Le Débarquement en Normandie

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Le Jour J, le 6 juin 1944 :
Le commencement de la fin
de la guerre en Europe
par
Ronald Cormier, historien,
Association des vétérans militaires
de Dieppe
Le Débarquement en Normandie
Le contexte historique
Le 1er septembre 1939, les armées allemandes déferlent sur la Pologne, mettant ainsi feu à la poudrière
qui annonce le début de la Seconde Guerre mondiale. Deux jours plus tard, la France et la Grande-Bretagne
donnent suite à leurs engagements envers la Pologne et déclarent la guerre à l’Allemagne suite au refus
d’Hitler de retirer ses troupes. Le Canada se joint à la coalition anti-nazie le 10 septembre. Les premier soldats
canadiens arrivent en Angleterre à la fin décembre 1939.
L’Allemagne écrase la Pologne en cinq semaines. Sur le front de l’Ouest, l’armée française se
retranche dans ses fortifications de la ligne Maginot tandis que l’Allemagne renforce sa ligne Siegfried, de
l’autre côté du Rhin. L’Angleterre envoie des troupes sur le continent pour prêter main-forte aux Français,
mais aucune attaque n’est montée contre l’ennemi. L’hiver de 1939 et le printemps de 1940 sont connus
comme “la drôle de guerre”, “the funny war”, la “Sitzkrieg”, puisque les armées adverses se contentent d’une
guerre de propagande.
Le 9 avril 1940, l’Allemagne reprend son agression. Elle envahit le Danemark et la Norvège. Mais
ce n’est que le 10 mai que les armées allemandes passent à l’attaque à l’Ouest. Les Pays-Bas capitulent le 15
mai et la Belgique rend les armes 10 jours plus tard.
Pendant ce temps, les Allemands pénètrent en France et atteignent La Manche, isolant ainsi les armées
françaises et britanniques dans le nord de la France et le sud de la Belgique. Les Alliés se replient sur le port
de Dunkerque d’où une flotte de toutes sortes de navires évacue 338,000 combattants anglais et français entre
le 27 mai et le 4 juin.
La menace alliée n’existant plus dans le nord, la Wehrmacht pousse vers le centre de la France. Les
Allemands entrent dans Paris le 14 juin. La France capitule de 22 juin.
De l’été de 1940 au Jour-J
Après la chute de la France, l’Angleterre et les pays du Commonwealth, incluant le Canada, se
retrouvent seuls face à l’Allemagne qui occupe presque toute l’Europe de l’Ouest. Entre l’été de 1940 et celui
de 1941, les succès militaires des Alliés sont peu nombreux. La Royal Air Force met cependant fin aux visées
d’Hitler d’envahir les îles britanniques en maintenant la suprématie aérienne au-dessus de l’Angleterre et de
La Manche.
Hitler tourne alors son attention vers l’Est et, le 22 juin 1941, ses armées attaquent l’Union Soviétique
qui se joint à la lutte contre l’Allemagne. Les Allemands foncent et atteignent presque Moscou au cours de
l’hiver.
Le 7 décembre 1941, le Japon attaque la flotte américaine à Pearl Harbor. La puissance militaire et
industrielle des États-Unis fera éventuellement pencher la balance à la faveur de la nouvelle coalition contre
l’Allemagne, le Japon et l’Italie.
Les premières victoires décisives alliées sont enregistrées en Union Soviétique en 1942. Staline, leader
incontesté de l’URSS, menace de signer une armistice séparée avec l’Allemagne si ses Alliés n’attaquent pas
à l’Ouest. C’est ce qui précipite le désastreux raid canadien contre le port de Dieppe, en France, le 19 août
1942.
C’est un grand détour que prennent les Alliés en 1942 pour amorcer la libération de l’Europe de
l’Ouest. Le 8 novembre, ils débarquent en Algérie et au Maroc. La campagne en Afrique du Nord dure cinq
mois. Puis, le 10 juillet 1943, c’est l’invasion de la Sicile, la première étape de la campagne d’Italie. Le 8
septembre, l’Italie capitule, mais les Allemands occupent le pays.
