnes conditions
de sécurité. Les actes esthétiques, longtemps réservés à une élite fortunée et informée
concernent maintenant toutes les couches sociales ;
- ensuite, les caractéristiques sociologiques des populations occidentales se sont
transformées avec l’apparition au cours de la deuxième moitié du 20ème siècle d’une
certaine revendication qualitative au bien être, même esthétique. Ce que le politologue
américain Ronald Iglehart appelle les valeurs post-matérialistes ;
- enfin, et peut-être surtout, la mondialisation de la publicité et l’explosion des
techniques de communication exercent une pression continue sur la population par
medias interposés. La mode, le cinéma, la télévision s’efforcent de donner une image
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d’acteurs socioprofessionnels performants toujours beaux et jeunes auxquels on se doit
de ressembler. L’avènement d’Internet et des nouvelles technologies démultiplient
encore ce phénomène.
Qu’on le veuille ou pas, d’un fait socioculturel, l’esthétique en médecine est progressivement
devenu un problème de santé publique, certains diront en plus, un véritable marché !
Or, les actes prestés en médecine ou en chirurgie esthétique restent des actes médicaux avec
leurs indications, leurs contre-indications, leurs complications voire catastrophes possibles.
Ces actes sont loin d’être anodins et peuvent dans certains cas avoir des conséquences
importantes.
¾ Quelques définitions
Avant de continuer, je voudrais brièvement formuler quelques définitions :
-
La chirurgie esthétique est une des deux branches de la chirurgie plastique, la
deuxième étant la chirurgie reconstructrice ou réparatrice.
La chirurgie reconstructrice concerne le traitement chirurgical d’anomalies ou de
malformations congénitales (présentes à la naissance) ou acquises à la suite d’une
maladie ou d’un traumatisme par exemple.
La chirurgie esthétique, s’intéresse, elle, à la correction de déformations, variations de
la normalité. Contrairement à la chirurgie reconstructrice, les actes posés en chirurgie
esthétique ne sont pas pris en charge par la sécurité sociale.
-
La médecine esthétique, comme la chirurgie esthétique, s’intéresse à la correction de
déformations esthétiques, mais par tous les procédés médicaux non chirurgicaux.
Si la chirurgie esthétique est parfaitement codifiée en Belgique en terme de pré requis, de
formation et de reconnaissance officielle, il n’en est pas de même pour la médecine
esthétique. Le Docteur Hébrant qui représente ici la Société Belge de Médecine Esthétique se
bat pour l’organisation d’une formation dans ce domaine assortie d’une reconnaissance
officielle de compétence et je pense qu’il a tout à fait raison.
Malgré l’existence de la chirurgie plastique, discipline médicale reconnue, la pratique des
interventions chirurgicales esthétiques n’est absolument pas régulée. Tout le monde, ou
presque, peut théoriquement faire n’importe quoi, du moins s’il a son diplôme de Docteur en
Médecine. Le seul frein du praticien étant sa responsabilité professionnelle devant son patient,
si ce n’est, bien entendu, son éthique personnelle.
¾ La situation actuelle nécessite-elle une législation ?
Depuis plusieurs années les organes officiels regroupant les plasticiens belges - la Société
Royale Belge de Chirurgie Plastique, Reconstructrice et Esthétique (RBSPS) et l’Association
Professionnelle Belge des Chirurgiens Plasticiens (GBS-VBS) - sont alertés par la
multiplication de comportement déviant de certains praticiens, y compris parfois de
chirurgiens plasticiens reconnus ou de certaines institutions regroupant des praticiens,
probablement plus attirés par les sirènes d’un marché au potentiel juteux que par la pratique
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d’un art médical. Cette mercantilisation de l’esthétique médicale se développe d’autant plus
qu’il n’existe pas ou peu de garde-fou législatif. Les comportements déviants sont multiples et
concernent la compétence des acteurs qui pratiquent certaines prestations, la publicité qu’ils
leur donnent et les conditions dans lesquelles ils les réalisent.
¾ Charte éthique
En réaction à ces pratiques déviantes, la Société Royale Belge de Chirurgie Plastique a édicté
une « charte éthique » à l’occasion de son 50ème anniversaire par laquelle ses membres
s’engagent :
•
•
•
•
•
•
A exercer leur art dans un respect rigoureux des règles d'éthique telles que
promulguées dans le serment d'Hippocrate ;
A parfaire constamment leurs connaissances pour en faire bénéficier leurs patients ;
A promouvoir des soins de qualité dans le respect de la personne humaine ;
A informer clairement les patients des bénéfices mais aussi des limites et des risques
des opérations envisagées ;
A ne pas faire de publicité personnelle ;
A protéger les patients contre des traitements inadéquats pratiqués par des médecins
incompétents ou sans éthique.
Nous pensons malheureusement que ces bonnes intentions ne sont pas suffisantes et qu’un
encadrement législatif se révèle être nécessaire dans l’intérêt général.
Par ailleurs, et c’est un paramètre capital, plusieurs pays européens confrontés aux mêmes
problèmes ont légiféré récemment dans le domaine ou sont en voie de le faire. La loi et les
décrets qui encadrent aujourd’hui strictement la pratique de la chirurgie esthétique en France
ne peuvent pas nous laisser indifférent vu les flux aisés de praticiens entre les deux pays.
Cet ensemble législatif concerne en gros trois points fondamentaux :
- la compétence pour la réalisation des actes de chirurgie esthétique ;
- la publicité afférente à ces actes ou aux institutions qui les pratiquent ;
- l’accréditation des installations où l’on pratique ces actes.
Nous allons donc vous commenter tour à tour, le Professeur de Mey, le Docteur Nizet et moimême la situation actuelle de la chirurgie plastique en Belgique concernant ces trois points.
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2) LA COMPETENCE POUR LA REALISATION DES ACTES DE CHIRURGIE
ESTHETIQUE
Professeur Albert de Mey
Madame le Sénateur, Madame la députée, chers confrères,
Je suis très heureux d’avoir été invité à participer à ce colloque qui fait suite à une conférence
de presse organisée l’année dernière, afin de mettre en garde le public contre les dérives de
la Médecine et de la Chirurgie Esthétique.
Il est réconfortant de voir que nous avons, maintenant, l’aide de nos autorités, et j’espère que
nous pourrons, dès lors, améliorer rapidement la situation.
Après l’introduction du Docteur D. Goldschmidt, je voudrais revenir sur un point important
qui est la base de toute pratique médicale, c’est-à-dire la compétence.
En ce qui concerne la pratique des actes de Chirurgie Esthétique il existe en Belgique un titre
reconnu de Chirurgie Plastique, Reconstructive et Esthétique correspondant à des critères de
reconnaissance comme pour toutes les autres spécialités chirurgicales, l’Orthopédie, l’ORL,
l’Urologie.
¾ Comment peut-on évaluer la compétence d'un médecin?
La compétence commence par l’apprentissage, théorique et pratique, d’autant plus si il s’agit
de techniques chirurgicales, mais aussi par une pratique continue.
En effet, les connaissances et les techniques médicales changent rapidement, et ces
changements doivent être suivis pour garder une « bonne pratique » par la mise à jour des
connaissances. Celle-ci est assurée par la participation à des GLEM (groupes locaux
d’évaluation médicale), à des Congrès, des cours ou des conférences, qui permettent aux
médecins de remettre leurs connaissances à jour.
¾ Les critères de reconnaissance
Ces critères sont bien codifiés et très stricts. Il faut un plan de stage, agréé par le Ministère, 6
années de formation plein temps au minimum, et en fin de formation l’agrément est accordé
par le Ministère Fédéral de la Santé Publique après avis des commissions compétentes.
¾ Les critères de formation
La formation en Chirurgie plastique consiste d'abord en une formation de Chirurgie Générale
de minimum deux années au cours desquelles il y a, outre l’apprentissage de la pratique, des
séances de formation théorique, aux techniques chirurgicales ainsi qu’à l’anatomie.
Cette pratique de base est très importante et indispensable pour maîtriser toute pratique
chirurgicale mais fait évidement cruellement défaut aux praticiens qui apprendraient une
technique chirurgicale par une formation de courte durée et donc tronquée.
La formation de Chirurgie Plastique proprement dite dure 4 années au cours desquelles la
fréquentation plein temps d’un service reconnu est requise.
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A nouveau, outre l’apprentissage pratique en salle d’opération et en consultation, des
cours théoriques sont organisés par le Collegium Chirurgicum Plasticum qui rassemble
l’ensemble des Maîtres de Stage en Chirurgie Plastique belges.
A côté des cours du Collegium (4 par an), deux congrès sont organisés par la
Société Royale Belge de Chirurgie Plastique Reconstructive et esthétique.
Ce point est extrêmement
important et différencie des chirurgiens
reconnus
de ceux
qui pratiquent des actes esthétiques après avoir suivi quelques séminaires de week-end.
De plus, cette formation est complétée par des prestations de garde qui obligent les assistants
en formation à faire face à des situations d’urgence et à apprendre le « geste qui sauve ». Cet
aspect de la formation est indispensable quel que soit le type de chirurgie que l’on pratique.
Même la Chirurgie Esthétique peut, comme toute forme de Chirurgie, amener des
complications.
Enfin, il y a le contrôle des connaissances. Ceci est réalisé par un examen de Chirurgie
Générale en fin de deuxième année. Puis, au cours des années de Chirurgie Plastique, un
examen annuel est organisé par le Collegium. Après chacune de ces épreuves, des remarques
éventuelles sont formulées aux candidats afin d’améliorer les points faibles qui auraient pu
être observés. En cas de déficiences importantes, une prolongation de formation peut être
imposée ou même un arrêt de formation en cas de problèmes graves.
Toutes ces données seront reprises dans le carnet de stage avec les évaluations des Maîtres de
Stage. L’ensemble de ces données permettra à la Commission Ministérielle d’évaluer les
candidats. Ce ne sera que si les critères, très stricts, sont satisfaisants concernant les gardes,
les consultations et les activités chirurgicales, que le candidat pourra être autorisé à pratiquer
la Chirurgie Plastique de façon indépendante.
¾ Pourquoi ce long apprentissage est-il indispensable ?
Les patients qui nous consultent pour une intervention esthétique le font pour améliorer
leur apparence sans indication médicale. Dès lors, il est indispensable de cerner les
espérances du patient et voir quelle technique, chirurgicale ou non, est la plus indiquée pour
le satisfaire.
En effet, il faut que la déformation dont se plaint le patient puisse être objectivée et
techniquement corrigible, sans laisser de séquelles plus importante que la déformation de
départ. Il faut donc maîtriser plusieurs techniques afin de pouvoir en choisir la meilleure.
Une fois que l’indication opératoire est posée et la technique choisie, il faut ensuite pouvoir la
réaliser avec un risque minimum de complication. Un exemple classique est le problème des
obèses qui consultent en souhaitant une liposuccion. L’obésité n’est en soi pas une bonne
indication de liposuccion, sauf dans des cas très particuliers, car très souvent, après
l’intervention, la peau présentera une laxité ou des ondulations qui seront plus disgracieuses
que la déformation de départ. Pour corriger ces déformations et enlever les excès cutanés
résiduels, une autre intervention chirurgicale sera souvent nécessaire, avec la présence de
cicatrices importantes.
Enfin, après une intervention esthétique, il faut pouvoir assurer le suivi post-opératoire chez
des patientes souvent exigeantes, et qui tolèrent moins, que les patientes opérées pour raison
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médicale, la moindre complication ou délai de cicatrisation. De plus, en cas de survenue d’une
complication, il faut pouvoir y faire face techniquement.
¾
Qu’en est-il des ratages ?
Il s’agit, bien sûr, d’un problème extrêmement important et très médiatisé.
Cependant, une distinction importante doit être faite. En effet, la patiente peut se trouver
devant deux situations :
La 1ère est une situation, heureusement peu fréquente, qui est celle devant laquelle on se
trouve après survenue d’un problème tel qu’une complication opératoire ou un défaut de
cicatrisation. Il y a là un problème objectif que l’on peut reprocher, et éventuellement
corriger.
La 2ème situation, est celle d’une patiente mécontente pour des raisons subjectives, c’est-à-dire
que le résultat de leur opération, réussie techniquement, ne correspond pas à ses attentes, et
dès lors pour elle l’opération est ratée. Cette situation est hélas, la cause de « ratage » la plus
fréquente. On revient, alors, au problème de l’indication et du contact avec la patiente en
consultation.
Ces patientes vont ensuite souvent voir plusieurs médecins en espérant qu’un de ceux-ci
conviendra, du fait que le résultat est insatisfaisant et peut donc être corrigé. Une indication de
correction, dans ces cas, doit être faite avec la plus grande prudence, car il faut cerner ce que
le patient attend de vous ou de l’intervention que vous comptez réaliser chez lui.
Le contexte psychologique est donc extrêmement important. Le plus difficile est de savoir
écouter les patients, et surtout ne pas leur imposer votre vision des choses. Par ailleurs, il est
évident que pour toute opération de Chirurgie Esthétique, il ne faut pas oublier d’interroger le
patient, non seulement pour le problème pour lequel il vous consulte, mais également sur des
pathologies associées et les médicaments qui pourraient avoir une influence sur la
cicatrisation ou les risques d’hémorragies. Il faut, bien sûr, également tenir compte de leurs
antécédents personnels, cardiaques, pulmonaires, etc.
Enfin, et ceci est très important pour que le patient puisse se faire une idée exacte de ce qui
l’attend, il faut lui parler des aléas de l’opération : des cicatrices, de la position de celle-ci, des
douleurs post-opératoires, de l’immobilisation éventuelle. Beaucoup de plaintes de patients
viennent de la non information. Les patients ne fuiront pas devant l’énoncé de complications
mais se rendront compte de l’importance du geste qu’ils vont faire en acceptant une
intervention esthétique. De plus, si une de ces complications survient, ils en auront été
informés et pourront donc psychologiquement mieux y faire face.
Un corollaire à cette information est qu’il faut laisser aux patients le temps de la réflexion
entre la consultation et l’intervention chirurgicale, ce qui permettra aux patients de
s’informer, et en cas de doute de demander un second avis. Cette réflexion est possible vu
qu’aucune de ces interventions n'est urgente.
En conclusion, une bonne pratique de Chirurgie Esthétique vient de bonnes indications
opératoires et d’une technique correcte. Ceci ne peut s’obtenir qu’après avoir eu une
formation complète, avec l’exemple des aînés et la confrontation à des problèmes difficiles, à
des complications et à des patients insatisfaits.
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3) LA PUBLICITE
Docteur Denis Goldschmidt
La publicité directe ou indirecte en médecine à quelque chose de choquant. Tout le monde se
révolterait devant une affiche qui proclamerait par exemple « pour toute appendicectomie, le
Dr XX ou l’institution YY offre un enlèvement des dents de sagesse à demi tarif ; et si vous
appelez maintenant, vous recevrez, en plus, une radiothérapie mammaire gratuite ». Et
pourtant… quelques exemples suffiront pour se rendre compte que dans le domaine de
l’esthétique médicale on n’est pas loin de la caricature.
¾ Publicité informative et publicité de rabattage
Le code belge de déontologie médicale dans son chapitre III, modifié le 21 septembre 2002,
fixe des limites plutôt strictes dans la manière qu’ont les médecins de porter leur activité
médicale à la connaissance du public.
Il y est spécifiquement déclaré :
- « L'information donnée doit être conforme à la réalité, objective, pertinente,
vérifiable, discrète et claire. Elle ne peut en aucun cas être trompeuse. Elle ne peut
être comparative. (…)
- Le rabattage de patients est interdit (…)
- La formulation et la présentation de la publicité ainsi que les méthodes et techniques y
afférentes, en ce compris les sites Internet, plaques nominatives, en-têtes et mentions
dans des annuaires, doivent être conformes aux dispositions des articles ci
précédents »
Il existe donc une différence entre « publicité informative » (publiciteit en néerlandais), tout à
fait tolérée et souhaitable et « publicité de rabattage ou racoleuse » (reclame en néerlandais),
proscrite par la déontologie.
Or, force est de constater que ces dispositions déontologiques sont loin d’être suivies dans le
domaine de l’esthétique médicale. On assiste effectivement avec impuissance à une explosion
des techniques de « rabattage » de « clients » (plutôt que de « patients ») : particulièrement
dans la presse écrite, mais également depuis quelques années par le truchement d’Internet.
Combien de praticiens ou « instituts esthétiques » n’ont pas leur site web alléchant ventant
leurs mérites personnels et ceux de leurs activités avec des photos « avant-après » (vraies ou
fausses) leurs prix, les « promotions du mois » etc.
¾ Quelques exemples
Voici un exemple : j’ai effacé ce qui permettait d’identifier une clinique esthétique en
Belgique. Vous pouvez voir les mentions « consultation gratuite » et « des chirurgiens
esthétiques qualifiés dont la compétence est reconnue ». Il suffit de téléphoner au numéro que
vous voyez pour demander le nom de ces chirurgiens esthétiques qualifiés « dont la
compétence est reconnue ». Ils sont parfaitement inconnus au bataillon, je ne suis même pas
sûr qu’ils soient repris au tableau de l’Ordre des Médecins en Belgique.
