Séminaire OSUR Ingénierie écologique 27 novembre 2014 La gestion des espèces végétales invasives : une application de l'ingénierie écologique. Jacques Haury UMR ESE 0985 Jacques.haury@agrocampus‐ouest.fr Contexte et plan de l’intervention • Un règlement européen sur les espèces invasives (=EEE) adopté en septembre 2014 stratégie nationale en cours d’élaboration – Listes d’espèces interdites – Veille et interventions précoces – Gestion • Une stratégie ? – Stratégies régionales existantes agrégation pour … – … Une Stratégie nationale en cours d’élaboration • Place de l’ingénierie écologique ? – Risques / élaboration des listes – Intervention précoce / éradication, limitation des colonisations – Gestion des invasions avérées. ‐ Information Prevention ‐ (Self)regulation & legislation ‐ Quarantine measures ‐ Management efficiency Time since introduction ‐ Interception Early detection ‐ Monitoring & Surveillance ‐ Removal Simberloff et al. ‐ Eradication Management ‐ Containment ‐ Control ‐ Impact ‐ Detectability ‐ Management cost Figure 1: Management strategy against invasive species: The optimal strategy evolves with time since introduction. Management efficiency decreases and management costs increase with time since introduction. Stratégie régionale pour la gestion des plantes exotiques envahissantes L. Anras, R. Matrat, J. Haury Les recommandations du comité en termes de politique générale Importance majeure des proliférations végétales Accentuer la prévention et la gestion précoce Amplifier les programmes de recherche appliquée Maintenir la forte mobilisation et assurer la cohérence entre les acteurs Poursuivre les bilans coûts ‐ efficacité Accentuer la mise en place d’outils d’observation permanente Insister sur l’urgence de mesures réglementaires appropriées Les recommandations du comité pour la Gestion Dans le cadre des opérations de restauration, d’entretien et de gestion qui visent à : Rétablir l’équilibre des écosystèmes perturbés Préserver la biodiversité Préserver les usages compatibles Il convient de : Définir des stratégies d’intervention coordonnées par unité administrative (département…) et/ou bassin hydrographique Etablir un plan d’action régional par espèce et en fonction des milieux et usages (actions de connaissance, d’information, de gestion préventive et de gestion curative) 1 – Prévention : élaboration de listes d’espèces invasives • Des listes élaborées en fonction des connaissances ex liste de Bretagne • A l’amont deux approches – Expertises connaissance de l’écologie et biologie de l’espèce + études de cas – Analyses de risques (Weber et Gut, ….) (en fonction de cas connus, de la biologie de l’espèce, ….) notation et agrégation de critères (ex approche FCBN) Eradication précoce • Sur fronts de colonisation • Ex. « éradication » précoce de cette invasive plus compétitive que la Jussie Veille Eviter la colonisation • A partir de zones (très colonisées) ex douves en marais Eviter la colonisation : la Jussie sur prairies humides ex. des marais du Syl (44) • Zone humide de 495 ha dont 380 ha à Lavau sur Loire, 83 ha sur la commune de bouée et 32 ha sur Savenay. • Gérés par les syndicats des prés du Syl et les communautés de communes • Canal exutoire du Syl de 6.8 km de long canalise le marais et l’étier du Syl ainsi que les écluses présentes régulent les niveaux d'eau. • Prairies consacrées à la fauche vers Lavau sur Loire et au pâturage au nord du marais à Savenay dans des Fig.1:Le canal du Syl ( 13‐06‐2012) prairies très humides. Source: Agrocampus Gestion hydraulique (curage des fossés et douves) Constats après Travaux: dans les douves • 8 368 m de linéaire de douves au total ont subi ces travaux dont 4 292 m de canaux et 4076 m de douves. • Forte diminution de la Jussie dans les douves curées ( recouvrement de 5‐10 % après travaux) donc curage efficace . • Après griffage, la Jussie se maintient avec des recouvrements encore élevés de 60‐70% donc griffage