L3 EBO Écologie et Biologie des Organismes Année 2015/2016 Université de Rouen Direction Régionale de l'Environnement de l'Aménagement et du Logement de Normandie Service Ressources Naturelles Bureau de la Biodiversité et des Espaces Naturels Tuteur universitaire : Estelle Forey Université de Rouen Maître de stage : Sophie Lardilleux DREAL Normandie Mise à jour de l'étude statistique des haies en Normandie 2 Remerciements Tout d'abord, j'adresse mes remerciements à Estelle Langlois et Estelle Forey, professeures à l'Université de Rouen, pour avoir accordé aux étudiants n’ayant pas trouvé de stage une seconde chance en prolongeant la période de réalisation de celui-ci jusqu'aux vacances d'été. Je remercie François Chevaux, adjoint au responsable du bureau de la police de l'eau à la Direction Départementale des Territoires et de la Mer en Seine-Maritime, qui m'a permis de trouver ce stage. Je tiens à remercier ma maître de stage, Sophie Lardilleux, chargée de mission Trame Verte et Bleue – PNR - Agriculture, pour son accueil, son encadrement et les connaissances qu'elle m'a apportées. Je remercie également Julien Defenouillère, et ses collègues du Bureau de l’Information Géographique, pour leur disponibilité et leur aide sur le logiciel QGIS tout au long de mon stage. Enfin, je tiens à remercier toute l’équipe du Service Ressources Naturelles pour leur accueil chaleureux et leur sympathie durant ces deux mois de stage. 3 Sommaire Introduction ….....................................................................................................................1 I) Contexte de l'étude : le bocage …........................................................................................3 1) La haie : définition et historique................................................................................3 2) Un ensemble fonctionnel...........................................................................................3 3) Protection des haies …..............................................................................................6 II) Protocole …..........................................................................................................................7 1) Photo-interprétation …..............................................................................................7 2) Calcul des indices ….................................................................................................9 III) Résultats ….......................................................................................................................11 1. Indice linéaire ….....................................................................................................11 2. Indice de cohérence …............................................................................................12 IV) Discussion …............................................................…..........................................14 Conclusion ….....................................................................................................................15 Bibliographie / Webographie ……………………………………………………………………16 Annexes …………………………………………………………………………………………17 4 Introduction La Direction Régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement (DREAL) de Normandie est un service de l’État, c'est l'échelon régional du ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie et du ministère du Logement, de l’Égalité des Territoires et de la Ruralité. La DREAL a plusieurs missions, dont l'élaboration et la mise en œuvre des politiques de l’État en matière d’environnement, dans le but de le protéger. Elle est divisée en services, eux-mêmes divisés en bureaux. Au sein du Service Ressources Naturelles, le Bureau de la Biodiversité et des Espaces Naturels est chargé de la protection des espèces et des espaces, des politiques et polices de la nature, et de l’accompagnement des projets pour l’intégration de la biodiversité. Les milieux naturels et la richesse de la faune et de la flore associées, sont érodés, fragilisés et menacés par l'activité humaine (urbanisation, culture intensive, infrastructures routières, etc). L'un des principaux enjeux actuels pour le développement durable de nos sociétés est de permettre aux espèces animales et végétales de circuler, s’alimenter, se reproduire, se reposer… Autrement dit, d'assurer leur survie et permettre aux écosystèmes de continuer à rendre à l’Homme des services (qualité des eaux, pollinisation, prévention des inondations, amélioration du cadre de vie…) : c'est l'ambition de la Trame Verte et Bleue (TVB). La TVB est un outil d’aménagement du territoire, avec pour objectif