Vous connaissez le moteur de recherche google et vous vous amusez à mettre « chirurgie
esthétique ». Vous voyez apparaître dans « liens commerciaux » deux bandeaux « chirurgie
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esthétique » : à nouveau « des chirurgiens esthétiques qualifiés dont la compétence est
reconnue, interventions de haute qualité, tarifs intéressants » avec évidemment les sites web
de ces cliniques, pignons sur rue en Belgique. Et il n’y a aucun mystère, il est bien marqué
« liens commerciaux ».
Que dire de cette clinique qui offre, promotion du mois, une augmentation mammaire à demi
prix. Pourquoi ? Parce que c’est son anniversaire, « offre spéciale d’anniversaire », vous avez
votre augmentation mammaire à demi prix !! Que dire de toutes ces photos d’interventions
esthétiques « avant-après » que l’on voit fleurir et multiplier sur Internet, pratique clairement
interdite par l’Ordre des Médecins.
Que dire aussi de ces émissions qui offrent aux candidates d’un jeu téléréalité un
« relooking » incluant des interventions chirurgicales esthétiques. Les chirurgiens y
participant devenant des « vedettes » de la télévision.
Que dire encore de ces publicités pour « safari esthétique » dans des pays tiers « low cost ».
On est loin de l’information discrète et vérifiable. Tout se passe comme si la médecine et la
chirurgie esthétique avaient quitté le monde médical pour s’établir dans celui du commerce
débridé.
L’Ordre des Médecins semble avoir des difficultés à faire respecter ses propres règles
déontologiques pour de multiples raisons :
- l’importance quantitative du phénomène ;
- les difficultés techniques (vérification régulière des sites web par exemple) ;
- le fait que certains « instituts » soient gérés par des non médecins, parfois résidant à
l’étranger avec inexistence d’interlocuteur médical responsable local ;
- l’absence de plainte de patients sur ce point précis etc.
Sur le plan législatif, le problème est complexe :
La loi du 2 août 2002 transpose en droit belge les directives européennes adoptées en matière
de publicité trompeuse, comparative et de clauses abusives concernant précisément les
professions libérales. La publicité trompeuse y est explicitement interdite. La publicité
comparative y est acceptée selon certaines règles strictes, mais la loi donne aux autorités
professionnelles (l’Ordre des Médecins par exemple) le pouvoir de l’interdire totalement
« dans la mesure nécessaire pour préserver la dignité et la déontologie de la profession
libérale concernée ». L’Ordre des Médecins a effectivement pris cette décision en
conséquence de quoi la publicité comparative est interdite. La publicité au sens large, elle, est
donc autorisée eu égard aux principes de libre concurrence. Toutefois, on n’y fait aucune
différence entre la « publicité informative » et la « publicité de rabattage ».
¾ Proposition de Madame Tilmans
Mesdames les députées Tilmans et Lejeune proposent de modifier la loi du 2 août 2002 en y
incorporant un volet spécifique destiné à la chirurgie esthétique. Il y est proposé de considérer
comme publicité trompeuse « celle qui, relative à la chirurgie esthétique ou à des
interventions à visée esthétique, telle qu’injection ou infiltration, ne mentionne pas de
manière précise et complète certains éléments, en ce compris la qualification du praticien
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chargé de l’intervention, les résultats qui peuvent être attendus et les possibles complications
et/ou effets secondaires ».
Cette proposition de loi va à notre avis dans le bon sens, mais ne permet toujours pas de
contrôler totalement la publicité de rabattage.
¾ Législation française
La France, dans sa nouvelle législation ne fait pas dans le détail : la publicité est tout
simplement interdite (décret du 11 juillet 2005).
Une circulaire du 23 décembre 2005 relative à l’autorisation de fonctionnement des
installations de chirurgie esthétique précise :
« L’article L. 6322-1 interdit aux installations autorisées de bénéficier d’une publicité
« directe ou indirecte, sous quelque forme que ce soit ». Cette prescription a le même
fondement de principe que les interdictions déontologiques faites aux médecins par l’article
R. 4127-19 du code de la santé publique. Elle est claire et n’appelle pas de mesure
particulière d’application. Elle concerne évidemment tous les moyens d’information, Internet
compris.
Il convient de souligner qu’elle n’empêche aucunement les titulaires de l’autorisation de
donner au public, sans employer les procédés de la publicité, des renseignements de fait sur
leurs installations, leurs activités et les compétences de leurs praticiens, en les présentant
avec sobriété.
Elle ne fait aucunement obstacle aux communications de nature scientifique, dans les
revues spécialisées par exemple, ni aux ouvrages d’enseignement, dès lors que ces
publications ne comportent pas de mentions en faveur d’un établissement. »
Cette interdiction de publicité est assortie de sanctions pénales très dissuasives en cas de
contravention.
Cette circulaire française fait nettement une distinction entre la publicité racoleuse et
l’information, mais ne précise pas explicitement les limites entre les deux. Qu’en est-il des
photos avant-après par exemple (même réelles) : s’agit-il de publicité ou d’information ? Ce
n’est absolument pas décrit et donc matière à interprétation.
En conclusion, la qualification de l’esthétique en médecine, soit comme activité purement
commerciale ou à l’inverse, comme activité médicale avec comme conséquence l’autorisation
ou non de la publicité sans limite dans ce domaine est un véritable débat de société. Et c’est
sûrement ici, au parlement, que ce débat a sa meilleure place. L’avis de la Société Royale
Belge de Chirurgie Plastique ainsi que celui de l’Association Professionnelle des chirurgiens
plasticiens est tout à fait clair : la demande esthétique constitue un phénomène de santé
publique ; la médecine esthétique est une discipline médicale, la chirurgie esthétique, une
discipline chirurgicale et doivent le rester avec toutes les conséquences en termes de droits et
devoirs déontologiques. Dans ce cas, nous serions en faveur d’une réglementation plutôt
restrictive de la publicité, qui, à l’instar de la France, ne ferait qu’entériner fermement les
principes de notre déontologie, en y précisant explicitement les limites tolérables.
16
4) LES CENTRES EXTRA-HOSPITALIERS DE CHIRURGIE ESTHETIQUE
Docteur Jean-Luc Nizet
Mes collègues, le Docteur Denis Goldschmidt et le Professeur Albert de Mey viennent
d’exposer l’opinion des chirurgiens plasticiens concernant les compétences médicales
requises pour l’exercice de la chirurgie esthétique et la place, si il échet, de la publicité en
chirurgie esthétique.
La France a, récemment, légiféré sur ces 2 sujets, ainsi d’ailleurs que sur les centres de
chirurgie esthétique extra-hospitaliers.
Je souhaite exposer les grands principes de ces modifications législatives en France, qui ont
suscité de très nombreux commentaires dans le monde de la chirurgie et de la médecine
esthétique en France, avec notamment des levées de boucliers de la part des non chirurgiens.
En effet, dans la mesure où des médecins se sont vu interdire d’activité en France, certains
n’hésiteraient pas à venir avec armes et bagages, ou plutôt patientes et patients, via le TGV,
continuer leur pratique à Bruxelles, dans des endroits qui peuvent être loin de garantir les
conditions de sécurité suffisantes telles qu’elles auraient été exigées en France. Désire-t-on
que la Belgique devienne la terre d’accueil de ces desperados de la chirurgie esthétique ? Que
doit faire le législateur belge s’il souhaite éviter des dérives ? Je compte sur vous Mesdames
pour régler le problème.
¾ Quels sont les textes légaux français ? (in extenso en annexe)
-
un arrêté du 17 octobre 1996 relatif à la publicité des actes médicaux et
chirurgicaux à visée esthétique ;
la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de
santé : encadrement de la chirurgie esthétique dans des établissements accrédités ;
un décret d’application du 11 juillet 2005, précisé par une circulaire du 23
décembre 2005.
Nous allons étudier de façon plus détaillée les différents points de ces loi et décret.
¾ Les actes chirurgicaux concernés
La circulaire précise, de façon non exhaustive, les interventions les plus fréquemment
pratiquées en chirurgie esthétique qu’« elles doivent être obligatoirement réalisées » dans le
respect des règles énoncées ci-après.
Pour certaines interventions, le doute n'existait pas dans l'esprit des patients (augmentation
mammaire, lifting cervico-facial, …). Pour d'autres, il est rappelé leur appartenance à la
chirurgie esthétique et les règles auxquelles elles doivent obéir.
Ainsi, ne peuvent être « faits que par des chirurgiens qualifiés car ce sont des actes de
chirurgie esthétique » :
- toutes les techniques de liposuccion ou lipoaspiration, de lipostructure, concernant
l’ensemble du corps ;
- les traitements de la calvitie par simple suppression de la tonsure ou prélèvements de
lambeaux ;
17
- la dermabrasion mécanique dans l'indication de l'effacement des ridules de la lèvre
supérieure et de la lèvre inférieure (acte qui consiste à enlever la couche superficielle
de la peau avec une meule à rotation très rapide) ;
- les injections de matériaux non résorbables.
Ne sont donc pas concernés d’après ce décret : les injections de matériaux ou substances
résorbables et la toxine botulique.
Le décret rappelle que ces actes ne sont pas couverts par l'assurance maladie.
¾ Les principes concernant le praticien
1) Les compétences chirurgicales
Le principe de base est réaffirmé :
« les actes chirurgicaux réalisés dans les installations autorisées ne doivent être faits que par
des chirurgiens possédant une spécialité ou une compétence dont l'omnivalence du diplôme de
médecin, ni l'expérience ne sauraient tenir lieu. »
Sont ainsi habilités à réaliser tous les actes de chirurgie esthétique, les praticiens spécialistes
ou compétents (ancien régime) en chirurgie plastique reconstructrice et esthétique.
Sont habilités à réaliser des actes de chirurgie esthétique limités au cadre anatomique de la
spécialité dans laquelle ils sont inscrits au tableau de l'ordre les spécialistes toute une série de
spécialistes :
- en chirurgie maxillo-faciale ;
- en chirurgie maxillo-faciale et stomatologie ;
- en chirurgie de la face et du cou ;
- en stomatologie ;
- en oto-rhino-laryngologie ;
- en oto-rhino-laryngologie et chirurgie cervico-faciale ;
- en ophtalmologie ;
- en gynécologie-obstétrique ;
- en chirurgie urologique.
Ces spécialistes ont accès aux actes de chirurgie esthétique qui concernent leur spécialité. On
a vu en France il y a quelques années des ophtalmologues qui commençaient par les
paupières, pour lesquelles je ne vois pas de problème, qui continuaient par le lifting et puis
qui mettaient des prothèses mammaires. Ce décret précise bien les limitations de chaque
spécialiste.
2) L'information concernant l'intervention
Cette circulaire rappelle que dans le domaine de la chirurgie esthétique, c’est une obligation
de moyens et non une obligation de résultats. Les juristes parlent d’une obligation de moyens
renforcée dans le domaine de la chirurgie esthétique et la jurisprudence est très nette.
La circulaire rappelle la caractérisation de la chirurgie esthétique : « la jurisprudence a
soumis l'exercice de cette chirurgie à des obligations d'information et de moyens renforcés ».
18
La jurisprudence est par ailleurs très nette en ce qui concerne l'information préalable et
complète sur les conditions de réalisation de l'intervention. Les techniques opératoires doivent
être complètement expliquées et ne peuvent être modifiées sans nouvel accord de la personne.
Une fiche détaillée de l'intervention (avec les risques et séquelles qu'elle peut comporter,
même bénins ou rares ainsi que les traitements complémentaires éventuels) est habituellement
remise au patient lors des rendez-vous préalables à celle-ci.
Je dirai quelques mots sur les centres de chirurgie esthétique extra-hospitaliers, sujet capital
pour l’avenir. En effet, de plus en plus, la chirurgie esthétique va être réalisée en dehors des
hôpitaux généraux, et cela pour de nombreuses raisons : limitation des places en milieu
hospitalier classique, mode de fonctionnement organisé pour des malades (et non des patients
sains), coûts plus élevés en milieu hospitalier classique… Cependant, la sécurité doit être
draconienne dans ces centres, avec notamment des processus d’accréditation.
¾ Les principes concernant les établissements
En France, les établissements dans lesquels sont effectués des actes de chirurgie esthétique
sont soumis à des conditions d'autorisation et de fonctionnement.
Ces conditions ont trait à l'organisation matérielle et technique et à la prise en charge des
personnes accueillies. Elles peuvent varier selon que les installations sont ou non situées dans
un établissement de santé.
Voilà, l’état de la situation en France qui est extrêmement controversée et pas seulement par
les non chirurgiens mais également par les chirurgiens.
Après avoir exposé ces différents points de la législation française, rappelons différents points
déjà exposés par mes 2 collègues sur la chirurgie esthétique en Belgique :
-
existence d’une spécialité en chirurgie plastique, réparatrice et esthétique depuis
plus de 25 ans ;
décision de l’Académie royale de Médecine (30 juin 2001) : la lipoaspiration est
un acte chirurgical, et il ne peut être effectué que par des médecins spécialistes
agréés en chirurgie plastique ;
l’article 35 du code de déontologie : le médecin doit éviter d’outrepasser sa
compétence ;
un arrêt de la cour d’appel de Bruxelles (5 avril 1991), qui condamne un médecin
qui réalise une opération alors qu’elle ne relève pas de sa spécialité (en
l’occurrence, il s’agissait d’un dermatologue qui avait effectué une réduction
mammaire).
En conclusion, que souhaitent les chirurgiens plasticiens belges ?
La transposition, mutatis mutandis, de la législation française ? Ce n’est pas souhaitable. Les
échos qui nous viennent de nos collègues plasticiens français rendent compte d’une forte
désorganisation de leur activité suite au décret de 2005, notamment pour l’activité
extrahospitalière. En effet, le législateur français a simplement transposé les normes des
hôpitaux généraux aux centres extrahospitaliers, comme par exemple la présence d’un
médiateur !
19
De plus, ce décret ne vise que la chirurgie esthétique. Ne sont donc pas concernés d’autres
praticiens qui effectuent des anesthésies au cabinet comme par exemple des dentistes. Le bon
sens élémentaire, c’est que la loi soit la même pour tout le monde et en tout cas pour tous les
praticiens quelle que soit leur spécialité.
Il faut savoir que des processus d’accréditation de ce type de centres existent déjà, notamment
aux USA, par exemple les critères de la SFR (Surgery Facilities Ressources). Ces critères sont
très stricts également mais réalistes, et surtout déjà validés par le terrain depuis de longues
années, et sur des millions de patients, ce qui n’est pas le cas en France. Ces critères
américains sont en ce qui concerne l’anesthésie basés sur trois stades et donc sur trois niveaux
d’agrément de ces centres : les centres type A où simplement une anesthésie locale est
effectuée, les centres type B où on peut faire anesthésie locale mais aussi des actes sous
sédation légère sans intubation ni masque laryngé et le type C, le plus élevé, où les
anesthésies générale et sédation profondes peuvent être effectuées mais avec présence d’un
anesthésiste. Les critères sont de plus en plus stricts au fur et à mesure qu’on monte d’échelle.
Il nous semble que ce type de règlement devrait être appliqué à tous les praticiens de
médecine humaine (chirurgiens, médecins, dentistes…) qui effectuent des actes en dehors
d’un centre hospitalier.
Nous sommes cependant demandeurs, puisqu’il s’agit de santé publique, de trois éléments :
-
du respect de critères précis de formation et de compétence pour la réalisation des
actes de chirurgie esthétique ;
une définition précise de ces actes de chirurgie esthétique. Où va-t-on mettre la
barre entre une lipoaspiration de 3 cc au niveau du cou et une full lipoaspiration,
comme certains disent, sous anesthésie générale pendant 5 ou 6 heures ? ;
une législation portant sur l’agrément de centres hospitaliers, nous penchons plus
pour une législation tendance anglo-saxonne et non française, car la France est
isolée. Les Pays-Bas, l’Angleterre et l’Espagne ont des critères qui se rapprochent
beaucoup plus des Etats-Unis que la France. La France a donc une position unique
au monde dans ce domaine et totalement contestée par les praticiens de terrain.
20
21
III. LA MEDECINE ESTHETIQUE
Quelle différence avec la chirurgie ? Sa place en Belgique et dans d’autres pays
Docteur Jean Hébrant, Président de la Société Belge de Médecine esthétique
Le papyrus Ryland en témoigne, la médecine se préoccupe d’esthétique depuis l’Egypte
ancienne, mais elle n’existe en tant que discipline que depuis quarante ans environ.
L’évolution des mœurs et la pression sociale ont poussé certains médecins, préoccupés de la
« beauté » à rassembler dans les années septante, des techniques empruntées à diverses
spécialités telles que l’endocrinologie, la dermatologie ou la phlébologie, mais aussi des
traitements qui n’appartenaient à personne et qui sont nés, en marge de toute spécialité, à la
faveur des savoir-faire et des progrès technologiques. Les traitements de la cellulite et la
lipoaspiration en sont de parfaits exemples.