moins efficace Douve curée en 2011 ( 13‐06‐2012) Douve griffée en 2011 (13‐06‐2012) Source: Agrocampus Colonisation hors‐douve liée aux travaux • Curage: on note quelques départ de Jussie sur les bourrelets avec des recouvrements encore faibles • Griffage: reprise conséquente de la Jussie sur les zones de dépôts des produits avec des recouvrements parfois forts • Cause: les déchets de Jussie n’ont pas séchés en raison de niveaux d’eau hauts. Reprise de la Jussie sur un bourrelet de curage (23‐06‐ 2012) source: Agrocampus Reprise de la Jussie sur un bourrelet de griffage au Syl (13‐06‐2012) Colonisation hors‐douve liée aux travaux Savenay N bourrelet de griffage colonisé (Syl le 13‐06‐2012) Plan du Syl Source: géoportail bourrelet de curage colonisé(Syl le 23‐06‐2012) Colonisation hors‐douve liée aux pratiques agricoles • Début d’implantation de Jussie dans les rigoles avec des recouvrements encore faibles. • Remontée de la Jussie dans les berges dans les secteurs très piétinés et remaniés où le bétail s’abreuve (recouvrements faibles) Implantation de Jussie dans une rigole au Syl le 13‐06‐ 2012; source: Agrocampus • Conséquence: dévégétalisation progressive de la berge Remontée de la Jussie sur les berges au Syl le 13‐06‐2012 Colonisation hors‐douve liée aux pratiques agricoles • On note aussi une dévégétalisation sur les bourrelets piétinés et remaniés avec des départs de Jussie. Bourrelet de curage piétiné et reprise de la Jussie ( 23‐06‐2012) Remontée de Jussie dans la prairie (13‐06‐2012) Musse le 09‐03‐2012: piétinement important en berges Syl : nouvelles modalités d’interventions suite à la campagne d’arrachage de jussie de 2011 et aux inventaires et suivis d’Agrocampus (découverte de la forme terrestre dans prairies et rigoles). Principe général Constat Solutions Principes complémentaires dans les parcelles les plus humides du marais Fresnier Zone sensible au développement de la forme terrestre en prairie. Développement important de la jussie dans les douves Mauvais séchage des dépôts de jussie/arrachage mécanique Arrachage manuel de la jussie avec export des déchets Abandon de la technique mécanique (trop de terre qui limite le séchage) Eviter la recréation de rigole tant que la jussie n’est pas sous contrôle Prévention Curage : calfeutrage de la jussie sous la vase. A surveiller. Evacuation des déchets 2011 non dégradés dans les 3 ou 4 parcelles très humides et au couvert végétal peu développé Arrachage manuel préventif dans les rares rigoles contaminées Pose de filets pour limiter la dissémination en Prévention phase chantier Repassage chaque année à partir de juin pendant 3 ans minimum (secteurs curés + lutte jussie) Poursuite de l’entretien du lac de Savenay pour limiter le retour par l’amont Surveillance renforcée des parcelles Rigole = facilite la remontée de la jussie/prairie Berges nues et piétinées = facilitent la remontée de la jussie/prairie Maintenir la présence des iris et joncs = cordon protecteur Prévention Limiter la destruction des berges par abreuvement direct. Si besoin, clôturer de manière Prévention temporaire les berges les plus En absence des vulnérables. végétaux : replanter dans les douves des 3 ou 4 parcelles plus plus Prévention sensibles ? Eviter le surpâturage des parcelles les plus Prévention humides . Eviter le piétinement des secteurs de dépôts de curage pour faciliter leur revégétalisation Prévention rapide. 