la préservation de la biodiversité en freinant la dégradation et la disparition des milieux naturels et en les reliant entre eux pour former un réseau écologique cohérent, à l’échelle du territoire national. Elle agit en complément des démarches de préservation des milieux naturels déjà existantes. Ce réseau, ou continuités écologiques, est constitué des réservoirs de biodiversité (zones vitales, qui présentent une biodiversité remarquable où les espèces peuvent réaliser l’ensemble de leur cycle de vie : reproduction, alimentation, abri…) écologiques (axe et de des corridors communication empruntées par les individus qui relient les réservoirs de biodiversité), les réservoirs doivent pouvoir bénéficier d'une zone tampon permettant de limiter l'influence de zones trop artificielles sur leurs équilibres écologiques. Le tout permet à une population d’espèces de circuler et ainsi faciliter les échanges génétiques nécessaires à la survie des espèces Figure 1 : les continuités écologiques de la faune et de la flore sauvage (figure 1 : (Source : www.trameverteetbleue.fr) les continuités écologiques). 1 Parmi ces milieux riches en biodiversité ; le bocage est un milieu créé par l'Homme, dont les haies assurent des fonctions essentielles sur le plan écologique, notamment la fonction de corridor écologique, et économique. On rencontre des paysages bocagers principalement dans l'ouest de la France (figure 2 : la densité de haies en France), en Normandie, Bretagne et Pays de la Loire. L'ex-BasseNormandie totalise à elle-seule près de 20 % des haies en France, d'où l'importance primordiale du bocage dans la région. Néanmoins, on assiste depuis une cinquantaine d'années à une régression et une fragmentation du bocage (dues aux remembrements, à la recherche de productivité agricole, etc). La plupart du temps, les haies font partie du domaine privé et l'arrachage de celles-ci résulte souvent d'une décision individuelle. Il n'existe pas pour les haies de législation comme celle qui réglemente la gestion des forêts, ainsi l'évolution globale du bocage n'est pas maîtrisée. Il est donc important de sensibiliser les communes, les agriculteurs et les particuliers à l'intérêt du bocage. Il ne s'agit pas de reconstituer un bocage enserrant des petites parcelles, mais de maintenir un Figure 2 : La densité de haies en France bocage (sources IFN, 2007) fonctionnel et un réseau cohérent compatibles avec l'agriculture d'aujourd’hui et demain. La DREAL a mis en place un suivi de la dynamique bocagère en Basse-Normandie, actuellement réalisé pour les années 1972, 1984, 1998, 2006 et 2010. Le but étant de réaliser une étude à l’échelle de la région, avec la même méthodologie utilisée dans le temps et l’espace. L’objectif de mon stage est d’actualiser l'étude avec les données de 2012 pour la Basse Normandie et, suite à la réunification de la Normandie, de l'élargir à la Haute-Normandie. 2 I) Contexte de l'étude : le bocage 1) La haie : définition et historique Le bocage peut avoir de nombreuses définitions selon les disciplines : paysage, tourisme, histoire, biologie… Ici, on considérera que le bocage est un aménagement agricole, où les parcelles (prairies ou cultures) sont entourées par un réseau de haies, connectées entre elles et avec milieux avoisinants (comme les mares). C'est un paysage semi-naturel, façonné par l'homme et modifié au cours du temps selon ses besoins. Il est souvent cité en exemple d’une gestion équilibrée entre les activités humaines et les dynamiques naturelles. En Normandie, le bocage est très présent à l’ouest, principalement dans la Manche. Il est très peu dense au niveau de l’ancienne Haute-Normandie, toutefois, on en retrouve dans le pays de Bray et dans le Lieuvin, aux confins du pays d’Auge (voir annexe 1 : délimitation des différents pays de Normandie). Les premiers bocages bas-normands apparaissent au Moyen-Âge. Les haies sont plantées comme clôtures, elles délimitent les propriétés et empêchent à la fois la divagation des troupeaux et les protègent des aléas climatiques. L'utilisation de la haie en tant que compléments alimentaires, bois d'œuvre et de chauffage renforcent son intérêt. En Haute-Normandie, les haies bocagères apparaissent seulement au XIXe siècle, tandis que le bocage bas-normand atteint son apogée à la fin de ce même siècle en matière de densité. Mais au XXe siècle, et surtout après la seconde guerre mondiale, on constate un fort recul du bocage. L'intensification de l'agriculture et la modernisation des techniques et des matériels favorisent les opérations de remembrement. Les parcelles sont agrandies et la haie devient une gène pour les agriculteurs entraînant leur arrachage (elle demande un entretien régulier, occupe une surface potentiellement cultivable, empêche le passage d'engins agricoles). De plus, la diminution de la maind’œuvre, la perte d'intérêt économique de la haie comme fourrage ou combustible favorisent son abandon. Dès les années 1970-80, les associations écologistes attirent l'attention sur les ravages environnementaux induits par le débocagement, limitant ainsi la vitesse de diminution du linéaire de haies, qui tend à se stabiliser, en Normandie, depuis 1990. 