Il était inévitable que certains gestes, plus agressifs que d’autres, se retrouvent à la frontière
de la chirurgie. Mais en cela, la médecine esthétique ne diffère pas des autres spécialités. Les
sphinctérotomies des gastro-entérologues, les dilatations des radiologues, les ponctions
pulmonaires des pneumologues sont au même titre que la lipoaspiration, des gestes à
connotation chirurgicale perpétrés au sein des spécialités médicales. Dans chacune de ces
spécialités, un conflit de compétence avec les chirurgiens a abouti à un équilibre plus ou
moins logique, plus ou moins légitime, toujours à la carte.
Si les actes de médecine esthétique ont une origine hétéroclite, ils n’en ont pas moins une
grande unité de principe : traiter les disgrâces esthétiques acquises ou non par des moyens
médicaux.
De cette unité fondatrice sont nées les sociétés nationales. La Belgique, l’Espagne, la France
et l’Italie ont été les premiers pays à se doter de Sociétés de médecine Esthétique réunies plus
tard sous la bannière de l’Union Internationale de Médecine Esthétique (UIME).
Actuellement, l’UIME regroupe 25 pays.
C’est ainsi que la Société Belge de Médecine Esthétique (SBME) a été crée en 1974
(Moniteur Belge du 22 août 1974), soit bien avant que les spécialités classiques et notamment
les spécialités chirurgicales ne prennent la mesure exacte de l’importance que l’esthétique
allait prendre à la fin du siècle passé.
La SBME a réuni les pionniers belges, dermatologues, chirurgiens, omnipraticiens, qui
ressentaient le besoin de partager leurs connaissances, d’échanger leurs idées et leurs
expériences au sein d’une société qui palliait les insuffisances de l’enseignement académique.
Aucune formation officielle n’existait en effet, et elle n’existe toujours pas, nous aurons à
revenir sur ce point.
¾ Définition
La médecine esthétique est une partie de la médecine qui s’attache à la correction des
disgrâces physiques acquises (vieillissement, traumatisme) ou constitutionnelles, par des
moyens médicaux adaptés.
La sophistication croissante des traitements allait nous confronter à de nouveaux défis et
notamment à la création d’un enseignement devenu impérativement nécessaire. C’est
pourquoi, en 1995, j’ai pu, je devrais presque dire j’ai dû mettre en chantier un cursus qui
22
couvre exhaustivement les bases théoriques et pratiques de la médecine esthétique
d’aujourd’hui et de demain. Avec l’aide de la chaire de prévention des sénescences du Centre
Universitaire de Charleroi, nous avons mis sur pied une Ecole de Médecine esthétique qui
délivre ses cours durant les week-end et qui assure la maîtrise de stages.
Aujourd’hui, une quarantaine de certificats ont été délivrés par le Centre Universitaire de
Charleroi aux médecins qui ont suivi l’enseignement théorique avec succès et ont accompli
les stages obligatoires conformément aux exigences des statuts.
Il va sans dire qu’en dehors de cet enseignement, une formation continue est assurée par le
biais des congrès annuels et des workshops mensuels.
¾ Les objectifs de la SBME
-
Définir clairement le « corpus » des actes de médecine esthétique ;
Assurer une formation de qualité pour tous les actes relevant de cette nouvelle
discipline ;
Exercer un contrôle sur des nouvelles techniques (efficacité, sécurité) ;
Faire respecter les règles de déontologie et notamment lutter contre la publicité
mensongère ;
Stimuler la recherche clinique et fondamentale ;
Protéger les patients par une information rigoureuse.
1) Définir le corpus des actes de médecine esthétique
Nous avons établi d’emblée une charte de qualité de soins, un guide de bonnes pratiques.
Nous n’avons pas attendu qu’on nous l’impose pour demander à ceux qui faisaient des actes
un peu plus chirurgicaux de s’équiper correctement.
2) Assurer une formation de qualité
Nous avons organisé une formation au centre universitaire de Charleroi, dont la création
remonte au 18 février 1995.
Nous assurons bien sur une formation continue, par le biais de nos workshops et de nos
congrès.
3) Exercer un contrôle sur les nouvelles techniques
En 1996, la Société Belge de Médecine Esthétique créait une commission de surveillance des
complications des actes de technique en médecine esthétique. Nous n’avons pas non plus
attendu que la chose nous soit imposée. Nous avons été les premiers à attirer l’attention sur les
problèmes des injections superficielles d’implants non-résorbables comme le Newfill®. Avec
mon ami Colignon, nous avons été les premiers à attirer l’attention sur les dégâts des produits
non résorbables dans les différents congrès internationaux auxquels nous avons été conviés.
4) Faire respecter les règles de déontologie et lutter contre la publicité
Nous connaissons tous les publicités caricaturales auxquelles s’adonnent certains « centres ».
Je pense pouvoir affirmer que pas un seul membre de la société belge de médecine esthétique
ne se prête à ce genre d’exercices qui font la honte de notre profession.
23
5) Stimuler la recherche clinique et fondamentale
Nous avons vite compris que comme notre spécialité n’était pas une spécialité reconnue, la
faire reconnaître au nom de la communauté scientifique belge et internationale devait passer
par une simulation de la recherche fondamentale.
C’est dans le cadre de notre société que s’est développé, en premier en Europe, l’échographie
de haute fréquence du derme. C’est dans le cadre de notre société qu’est née la
transluminescence qui fait fureur dans le milieu phlébologique actuel. Grâce à ce travail de
recherche, nous avons pu participer à différentes formations universitaires françaises aussi
bien dans les facultés de Paris que de Poitiers.
6) Protéger les patients par une information rigoureuse
Nous avons créé le passeport de médecine esthétique, hélas, pas encore assez répandu. Dans
ce document, nous avons exigé que nos médecins notent les types de produit qu’ils injectaient
de telle manière à ce que le patient dispose d’une liste des actes de médecine esthétique qu’il a
reçu.
Nous avons combattu la publicité mensongère. Notre société doit lutter contre de telles
pratiques et elle l’a toujours fait : voici la réponse de notre ami Colignon à un monsieur
vendeur de machine :
¾ Pourquoi la médecine esthétique est-elle au cœur des débats ?
La médecine esthétique emprunte des techniques à la dermatologie, à l’endocrinologie et à la
chirurgie plastique. C’est une entité à part qu’on ne sait pas classer dans une autre spécialité.
Certaines de ses techniques ont une frontière commune avec la chirurgie esthétique. C’est une
évidence, une nécessité mais aussi hélas une source de conflits.
¾ Que se passe-t-il dans les autres pays ?
Le plus mauvais exemple est la France car c’est le pays de toutes les restrictions. On se
demande d’ailleurs pourquoi et comment la loi française a atterri sur le pupitre de nos
hommes politiques alors qu’elle est un exemple à ne pas suivre.
Malgré l’excellence de son enseignement (l’enseignement de la médecine esthétique est entré
dans les universités en France), cette loi pose des restrictions qui sont difficilement
acceptables par le monde de la médecine esthétique.
24
En Italie, la médecine esthétique n’a pas de reconnaissance officielle mais elle a des écoles1 et
des masters universitaires, qui comme je l’ai toujours souhaité sont dans les services de
chirurgie plastique. C’est une avancée européenne, un exemple à suivre. La seule limitation
des actes est la compétence du médecin.
L’Espagne est aussi un pays novateur. C’est vrai qu’elle n’est pas encore tout à fait reconnue
par le ministère de la santé publique mais elle est reconnue officiellement par l’Ordre des
Médecins. Les masters universitaires existent depuis 10 ans. Le master s’étend actuellement à
l’université de Madrid. L’ordre des médecins cite et reconnaît explicitement les formations en
point d’accréditation.
Dans la loi du 22 novembre 2003, la santé publique espagnole crée des aires de capacitations
spécifiques, allant ainsi dans le sens européen qui diminue au lieu de les augmenter le nombre
de spécialité. L’Espagne a décidé de créer ces aires qui seront des « spécialités » ou la
médecine esthétique est en train de trouver sa place.
Aux Pays-Bas, il n’y a pas de société de médecine esthétique. Il n’y a rien, juste des
réglementations d’ordre d’installation. C’est un pays qui je pense n’a pas de formation bien
organisée.
En Belgique, la SBME n’est pas restée inactive, elle a créé un diplôme. Depuis le nombre
d’années, nous n’avons que 38 diplômés. La médecine esthétique a eu des contacts avec les
universités mais on s’est heurté au lobby des spécialités. Je pense que différentes spécialités
connexes ne nous voient pas d’un bon œil et ne voient pas l’intérêt d’établir une spécificité de
médecine esthétique. L’Ordre des Médecins, dans son bulletin, faisait un amalgame entre les
médecins esthéticiens charlatans et les médecins esthéticiens qui depuis des années se forment
au sein de la société belge.
Quant au pouvoir politique, nous ne sommes pas restés inactifs. Nous avons rencontré en
2003, dans un premier temps les collaborateurs de Monsieur Vandenbroeck et Tavernier, mais
notre entretien n’a pas eu de suite. Lors d’une seconde réunion avec le cabinet du Ministre
Demotte en septembre 2005, on nous a opposé des arguments financiers et budgétaires pour
renoncer à la trop coûteuse entreprise que représente la mise sur pied d’une commission
d’agréation. Par contre, la possibilité d’attribuer aux sociétés scientifiques la compétence
d’organiser la certification en médecine esthétique a clairement été évoquée.
¾ Comment définir la médecine esthétique en 2006 ?
La médecine esthétique est une médecine qui tend à modifier l’apparence corporelle d’une
personne, à sa demande et sans visée thérapeutique.
Les actes relevant de la médecine esthétique sont ceux qui mettent en œuvre des techniques
médicales et des actes de chirurgie superficielle, tels que l’exérèse de petites lésions cutanées,
les gestes de photothérapie ablative, la lipoaspiration sous anesthésie locale stricte, les
implants capillaires et les phlébectomies.
Le médecin esthétique est porteur d’un certificat de formation.
1
Scuola Internationale de M.E (Fate Bene Fratelli – Roma)
25
¾ Pourquoi laisser la technique de lipoaspiration parmi les actes de médecine
esthétique ?
-
-
parce que les lipoaspirations telles qu’elles ont été décrites par
Y.G. Illouz 2 et P. Fournier, raisonnables en volume, sous anesthésie locale, ne
peuvent être considérées comme des gestes chirurgicaux…
parce qu’elle est entrée dans la Médecine Esthétique en même temps que dans la
chirurgie plastique ;
parce que la Médecine Esthétique a grandement contribué à l’ amélioration de la
lipoaspiration. Citons à titre d’exemple, le liquide de Klein (Dermatologue américain)
et la vibro-liposculpture-Lipomatic (invention d’un médecin esthétique, membre de la
SBME). Des milliers de patients ont été traités sous anesthésie tumescente telle qu’elle
a été décrite par le Dr Jeffrey A. Klein, sans aucune mortalité 3 ;
parce que la littérature internationale prouve que la lipoaspiration en ambulatoire
comporte beaucoup moins de complications que la lipoaspiration réalisée en hôpital et
que cela se vérifie depuis des années, à l’intérieur de la SBME 4 .
Toutes les études vont dans le même sens.
Si les objectifs de la loi qui se discute aujourd’hui relèvent :
- de l’uniformisation Européenne ;
- de la valorisation des compétences ;
- de la sécurité du patient.
La Médecine Esthétique telle qu’elle est défendue par la Société Belge de Médecine
Esthétique n’a rien à craindre : elle rejoint les mêmes aspirations.
2
Clin Plast Surg. 2006 Jan;33(1):129-63, viii. Links
Complications of liposuction.
Illouz YG.
Department of Plastic and Aesthetic Surgery, Saint-Louis Hospital 14 Boulevard Suchet, 75016 Paris, France.
Abstract
Since liposuction is surgery, it has the same complications as any surgery, but because of the minimalization of
the procedure done by the author since he invented it in 1977, the complications were and are still minimal in
the traditional way. Others have tried to maximalize the procedure and so, almost immediately after, appear a
maximalization of complications and new severe complications.
3
Dermatol Clin. 1999 Oct;17(4)899-902, VIII
The safety of the liposuction : result of a national survey.Morbidity and Mortality related to liposuction.
Questions and Answers.
Hancke, Coleman, WP 3rd
Department of Otorlaryngology- Head and Neck Surgery, Indiana University School of Medicine.
Indianapolis, USA.
4
Dermatol Surg. 2002 Nov;28(11):971-8,
The safety of the liposuction : result of a national survey.
Housman TS, Lawrence N and All
Department of Dermatology, Wake Forest University (Ecole de Médecine), Winston Salem, North Carolina
27157, USA
26
27
IV. LES TRAITEMENTS ESTHETIQUES, LEURS APPLICATIONS ET
MESURES DE PRECAUTION
Le point de vue des dermatologues par :
Docteur Johan Snauwaert, Président de l’Union professionnelle belge de dermatologie et
dermatologue à Brasschaat
Docteur Olivier Vanhooteghem, chef de service de la Clinique Sainte-Elisabeth de
Namur, maître de stage de dermatologie, consultant universitaire à l’ULg et maître de
conférence de la faculté de médecine de l’ULg
1) INTRODUCTION SUR LA DERMATOLOGIE
Docteur Olivier Vanhooteghem
Mesdames les présidentes, Mesdames, Messieurs les Sénateurs et Députés, chers confrères,
Je souhaite vous rappeler le rôle du dermatologue dans le paysage médical. La dermatologie
est la spécialité médicale qui s’occupe de l’organe « peau ». Au même titre que la cardiologie
s’occupe de l’organe « cœur », l’ophtalmologie s’occupe de l’organe « œil ».
La peau est composée d’un épiderme, d’un derme et d’un hypoderme ainsi que d’annexes
kératinisantes et glandulaires. Les poils, les cheveux et les ongles font partie des premières
tandis que les glandes sudoripares et sébacées font parties des secondes. Certaines de ses
annexes se terminent profondément dans l’hypoderme situé sur le fascia musculaire.
La peau n’est pas uniquement un organe servant de protection, elle est aussi un organe vital et
immunitaire ; elle est également un outil privilégié pour diagnostiquer certaines maladies
internes, chirurgicales, ou liées au vieillissement. Elle est aussi un interface entre le moi et le
non moi avec toutes implications psychologiques qui en découlent.
La dermatologie étudie toutes les fonctions de la peau comme par exemple, la régulation
thermique, la fonction barrière, la photoprotection et la relation à soi et à autrui.
Le titre de Spécialiste en « Dermatologie et Vénérologie » est délivré à la suite d’un cursus
universitaire de 4 ans. Cette formation est délivrée selon les instructions des Instances
Européennes de la Santé et rentre dans le cadre de ce que l’on nomme un « Masters
Complémentaire » anciennement dénommé « Diplôme d’Enseignement Supérieur ou DES ».
Par ailleurs, au sein de l’Université d’Etat de Liège, le service de Dermatologie du Professeur
de la Brassinne, auquel j’appartiens, enseigne l’art de la chirurgie dermatologique et des
nombreuses techniques à visée esthétique : peeling, lasers et autres. Ceci en toute conformité
avec le programme Européen de l’Union Professionnelle des Dermatologues, instance
représentée ici par le Docteur Snauwaert.
Ce programme de formation est en tous points reconnu par les instances de l’Union
Professionnelle des Dermatologues américains. La formation du dermatologue est donc
spécifique et ses compétences en font un acteur obligé dans la pratique des sciences aussi
diverses que l’histologie dermatologique, l’allergologie dermatologique, la cancérologie
dermatologique, la chirurgie dermatologique et ce y compris la chirurgie de l’ongle et du cuir
28
chevelu, la phlébologie, les techniques de dermatologie esthétique telles que laser, injections
de produits de comblement et de toxine botulique.
Le dermatologue est ainsi privilégié de par sa formation à pouvoir étudier, analyser, critiquer
et promouvoir les nouvelles techniques à but esthétique qui fleurissent sur le marché. Il est
important de savoir que l’anatomie et la physiologie de la peau constituent parfois des contre
indications à certains de ces procédés et que des réactions des peaux saines ou malades sont
souvent ignorées des non dermatologues. Le dermatologue est donc le plus compétent pour
évaluer les indications et les contre indications de ces traitements. Une méconnaissance de
celles-ci risque d’être préjudiciable à tous.
A ce stade de l’exposé, je souhaiterais vous poser quelques questions :
Faut-il empêcher le dermatologue, cet acteur incontournable de la santé et du bien être, de
développer, étudier, utiliser et améliorer les différentes techniques qu’il met au point ?
La coopération interdisciplinaire n’est-elle pas la seule garantie d’une bonne évolution de la
médecine ?
La pensée unique n’est-elle pas le signe d’un repli sur soi qui, à terme provoque un
appauvrissement intellectuel puisque pas ou peu ouverte à la réflexion et à l’éducation ?
Un exemple frappant et fort à propos : en 2007, se tiendra à Paris un congrès international que
vous connaissez tous. Le Comité scientifique et directeur de ce grand congrès est composé à
parts égales par des dermatologues et des plasticiens. S’il fallait encore prouver l’importance
de cet acteur qu’est le dermatologue, il est utile de rappeler qu’un nombre croissant de firmes
pharmaceutiques et commerciales fait appel à lui pour mettre au point des techniques
nouvelles. C’est le dermatologue bien souvent qui assure couramment des formations
complémentaires concernant l’utilisation de lasers, de produits de comblements, de techniques
chirurgicales de la peau et des annexes, de techniques de cicatrisation, de greffes et de
pansements.