2‐ Méthode : Cartographie des risques d’envahissement des prairies Pédologie Sable Argile séchante Gestions antérieures Dégradation des berges Etat des fossés de drainage Absence avérée Pas de risque Herbier dispersé Risque modéré Nulle Herbier discontinu Herbier continu Risque fort Moyenne Risque modéré Forte Risque fort Pas de risque Export Tourbe Dépôt Risque fort Sylvain Chotard Licence Pro PARTAGER 16 3‐ Résultats: cartographie des parcelles à risque Source: Fond cartographique (Damien Linard CC Loire et Sillon) – Réalisation (Sylvain Chotard) Sylvain Chotard Licence Pro PARTAGER 17 Perspectives et solutions de lutte • • Pose de grilles anti‐boutures au niveau de la connexion douve‐rigole. Le pâturage de la Jussie avant la fructification(graines) peut permettre un meilleur contrôle de l’expansion de la Jussie • pose de clôtures fixes à barbelés non‐électriques au niveau des berges pour limiter le piétinement • Modification du système d’abreuvement avec descentes aménagées et empierrées. contrainte: ce système peut être difficile à installer dans les marais en raison de la présence de tourbe. Exemple de zone de dépôts des déchets du griffage à décaper au Syl Source: Agrocampus Exemple d’abreuvement aménagé III – Gestion ex Apigné Relations macrophytes‐cyanobactéries • Observation : augmentation du problème Proliférations de cyanobactéries Proliférations de macrophytes envahissants • Mécanisme (voie de recherche) : anoxie – P sédiments libéré sous les macrophytes – Reprise dans l’étang – prolifération de cyanobactéries 19 Colonisation de l’étang A et évolution L u d w ig ia h e x a p e ta la 1 - 10 11 - 2 5 26 - 50 51 - 75 76 - 10 0 m y r i o p h y llu m a q u a tic u m 1 - 10 11 - 2 5 26 - 50 51 - 75 76 - 10 0 P a s p a l u m d is tic h u m 1 - 10 11 - 2 5 26 - 50 51 - 75 76 - 10 0 Octobre 2004 Septembre 2006 20 Colonisation de l’étang A et évolution 60 1 0,8 39 0,97 0,6 0,4 1,20 0,71 recouvrement (%) surface (Ha) Evolution de la colonisation de la jussie sur le pourtour du grand étang d'Apigné (octobre 2004 septembre 2006) 1,4 80 73 X 1.8 72 70 1,2 50 40 30 X 1.7 0,2 20 10 0 0 oct-04 juin-06 sept-06 (sf hb isolés) date surface occupée (Ha) recouvrement moyen associé (%) • surface colonisée + recouvrements x 3 sur pourtour de l’étang et x 2 sur l’anse • étang de faible profondeur (< 3m) : potentiellement totalement colonisable => nécessité d ’intervention 21 Evolution de la colonisation depuis arrachages et évaluation de leurs efficacités Septembre 2006 (Ha) W W et E (+ 1 an) (+ 1 an) Evolution des surfaces colonisées par la jussie Evolution du recouvrement associé aux surfaces (%) zone S zone E zone W zone W zone E zone S 100 90 80 0,33 1,00 => Efficacité 70 60 0,30 0,60 40 0,28 30 0,66 0,55 20 0,23 0,19 0,00 aout-07 sept-08 0,05 0,11 0,15 0,05 0,10 0,06 0,09 0,11 0,07 0,20 sept-06 importante 50 0,32 0,40 Septembre 2012 (idem depuis 2009) 1,20 0,80 Septembre 2008 Août 2007 1,40 0,25 W , E et S sept-09 sept-10 0,07 0,09 0,08 oct-11 oct-12 10 0 sept-06 aout-07 sept-08 sept-09 sept-10 oct-11 oct-12 22 Bilan des opérations d’arrachage 2006 Durée (j pour 4 personnes) Périmètre (% du total) 2008 2009 2010 2011 2012 Zone Mesuré (estimé) Mesuré (estimé) Mesuré (estimé) Mesuré (estimé) Mesuré Mesuré (estimé) Mesuré (estimé Nouveau modèle) OUEST 310 (128) 36,5 (39,5) 4,5 (13) 0,5 (2,8) 3,9 5,5 ? (1,5) 75 (89,5) 20,5 (47) 2,5 (12,8) 5,2 6,2 ? (3,2) 150 (120) 5,5 (9,3) 3,9 1 ? (4,2) EST Volume (m3) 2007 SUD TOTAL 310 (128) 111,5 (129) 175 (180) 8,5 (25) 13 12,7 ? (8,9) TOTAL 38 (33) --- (63) 33 (38) 25 (12) 20 20 ? 50 % 85% 100% 100 % 100% 100% 100% Forte réduction et stabilisation des volumes arrachés Réduction et stabilisation du temps de travail 23 Quelques points de discussion : • Nécessité d’une vision écosystémique du problème des invasions biologiques • Ingénierie écologique : – Evaluer le problème dans son ensemble – Proposer une expérimentation – Etablir des protocoles, les mettre en œuvre, acquérir des données, les traiter, les remettre en perspective / corpus scientifique – Faire un retour vers les acteurs et proposer un suivi des actions de gestion • Communiquer ! Journée technique sur la gestion des espèces exotiques envahissantes Les espèces exotiques envahissantes et les espaces protégés Le jeudi 11 septembre 2014 à Montsoreau Gestion des espèces invasives ‐ Transposabilité des actions de gestion et suivi post‐intervention : quelques recommandations Jacques Haury Jacques.haury@agrocampus‐ouest.fr