2) Un ensemble fonctionnel Le bocage est un ensemble fonctionnel qui a de nombreux intérêts. ● Biodiversité Le bocage résulte d'un long et patient travail des paysans, c'est cette lenteur qui a permis la conservation des équilibres biologiques et favorisé la diversité biologique du bocage. La haie est un lieu de vie important pour la faune et la flore : source de nourriture, abris variés privilégiés par la faune permettant reproduction, refuge, repos (nidification, terriers), mais aussi un lieu permettant aux espèces 3 de circuler, se mélanger, migrer (dissémination des graines). La haie est donc à la fois un corridor écologique et un réservoir de biodiversité. Les haies abritent une faune et flore non spécifique au bocage. C’est un milieu riche, caractérisé, en partie grâce à l'effet lisière de la haie, par la présence conjointe d'espèces forestières et d'espèces prairiales. Les haies relient les différents milieux qui les entourent : forêts, prairies, cours d’eau, mares, etc. De nombreuses espèces, de biotopes très variés, sont représentées sans que l'une ou l'autre soit particulièrement abondante ou au contraire rare. Les maillages bocagers regroupent une richesse floristique conséquente. Pour qu’une haie présente le maximum d’avantages, elle doit être composée des différentes strates : - arborescente : composée des arbres qui devaient dominer dans les forêts d'origine : chênes, frênes, merisiers, hêtres, noyers, châtaigner… - arbustive, source de fruits pour les animaux : prunelliers, aubépine, noisetiers, charme, sureau, etc - herbacée, sur talus ou non, est source de nourriture pour les animaux, permet aux pollinisateurs de butiner, de cacher la faune d’éventuels prédateurs. (Voir annexe 2 : répartition des principales essences des strates arborescente et arbustive de BN). La haie abrite une importante richesse faunistique, elle est colonisée à tous les niveaux (sol, litière, feuillage, tiges, hautes branches) et pour toutes les formes d’alimentation (détritivores, herbivores, granivores, insectivores, carnivores) (ONCFS). La faune bocagère est majoritairement forestière et prairiale, mais il convient d'y ajouter une faune aquatique surtout liée aux mares. On trouve des mammifères : campagnols, mulots, renards, muscardins, lapins de garenne… Le débocagement a des répercussions directes sur la faune. À titre d’exemple, il existe une régulation naturelle entre les prédateurs (carnivores) : renard et belette, et proies : campagnols. Suite à l'arrachage des haies, les renards et belettes n'ont plus d'endroit où se réfugier et se reproduire, leur population diminue, la densité de campagnols explose et menacent les activités agricoles : près de 10 000 hectares de prairies ou culture sont ravagés chaque année en France (livret Association EVPB, 2016). Les oiseaux se nichent à différents niveaux selon les espèces. Les rapaces utilisent la strate arborescente comme nichoir, les merles et pies nichent à mi-hauteur, tandis que le faisan, la perdrix ou encore l’alouette nichent au pied de la haie. Il y a également de petits reptiles (serpents, lézards), des amphibiens (tritons, crapauds, grenouilles), et de nombreux insectes. ● Brise-vent et régulateur climatique Une haie brise-vent efficace est composée des trois strates végétales, semi-perméable, homogène et la plus haute possible. Ainsi, contrairement à une haie mono-spécifique très dense et semi-perméable (composée par ex de thuyas), elle freine considérablement le vent sans provoquer de tourbillons derrières, et protège une zone alors de 15 à 20 fois sa hauteur. Ce qui augmente significativement les rendements agricoles de 6 à 20 % (figure 3 : l'effet brise-vent). Ce rôle de brise-vent permet également de limiter l'érosion éolienne et réduire la quantité de terre perdue, surtout quand les terres sont labourées. 