Je terminerai par vous affirmer qu’il est en notre devoir de dermatologue, en tant que
professionnel de la peau, de continuer à être au premier plan dans ce domaine en pleine
évolution.
29
2) LES TRAITEMENTS ESTHETIQUES
Docteur Johan Snauwaert
Mesdames les présidentes, Mesdames, Messieurs,
C’est avec grand plaisir que j’ai accepté l’invitation de Madame Defraigne d’intervenir et de
clarifier la position des dermatologues sur ce qu’on appelle la médecine esthétique.
La médecine esthétique est une nouvelle branche de la médecine, plutôt « artistique ». Au
début, c’était une médecine chirurgicale qui est devenue de plus en plus sophistiquée et « high
tech » vu l’apparition des lasers, produits injectables, techniques chirurgicales non invasives.
Le vieillissement de la population a créé une demande énorme pour la médecine esthétique.
La génération des baby-boomers est la première génération qui refuse de vieillir. Les babyboomers forment 28% de la population mais constituent 50% de la force économique.
On désigne cela comme la troisième révolution « trois trillions de dollars ». C’est une thèse
d’un économiste américain qui dit que nous avons connu l’industrie automobile d’abord,
l’industrie informatique ensuite et enfin l’industrie du bien-être ou wellness.
Il y a aussi un revers à cette médaille. Sous l’influence des médias l’apparence prend de plus
en plus d’importance. Une étude très intéressante d’un dermatologue anglais (JA Cotterill)
montre que 40% des patients « esthétiques » ont des caractéristiques de « dysmorphophobie ».
Ce sont les gens qui se contrôlent en permanence par le miroir. C’est un syndrome très
complexe qui est une combinaison d’anxiété et de dépression. Normalement, dans un cabinet
de dermatologue on voit entre 8 et 10% des patients qui présentent ce syndrome. Donc, ce
pourcentage est beaucoup plus élevé chez les patients « esthétiques ».
Pourquoi il y a si « peu d’estime de soi » dans notre société ?
Des choses aberrantes deviennent de plus en plus importantes. De plus en plus de gens
veulent changer de sexe et utilisent toutes les techniques possibles. Il y a même un petit
groupe de personnes, ce sont les « apothemnophilia » qui veulent être amputé d’un bras ou
d’une jambe. Il y a déjà 3000 personnes au monde qui se sont faits amputer par ce qu’ils l’ont
demandés. C’est une maladie psychiatrique très rare.
On vient aussi de plus en plus de « cosmeholics », terme que je trouve pertinent ici. Ce sont
des patients qui viennent à de multiples reprises et qui demandent des interventions sans issue.
Avant les années ’70, la médecine esthétique était surtout invasive et réservée à la jet-set.
Dès le début des années ’80, on a connu une révolution technique dans l’approche de la
modification esthétique du corps.
¾ Quelle est la contribution de la dermatologie à la médecine esthétique ?
a) Recherche fondamentale et innovation
Laser
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Tout a commencé avec un article de 1983 de deux dermatologues américains Anderson RR &
Parrish JA. Depuis cet article, l’industrie laser a démarrée. Ils ont découvert qu’en fonction de
la longueur d’onde et de la durée d’impulsion d’un rayon laser, on obtient un effet destructeur
très spécifique avec un effet minimal sur les tissus autour de la cible. On appelle cela la
Selective photothermolysis.
Au début, on l’a utilisé pour les vaisseaux (tache de vin, angiome, coupe rose, varices).
Ensuite, on a vu apparaître les Q-pulse pour traiter les lésions pigmentaires et enlever les
tatouages. Enfin, les techniques d’épilation sont apparues grâce à un dermatologue belge, le
Docteur C. Dierickx (avec Rox Anderson).
Rox Anderson a trouvé, il y a 2 ans, une nouvelle utilisation du laser. C’est le concept de
« fractional coagulation » qui consiste à traiter seulement une fraction de la peau et avec un
chauffement spécifique on peut rajeunir la peau. La peau guérit très vite parce que 80% de
l’épiderme reste intact, on a donc un temps improductif minimal. Cette procédure peut être
réalisée sous anesthésie locale simplement avec une pommade.
Lipoaspiration
Le Docteur Klein, dermatologue Californien, a présenté en 1985 la technique tumescente de
liposuccion sous anesthésie locale durant le congrès des chirurgiens plasticiens à Philadelphie.
Quelques années plus tard, il a publié une étude sur la sécurité de l’anesthésie tumescente
(« Tumescent technique for regional anesthesia permits lidocaine doses of 35 mg/kg for
liposuction ». J Dermatol Surg Oncol 1990).
Il s’agit d’une idée très simple qu’il a trouvée par coïncidence. Il voulait faire une anesthésie
locale pour enlever les cellules adipeuses. Il a dilué l’anesthésiant, l’a infiltré dans la peau et a
vu que cela marchait mieux qu’une anesthésie générale.
Pourquoi utiliser l’anesthésie tumescente ?
Une anesthésie locale est considérée comme moins agressive qu’une anesthésie générale. Elle
permet de fractionner l’intervention en plusieurs sessions sans répétition d’anesthésies
générales. Le risque de l’intervention est lié à la quantité de tissu adipeux enlevée. Au dessus
de 2000cc par séance, cela devient dangereux. Le risque d’infection par MRSA et Clostridium
est moins élevé lors d’une intervention hors milieu hospitalier.
Une autre technique, c’est l’introduction d’une microcanule. C’est moins agressif pour les
tissus et cela permet de travailler de façon plus précise. Au début, les canules mesuraient six
millimètres maintenant elles ne font plus qu’un ou deux millimètre(s).
Botox
Le botox a été aussi découvert par coïncidence par les Carruthers à Vancouver. On savait
depuis longtemps que le botox était une protéine qui pouvait paralyser les muscles et qui
pouvait être utilisée comme traitement de relaxation de muscle. J. Carruthers, ophtalmologue,
traitait des patients autour des yeux. Un jour, une de ses patientes est revenue et a dit que
c’était remarquable car elle n’avait plus de rides. J. Carruthers a appelé tout de suite son mari,
dermatologue, et depuis une industrie s’est développée autour de cette technique. Ils ont
publié leurs données dans un journal réputé aux Etats-Unis.
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Comblement
Depuis les années ’60, l’huile de silicone est utilisée pour combler les rides. Fin des années
’70, les premières injections à base de collagène bovin sont effectuées. Depuis, chaque année,
de nouveaux produits sont introduits.
L’injection de ces produits peut provoquer des réactions immunitaires. La peau est un des
organes les plus immunitaires de notre corps car c’est notre défense contre le milieu qui nous
entoure. Quand on injecte des produits qui ne sont pas naturels, on peut avoir des réactions
immunitaires importantes. Notre collègue Koen De Boulle est devenu l’expert des dérives
liées à ces injections. Dans un article, il a conclu que l’utilisation de substances non
permanentes et biodégradables provoque le moins de risque d’effets secondaires
(« Management of complications after implantation of filler », J. Cosmetic Dermatology
2004).
b) Assurance groupe pour les interventions esthétiques
Très vite, les dermatologues ont compris le danger de la médecine esthétique.
Les patientes « esthétiques » réagissent beaucoup plus vite et portent plainte quand elles sont
mécontentes. En 1998, une police de groupe est négociée avec l’assureur Generali Belgium
pour les dermatologues. Cette police couvre les traitements médicaux et les traitements
esthétiques définis avec l’assureur. Les assureurs étaient déjà bien informés sur le sujet car ils
sont les premiers à voir les dérives. Cette police est basée sur deux points : l’introduction du
consentement éclairé et les directives quant aux différentes techniques esthétiques.
On a pu introduire un consentement éclairé bien équilibré grâce à l’aide du Professeur van
Sweevelt (Université d’Anvers).
Tous les dermatologues qui contractent cette police d’assurance doivent suivre les directives.
Le projet a démarré en mars 2000. Environ 130 dermatologues sont assurés par cette police.
En octobre 2006, les statistiques des sinistres sont extrêmement favorables puisqu’on ne note
à ce jour aucun sinistre pour les traitements esthétiques et seulement un sinistre pour les
traitements médicaux.
c) Expertise
Les dermatologues sont souvent demandés comme experts par la Justice et notamment lors de
deux cas mortels de liposuccion suite à des erreurs d’anesthésie.
Les dermatologues sont souvent consultés par les patients quand il y a des problèmes de
comblement. On a même formé un réseau de vigilance pour les effets secondaires de produits
de comblement.
Les dermatologues participent aussi à une commission ad hoc du Conseil Supérieur
d’Hygiène et donnent leur avis sur l’utilisation des lasers par les non médecins. Il y a
beaucoup de problèmes à ce propos car il existe un vide juridique énorme.
¾ Conclusions
Le rôle des dermatologues en médecine esthétique est très important :
32
-
innovateurs dans plusieurs domaines ;
amélioration des techniques pour une médecine esthétique moins agressive et plus
efficace « less is more » ;
par un système d’assurance étudié on a pu diminuer les dérives.
La coopération entre tous les médecins qui pratiquent la médecine esthétique est
indispensable pour minimaliser les dérives des nouvelles techniques dans le futur.
Cela se voit déjà dans les grands congrès de médecine esthétique qui ont des orateurs de
plusieurs disciplines (IMCAS à Paris, American Society for Cosmetic surgery,…) comme les
dermatologues et les chirurgiens plasticiens.
Chaque discipline apporte des nouveautés et par « pollinisation croisée » on peut rendre la
médecine esthétique plus sûre.
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V. QUESTIONS-REPONSES
o Un intervenant
Nous sommes dans une société où apparemment le monde politique adore construire des murs
pour imperméabiliser les communications entre les humains. Ce matin, il y a eu l’une ou
l’autre petite allusion de type exclusif. J’ai ressenti dans la plupart des exposés le souhait
d’une coopération plutôt que d’une confrontation négative entre les diverses spécialités. Si
nous nous trouvons dans ce haut lieu de la vie civile en Belgique, c’est qu’il y a déjà eu des
contacts préalables entre les divers groupes de spécialistes et nous ne pouvons qu’encourager
ce développement à l’avenir. Comme dermatologue, je me suis limité à un certain territoire et
je vois que ce qui a été annoncé à Lille risque de se concrétiser. Claude Duriez avait prévenu
les dermatologues qu’ils allaient perdre la vénérologie, ce qui est le cas, la phlébologie, ce qui
semble se dessiner à l’horizon, la chirurgie, ce qui donne lieu à des velléités agressives de la
part de l’administration ou de groupement de spécialistes. Le moment est venu d’ouvrir le
débat et peut-être de le décloisonner tout en précisant les compétences de chaque sous groupe
de médecins dans les indications de type esthétique.
o Christine Defraigne, Présidente du Groupe MR du Sénat
Décloisonner le débat et coopérer, cela rejoint l’intervention du Docteur Snauwaert qui
plaidait pour une coopération renforcée.
o Daniel Bacquelaine, Président du Groupe MR de la Chambre
Je me demande ce que pensent les chirurgiens plasticiens des médecins généralistes qui
pratiquent la médecine esthétique.
Réponse du Professeur de Mey, chirurgien plasticien
Le problème est un problème de compétence. Si un dermatologue apprend à faire de la
chirurgie dermatologique, c’est très bien. Ce qu’on voit, malheureusement, en chirurgie
plastique, ce sont des patients qui viennent, par exemple, avec un petit cancer de la peau qui
n’a pas été bien traité car le dermatologue ne savait rien faire d’autre qu’une excision simple,
ne connaissait pas les techniques de lambeaux de couverture et n’avait pas l’occasion de les
faire, travaillant dans son cabinet. Cela est de la mauvaise médecine. Par contre, si un
dermatologue apprend à faire de la chirurgie dermatologique, c’est tout à fait normal qu’il le
fasse. Le problème des médecins généralistes est qu’ils outrepassent très souvent leurs
compétences quand il s’agit de gestes plus invasifs. On peut apprendre à faire une injection
mais est ce que l’indication est bien posée ? La compétence vient non seulement d’un
apprentissage, d’une pratique mais aussi de la façon dont on voit les choses et dont considère
le patient. Le patient n’est pas un client mais quelqu’un à qui on doit rendre un service.
o Christine Defraigne, Présidente du Groupe MR du Sénat
Quelles seraient les prestations à réserver aux chirurgiens plasticiens s’il en est de telles ?
Quelles seraient les prestations à réserver aux autres ?
34
Réponse du Docteur Goldschmidt, chirurgien plasticien
J’adhère complètement aux exposés des autres intervenants. Je souhaite aussi une
coopération. Le problème de la limitation, c’est souvent de définir les frontières. C’est très
difficile de les fixer. L’idéal serait que chacun fixe ses propres frontières en fonction de ses
propres capacités et de sa formation. Il faut se restreindre de soi-même. Par exemple, je ne
suis pas contre qu’un médecin esthétique formé avec sa compétence ou un dermatologue
formé avec sa compétence fasse des liposuccions limitées en volume. Mais pas celles qui
peuvent entraîner des modifications hémodynamiques avec des problèmes, comme nous en
avons vu de temps en temps, qui sont faites en cabinet où il arrive que des patients fassent un
collapsus en rentrant. Donc, pas les grosses liposuccions qui doivent être faites dans un
encadrement plus sérieux et par des gens qui ont une compétence chirurgicale. La chirurgie ne
s’apprend pas par trois cours le samedi et le dimanche à Paris. Cela s’apprend, comme le
disait le Professeur de Mey, par une longue et lente succession d’inputs théoriques et
pratiques. S’il existait une auto-restriction où les dermatologues compétents se fixent la
barre, il ne faudrait pas légiférer. Le problème est que cela ne se passe pas comme ça. Je
compare toujours avec l’aviation. Il y a des écoles de pilotage. On a une qualification pour
voler sur les grosses machines. On peut aussi apprendre à voler sur des petits avions. Ce sont
des qualifications différentes. Il est certain que de temps en temps des pilotes de petits avions
aimeraient bien voler sur des gros avions et on le comprend très bien et probablement qu’ils le
feraient très bien. Mais il y a une compétence et une qualification à obtenir. La limite est plus
facile à fixer pour l’aviation. En matière de liposuccion, c’est beaucoup plus difficile. On
pourrait dire, par exemple, qu’en dessous de 500 cc, la liposuccion est autorisée pour tout le
monde et qu’au-delà, un encadrement est nécessaire. Je ne sais pas, je n’ai pas la solution
parce que c’est difficile à déterminer.
Je reconnais les contributions des dermatologues à l’évolution même de la chirurgie
esthétique. Il n’y a pas de limite imperméable, de mur. Le problème de santé publique est de
dire ce qu’il convient de faire pour que les patients ne prennent pas de risque. Si tout le monde
se fixait ses propres limites, cela ne poserait absolument aucun problème. Je vois de temps en
temps des patients opérés par tel généraliste et quand, c’est lui, je sais que c’est très bien
réalisé. Ce généraliste est parfaitement compétent et se limite. Mais parfois j’entends qu’un
généraliste a proposé une liposuccion de 3 litres. Cela ne va plus car sur le plan médical,
chirurgical, la limite est franchie.
o Christine Defraigne, Présidente du Groupe MR du Sénat
Pas de mur mais une difficulté de tracer les frontières. Nous sentons très bien que si
l’autorégulation fonctionnait, nous n’aurions pas besoin de tenir un colloque pour nous
informer. Nous sentons que la difficulté est la lipoaspiration et que vous semblez fixer un
critère qui serait celui de la quantité. Est-ce le seul critère ou faut-il envisager d’autres
critères ?
Réponse du Docteur Hébrant, médecin esthétique
Je remercie mes confrères chirurgiens et pense que si aujourd’hui on a une voie unanime c’est
grâce aux contacts que j’ai eus avec le Professeur de Mey depuis des années.
Nous ne sommes pas des médecins généralistes et sommes opposés au fait que des médecins
non formés fassent des actes de médecine esthétique. Pourquoi ? Parce que les dermatologues
et les chirurgiens plasticiens sont protégés par un diplôme, la médecine esthétique ne l’est pas.
35
Lorsqu’une personne dans un coin d’une cuisine fait un acte esthétique malheureux, c’est sur
la médecine esthétique entière que cela retombe et pas sur les plasticiens et les dermatologues.
