Échos des congrès Société francophone du diabète (SFD) Des cellules souches induites pour le traitement du diabète Lille, 16-19 mars 2010 L e Dr Emmanuel Baetge (San Diego) est considéré comme le leader mondial de la production de cellules β pancréatiques à partir de cellules souches humaines embryonnaires. Il a donné une conférence plénière au congrès de la SFD 2010 et a fait le point sur ce sujet. Ce dernier représente un enjeu énorme sur le plan thérapeutique. En effet, l’objectif principal est de pouvoir à long terme greffer des cellules β générées in vitro à des patients atteints de diabète de type 1. Des greffes d’îlots qui provenaient de donneurs cadavériques avaient déjà été réalisées par le laboratoire du Dr James Shapiro à Edmonton en 2000. Ces traitements nécessitaient une forte immunosuppression pour éviter le rejet du greffon. Ces essais cliniques étaient encourageants car les greffons avaient permis une normalisation de la glycémie chez la majorité des patients pendant la première année après la greffe. Néanmoins, une limite importante reste la faible disponibilité des cellules β. Le laboratoire d’E. Baetge essaie donc d’utiliser des cellules souches pour obtenir de nouvelles sources de cellules β. Les cellules souches ont une forte capacité de prolifération, et il semble possible d’orienter in vitro leur différenciation en cellules β. Pour cela, E. Baetge essaie de reproduire les étapes du développement embryonnaire afin d’obtenir in vitro des cellules β qui ressemblent le plus possible à celles que l’on pourrait trouver chez des individus. Les étapes de la différenciation sont les suivantes : des cellules souches se différencient en endoderme indifférencié, puis en endoderme digestif, en endoderme pancréatique, en cellules endocrines et enfin en cellules β. Selon E. Baetge, le point clé de l’étape initiale a été de réduire la concentration de sérum dans le milieu de culture pour générer de l’endoderme définitif à partir des cellules souches. En effet, la signalisation par la phospho-inositol 3 kinase (PI3 kinase) peut être stimulée par le sérum et empêche la formation d’endoderme. Ensuite, pour la deuxième étape, des facteurs de croissance tels que le keratinocyte growth factor (KGF) et le fibroblast growth factor 2 sont ajoutés dans la culture. Ces facteurs ont été décrits par le laboratoire du Dr R. Scharfmann (Paris) pour leur capacité à stimuler la prolifération des cellules progénitrices. Dans le cas du protocole d’E. Baetge, l’addition de KGF et FGF2 permet d’obtenir de l’endoderme définitif. Ensuite, l’addition d’acide rétinoïque et de protéine de morphogenèse osseuse permettra d’obtenir un endoderme digestif qualifié de “prépancréatique”. Le tissu obtenu contiendra des cellules exprimant des facteurs de transcription pancréatiques, dont Pdx1 et Nkx6.1, mais aussi quelques cellules exprimant l’insuline, la somatostatine, le polypeptide pancréatique et la ghréline. Lorsque cet endoderme est greffé chez la souris, il est capable de sécréter de l’insuline en réponse au glucose. Cette fonction augmente avec le temps après la greffe. Si on détruit les cellules β endogènes de souris avec une toxine, la streptozotocine, la greffe d’endoderme généré à partir des cellules souches humaines permet de rétablir une glycémie normale. Cette expérience démontre que l’endoderme humain produit in vitro est une source de cellules β fonctionnelles. On cherche maintenant à utiliser des agrégats de cellules générées in vitro pour reproduire la structure et la vascularisation des îlots. Il s’agit également d’utiliser des méthodes d’encapsulation qui permettraient de protéger les cellules greffées tout en permettant une libération adéquate des hormones pancréatiques. En conclusion, ces travaux semblent extrêmement prometteurs quant à la production de cellules β in vitro. Toutefois, certains points nécessitent absolument d’être améliorés. En effet, dans un nombre non négligeable de cas, la greffe de cellules d’endoderme humain chez la souris forme des tératomes. De nouveaux moyens devront donc être utilisés pour éviter la formation de tumeurs. De plus, il sera nécessaire de définir la dose de cellules utilisée, leur site d’insertion pour une bonne libération des hormones, et enfin de régler les problèmes de rejet et d’auto-immunité liés au diabète de type 1. ■ Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIV - n° 5 - mai 2010 © Tous droits réservés. Bertrand Duvillié* * Inserm U845, faculté Necker. 129