4 Figure 3 : l'effet brise-vent (source : D. Soltner, « l'arbre et la haie », 1978) Par son action sur le vent, la haie conduit à la création d'un micro-climat. L'air ambiant n’est ni trop chaud ni trop agité. Dans le cas contraire, les stomates des végétaux se ferment, limitant l’évapotranspiration mais aussi les échanges de gaz avec l’atmosphère et ainsi la croissance du végétal. De plus, l'évapotranspiration contribue à humidifier l'air et limite la déshydratation des cultures. L’air humide retient mieux les nuages sur les régions bocagères et augmente les précipitations de 1 à 2 %. La présence de haie favorise aussi la formation et la quantité de rosée (utilisée par beaucoup d'insectes). La haie protège les animaux du vent, de la pluie ou d’un soleil trop violent. Ainsi, pour les animaux d’élevage, cela augmente la productivité de lait et de viande, car les animaux dépensent moins d’énergie à réguler leur température ; ils sont moins stressés et moins malades. De plus, la haie diminue le risque phytosanitaire, limite la propagation des épidémies et des ravageurs, comme expliqué plus haut. ● Régulateur des eaux et anti-érosion Dans le cas des champs ouverts, l’eau ne s’infiltre pas le sol, elle l’érode et transporte les particules fines jusqu’aux cours d’eau. Ce qui entraîne, entre autres, une perte de sol, la disparition d’éléments nutritifs, des difficultés lors des travaux agricoles en la présence de ravines, le transfert de produits chimiques jusqu’aux cours d’eau (pesticides, nitrates), coulée de boue. Les haies (et les talus), plantées perpendiculairement au sens de la pente, permettent de stopper les ruissellements sur les sols pentus, laissant le temps à l’eau de s'infiltrer dans les différentes couches du sol grâce aux structures racinaires des arbres. La présence de haies permet la recharge des nappes phréatiques, diminue les risques de crues et les conséquences citées précédemment. Dans un paysage de bocage dégradé, les résidus de haies ne font que détourner les flux d'eau en les concentrant. 5 ● Rôle économique La production de bois de chauffage a longtemps été l’un des atouts principaux du maintien des haies, puis a été mis de côté au profit l’intensification de l’agriculture et l’utilisation d’énergies plus puissantes comme le pétrole. On note tout de même un regain d’intérêt depuis les années 2000, le bois de chauffe étant considéré comme une énergie renouvelable (si la ressource est gérée de manière raisonnée) qui contribue à une diminution des gaz à effet de serre et au développement d’une économie de proximité. Une haie produit environ 50 tonnes de bois par km avec une exploitation tous les 15 ans. ● Touristique Les haies apportent un cadre de vie agréable. Une authenticité et une nature préservée qui sont de plus en plus recherchées par les touristes, mais aussi par les habitants qui préfèrent les zones de bocage dense. 3) Protection des haies De nombreux acteurs – collectivités locales (DREAL, PNR, Chambre d'agriculture, Direction Départementale Territoriale, etc), associations, communes, entreprises, etc – encouragent une sauvegarde voire une reconquête du paysage bocager, ils mènent des actions à différentes échelles pour mener à bien cet objectif, comme sensibiliser des élus, agriculteurs, habitants, etc, aux atouts de la haie et aux enjeux de maintien du bocage ; informer et former les agriculteurs sur la mise en place de filière de production locale du bois-énergie ou apporter un soutien financier pour la plantation de haies. Les politiques publiques ont proposé des dispositifs de protection des haies qu’il est possible de les classer en trois groupes (livret de l’Association EVPB). Il existe des outils protégeant directement la haie par simple délibération du conseil municipal ou via les documents d’urbanisme (qui doivent prendre en compte les continuités écologiques) : SCoT (Schéma de Cohérence Territoriale) (donne une directive générale) et PLU (Plan Local d’Urbanisme). Pour les haies identifiées comme importantes (en fonction des enjeux définis en amont : biodiversité, lutte contre érosion des sols, etc) tout arrachage ou changement de destination doit faire l'objet d'une autorisation à demander en mairie. En revanche, pour les haies bénéficiant de l’appellation « espaces boisés classés » tout arasement est interdit (l'entretien est soumis à autorisation). D'autres outils protègent indirectement la haie en tant qu’élément appartenant à un écosystème protégé (par exemple les sites classés Natura 2000) ou patrimoine naturel à sauvegarder. Enfin, des outils non réglementaires cadrent le maintien et l’entretien des haies. Ainsi pour les agriculteurs demandant les aides PAC (Politique Agricole Commune), la totalité des haies est soumise à la réglementation européenne et l'arrachage des haies est encadré. 