Donc, nous sommes convaincus de la nécessité d’une exigence de formation, que le médecin
esthéticien doit rester à sa place et ne doit pas faire de liftings ou d’abdominoplasties. Il est
vrai que la lipoaspiration est l’acte frontière et qu’un médecin esthéticien formé peut faire
des petites lipoaspirations. Le volume qui est le critère américain doit être affiné mais cela
doit être déterminé par des commissions. Pour moi, c’est un bon critère.
o Docteur Bovy, chirurgien plasticien
Je voudrais élargir le débat quant aux dérives. S’il existe une dérive locale sur la différence de
formation, il n’y a pas que ce problème là. Dans la dérive de la chirurgie esthétique, il y a
essentiellement la dérive de la demande des patients. La demande des patients est énorme en
chirurgie esthétique pour le moment. Elle est souvent démesurée, excessive et à refuser. Il est
essentiel qu’un membre médical qui pose une indication de chirurgie esthétique suive son bon
sens et réagisse en son âme et conscience si cette intervention ne se justifie pas. Que ce soit
une liposuccion minime ou pas, faite par un chirurgien ou pas, il y a le problème médico-légal
qui tient compte des techniques et du risque mais aussi le problème de l’indication. Il y a des
gens à qui il faut oser dire non ! Dans mon activité, je refuse d’opérer à peu près un patient sur
deux parce que je crois que psychologiquement l’indication est tout à fait déplacée. C’est un
problème médico-légal également car ces patients là porteront plainte qu’ils soient opérés par
un médecin esthétique, par un chirurgien plasticien formé ou quelqu’un d’autre. La formation
de chirurgie plastique devrait inclure la notion de motivation c'est-à-dire de ne pas opérer
n’importe qui en faisant n’importe quoi, de doser la motivation du patient et d’oser dire non.
Il existe aussi une dérive mercantile. En effet, beaucoup de médecins acceptent de faire
n’importe quoi pour des raisons financières. C’est un problème sur lequel il convient
d’intervenir. C’est la source de problèmes et de complications en médecine esthétique.
o Un intervenant
Concernant la liposuccion, on a vu que pour les dermatologues, qui la pratique depuis 6 ans,
il n’y a jamais eu d’accident.
Il y a une demande énorme de la population qui est stimulée par la presse. Les gens veulent
faire plein de choses. Si nous nous limitons trop, ce n’est pas les médecins qui pourront
continuer à le faire mais ce sera fait par des non médicaux. Ce qui est nettement plus
dangereux que ce qui est fait maintenant. Les injections de Botox qui se font dans les salons
de coiffure, les lipopeeling qui se font dans les centres esthétiques par des non médecins,
toutes sortes de traitements « borderline » qui se font par des non médecins, là est le réel
danger. Les grands problèmes se voient là-bas et pas tellement dans les cabinets médicaux.
o Dominique Tilmans, députée
Je rejoins cette dernière intervention. Il faut avoir aujourd’hui une réponse à l’engouement de
la chirurgie esthétique que la presse relaye abondamment. Si nous n’y répondons pas,
beaucoup de gens iront à l’étranger se faire opérer. Une cohabitation doit être acceptée. Il faut
pouvoir définir les actes esthétiques et qui peut les faire. On revient peut être à la
classification américaine A-B-C. Il est important de savoir qui peut définir cela. Je pense que
vous, les médecins, êtes les premiers à pouvoir le faire. Si vous ne le faites pas, le législateur
le fera mais est-ce qu’il le fera correctement ?
36
En définitive, nous devons répondre à la demande, définir les actes et faire en sorte que
chacun puisse exercer avec des formations très strictes et reconnues.
o Madame Salembier, Présidente nationale de l’Union des esthéticiennes
Nous sommes actuellement 7200 sur le marché. C’est un peu inquiétant puisque nous filons
également et, depuis des années, vers une dérive. Je remercie le Docteur Snauwaert avec
lequel j’ai pu déjà collaborer au niveau du laser. Nous étions affolés par l’idée du laser à
domicile. Il y a des traitements de laser qui se font à domicile. Cette dérive, on vous en
supplie, d’y mettre une barrière puisqu’il n’y a plus de limites. On parle de dermabration, de
phlébologie… Mais là c’est devenu tragique. Au secours ! Aidez nous et mettez y des
barrières très vite.
Réponse du Docteur Snauwaert, dermatologue
Cet été, la commission du Conseil supérieur de la santé a formulé un avis qui est en cours de
validation par le Conseil supérieur d’Hygiène et qui va partir au cabinet. Donc, le travail
législatif va suivre très vite concernant le laser. En tant que dermatologues, nous considérons
le laser comme un problème très important car l’industrie a envahi ce marché et présente ces
lasers comme des jouets. Cette discussion a lieu aussi en Angleterre, aux Pays-Bas et en
France. En Europe, nous avons compris qu’il est urgent de réagir.
o Anne Wittebole, chirurgien plasticien
Le gros problème est de poser la bonne indication que ce soit en chirurgie, en dermatologie ou
en médecine esthétique. Pour avoir la bonne indication, il faut avoir une bonne connaissance
de tout le panel thérapeutique. On en revient donc à la formation qui doit être stricte. On a la
chance en Belgique d’avoir un niveau médical nettement élevé. La chirurgie plastique existe,
la dermatologie existe, elles se complètent dans différents domaines. S’il y a place pour la
médecine esthétique, quel type de formation existe-t-il ? Actuellement, quelle est la
formation que l’on donne aux médecins esthétiques ? Quel est le nombre d’heures par
semaine, par an et combien d’années cela prend-il ? En dermatologie ou en chirurgie
plastique, par exemple, cela prend plusieurs années à temps complet.
Réponse du Docteur Hébrant, médecin esthétique
D’abord, je voudrais revenir sur le problème du laser. Il y a déjà là un manque de dialogue
parce que c’est vrai que les dermatologues sont en train de légiférer sur le laser mais nous
n’avons pas été associés. C’est un peu paradoxal puisque dans le laser vasculaire, nous
sommes chargés dans les universités de Paris de l’enseignement. Alors, je pense qu’on aurait
pu au moins être associés à cette discussion pour déterminer cette partie, on aurait eu un panel
d’avis intéressant pour le législateur.
Pour l’enseignement, la chose est très difficile, c’est pour cela que j’avais demandé à Albert
de Mey de l’introduire dans les universités. Il avait été enchanté mais malheureusement il
n’est pas le seul à décider. Nous n’avons pas pu jusqu’à présent l’introduire. Donc, nous
sommes obligés d’organiser notre propre formation. Cette formation a été mise en place sur
des années. Pour avoir le premier diplôme, nous avons attendu 6 ans. Nous avons d’abord
donné un enseignement qui se donnait les week-ends pendant 4 ans, puis nous avons parfait
cet enseignement dans des congrès, nous avons demandé des travaux et pour certains, des
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publications. C’est pour cela qu’il y a si peu de diplômés. Nous n’avons pas l’infrastructure
pour donner ces cours d’une manière aussi bien organisée que dans les instances
universitaires. Nous sommes obligés de faire des formations longues et de n’approuver
comme médecin esthéticien qu’un nombre très réduit de personnes.
AnneWittebole, chirurgien plasticien
La formation se passe apparemment à temps partiel. Je suis allée à un congrès récemment sur
les prothèses de fesses que je n’ai encore jamais mises. J’ai reçu après 2 heures un diplôme
indiquant que je suis apte à poser des prothèses de fesses. Je m’excuse mais je ne vais pas me
lancer comme ça sans, en tout cas, avoir été voir quelqu’un pratiquer ou pratiqué moi-même
sous une certaine direction. J’ai le diplôme oui.
Docteur Hébrant, médecin esthétique
La formation de médecine esthétique est globale, c’est pour cela qu’elle dure aussi longtemps.
D’ailleurs, nous avons des professeurs de renom belges et étrangers dont on ne peut contester
la compétence. Je pense que faire entrer, comme l’Italie, la médecine esthétique dans la chaire
de chirurgie plastique est une voie et un exemple à suivre.
o Didier Van Den Broeck, chirurgien plasticien
Je voulais faire une remarque non quant au fond du débat mais quant à la forme. Nous avons
assisté, dès le début du colloque, à un essai de collaboration entre les différentes spécialités.
Maintenant, nous avons un peu l’impression que chacun tire la couverture à soi et que chacun
veut défendre son point de vue. Finalement, le débat prend une autre tournure. Sur la forme, je
m’inspire d’une réflexion de Madame Tilmans qui a dit « qu’il n’y a pas une pensée unique et
qu’il fallait tenir compte de l’avis des praticiens ». Je pense que les organes officiels que sont
la société de chirurgie plastique et la société de médecine esthétique sont les meilleurs
interlocuteurs de nos hommes et femmes politiques. Dans quelle mesure ne pouvons nous pas,
tant en chirurgie plastique qu’en médecine esthétique (nous ne sommes pas nombreux),
envisager un débat sous forme de référendum pour tenir compte de l’avis de tout le monde.
Je pense qu’il est choquant que de grandes marques investissent des millions de dollars dans
la publicité alors que c’est juste mercantile, que ces produits peuvent entraîner des
complications et que nous, médecins, n’avons pas le droit d’annoncer la couleur de nos
résultats. Je suis tout à fait d’accord avec les remarques concernant le racolage, on sait que les
dérives sont nombreuses. Je me demande dans quelle mesure on ne peut pas tenir compte de
l’avis de chacun.
Christine Defraigne, Présidente du Groupe MR du Sénat
L’avis de chacun, le référendum, mais qui faut-il consulter ? Quel est le panel qu’il faut
envisager ?
Réponse du Docteur Nizet, chirurgien plasticien
Si ce n’est pas le rôle des associations professionnelles d’être ici, je ne comprends pas très
bien notre existence. Je ne dis pas que nous avons été mandatés, nous trois pour représenter
l’ensemble des plasticiens mais il existe des réunions régulières à la fois de la société belge et
de l’Union professionnelle. Malheureusement, peu de plasticiens sont membres de
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l’association de défense professionnelle. Nous sommes ici car nous essayons d’être le plus
actif possible pour l’ensemble des chirurgiens plasticiens et nous ne défendons pas un pré
carré ou l’autre.
Didier Vandenbrouck, chirurgien plasticien
Je pense que vous êtes les bons interlocuteurs et je n’ai jamais remis en cause l’existence de la
société ni votre rôle au sein d’un colloque comme celui-ci.
o Christine Defraigne, Présidente du Groupe MR du Sénat
Nous n’en avons pas beaucoup parlé mais quel est le rôle des firmes pharmaceutiques ?
Réponse du Docteur Vanhooteghem, dermatologue
Elles sont absentes ici car c’est purement mercantile. Il faut essayer de résoudre nos
problèmes en essayant peut-être de rassembler les idées des uns et des autres et de mettre en
place un diplôme universitaire où les uns et les autres mettent sur papier leurs compétences. Si
l’un ou l’autre veut faire une liposuccion ou un traitement au laser, il devra ainsi participer à
cette formation. On devrait créer une formation commune à tous où l’on puisse définir les
techniques. Cela évoluera naturellement vers la qualité des soins. Nous pourrons avoir avec ce
diplôme un gage de garantie. Les esthéticiennes seront contentes car elles auront en face
d’elles des interlocuteurs qui savent de quoi ils parlent.
Christine Defraigne, Présidente du Groupe MR du Sénat
Diplôme commun à tous, tout le monde est d’accord avec ce point de vue ?
Docteur Nizet, chirurgien plasticien
Au niveau des commissions d’agrément pour toutes les spécialités, nous avons été interrogés,
il y a un an ou deux, sur la possibilité d’effectuer des formations à temps partiel.
L’ensemble des spécialités médicales a refusé cette option estimant qu’une formation devait
se faire à temps plein et nécessitait un suivi. La formation malheureusement n’existe pas
encore en médecine esthétique mais ne peut pas s’apprendre uniquement lors de congrès.
Nous avons aussi des congrès, ce n’est pas l’essentiel de la formation, la base doit être une
formation à temps plein.
o Un médecin esthétique
Il me semble qu’aujourd’hui il y a deux débats. Un débat d’ordre général sur la publicité, le
respect et la sécurité des patients. Je pense que l’ensemble des acteurs est d’accord pour dire
qu’il faut aller de l’avant et là une législation me semble relativement facile à trouver. La
pierre d’achoppement est la lipoaspiration. Ne pourrait-on pas s’inspirer des critères
d’assurabilité des dermatologues en reprenant ce que l’assurance a considéré comme étant
quelque chose de sécurisant ? Je rappelle qu’il n’y a pas de sinistres depuis plusieurs années.
Il conviendrait d’élargir ces critères à ce qu’il faut faire au préalable, les indications, le check
up, la façon dont cela doit se faire, les locaux, le matériel, le suivi, l’ensemble des éléments. Il
faudrait édicter une liste de ces critères à laquelle chacun des médecins, dont vous estimeriez
qu’il est compétent par son diplôme ou sa formation, doit adhérer. Sur base de cela, il
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obtiendrait une assurabilité. Cette assurabilité lui permettrait d’avoir un document officiel lui
permettant d’effectuer un acte déterminé.
Réponse du Docteur Snauwaert, dermatologue
Avec cet auto contrôle, beaucoup de collègues ont critiqué cette police d’assurance. Le temps
a prouvé que j’avais raison avec ce projet. Pas mal de dermatologues ont vu tout de suite que
c’était très intéressant. Il est unique au monde qu’un groupe de médecins d’une discipline se
penche sur les statistiques portant sur leurs comportements. L’assureur est toujours contacté
immédiatement quand il y a un sinistre. Il est donc le mieux placé pour évaluer la sûreté de
notre discipline.
o Une dermatologue
Je pense que nous sommes à peu près tous d’accord sur le fait que le projet de loi n’était pas
ce que nous désirions le plus. Nous sommes presque unanimes pour le condamner car cela ne
correspond pas à ce que nous souhaitons sur le terrain. Nous pensons que la compétence est
un des domaines essentiels et nous sommes tous d’accord pour augmenter les compétences et
favoriser les formations mais ceci devrait rester à l’intérieur de la profession car à trop
légiférer, cela constitue un frein au développement. Autant, il faut des critères minimums,
autant il faut augmenter la compétence et favoriser cela à l’intérieur de la profession.
Augmenter des formations interdisciplinaires, pourquoi pas. Nous dermatologues aller vers
les chirurgiens plasticiens pour voir ce qu’ils font, pour que nous puissions conseiller à nos
patients d’aller voir les chirurgiens plasticiens pour telle ou telle chose car nous ne
connaissons pas toujours tous ce que les autres font. Ne pas vouloir s’approprier les actes de
chirurgie qui sont réservés à la chirurgie. Je pense que d’autres que les chirurgiens peuvent
peut être pratiquer certains petits actes de chirurgie s’ils ont une formation et la compétence.
Cela est à définir entre nous, entre médecins de bonne volonté. Nous devons nous mettre à
table, voir ce qu’il en est, quelles sont les formations que nous décidons de faire pour cela et
moyennant quoi ces médecins auront la compétence de faire certains actes. Je pense que
légiférer dans ce domaine est un petit peu trop osé. Je veux bien des critères minimums de
fonctionnement. Par contre, le problème le plus important est la publicité qui, à l’heure
actuelle, crée des besoins et qui promet des choses aberrantes aux patients. Je crois qu’il faut
faire attention à cette dérive vers le mercantilisme et l’appât du gain. On doit être plus vigilant
en effet car c’est un domaine où nous n’avons pas de prise. Il faudra également être très
vigilant contre les non médecins qui pratiquent des actes. Tout médecin qui a une certaine
formation, une certaine éthique, va s’auto limiter à ce qu’il connaît en général et va essayer de
ne pas pratiquer n’importe quoi. Moins on est formé, plus on a l’impression que l’on peut
faire et c’est là que réside le danger. Pour le reste, je pense que nous sommes entre gens de
bonne compagnie et que nous pouvons régler beaucoup de choses à l’intérieur de la
profession par des dialogues, par l’ouverture d’esprit.
o Christine Defraigne Présidente du Groupe MR du Sénat
Faut-il légiférer ou non ? Il y a une ébauche de texte qui est soumise à la consultation.
L’autorégulation peut-elle fonctionner ? Est-ce qu’on ne court pas le danger alors de laisser
proliférer tout et n’importe quoi en laissant la régulation se faire par la jurisprudence et par les
tribunaux ? Le législateur doit-il intervenir ou pas ?
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Réponse du Docteur Goldschmidt, chirurgien plasticien
Je pense que l’autorégulation ne marche pas bien. Probablement que ça ne fonctionne pas
chez un petit nombre de personnes mais ce petit nombre peut faire un tort considérable. Je ne
parle pas en tant que chirurgien plasticien mais en tant que citoyen du pays. C’est un débat de
société. Le problème de la publicité est un débat sociétal, ce n’est pas nous qui décidons. Il
faut savoir si on veut permettre que les gens fassent n’importe quoi en termes de publicité
sans avoir la compétence ou s’il faut fixer quelques limites pas trop strictes, quelques balises
sur lesquelles on puisse s’appuyer. De demander aux compagnies d’assurance de devenir les
commissions d’agrément, j’ai un petit doute. Je pense que c’est au législateur de dire « ceuxlà, ils peuvent faire, ceux-là, ils ne peuvent pas faire ». C’est pour cela qu’on a ouvert ce
débat. Je crois qu’il faut fixer des limites qui ne sont pas infranchissables. L’expérience dans
la pratique montre que cela ne marche pas quand on laisse les gens s’autoréguler.
o Docteur Bluth, chirurgien plasticien
Je voulais soulever le problème des centres privés de chirurgie esthétique. Il est très
difficile de contrôler la pratique dans certains centres. Sur ce point, je souhaite que ce
problème de législation, de régulation et d’accréditation soit discuté par les personnes qui
pratiquent dans des centres privés de chirurgie esthétique et qui ont une certaine expérience
ayant vu sur un certain nombre d’années, les échecs, les problèmes et les infections
éventuelles. Sur ces bases, on pourrait discuter des critères d’accréditation des centres privés
sans arriver à la situation française. En effet, la législation française est tombée très
brutalement pour les centres privés de chirurgiens plasticiens qui fonctionnaient très bien pour
la plupart, et qui ont dû fermer les uns après les autres leurs centres parce que la législation
était insupportable pour eux. Ils se retrouvent à nouveau obligés de travailler dans des
cliniques qui ne sont plus aux mains de médecins et dans lesquelles ils travaillent moins
librement. Je pense que le médecin est, dans son essence même, une personne libre qui aime
travailler le plus souvent seul et dans ces conditions là. Nous sommes des indépendants. Pour
cette raison aussi, il est très difficile de collaborer dans des sociétés ou même dans des
réunions interdisciplinaires comme cela se passe aujourd’hui.
