Cancer et Sexualité Point de vue des jeunes adultes concernés par la maladie. Congrès de psycho-oncologie, Décembre 2007. A 20 ans on construit sa vie, des projets pleins la tête, qu’un cancer vient modifier. Le cancer a une incidence sur la construction de sa vie et sa sexualité. Afin de mieux comprendre l’impact du cancer sur la vie des personnes malades, JSC a mené une grande enquête en 2004 et a obtenu 165 réponses. Cet échantillon ne prétend pas être représentatif de l’ensemble des personnes atteintes de cancer, mais l’enquête pose des problématiques intéressantes. Comme la diminution du désir (60.2% des répondants), la diminution des rapports sexuels 39%, l’absence de relations sexuelles (30,5%), … Ces réponses sont quasi identiques dans la sous-population des moins de 35 ans. Concernant la fertilité, elle est évoquée comme étant une préoccupation importante par 19,5% des répondants, principalement chez les moins de 35 ans (40,4%). Un réel besoin de dialogue Avec qui échanger sur ses craintes et ses incertitudes lorsqu’on est plus un enfant, mais pas encore un adulte ? Pour tout adolescent la découverte de la sexualité est souvent source de questionnement qu’il peut partager avec leurs copains. L’ado atteint de cancer aura plus de difficultés à évoquer ces questions avec eux. « Je me rassure seule car à aucun moment je n’ai eu de soutien proposé spontanément par le corps médical » Des jeunes adultes et ado atteints de cancer il y en a environ 2000 par an. Ils sont eux-aussi en pleine découverte de leur corps et de celui de l’autre. La sexualité est rarement abordée avec le médecin ou l’infirmière, plus préoccupé par le soin. Le psychologue pourrait être un interlocuteur privilégié mais encore faut-il qu’il ait le temps ou qu’il entreprenne d’en parler ouvertement. Le sujet ne vient pas tout seul, il faut oser poser la question. De plus, les jeunes adultes ou les grands ados se rendent régulièrement aux consultations avec leurs parents, ce qui empêche d’aborder ce thème. Comment poser toutes ces questions lorsque votre mère s’inquiète tellement, qu’elle monopolise la parole ? Il est important de prendre ce temps, avant, pendant et après les traitements. « Je suis aménorrhée, quelle conséquence sur ma libido ? » « J’ai un testicule en moins est-ce que je pourrais toujours donne du plaisir à ma petite amie ? » « Je ne peux plus prendre la pilule, quelles solutions ? » « Pendant la chimiothérapie, puis-je faire l’amour ? » Marie-Aude Sevaux Vice-présidente de Jeunes Solidarité Cancer 17 Août 2007 1 Questions naïves, primordiales, questions de personnes, d’intimités : Combien de professionnels du soin prennent le temps et ose aborder ce sujet pour lequel ils n’ont pas toujours de réponses médicales ? « Lorsque je racontais qu’au jour de l’an 2003, en pleine chimio, j’avais pu embrasser un garçon, avec qui je suis restée 3 mois, mon psy m’a regardée bizarrement, comme si une jeune femme malade ne pouvait pas séduire un homme ! Or j’avais pleins de questions, de peurs, sur cette nouvelle relation et personnes avec qui partager. » Le cancer dans la relation à deux Pour certains, il y a cette histoire d’amour toute neuve quand soudain la maladie fait irruption. Pour d’autres le cancer est déjà présent ou l’a été et il faut construire une relation avec cet élément de sa vie. Au-delà de la rencontre et du quotidien il y a l’intimité, la peur de ne plus plaire, de n’être plus une femme, un homme désirable. Voir son conjoint affaiblit, triste, inquiet ou se sentir impuissant, vulnérable, perdu, sont des sentiments déstabilisent dans une relation. « Lorsque mon ami revenais de chimiothérapie, il fallait que je lui fasse sa toilette, que je lui donne à manger, je n’arrivais plus à le trouver désirable ». Aujourd’hui, la période des soins se passe aussi bien à l’hôpital qu’au au domicile. Cette nouvelle façon de vivre la maladie chez soi change les équilibres du quotidien. Peut-on être amant et soignant ? La peur du regard de l’autre «Ce qui m’a le plus aidée à surmonter le traumatisme de la maladie, c’est de voir que je pouvais quand même susciter le désir d’un homme » Au-delà de cette difficulté dans le dialogue, il y a la peur du regard de l’autre. Nouveau ou ancien petit ami, il faut d’abord s’accepter soi pour être accepté de l’autre. Des changements physiques, temporaires ou définitifs ont lieu durant la période des traitements. De nouvelles questions chercheront une réponse. Qui pourra m’aimer avec mon sein abîmé et sans mes cheveux ? Suis-je encore un garçon normal J’ai une ablation du sein, je n’ose plus me mettre nue devant ma petite amie ? La réponse à ces questions est là encore très personnelle. Il n’y a pas de réponse universelle, voir parfois pas de réponse du tout ! D’où la difficulté de chercher de l’information sur ces sujets. De plus, les fantasmes, qui entourent la sexualité, accentuent encore l’impression d’anormalité. Et puis il y a la peur d’être jugé : par son entourage et son partenaire. Certes, ce qui compte c’est de soigner, mais il ne faut jamais oublier qu’il s’agit de personnes avec les problématiques de leur âge souvent accentuées par la maladie. Marie-Aude Sevaux Vice-présidente de Jeunes Solidarité Cancer 17 Août 2007 2