6 II)Protocole En 2002, la DREAL (dans le cadre d’un travail en liaison avec l’Université de Caen : Laboratoire CRESO) a mis au point un indicateur de la dynamique bocagère de Basse-Normandie. Cette étude est une estimation statistique de l’état du bocage par échantillonnage. Comme mentionné en introduction, elle a déjà été réalisée pour les années 1972, 1984, 1998, 2006 et 2010 en Basse-Normandie. Elle consiste en la photo-interprétation des éléments du bocage et leur saisie sur un logiciel de SIG (Système d’Information Géographique) permettant de calculer 2 indices. D’une part, la densité de haies et, d’autre part, la cohérence du bocage, permettant d’apprécier la complexité du bocage en fonction des intersections (si la haie est reliée à une ou plusieurs autres haies ou à un espace boisé) et des extrémités libres (si la haie n’est reliée à aucune autre haie ou boisements). 1) Photo-interprétation Le tracé des haies est réalisé à partir de photographies aériennes (de l'IGN achetées par la DREAL) sous le logiciel de SIG : QGIS. C’est un logiciel adapté à la conception de cartes et bases de données cartographiques, qui permet la manipulation, la gestion et l’affichage de données géoréférencées, ainsi que la superposition de couches numériques. On procède par échantillonnage : des cercles de 300 mètres de rayon (28,27 hectares) sont répartis régulièrement sur tout le territoire normand par grappe de 4 (figure 4 : répartition des cercles sur la Normandie). On compte 1975 cercles, soit environ 400 cercles pour chacun des départements : Manche, Calvados, Orne, SeineMaritime, Eure. Les haies sont tracées uniquement dans les cercles. Cette année, deux améliorations ont Figure 4 : répartition des 1975 cercles sur la Normandie été apportées à la méthode de travail : ● en ce qui concerne la Basse-Normandie, la saisie des haies a été réalisée à partir des tracés de 2010. Une base de données a été créée permettant d’enregistrer chaque modification (allongement, raccourcissement, effacement ou ajout de haies) tout en conservant en mémoire les haies avant 7 modification. Cela a permis, et va permettre pour lors des prochaines mises à jour de l’étude, un gain de temps lors de la saisie des haies. ● les années précédentes, lors du tracé des haies, les extrémités de celles-ci étaient à l'intérieur des cercles bien qu'elles continuaient en réalité en dehors. Elles étaient alors considérées comme des extrémités libres, ce qui biaisait le calcul de l'indice de cohérence. Les extrémités des haies sont maintenant à l'extérieur des cercles, et ne sont donc pas prises en compte dans le calcul. Sous QGis, plusieurs couches numériques sont superposables : → les photographies aériennes - de la Normandie datant de 2012 - de la Basse-Normandie datant de 2010 → les haies tracées – « vue haie » : c'est sur cette couche que les modifications sont effectuées, elle correspond à toutes les haies créées, avant et après modification – « vue haies 2010 » et « vue haies 2012 » : ces deux couches sont représentées en même temps sur les photographies aériennes et permettent de visualiser les haies existantes pour l'année 2010 et celles existantes pour l'année 2012. Les indices seront calculés sur celles-ci. Afin de limiter la subjectivité de l’opérateur, c’est-à-dire que les haies soient recensées de la même façon chaque année, des règles de photo-interprétation ont été fixées : – ne sont comptées que les formations linéaires visibles à la photo-interprétation : de longueur supérieure à 20 m – considérer un seul segment de haie s’il n’y pas d’interruption de plus de 20 m – les intersections consécutives sont dissociées si elles sont distantes de plus de 20 m, dans le cas contraire, elles sont confondues – un angle dans une haie est considéré comme une intersection lorsqu’il est inférieur à 135° – deux haies parallèles qui bordent une route ou un chemin sont relevées individuellement lorsqu’elles sont visibles toutes les deux – les lisières de bois ne sont pas comptabilisées. En revanche, on recense les haies en périphérie des bois et des fourrés, qui sont visibles et bien distinctes – n’est pas comptée comme extrémité libre une haie aboutissant sur un bois ou une forêt. Protocole pour la Basse-Normandie ● Étant donné que les haies de 2012 résultent de la modification des données de 2010, il a fallu corriger toutes les haies déjà existantes qui devaient sortir des cercles : à partir des photographies de 2010, les haies correspondantes sont allongées pour sortir des cercles. 