Je pense que les chirurgiens doivent émettre les critères permettant au législateur de légiférer
en ce qui concerne les centres privés. Le législateur ne sait pas ce qu’est une infection de
prothèse, les médicaments utilisés, les risques d’une salle d’opération, les critères de sélection
et de stérilité… Ils ont mis de telles contraintes en France que c’est insurmontable. Tous les 6
mois de nouveaux critères apparaissent, cela n’est pas tenable. Il faut avoir un côté pratique,
on ne peut mettre les mêmes critères de stérilité pour un service de chirurgie orthopédique ou
de chirurgie plastique. Cela n’a pas de sens.
o Christine Defraigne, Présidente du Groupe MR du Sénat
Je crois que nous avons pointé du doigt les dérives, en tout cas les conséquences perverses de
la loi française. La loi, c’est la norme abstraite et générale, et puis, il y a l’aspect
réglementaire. Pour cela, il faut consulter et s’entourer d’avis.
o Docteur Carlaire
Je ne me retrouve nulle part dans le débat. Je suis un médecin généraliste qui pratique la
médecine esthétique depuis plus de 10 ans. Je suis assurée pour les liposuccions, je n’ai
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jamais eu de sinistre et je me demande ce que je vais devenir. Dans votre ébauche de projet, je
me demande si vous avez pensé à moi et aux autres médecins qui sont dans la même situation.
Je connais des confrères français qui étaient dans ma situation et qui du jour au lendemain,
bien que n’ayant eu aucun problème, ont été obligés d’interrompre leurs activités.
o Docteur Hébrant, médecin esthétique
Il y a un accord très cordial sur les limites. Je voudrais revenir sur la question de
l’enseignement. Depuis le début, j’ai toujours soutenu que l’enseignement, dans sa version
actuelle, n’est pas suffisant. Sinon, je n’aurais pas fait une approche vers le milieu
universitaire. Ce sont les chirurgiens plasticiens eux-mêmes qui m’ont demandé de poursuivre
dans cette voie car nous ne pouvions pas laisser le terrain sans un enseignement.
Le DU dermato-rides universitaire dans lequel j’enseigne à Paris permet d’apprendre aux
dermatologues comment injecter. Il se passe le week-end.
Est-ce que la médecine scolaire fait partie d’une spécialité ? Ou la médecine légale ? Les
cours se donnent-ils en continu ? Non, il y a des heures de cours mais je pense que ce n’est
pas une occupation 8 heures par jour. Je pense qu’à vouloir être trop maximaliste, on va avoir
des difficultés à faire rentrer la médecine esthétique dans une université.
o Docteur de Fontaine, chirurgien plasticien
Certains centres à Bruxelles font venir des médecins étrangers pour opérer. Les patients
rencontrent un premier médecin qui leur donne un avis et ensuite se font opérer quelques
semaines plus tard par un autre médecin que le centre fait venir d’Amérique du Sud, par
exemple, et qui a, soi-disant, la qualité de chirurgien plasticien.
Je pense que c’est inacceptable. Nous vivons cette situation très régulièrement. Je pense qu’il
va falloir légiférer. Nous avons essayé de faire sans et cela ne marche pas. On a besoin de
vous. Je reconnais beaucoup de qualité et de compétence à mes trois collègues parce qu’ils
ont une activité très remplie et qu’ils libèrent encore du temps sur leurs activités personnelles
pour s’occuper d’autre chose.
Nous sommes beaucoup dans la même situation. Le débat n’est pas de protéger notre métier
mais de protéger avant tout les patients. Le politique doit légiférer sur un sujet qui est délicat.
Si nous ne pouvons pas informer les patients aujourd’hui, nous sommes bloqués au niveau de
cette information et je pense que vous pouvez nous aider en informant les gens de ce qui
existe.
La notion de victime. Les patients peuvent être victimes des traitements que nous leur
proposons. Tous les traitements de chirurgie esthétique peuvent avoir des conséquences
importantes. Dans les patients, nous voyons des patients plus ou moins aisés qui ont donc
financièrement la possibilité de se payer une intervention. Ceux qui sont vraiment aisés en
général participent à un niveau social élevé et sont donc cultivés, des gens qui connaissent.
Quand ils connaissent, ils choisissent la plupart du temps des gens qui seront au moins
compétents. Les gens qui ont des revenus moindres vont prendre des soins dont ils rêvent
qu’ils vont avoir de bons résultats, qui seront souvent réalisés par des gens meilleurs marché
et qui peuvent être moins compétents. Dans tous les cas, si un problème survient, ceux qui ont
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payé moins, ont moins d’argent pour payer les groupes d’experts et d’avocats en vue d’assurer
leur défense en justice.
o Une représentante du CRIOC
Je remercie vivement la personne qui a fait la dernière intervention qui recentre le débat sur
les victimes des dérives c'est-à-dire les patients. Je retiens dans ce colloque plusieurs points
importants pour protéger le patient. On a parlé de la capacité d’écoute du patient qui est
nécessaire pour poser un diagnostic et choisir la bonne technique ainsi que du consentement
éclairé, élément qui est incorporé dans l’assurance responsabilité civile.
Je me demande si le patient est réellement éclairé sur l’existence de cette assurance et si il
retourne chez le praticien dire qu’il a un problème ? Ou va-t-il se tourner vers un autre
praticien pour déclarer son problème, ne sachant pas qu’il est assuré et qu’il peut résoudre
cela avec le praticien qui l’a opéré ? Cela mériterait de donner davantage de détails sur cette
assurance et d’être vigilant.
Concernant la publicité mensongère ou de rabattage, je suis tout à fait favorable à une
législation claire en la matière qui évite des débordements importants. Elle devrait être bien
sûr complétée par une commission à laquelle les patients, citoyens, consommateurs pourraient
s’adresser en cas de plainte.
Réponse du Professeur de Mey, chirurgien plasticien
Ces patients ont parfois honte de dire où ils ont été opérés. Très souvent, ils ne demandent pas
et n’essaient pas de porter plainte contre le centre où ils ont été mal traités. On voit cela
souvent chez nous car à l’hôpital universitaire les gens viennent en fin de parcours, ne sachant
plus très bien où aller. Ils demandent alors ce qu’on peut faire pour eux. Ce n’est pas toujours
celui qui a provoqué le sinistre qui est au courant de celui-ci. Les statistiques personnelles sur
les médecins qui font ce genre de pratiques sont parfois difficiles à cerner parce que les
patients ne vont pas toujours se plaindre chez le praticien qui a causé le dommage.
o Un intervenant
Le problème se situe au niveau des confrères étrangers qui viennent opérer sauvagement en
Belgique. Je me demande dans quelle mesure une loi sera contraignante vis-à-vis d’eux. En
théorie, ils ne peuvent pas exercer sur notre territoire n’étant pas inscrit à l’Ordre des
médecins. Qu’est ce qu’une loi supplémentaire pourrait avoir comme effet ?
Réponse de Christine Defraigne, Présidente du Groupe MR du Sénat
Par le biais des centres esthétiques et puis là où l’éventuelle infraction ou acte est commis.
Dominique Tilmans, députée
Je pense qu’il y a trois problématiques aujourd’hui. Il y a, effectivement, les centres de
médecine esthétique et de chirurgie esthétique qui ne sont pas agréés et ne répondent à
aucune norme. Il est important de légiférer sur ce sujet et de fixer les agréations afin que
notamment n’importe qui ne pourra plus y opérer. Ensuite, il y a la définition des actes
43
esthétiques qui déterminera qui peut faire quoi. Enfin, la publicité sur les actes de chirurgie
et médecine esthétique.
Il est clair que nous n’avons pas la volonté absolue de légiférer. Notre objectif est de venir en
appui aux associations car, ensemble nous avons la volonté de poser des balises afin de
répondre aux dérives que connaît l’esthétique aujourd’hui.
o Un chirurgien plasticien
Je pense qu’on se retrouve depuis plusieurs années dans une situation où nous ne pouvons pas
faire de publicité pour tous les chirurgiens qui ont des centres privés mais qu’on retrouve
dans tous les magazines néerlandophones ou francophones des publicités de nos confrères des
Pays-Bas, de la France, d’Angleterre même de Turquie et du Maroc. Je trouve qu’aujourd’hui
nous habitons dans la capitale de l’Europe et que quelque chose ne va pas. Pour moi, il est très
difficile de ne pouvoir rien faire même correctement ou discrètement alors que nos confrères
des autres pays font n’importe quoi.
Christine Defraigne, Présidente du Groupe MR du Sénat
Je pense que la publicité est le point où il y a le plus de convergences. En tout cas, il y a un
accord sur le fait qu’il faut évidemment encadrer, légiférer et interdire la réclame (publiciteit).
Dominique Tilmans, députée
Nous pouvons aussi lancer le débat au niveau européen pour essayer de relayer la
problématique.
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45
VI. CONCLUSIONS
Madame Christine Defraigne, Présidente du groupe MR du Sénat
Je voulais remercier nos intervenants qui ont pris de leur temps, très précieux, pour venir nous
aider et nous éclairer et aussi le public qui est venu nombreux.
L’esthétique est devenue un véritable phénomène de société lié à l’allongement de la durée de
vie qui implique qu’on soit plus performant, plus séduisant plus longtemps.
On touche à la philosophie, à la psychologie, à l’anthropologie, à la sociologie, au juridique.
Il s’agit aussi d’un vrai problème de santé publique lorsque le patient devient un client et
même un consommateur.
On est dès lors confronté à un véritable marché, rencontre de l’offre et de la demande.
La demande régit la frontière difficile à définir entre le besoin et l’envie.
L’offre, quant à elle, se diversifie, car on assiste à une multiplication des techniques.
Nous voulons travailler contre les dérives mercantiles.
Faut-il oui ou non légiférer en la matière ? Si oui, que faut-il y mettre ? Nous avons organisé
ce colloque dans une optique de consultation et de nous éclairer.
Pour ma part, je ne crois pas à l’autorégulation et je considère que le législateur ne serait pas
intrusif.
L’objectif premier à poursuivre est la protection du patient.
Ce sont surtout les personnes les plus démunies financièrement mais aussi socialement, c’està-dire qui ont le moins accès au savoir et à la formation, qui sont la proie de charlatans.
Les praticiens sérieux n’ont pas envie d’être concurrencés par les farfelus.
Cet objectif est-il exclusif de la défense des intérêts des médecins ?
Je ne le crois pas, une conjonction entre les intérêts en présence va même de soi.
Les différentes sociétés de chirurgie plastique et de médecine esthétique ont des chartes de
bonne conduite nécessaires mais non suffisantes car elles n’ont pas de caractère contraignant.
Un droit n’existe pas sans pression par menace de sanction.
Je salue l’approche pragmatique des dermatologues via le concept d’assurabilité.
C’est un critère intéressant mais qui ne résout pas tout.
Ce colloque a permis de mettre à jour différents problèmes :
1) La compétence. Il y a une demande conjointe de reconnaissance de la ou des
formations.
Par voie réglementaire, par un label ?
2) La définition des actes esthétiques posés. Quelles compétences mais pour quoi faire ?
On sent très bien que se situe au cœur du débat la liposuccion. La demande n’est
toutefois pas rigide, elle évolue en même temps que les techniques se multiplient.
Ainsi, on voit poindre un échange de vues à propos du laser entre esthéticiennes et
médecins.
3) La publicité. Un texte est déjà déposé à la Chambre. Mais apparemment il faut aller
plus loin. Doit s’envisager aussi la question des firmes pharmaceutiques.
4) Les installations. Il faut prévoir leur agrément, leur accréditation.
La loi française qui réglemente la question a déjà entraîné de nombreux effets.
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Nous ne vivons pas en Belgique en autarcie et les textes pris par nos voisins ont des
répercussions sur nos pratiques et entraînent un appel d’air. Ainsi, se développent des
Thalys de chirurgiens qui opèrent chez nous.
La rigidité de la loi française a aussi eu des conséquences internes. Ainsi, le renvoi
systématique vers les hôpitaux pas demandeurs au lieu des centres privés entraîne des
conséquences perverses.
Là, le problème devient aussi celui de la sécurité sociale.
On mesure à quel point une réflexion au niveau européen doit intervenir. Il ne suffit pas de se
retrancher derrière celle-ci pour ne pas entamer la réflexion dans notre pays.
Au-delà des différences de points de vue, gardons-nous de toute dérive corporatiste et
soulignons les points d’ancrage, de coopération entre les différents « types » de médecins.
C’est avec optimisme que j’ai dégagé des points communs, des synergies entre les
dermatologues, les chirurgiens, les médecins esthétiques.
Nous mesurons à quel point notre tâche « d’artisan législatif » n’est pas simple, mais nous
pensons que la bonne coopération et la franchise des uns et des autres ont éclairé ce matin
notre chemin.
Docteur Daniel Bacquelaine, Président du groupe MR de la Chambre
Je voulais remercier Dominique Tilmans et Christine Defraigne d’avoir organisé ce colloque.
Nous ne pratiquons pas la pensée unique mais bien la pensée libérale et réformatrice. On est
attaché, d’une part, à la liberté d’exercice, de diagnostiquer, à la liberté thérapeutique. C’est
un préalable pour nous lorsque l’on parle de médecine. Je voulais rassurer certains sur
l’immixion des législateurs en la matière. Nous allons le faire dans le cadre d’une pensée
libérale, c'est-à-dire une pensée d’ouverture et qui attache beaucoup de prix à la responsabilité
individuelle. Chacun doit avoir la liberté d’exercer sa profession dans un régime de liberté.
Bien entendu, nous sommes préoccupés par la sécurité des consommateurs en général, et des
patients en particulier. Nous sommes aussi favorables à l’esprit d’entreprise. En ce qui
concerne la possibilité pour des médecins de développer une activité, nous y sommes
particulièrement attachés. Il faut que vous partiez d’ici en ayant la conviction que nous allons
nous consacrer au règlement de ces multiples problèmes dans cet esprit. Non pas dans un
esprit de faire une loi bureaucratique qui enfermerait les praticiens dans un ensemble de règles
et de règlements absolument inextricables qui ne permettraient plus à chacun de développer sa
compétence et son talent.
Nous sommes aussi attachés à la notion d’excellence et à la notion d’exigence de compétence.
Evidemment, il faut éliminer les brebis galeuses et il faut faire en sorte que la médecine soit
pratiquée uniquement par des médecins. Nous sommes très fermes sur ce principe là, dans
tous les domaines. Donc, exigence de compétence, de formation de base, de formation
continue. Je pense qu’un système d’agrément est indispensable en la matière, sans de nouveau
tomber dans les excès d’une bureaucratie tatillonne.
La déontologie ne peut pas tout faire toute seule. La déontologie prévoit des règles en matière
de publicité. Toutefois, elle privilégie toujours les institutions par rapport aux personnes.
D’expérience, j’ai rarement vu des conseils de l’Ordre intervenir dans des publicités, parfois
racoleuses, d’institutions hospitalières notamment universitaires. Par contre, le praticien
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individuel privé, on lui tombe très vite dessus. Donc, je pense que la déontologie ne suffira
pas en matière de publicité et qu’il faudra aller un peu plus loin.
Par contre, la limite entre la publicité informative et la publicité racoleuse est toujours très
difficile à établir. Que veut dire « racoler » ? C’est un terme familier qui veut dire « faire en
sorte que les gens aient l’information pour venir ». En matière de publicité, il faudra fixer des
règles. On se pose la question de savoir si on n’est pas dans un débat manichéen entre
l’interdiction totale ou la liberté totale. Tout ce qui est entre les deux est extrêmement
difficile.
Enfin, je terminerai par les centres extra-hospitaliers. J’y suis particulièrement intéressé, étant
bourgmestre d’une commune où l’on s’apprête à ouvrir un centre de chirurgie esthétique dans
un établissement thermal. Je souhaite que ce projet puisse être mené à bien, le gros œuvre est
pratiquement terminé. De manière générale, je suis toujours un peu méfiant par rapport à
l’hospitalo-centrisme. Les hôpitaux sont bien sûr nécessaires mais par contre j’ai toujours
trouvé que ce n’est pas parce qu’on est malade qu’on doit mal manger. Parfois, la fonction
hôtelière et la fonction médicale sont deux choses très différentes. Il y a d’ailleurs des pays,
notamment les pays anglo-saxons, où l’on différencie beaucoup plus ces deux fonctions. Dans
ce cadre, les centres privés où l’on pratiquerait de la chirurgie esthétique dans des conditions
qui correspondent aux exigences de formation, de compétence et d’excellence me semblent
une voie qu’il faut autoriser. On ne peut en tout cas pas interdire sur un plan idéologique et
non pragmatique.