8 ● Les photographies aériennes de 2012 sont comparées A à la fois aux photographies de 2010 et aux haies recensées en 2010 pour voir quelles haies ont changé (figure 5 A : photographie de 2010 + haies 2010). ● Les haies de 2010 sont modifiées pour correspondre aux haies de 2012 (en les superposant aux photographies de 2012 : figure 5 B) (figure 5 C : photographies de 2012 + haies). Il y a alors trois possibilités : – une haie est plantée → création d’une haie – une haie est arrachée → la validité de la haie uniquement est changée, elle devient invalide B – une haie est allongée ou raccourcie → la même modification est effectuée sur le tracé de haie. Protocole pour la Haute-Normandie Chaque haie a été tracée directement par interprétation C des photographies de 2012. 2) Calcul des indices ● L’indice linéaire I(li) caractérise la longueur des haies du bocage comprise dans les cercles (en km par km²). Il est calculé pour chacun des cercles. Lj = longueur totale de haies du le cercle j en km Sj = surface du cercle j en km² 9 Figure 5 : Tracé des haies sur QGIS ● L’indice de cohérence I(co) (ou complexité du bocage) est basé sur un rapport établi entre le nombre d’extrémités libres et de connexions de haies. La méthode repose sur le comptage des extrémités libres (E) et des intersections de haies (ou angle). À chaque angle est associé un « poids » P qui dépend du nombre de branches constituant l’intersection (voir figure 6 : détermination du poids des angles). L’indice est exprimé en pourcentage. Aj : angles affectés de leur poids dans le cercle j. Aj = 1w + 2x + 3y + 4z w : nombre d'angles de poids 1 x : nombre d'angles de poids 2 y : nombre d'angles de poids 3 z : nombre d'angles de poids 4 Ej : nombre d'extrémités libres dans le cercle j Figure 6 : détermination du poids des angles 10 III) Résultats À l'heure où ces lignes sont écrites, les indices pour 2012 sont en cours de calcul. Pour rappel, les indices ont été calculés pour 1972, 1984, 1998, 2006 et 2010, à l’échelle départementale et de la BasseNormandie. Pour la Haute-Normandie, on s’attend à des indices plus faibles que pour la BasseNormandie. Non pas suite à une destruction importante du bocage (même s'il a subit, comme quasiment tous les bocages, la mécanisation de l'agriculture, les remembrements, etc), mais parce que la HauteNormandie a toujours eu une densité de haies moins importante, elle est composée de différents paysages comme ceux de la vallée de la Seine, les forêts ou encore les champs ouverts. Le calcul des indices (voir annexes 3 : tableau des calculs d'indices) a permis une appréciation quantitative du bocage bas-normand ainsi que la production de cartes. 1) Indice linéaire Figure 7 Figure 8 : Évolution de la densité de haies 11 Voir figures 7 et 8. Depuis 1972, le linéaire de haie a constamment diminué, malgré un ralentissement marqué depuis 1998. Le bocage bas-normand a perdu 46 % de son linéaire entre 1972 et 2010, soit environ 2700 km/an. Le département de la Manche présente la plus forte densité de haies (9,48 km/km²) en comparaison du Calvados (6,07 km/km²) et de l’Orne (5,34 km/km²). Par ailleurs, la perte de haies diminue également chaque année, elle est plus faible pour la période 2006-2010 par rapport à 1998-2006. Le Calvados est le département pour lequel l’érosion a été la moins forte entre 2006 et 2010. 2) Indice de cohérence Figure 9 : Indice de cohérence pour la Basse-Normandie Figure 10 : Évolution de l'indice de cohérence et du maillage du bocage Source : DREAL, 2010 12 Voir figures 9 et 10. Plus que la longueur totale de haies, c’est le maillage continu qui est essentiel à la fonction de corridor. Plus l'indice de cohérence tend vers 100 %, plus le maillage bocager est structuré. Depuis 1972 jusqu’en 2006, on observe une perte constante de connexion entre les haies. Le maillage bocager en Basse-Normandie a perdu 62 % de sa cohérence. Entre 1998 et 2006 les résultats paraissent encourageants avec un ralentissement de la perte de cohérence. Mais entre 2006 et 2010, l’indice diminue considérablement. Il est probable que cette chute soit due à la méthode de numérisation des haies. Comme expliqué dans le protocole, les extrémités des haies étaient à l’intérieur des cercles, considérées alors comme des extrémités libres bien qu’elles n’en soient pas. Tous les indices de 2010 vont donc être à nouveau calculés. 