Vous allez bientôt être confrontés au principe de la responsabilité sans faute parce que le
projet assurantiel devrait avancer assez vite et venir sur la table du Parlement. Nous avons
plutôt une tendance à en exclure la chirurgie esthétique. Dans ce dossier, il nous parait que la
collectivité ne doit pas nécessairement, par le biais de la responsabilité sans faute, financer les
insatisfactions relatives à un résultat de chirurgie esthétique.
En conclusion, nous allons probablement légiférer mais je vous rassure nous allons le faire,
dans le cadre d’une pensée d’ouverture et libérale, en concertation avec le secteur. Je souhaite
que nous puissions messieurs et mesdames, les chirurgiens plasticiens, les médecins
esthétiques et les dermatologues vous laissez en mesure de nous rendre plus beaux et si c’est
possible plus belles.
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49
VII. ANNEXES : LEGISLATION FRANCAISE
1) Arrêté du 17 octobre 1996 relatif à la publicité des prix des actes médicaux et
chirurgicaux à visée esthétique
Le ministre délégué aux finances et au commerce extérieur,
Vu le code de la consommation, notamment son article L. 113-3 ;
Vu le décret no 86-1309 du 29 décembre 1986 fixant les conditions d'application de
l'ordonnance no 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la
concurrence ;
Vu l'arrêté du 3 octobre 1983 relatif à la publicité des prix de tous les services ;
Vu l'arrêté du 3 décembre 1987 relatif à l'information du consommateur sur les prix ;
Le Conseil national de la consommation consulté,
Arrête :
Art. 1er. - Pour toute prestation à visée esthétique, dont le montant estimé est supérieur ou
égal à 2 000 F ou comportant une anesthésie générale, le praticien remet un devis détaillé.
Les autres prestations à visée esthétique doivent également donner lieu à un devis détaillé
lorsque la personne examinée le demande.
Art. 2. - Tout devis doit comporter les mentions suivantes :
1. La date de rédaction ;
2. Le nom, l'adresse, le numéro d'inscription au conseil départemental de l'ordre des médecins,
la qualification dans une spécialité (y compris la médecine générale) et/ou la compétence
exclusive en chirurgie plastique,
reconstructrice et esthétique délivrée par le Conseil national de l'ordre des médecins et
l'existence ou non d'une assurance en responsabilité civile professionnelle du praticien, le
garantissant pour l'acte prévu ;
3. Le nom, le prénom, la date de naissance et l'adresse du patient demandeur ;
4. Le lieu d'exécution de la prestation en précisant, pour les établissements de santé privés, le
numéro d'agrément délivré par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales ;
5. La nature précise de l'acte prévu et de l'anesthésie nécessaire, la date proposée ; les
informations d'ordre médical concernant l'acte proposé peuvent être données sur un document
séparé ;
6. Le décompte détaillé, en quantité et en prix, de chaque prestation et produit nécessaires à
l'acte prévu : dénomination, prix unitaire et quantité prévue, à l'exception des examens
préopératoires, ainsi que la durée pendant laquelle sont assurés les soins postopératoires, la
somme globale à payer,
T.T.C., et la durée de validité de l'offre ;
7. Le nombre de jours d'arrêt de travail à prévoir et la nature des examens préopératoires
indispensables ;
8. L'obligation, pour le praticien, de fournir au médecin indiqué par la personne examinée le
compte rendu opératoire ;
9. Les phrases :
<< Lorsque des dispositifs médicaux ou de produits injectables à visée esthétique sont utilisés,
ils doivent être autorisés officiellement. Les références en seront détaillées sur la facture
(marque, fabricant, numéro de lot...).
<< S'il s'agit d'un acte uniquement à visée esthétique, les examens,
l'intervention, les prescriptions et l'arrêt de travail éventuel ne pourront être pris en charge par
l'assurance maladie.
50
<< Il est convenu que doit être respecté un délai minimum de quinze jours entre la remise de
ce document et l'intervention éventuelle. C'est un délai de réflexion avant toute décision, pour
le praticien comme pour la personne examinée. Pendant cette période, il ne peut être exigé ou
obtenu, de la personne examinée, directement ou indirectement, à quelque titre que ce soit ni
sous quelque forme que ce soit, une contrepartie quelconque ni aucun engagement, à
l'exception du prix de la présente consultation.
<< Ce délai peut toutefois être réduit à sept jours, à la demande expresse de la personne
examinée, qui devra mentionner elle-même, de manière manuscrite et signée, cette demande
sur le présent devis. >> Dans tous les cas, le devis, établi en double exemplaire et signé du
praticien, doit également comporter l'indication manuscrite, datée et signée du consommateur
: << devis reçu avant l'exécution de la prestation de service >>.
Passé le délai de réflexion, la personne examinée qui accepte le devis doit porter sur
l'exemplaire du praticien la mention manuscrite, datée et signée : << devis accepté après
réflexion >>.
Lorsque le praticien fournit les informations médicales mentionnées à l'alinéa 5 sur un
document séparé, ce document doit comporter les mêmes mentions manuscrites et signatures
que le présent devis.
Le praticien conserve le double du devis dans les mêmes conditions que celles prévues par
l'arrêté du 3 octobre 1983.
Art. 3. - Pour tous les actes à visée esthétique qui ne sont pas visés à l'article 1er, est remis à la
personne examinée un document d'information reprenant les alinéas 1 à 5 de l'article 2.
Art. 4. - Le présent arrêté sera publié au Journal officiel de la République française et entrera
en vigueur le 1er janvier 1997.
2) Loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de
santé : encadrement de la chirurgie esthétique dans des établissements accrédités
« Chapitre II
« Chirurgie esthétique
« Art. L. 6322-1. - Une intervention de chirurgie esthétique, y compris dans les établissements
de santé mentionnés au livre Ier, ne peut être pratiquée que dans des installations satisfaisant à
des conditions techniques de fonctionnement. Celles-ci font l'objet d'une accréditation dans
les conditions prévues à l'article L. 6113-3.
« La création de ces installations est soumise à l'autorisation de l'autorité administrative
territorialement compétente. L'autorisation, qui entraîne la possibilité de fonctionner, est
accordée pour une durée limitée renouvelable. Elle est subordonnée au résultat d'une visite de
conformité sollicitée par la personne autorisée et menée par l'autorité administrative
compétente.
« Elle est réputée caduque si l'installation n'a pas commencé à fonctionner dans un délai de
trois ans. De même, sauf accord préalable de l'autorité administrative sur demande justifiée du
titulaire de l'autorisation, l'arrêt du fonctionnement de l'installation pendant une durée
supérieure à six mois entraîne la caducité de l'autorisation. La caducité est constatée par
l'autorité administrative compétente.
« L'autorisation est retirée si une publicité directe ou indirecte sous quelque forme que ce soit
est effectuée en faveur de l'établissement titulaire de ladite autorisation.
« L'autorisation peut être suspendue totalement ou partiellement, ou peut être retirée par
l'autorité administrative compétente pour les motifs et dans les conditions prévues à l'article L.
51
6122-13. Toutefois, l'avis de la section compétente du conseil régional de santé n'est pas
exigé.
« L'activité, objet de l'autorisation, n'entre pas dans le champ des prestations couvertes par
l'assurance maladie au sens de l' article L. 321-1 du code de la sécurité sociale .
« Art. L. 6322-2. - Pour toute prestation de chirurgie esthétique, la personne concernée, et, s'il
y a lieu, son représentant légal, doivent être informés par le praticien responsable des
conditions de l'intervention, des risques et des éventuelles conséquences et complications.
Cette information est accompagnée de la remise d'un devis détaillé. Un délai minimum doit
être respecté par le praticien entre la remise de ce devis et l'intervention éventuelle. Pendant
cette période, il ne peut être exigé ou obtenu de la personne concernée une contrepartie
quelconque ni aucun engagement à l'exception des honoraires afférents aux consultations
préalables à l'intervention.
« Art. L. 6322-3. - Les conditions d'autorisation des installations mentionnées à l'article L.
6322-1 sont fixées par décret en Conseil d'Etat. Les conditions techniques de leur
fonctionnement et la durée du délai prévu à l'article L. 6322-2 sont fixées par décret. »
II. - Dans un délai de six mois à compter de la publication du décret en Conseil d'Etat prévu à
l' article L. 6322-3 du code de la santé publique , les responsables des installations de
chirurgie esthétique existant à cette même date doivent déposer une demande d'autorisation.
Ils peuvent poursuivre leur activité jusqu'à ce qu'il soit statué sur leur demande par l'autorité
administrative compétente dans les conditions prévues à l'article L. 6322-3 du même code.
3) Décret d’application du 11 juillet 2005
Décret n° 2005-776 du 11 juillet 2005 relatif aux conditions d'autorisation des installations de
chirurgie esthétique et modifiant le code de la santé publique
Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre de la santé et des solidarités,
Vu le code de la santé publique, notamment ses articles L. 6322-1 à L. 6322-3 ;
Vu le code de la sécurité sociale, notamment son article L. 376-1 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations
avec les administrations, et notamment ses articles 16, 21 et 22 ;
Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du
système de soins, notamment son article 52 ;
Vu le décret n° 97-34 du 15 janvier 1997 relatif à la déconcentration des décisions
administratives individuelles ;
Le Conseil d'Etat (section sociale) entendu,
Décrète :
Chapitre 1er
Dispositions générales
Article 1
Il est inséré dans le livre VII du code de la santé publique (deuxième partie : Décrets en
Conseil d'Etat), après le titre II, un titre III, comprenant les articles R. 740-1 à R. 740-24, ainsi
rédigé :
« TITRE III
52
« CHIRURGIE ESTHÉTIQUE
« Section 1
« Autorisation
« Art. R. 740-1. - Sont soumises aux dispositions du présent titre les installations où sont
pratiqués des actes chirurgicaux tendant à modifier l'apparence corporelle d'une personne, à sa
demande, sans visée thérapeutique ou reconstructrice.
« Art. R. 740-2. - L'autorisation mentionnée à l'article L. 6322-1 est accordée ou renouvelée
par le préfet du département où se situent les installations de chirurgie esthétique.
« Art. R. 740-3. - Les demandes d'autorisation et de renouvellement de l'autorisation sont
adressées au préfet, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, par la ou les
personnes physiques ou morales qui sollicitent pour leur propre compte la délivrance de
l'autorisation.
« Les demandes de renouvellement sont présentées dans les mêmes conditions par le titulaire
de l'autorisation, huit mois au moins et douze mois au plus avant l'achèvement de la durée de
l'autorisation en cours de validité.
« Art. R. 740-4. - Les demandes d'autorisation ou de renouvellement de l'autorisation ne
peuvent être examinées par le préfet que si elles sont accompagnées d'un dossier complet.
« Ce dossier doit comprendre les éléments suivants :
« 1° Un dossier administratif comportant :
« a) L'identité et le statut juridique du demandeur ;
« b) La présentation du projet d'installation servant à la pratique de la chirurgie esthétique ou
le projet d'exercice de la chirurgie esthétique au sein de l'établissement de santé, et, lorsqu'il
s'agit d'une demande de renouvellement, les modifications, le cas échéant, envisagées ;
« c) Un engagement du demandeur sur le maintien des caractéristiques de l'installation après
l'autorisation ou le renouvellement ;
« d) Les conventions conclues avec un ou plusieurs établissements de santé autorisés à
exercer l'activité de soins "Accueil et traitement des urgences et l'activité de soins de
réanimation mentionnées à l'article R. 712-28, en vue d'organiser, le cas échéant, le transfert
d'urgence des personnes prises en charge par le demandeur, lorsque le demandeur n'est pas un
établissement de santé autorisé à exercer ces activités ;
« e) Le cas échéant, la convention mentionnée à l'article R. 5126-112 ;
« f) Un document attestant l'adoption du système prévu à l'article L. 6111-1 et, le cas échéant,
la convention mentionnée au deuxième alinéa de l'article R. 711-1-18 ;
« g) Une attestation du demandeur et de son assureur qu'ils ont connaissance des obligations
d'information des caisses d'assurance maladie, en application de l'article L. 376-1 du code de
la sécurité sociale, en cas d'accident ou de lésion causés à un assuré social ;
« 2° Un dossier relatif aux personnels, faisant apparaître les engagements du demandeur
relatifs aux effectifs et à la qualification des personnels, notamment médicaux,
pharmaceutiques et non médicaux, nécessaires à la mise en oeuvre du projet et à la pratique de
la chirurgie esthétique ;
« 3° Un dossier technique et financier comportant :
« a) Une présentation, accompagnée de plans cotés et orientés, des installations servant à
l'activité de chirurgie esthétique, ainsi que des moyens d'hospitalisation et des moyens
techniques, notamment le secteur opératoire, qui sont mis en place ou que le demandeur
s'engage à mettre en place pour satisfaire aux conditions d'autorisation et aux conditions
techniques de fonctionnement fixées en application de l'article L. 6322-1 ;
« b) Une présentation des modalités de financement du projet et du compte ou budget
53
prévisionnel d'exploitation ;
« 4° Un dossier relatif à l'évaluation comportant :
« a) L'énoncé des objectifs que s'est assignés le demandeur relatifs notamment à la qualité, à
la sécurité et à la continuité des soins donnés aux personnes faisant l'objet d'une intervention
de chirurgie esthétique ;
« b) La description des indicateurs et des méthodes prévus pour apprécier la réalisation de ces
objectifs ;
« c) La description du système de recueil et de traitement des données médicales, techniques
et administratives nécessaires à la mise en oeuvre de l'évaluation comprenant :
« - les caractéristiques des interventions réalisées, notamment les constatations de l'état de la
personne concernée avant et après l'intervention ;
« - le volume des actes par nature et par degré de complexité ;
« - les données relatives à la surveillance des risques de survenance d'accident médical,
d'affection iatrogène, d'infection nosocomiale ou d'événement indésirable lié à un produit de
santé, ainsi qu'au signalement des faits constatés de ces diverses natures ;
« d) La description du dispositif d'information et de participation des personnels médicaux et
non médicaux impliqués dans la procédure d'évaluation ;
« e) La description des procédures ou des méthodes d'évaluation de la satisfaction des
personnes faisant l'objet d'une intervention de chirurgie esthétique.
« Lorsqu'il s'agit d'une demande de renouvellement, le demandeur joint au dossier les rapports
d'évaluation établis pendant la précédente période d'autorisation et une synthèse faisant état
des mesures prises ou qu'il s'engage à prendre pour corriger les éventuels écarts constatés. Les
objectifs et les moyens d'évaluation mentionnés ci-dessus tiennent compte des résultats de
l'évaluation correspondant à cette période.
« Le demandeur joint également au dossier une copie du rapport de certification par la Haute
Autorité de santé mentionnée à l'article L. 6113-3, ou à défaut une copie de l'accusé de
réception par cette autorité de sa demande d'engagement de la procédure de certification.
« Art. R. 740-5. - Le dossier est complet le jour où sont reçues par le préfet toutes les pièces
prévues à l'article R. 740-4.
« Toutefois, le dossier est réputé complet au jour de sa réception si, dans le délai d'un mois à
compter de ce jour, le préfet n'a pas fait connaître au demandeur, par lettre recommandée avec
demande d'avis de réception, la liste des pièces manquantes ou incomplètes, en l'invitant à
compléter le dossier dans les conditions d'envoi prévues au premier alinéa de l'article R. 7403.
« Lorsqu'il s'agit d'une demande tendant à obtenir le renouvellement de l'autorisation, le
dossier non complet au plus tard huit mois avant l'échéance est réputé non déposé.
« Art. R. 740-6. - Le silence gardé par le préfet vaut rejet de la demande à l'expiration d'un
délai de quatre mois à compter du jour où le dossier de la demande est complet ou réputé
complet.
« Lorsque la demande tend à obtenir le renouvellement de l'autorisation, le silence gardé par
le préfet au-delà de quatre mois à compter du même jour vaut tacite reconduction de
l'autorisation à la date de son échéance.
« Ces délais sont portés à six mois lorsque le préfet décide de faire procéder à une inspection
des installations à l'occasion de l'instruction d'une demande de renouvellement ou à l'occasion
de l'instruction de la demande de confirmation d'autorisation en cas de cession d'exploitation
prévue à l'article R. 740-10.
« Art. R. 740-7. - Une décision de refus d'autorisation ne peut être prise que pour l'un ou
plusieurs des motifs suivants :
« 1° Lorsque le projet n'est pas conforme aux conditions d'autorisation fixées aux articles R.
740-14 à R. 740-24 ou aux conditions techniques de fonctionnement fixées en application de
54
l'article L. 6322-3 ;
« 2° Lorsqu'il a été constaté un début de création des installations avant l'octroi de
l'autorisation.
« Art. R. 740-8. - Une décision de refus de renouvellement de l'autorisation ne peut être prise
que pour un ou plusieurs des motifs suivants :
« 1° Lorsque les installations et leur utilisation ne satisfont pas aux conditions d'autorisation
fixées aux articles R. 740-14 à R. 740-24 ou aux conditions techniques de fonctionnement
prévues à l'article L. 6322-3 ;
« 2° Lorsqu'est constaté le non-respect des obligations prévues à l'article L. 6322-2 ;
« 3° Lorsqu'il a été constaté une publicité directe ou indirecte sous quelque forme que ce soit
en faveur de l'activité de chirurgie esthétique réalisée par le titulaire de l'autorisation ;
« 4° Lorsque le titulaire de l'autorisation n'a pas engagé la procédure de certification prévue à
l'article L. 6113-3 ;
« 5° Lorsque les caractéristiques des installations ou de leur fonctionnement ne sont plus en
conformité avec l'autorisation ;
« 6° Lorsque l'évaluation n'est pas réalisée ou ne fait pas apparaître que les objectifs
mentionnés au a du 4° de l'article R. 740-4 ont été poursuivis ;
« 7° Lorsque l'exploitation a été cédée, sans la confirmation d'autorisation prévue à l'article R.
740-10.
« Art. R. 740-9. - Les décisions d'autorisation ou de rejet explicites doivent être motivées.
« Elles sont notifiées au demandeur par lettre recommandée avec demande d'avis de
réception.
« Toute décision expresse d'autorisation, de renouvellement ou de rejet fait l'objet d'une
publication au recueil des actes administratifs du département. Il est fait mention à ce recueil
des décisions implicites de reconduction de l'autorisation prévues à l'article R. 740-6 et de la
date à laquelle elles prennent effet.
« Le préfet délivre une attestation de ces décisions implicites aux bénéficiaires, sur leur
demande.
« La demande par laquelle est sollicitée la communication des motifs d'une décision implicite
de rejet intervenue en application de l'article R. 740-6 est adressée au préfet par lettre
recommandée avec demande d'avis de réception dans les deux mois à compter de la date à
laquelle la décision implicite est née ; les motifs sont indiqués au demandeur dans le mois qui
suit la réception de cette lettre.
« Art. R. 740-10. - Dans le cas de cession de l'exploitation, y compris lorsque cette cession
résulte d'un regroupement ou d'une fusion, le cessionnaire, avant de commencer l'exploitation
pour son compte, adresse au préfet, suivant les modalités prévues au premier alinéa de l'article
R. 740-3, une demande de confirmation de l'autorisation, assortie du dossier prévu à l'article
R. 740-4 tel qu'il est exigible pour une demande de renouvellement et faisant apparaître, le cas
échéant, les modifications qu'il entend apporter aux installations ou à leur fonctionnement.
« Le dossier comporte en outre un document signé du cédant ou de son représentant légal,
attestant la cession, ou une copie de l'acte ou de la promesse de vente.
« Le préfet statue sur cette demande suivant les modalités prévues pour une demande
d'autorisation.
« La confirmation de l'autorisation ne peut être refusée que si le dossier présenté par le
cessionnaire fait apparaître des modifications qui seraient de nature à justifier un refus de
renouvellement en application de l'article R. 740-8.
« Art. R. 740-11. - La caducité de l'autorisation prévue par l'article L. 6322-1 est constatée par
le préfet. Le délai de trois ans mentionné au troisième alinéa de cet article court à partir du
jour de la notification de la décision expresse accordant l'autorisation.
« La durée de validité des autorisations est de cinq ans. Pour la première autorisation, cette
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durée est comptée à partir du jour où est constaté le résultat positif de la visite de conformité
prévue au même article. Pour le renouvellement de l'autorisation, cette durée est comptée à
partir du lendemain de l'expiration de la précédente autorisation.
« La confirmation de l'autorisation en cas de cession ne modifie pas la durée de l'autorisation
en cours de validité.
« Art. R. 740-12. - Les décisions de suspension et de retrait prévues au cinquième alinéa de
l'article L. 6322-1 sont prises par le préfet pour les motifs et dans les conditions définies par
l'article L. 6122-13. Elles doivent être motivées. Elles sont notifiées et publiées selon les
modalités prévues à l'article R. 740-9.
« La suspension ne proroge pas la durée de l'autorisation, sous réserve de ce qui est prévu à
l'article R. 740-13.
« Art. R. 740-13. - Lorsque, au cours de l'examen d'une demande de renouvellement ou d'une
demande de confirmation de l'autorisation, les constatations faites lors de l'inspection
mentionnée au dernier alinéa de l'article R. 740-6 conduisent à la suspension de l'autorisation
mentionnée à l'article L. 6322-1, les délais prévus par l'article 740-6, ainsi que les durées
mentionnées au deuxième alinéa de l'article R. 740-11 sont interrompus jusqu'à l'intervention
de la décision définitive.
« Cette interruption est applicable aux demandes qui sont présentées en vue de la
confirmation ou du renouvellement de la durée d'une autorisation pendant qu'elle est
suspendue.
« Si l'autorisation n'est pas retirée, l'examen de la demande de renouvellement ou de
confirmation d'autorisation reprend alors, sans que le silence du préfet sur cette demande ait
pu faire naître la tacite reconduction de l'autorisation prévue à l'article R. 740-6. La durée de
validité de l'autorisation renouvelée est comptée, comme il est prévu au deuxième alinéa de
l'article R. 740-11, à partir du lendemain du jour où devait expirer l'autorisation précédente.
« Section 2
« Conditions d'autorisation
« Art. R. 740-14. - L'autorisation prévue à l'article L. 6322-1 ne peut être accordée que pour
les installations remplissant les conditions prévues à la présente section.
« Art. R. 740-15. - Lorsqu'elles ne sont pas desservies par la pharmacie à usage intérieur d'un
établissement de santé en vertu du 4 de l'article R. 5126-3, les installations de chirurgie
esthétique peuvent disposer d'une pharmacie à usage intérieur dans les conditions prévues à
l'article L. 5126-1 et aux articles R. 5126-2 à R. 5126-52.
« A défaut, elles se conforment pour l'approvisionnement, la détention et la dispensation des
produits pharmaceutiques et des médicaments aux dispositions des articles R. 5126-111 à R.
5126-115.
« Art. R. 740-16. - La personne titulaire de l'autorisation relative aux installations de chirurgie
assure la qualité de la stérilisation des dispositifs médicaux dans les conditions prévues aux
articles R. 711-1-15 à R. 711-1-18.
« Art. R. 740-17. - Les déchets issus des activités de chirurgie esthétique sont considérés
comme des déchets d'activités de soins, au sens et pour l'application des dispositions de
l'article R. 1335-1.
« Les dispositions des articles R. 1335-2 à R. 1335-8 et des articles R. 1335-13 et R. 1335-14
relatifs à l'élimination des déchets d'activités de soins à risques infectieux et assimilés sont
applicables aux installations de chirurgie esthétique.
« Art. R. 740-18. - Les dispositions des articles R. 1113-1 à R. 1113-9 relatifs à la
responsabilité des établissements à l'égard des biens des personnes accueillies sont applicables
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aux installations de chirurgie esthétique.
« Art. R. 740-19. - Les dispositions des articles R. 1112-79 à R. 1112-94 relatifs à la
commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge sont
appliquées aux personnes prises en charge dans les installations de chirurgie esthétique dont le
titulaire de l'autorisation est un établissement de santé.
« Dans ce cas, le préfet reçoit le rapport prévu au 3 du II de l'article R. 1112-80, ou
communication des éléments relatifs à l'activité de chirurgie esthétique figurant à ce rapport.
« Art. R. 740-20. - I. - Lorsque le titulaire de l'autorisation n'est pas un établissement de santé,
il met en place un comité de relations avec les usagers et de qualité de la prise en charge ainsi
constitué :
« 1° Le titulaire de l'autorisation, ou son représentant, président ;
« 2° Deux médiateurs médecins et leurs suppléants ;
« 3° Deux médiateurs non médecins et leurs suppléants ;
« 4° Un représentant des usagers et son suppléant.
« Les médiateurs non médecins et leurs suppléants sont désignés par le titulaire de
l'autorisation parmi le personnel infirmier ou aide-soignant exerçant dans les installations de
chirurgie esthétique.
« Les médiateurs médecins et leurs suppléants sont désignés par le titulaire de l'autorisation
parmi les médecins exerçant la chirurgie esthétique dans d'autres installations que les
installations concernées ou ayant cessé d'exercer la chirurgie esthétique ou des fonctions de
médiateur depuis moins de cinq ans.
« Le représentant des usagers et son suppléant sont désignés par le préfet parmi les personnes
proposées par les associations mentionnées à l'article L. 1114-1, ou, à défaut, par les
associations de défense des consommateurs, régulièrement déclarées.
« II. - Le titulaire de l'autorisation peut décider de compléter la composition de ce comité par
un médecin et un suppléant ainsi que par un représentant du conseil d'administration ou de
l'organe collégial qui en tient lieu et un suppléant. Le médecin et son suppléant sont choisis
par et parmi les médecins exerçant dans l'installation de chirurgie esthétique. Le représentant
du conseil d'administration ou de l'organe collégial qui en tient lieu et son suppléant sont
choisis par et parmi les membres qui n'y représentent pas les professionnels.
« Les membres du comité sont nommés pour une durée de trois ans renouvelable.
« III. - En cas de vacance d'un siège de médiateur médecin pendant une période supérieure à
six mois, le préfet en désigne un sur proposition du conseil départemental de l'ordre des
médecins, parmi des praticiens remplissant les conditions d'exercice définies au I ci-dessus.
« Une même personne ne peut assurer les missions de médiateur médecin titulaire ou
suppléant auprès de plus de trois établissements simultanément.
« Le titulaire de l'autorisation assure les médiateurs médecins titulaires et suppléants pour les
risques courus au titre de leurs missions.
« IV. - La liste nominative des membres du comité est affichée dans l'établissement et remise
à chaque patient.
« V. - Le comité se réunit sur convocation de son président au moins une fois par an et aussi
souvent que nécessaire pour procéder à l'examen des plaintes et réclamations dans les
conditions prévues à l'article R. 740-21.
« Le président ne prend pas part aux votes. En cas de partage égal des voix, le comité est
regardé comme ayant donné son avis.
« Art. R. 740-21. - I. - Le comité veille au respect des droits des usagers et facilite leurs
démarches. Il veille à ce que toute personne soit informée sur les voies de recours et de
conciliation dont elle dispose.
« A cet effet, l'ensemble des plaintes et des réclamations exprimées par les usagers ou leurs
proches sont tenues à sa disposition par le titulaire de l'autorisation.
57
« Les réponses qui sont apportées à ces plaintes et réclamations par les responsables sont
accompagnées d'une information sur la possibilité de saisir le comité.
« Le comité examine les plaintes et réclamations dont il est saisi par le titulaire de
l'autorisation ou par la personne intéressée. Le ou les médiateurs concernés rencontrent
l'auteur de la plainte ou de la réclamation et en rendent compte au comité. Une copie de ce
compte rendu est transmise au plaignant.
« Après avoir, s'il le juge utile, entendu l'auteur de la plainte ou de la réclamation, le comité
formule des recommandations en vue d'apporter une solution au litige ou d'informer
l'intéressé des voies de conciliation ou de recours dont il dispose. Il peut également émettre un
avis motivé en faveur du classement du dossier.
« Dans le délai de huit jours suivant la séance, le titulaire de l'autorisation répond à l'auteur de
la plainte ou de la réclamation et joint à son courrier l'avis du comité.
« II. - Le comité contribue par ses avis et propositions à l'amélioration de la prise en charge
des personnes accueillies.
« A cet effet :
« 1° Il reçoit toutes les informations nécessaires à l'exercice de ses missions, notamment :
« a) Le résultat de l'évaluation de la satisfaction des personnes mentionnée au e du 4° de
l'article R. 740-4 ;
« b) Le nombre, la nature et l'issue des recours formés par les usagers ;
« 2° A partir notamment de ces informations, le comité :
« a) Procède à une appréciation des pratiques concernant les droits des usagers et la qualité de
l'accueil et de la prise en charge, fondée sur une analyse de l'origine et des motifs des plaintes,
des réclamations et des témoignages de satisfaction reçus ainsi que des suites qui leur ont été
apportées ;
« b) Formule des recommandations, notamment en matière de formation des personnels,
destinées à améliorer l'accueil et la qualité de la prise en charge des personnes accueillies et
de leurs proches et à assurer le respect des droits des usagers.
« III. - Le rapport annuel d'activité du comité est transmis au préfet.
« Art. R. 740-22. - Les dispositions des articles R. 1112-1 à R. 1112-3, de l'article R. 1112-5
et des articles R. 1112-7 à R. 1112-9 relatifs à l'information des personnes accueillies et à la
communication des informations de santé définies à l'article L. 1111-7 sont applicables aux
installations de chirurgie esthétique.
« Lorsque le titulaire de l'autorisation n'est pas un établissement de santé, il exécute ces
dispositions comme elles sont prévues pour les établissements de santé privés ne participant
pas à l'exécution du service public hospitalier ; toutefois, à défaut de conférence médicale, les
médecins mentionnés aux articles R. 1112-1 et R. 1112-7 sont désignés par le titulaire de
l'autorisation ou par son représentant légal.
« Art. R. 740-23. - Les dispositions des articles R. 710-6-1 à R. 710-6-4 relatives à la
certification sont applicables aux installations de chirurgie esthétique en application de
l'article L. 6322-1.
« Les faits ou manquements mettant en jeu la sécurité des patients, mentionnés à l'article R.
710-6-3, sont portés à la connaissance du préfet.
« Lorsque le titulaire de l'autorisation prévue à l'article L. 6322-1 est un établissement de
santé, la certification de ses installations et de son activité de chirurgie esthétique est conjointe
à la certification à laquelle il est soumis pour les activités qu'il exerce au titre des missions
définies aux articles L. 6111-1 et L. 6111-2 ; elle fait l'objet d'une mention particulière.
« Art. R. 740-24. - Lorsque le titulaire de l'autorisation relative aux installations de chirurgie
esthétique est un établissement de santé, il peut satisfaire aux obligations mentionnées aux
articles R. 740-16 à R. 740-19 et aux articles R. 740-22 et R. 740-23 par les dispositions qu'il
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a prises pour répondre à ces mêmes obligations et mettre en oeuvre les mesures d'exécution
qu'elles exigent dans l'exercice de ses missions définies aux articles L. 6111-1 et L. 6111-2. »
Chapitre 2
Dispositions transitoires et finales
Article 2
Pour l'application des dispositions du II de l'article 52 de la loi du 4 mars 2002 visée ci-dessus
aux personnes, physiques ou morales, y compris les établissements de santé, faisant, à la date
de publication du présent décret, fonctionner des installations de chirurgie esthétique, les
dispositions transitoires suivantes sont applicables :
I. - Les demandes d'autorisation sont adressées, avec le dossier prévu à l'article R. 740-4, dans
les six mois suivant la publication du présent décret, au préfet du département où se situent les
installations. Le dossier est présenté dans les formes prévues au premier alinéa de l'article R.
740-3 du code de la santé publique. Elles sont reçues et instruites selon les modalités prévues
aux articles R. 740-5 à R. 740-9 du même code.
II. - Le dossier de la demande d'autorisation comporte l'attestation par le demandeur qu'il a
fait toutes diligences pour mettre fin à toute publicité en cours, directe ou indirecte sous
quelque forme que ce soit, en faveur de ses activités de chirurgie esthétique et qu'il n'en a
commandé aucune pour le futur ; le délai d'aboutissement de ces diligences ne peut pas être
supérieur à treize mois après la date de dépôt de la demande d'autorisation.
III. - Lorsque le préfet fait procéder à une inspection des installations, le délai dont il dispose
pour instruire la demande est celui qui est prévu au dernier alinéa de l'article R. 740-6 du
même code.
Article 3
Les autorisations pourront être accordées aux installations pratiquant la chirurgie esthétique à
la date de la publication du présent décret et ne satisfaisant pas encore aux conditions
d'autorisation et aux conditions techniques de fonctionnement sous réserve que soit imposée
au titulaire de l'autorisation la mise en conformité de ces installations dans un délai de dixhuit mois suivant la notification de la décision d'autorisation.
Toutefois, ce délai est porté à deux ans à compter de cette notification en ce qui concerne les
conditions relatives à la qualification des chirurgiens exerçant dans ces installations.
La visite de conformité prévue à l'article L. 6322-1 du même code doit être demandée au plus
tard au terme du délai de dix-huit mois. L'attestation relative à la qualification des chirurgiens
doit être transmise au préfet au plus tard au terme du délai de deux ans.
Article 4
I. - La durée de validité de l'autorisation est comptée à partir du jour où la notification de la
décision a été reçue par le titulaire.
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II. - Les personnes, physiques ou morales, y compris les établissements de santé, faisant
fonctionner des installations de chirurgie esthétique à la date de publication du présent décret
qui, à l'échéance des six mois suivant cette date, n'ont pas déposé la demande prévue à l'article
52 de la loi susvisée doivent à cette échéance cesser sans délai toute activité de chirurgie
esthétique définie par l'article R. 740-1 du code de la santé publique.
Article 5
Le ministre de la santé et des solidarités est chargé de l'exécution du présent décret, qui sera
publié au Journal officiel de la République française.
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