13 IV) Discussion De nombreuses études ont été réalisées sur le bocage, à différentes échelles (départements, communes), avec des méthodes différentes et qui ne parlent pas tout à fait de la même chose. L’IGN a réalisé une étude quantitative du bocage à l’échelle nationale, mais qui n’a pas été réitérée dans le temps suivant le même protocole. Ainsi, la DREAL a décidé de mettre au point son propre indicateur de la dynamique bocagère, à l’échelle de la région et identique depuis 1972. Les différents choix faits lors de la mise au point de l’étude résultent du compromis entre la fiabilité des résultats et les contraintes à la fois du temps et du coût. Cette étude est réalisée à partir de photographies aériennes, elle ne nécessite pas détermination des haies sur le terrain, et peut être élargie à toutes les années pour lesquelles la DREAL dispose de photographies. L’échantillonnage permet de couvrir un large territoire comme la Normandie. De plus, la disposition des cercles par grappes de 4 était initialement dans le but de limiter le coût d’acquisition des photographies (actuellement la DREAL les possède pour toute la région). Pour faciliter l’interprétation et aussi parce qu’elles améliorent considérablement le cadre de vie, toutes les haies sont prises en compte (les haies bocagères comme celles de jardin, de zone industrielle). Mais le but étant d’avoir un suivi dynamique bocagère, le choix de considérer toutes les haies ne nuit pas aux résultats. Ces photographies aériennes induisent une marge d’erreur, limitée au maximum. Le photo-interprète est différent chaque année et sa subjectivité entre en compte : pour limiter au maximum les erreurs d’interprétation, des règles de photo-interprétation ont été établies et une carte des zones de végétation (forêts, haies, vergers, bois…) réalisée par l’IGN en 2014 par infrarouge peut être utilisée en cas de doute. Ce protocole estime la densité et l’état du maillage mais ne renseigne pas sur la qualité des haies. Cela serait beaucoup plus difficile à mettre en œuvre sur toute la Normandie. Il existe cependant des études à plus petite échelle qui évalue la qualité de la haie, selon le critère qu’il est souhaité d’être mis en avant : qualité anti-érosive, capacité à retenir l’eau, par la présence d’espèces bio-indicatrices (espèces qui, au regard de leur exigence écologique forte, prouvent que le milieu est souvent très riche) comme le Piqueprune (Osmoderma eremita) (insecte prestigieux des bocages). Au cours des dernières décennies, la densité de haies a fortement chuté, on constate tout de même une diminution de l’arrachage. Le bocage a été progressivement déstructuré. Le phénomène de fragmentation et diminution du linéaire de haie est connu, les causes principales étant l’intensification des pratiques agricoles et l’agrandissement des parcelles, le manque de main d’œuvre ou de revenus pour entretenir les haies bocagères et l’extension urbaine. Pour certains agriculteurs, l’avenir de la haie correspond à une valorisation économique par le bois de chauffage. Cependant, le risque d’une valorisation du bois de chauffage serait de privilégier des peuplements mono-spécifiques, qui entraîneraient une perte de diversité des espèces bocagères. Il y a également un risque pillage de la ressource, si la récolte se fait sans replanter de haies. 14 Conclusion Le bocage est un paysage typique de l’ouest de la Normandie. Il est le résultat d’une gestion équilibrée entre les activités humaines et les dynamiques naturelles. La conservation du bocage est un fort enjeu régional. La dégradation du bocage amène, par la disparition des corridors écologiques, la fragmentation et l’isolement des populations. Le maintien d’un bon état de connexions entre les haies, quitte à voir le maillage s'élargir en raison de l'évolution des pratiques agricoles, est primordial. Le meilleur compromis entre un maillage suffisamment cohérent et les contraintes liées à la mécanisation équivaudrait à des parcelles de 4 à 10 hectares (les parcelles actuelles étant jusqu'à dix fois supérieures). En période de changement climatique, le bocage est d’autant plus intéressant par les services qu’il rend (brise-vent, régulation hydrique…) et il pourrait permettre d’atténuer certains effets de ce changement (fortes pluie, tempêtes, inondations, élévation de la température en été…). 15 Bibliographie / Webographie ● Pierre BRUNET, Pierre GIRARDIN. Inventaire régional des paysages de Basse-Normandie, Tome 1. 2001, 323 pages. ● Direction Régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement de Basse-Normandie. Profil environnemental de Basse-Normandie. 2015, 124 pages. ● Serge LESUR. Guide Nature AFFO (Association Faune Flore de l'Orne) « Les haies dans l'Orne ». 2015, 50 pages. ● Association Environnement et Vie en Pays de Briouze. Livret « La haie, un patrimoine à valoriser ». 2016, 54 pages. ● Fabien LIAGRE. Les haies rurales : rôle – création – entretien. Éditions France Agricole. 2006. ● Armand FREMONT, Christian MALON. Paysans de Normandie aujourd'hui. OREP Éditions, 2015. ● Élise VADAINE. Rapport de stage « Appréciation quantitative de l'évolution du paysage bocager – Mise au point d'un indicateur de la dynamique bocagère ». 2002, 65 pages. ● Romain DAUTRESIRE. Rapport de stage « Cartographie de bocage par photo-interprétation sur des secteurs de Basse-Normandie ». 2014, 53 pages. ○ DREAL Normandie, internet : www.developpement-durable.gouv et intranet. ○ Trame verte et bleue : www.trameverteetbleuebassenormandie.fr ○ Pôle bocage : www.pole-bocage.fr ○ ONCFS Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage : www.oncfs.gouv.fr ○ Conseil général du Calvados, guide des haies : www.calvados.fr ○ Atlas des paysages de Haute-Normandie, http://www.atlaspaysages.hautenormandie.fr/ « les paysages, la ○ Centre régional de phytosociologie – Conservatoire Botanique http://digitale.cbnbl.org/digitale-rft/site/Atlas/Atlas_HN/Region/Paysages.html 16 forêt national et de l’arbre » : Bailleul Annexes Annexe 1 : délimitation des différents pays de Normandie 17 L’orme était très présent jusqu’au XXe siècle, période à laquelle il a quasiment disparu suite à la graphiose (maladie causée par un champignon qui bouche les canaux de sève). Annexe 2 : répartition des principales essences de la strate arborescente et arbustive de Basse-Normandie 18 Estimation de la densité de haies en Basse-Normandie Total de linéaire Surface des cercles Indice linéaire km km² km/km² Perte Perte régionale Perte régionale par an Restant depuis 1972 Superficie Basse-Normandie km/km² km km % 1972 4234,50 329,30 12,86 1984 3539,20 329,30 10,75 1998 2617,80 329,30 7,95 2006 2433,66 329,30 7,39 2010 2297,30 329,30 6,98 2,11 37771,70 3147,64 83,58 2,80 50054,43 4171,20 61,82 0,56 10003,28 1250,41 57,47 0,41 7407,66 1851,92 54,25 2012 17889 km² Estimation de la densité de haies par département MANCHE (50) Total de linéaire Surface des cercles Indice linéaire km km² km/km² Perte Perte départementale Perte départementale par an Restant depuis 1972 Superficie Manche km/km² km km % 1972 1964,10 112,10 17,52 1984 1671,70 112,10 14,91 1998 1184,30 112,10 10,56 2006 1114,87 112,10 9,95 2010 1062,97 112,10 9,48 2,61 15488,59 1290,72 85,11 4,35 25817,85 1844,13 60,30 0,62 3677,75 459,72 56,76 0,46 2749,17 687,29 54,12 1998 679,30 102,90 6,60 2006 640,76 102,90 6,23 2010 624,18 102,90 6,07 2,41 14082,94 1005,92 62,22 0,37 2190,30 273,79 58,69 0,16 942,27 235,57 57,18 1998 754,20 114,30 6,60 2006 678,03 114,30 5,93 2010 610,15 114,30 5,34 1,63 9942,07 710,15 63,99 0,67 4067,06 508,38 57,52 0,59 3624,42 906,11 51,76 2012 5938 km² Total de linéaire Surface des cercles Indice linéaire km km² km/km² Perte Perte départementale Perte départementale par an Restant depuis 1972 Superficie Calvados km/km² km km % 1972 1091,70 102,90 10,61 CALVADOS (14) 1984 927,10 102,90 9,01 1,60 9354,53 779,54 84,92 2012 5848 km² Total de linéaire Surface des cercles Indice linéaire km km² km/km² Perte Perte départementale Perte départementale par an Restant depuis 1972 Superficie Orne km/km² km km % 1972 1178,70 114,30 10,31 ORNE (61) 1984 940,40 114,30 8,23 2,08 12723,93 1060,33 79,78 6103 km² Annexes 3 : tableau des calculs d'indice linéaire 19 2012 Estimation de la cohérence des haies en Basse-Normandie Nombre d’extrémités = E Nb angles poids 1 Nb angles poids 2 Nb angles poids 3 Nb angles poids 4 A Indice de cohérence Perte Perte cumulée % % % 1972 10331 9906 19885 1626 21 54638 84,10 1984 11767 8968 14616 979 11 41181 77,78 6,32 6,32 1998 11692 6881 8135 558 4 24841 68,00 9,78 16,10 2006 13979 6932 6476 329 1 20875 59,89 8,10 24,21 2010 42847 6986 5969 380 6 20088 31,92 27,97 52,18 2012 Estimation de la cohérence des haies par département Nombre d’extrémités = E Nb angles poids 1 Nb angles poids 2 Nb angles poids 3 Nb angles poids 4 A Indice de cohérence Perte Superficie Manche Nombre d’extrémités = E Nb angles poids 1 Nb angles poids 2 Nb angles poids 3 Nb angles poids 4 A Indice de cohérence Perte Superficie Calvados Nombre d’extrémités = E Nb angles poids 1 Nb angles poids 2 Nb angles poids 3 Nb angles poids 4 A Indice de cohérence Perte Superficie Orne % % 5938 km² % % 5848 km² % % 6103 km² 1972 4382 4454 11193 1036 10 29988 87,25 MANCHE (50) 1984 4893 4079 8670 594 4 23217 82,59 4,66 1998 5271 3140 4652 344 1 13480 71,89 10,70 2006 6288 3332 3752 205 0 11451 64,55 7,34 2010 18653 3374 3311 206 4 10630 36,30 28,25 2012 1972 2608 2373 4321 304 9 11963 82,10 CALVADOS (14) 1984 3148 2225 3172 206 6 9211 74,53 7,57 1998 2955 1666 1750 120 2 5534 65,19 9,34 2006 3599 1660 1363 67 0 4587 56,03 9,16 2010 11104 1666 1415 122 0 4862 30,45 25,58 2012 1972 3341 3079 4371 286 2 12687 79,16 ORNE (61) 1984 3726 2664 2774 179 1 8753 70,14 9,01 1998 3466 2075 1733 94 1 5827 62,70 7,44 2006 4092 1940 1361 57 1 4837 54,17 8,53 2010 13090 1946 1243 52 2 4596 25,99 28,19 2012 Annexes 3 : tableau des calculs d'indice de cohérence 20