En dépit des victoires alliées, tous comprennent que l’on ne peut vaincre l’ennemi sans débarquer dans
le nord-ouest de l’Europe. Même les Allemands l’ont compris... ils ont construit un important réseau de points
forts qui vont du nord des Pays-Bas au sud-ouest de la France. Ces fortifications, que l’on appelle “mur de
l’Atlantique” et que les Allemands nomment Festung Europa, comprennent des emplacements de canons, des
centaines de bunkers, des nids de mitrailleuses, des milliers de kilomètres de barbelés et des millions de mines
sur les plages et à proximité des côtes. Des divisions d’infanterie et des blindés sont postés le long des plages
et à lintérieur des terres, notamment en France.
La planification de l’invasion
La planification pour le retour sur le continent débute peu après la débâcle de 1940, mais ce n’est
qu’en août 1943, lors de la conférence de Québec, que le plan initial de l’opération OVERLORD est adopté.
On croit pouvoir lancer l’invasion après le 1er mai 1944.
La veille de Noël 1943, le général américain Dwight Eisenhower est nommé Commandant suprême
des forces alliées en Europe. Le général anglais Bernard Montgomery prend le commandement du groupe
d’armées britanniques et devient le bras droit d’Eisenhower. C’est Montgomery qui dirigera la première phase
de la bataille sur terre.
Les deux généraux ne sont pas satisfaits des plans présentés. Ils demandent que l’on affecte plus
d’hommes et que la zone de débarquement soit élargie. Le plan définitif est finalement arrêté en février 1944.
Il s’agira de la plus importante opération militaire de la Seconde Guerre mondiale. Il faut absolument que
l’invasion réussisse sinon on devra attendre plusieurs mois, voire même des années, avant de pouvoir remonter
une attaque pour libérer l’Europe de l’Ouest.
L’opération OVERLORD
Les Alliés sont enfin prêts pour donner l’assaut à la Festung Europa. Leur aviation contrôle le ciel
au-dessus du nord-ouest de l’Europe. Leurs bombardiers larguent des milliers de tonnes de bombes sur les
industries de guerre allemandes et sur les réseaux routiers et ferroviaires en Allemagne et en France. Après
le raid de Dieppe en août 1942, ils ont développé de nouveaux instruments de guerre dont des tanks flottants.
Ils ont aussi construit deux ports artificiels qui seront toués de l’Angleterre jusqu’à la zone d’invasion.
Le débarquement en Normandie est l’opération militaire la plus complexe de tous les temps. Plus de
5,000 navires de tous genres, 200,000 hommes, des milliers de bombardiers et d’avions de chasse, quelque
900 planeurs et 1,200 avions de transport participent à l’opération OVERLORD.
Les Allemands savent que les Alliés préparent l’invasion, mais ils croient que l’assaut sera donné
contre le Pas de Calais qui n’est qu’à 35 kilomètres du sud de l’Angleterre, de l’autre côté de la Manche.
Le débarquement amphibie se fera sur cinq plages en Normandie portant les noms de code Sword
et Gold (britanniques), Juno (canadienne), Omaha et Utah (américaines) à 150 kilomètres des côtes de
l’Angleterre. Elle s’étendent de l’embouchure de la rivière Orne à l’Est jusqu’aux dunes de Varaville à l’Ouest.
Des parachutistes seront largués à l’intérieur des terres à chaque extrémité de la zone d’invasion afin de
protéger les flancs des plages du débarquement.
L’attaque doit avoir lieu le 5 juin, mais le mauvais temps oblige le général Eisenhower à la reporter
au lendemain. Le 6 juin 1944 sera dorénavant connu comme le JOUR J.
En fin de journée le 5, la flotte d’invasion prend la mer et 2,200 bombardiers partent larguer leurs
bombes contre les positions ennemies dans la zone d’invasion. Les bombardements vont durer jusqu’à 5 h 15
du matin.
Les premiers soldats alliés à mettre le pied en France font partie d’un régiment anglais, le Oxford and
Buckinhamshire Light Infantry. Ils arrivent en planeurs à minuit 16. Leur objectif est le pont de Bénouville
(aujourd’hui Pegasus Bridge). Dans les heures qui suivent, près de 6,000 parachutistes britanniques et
canadiens sautent dans cette même région et 13,000 Américains descendent près de Ste-Mère-Église et
Carentan sur le flanc opposé.
Vers 5 h 30, les gros navires de guerre alliés qui sont encore à des dizaines de kilomètres en mer
commencent à pilonner les positions défensives allemandes sur la côte.
L’invasion se fait par vagues en fonction des marées. Ce sont les Américains qui sont les premiers
à donner l’assaut peu après 6 h. Ils s’emparent rapidement de la plage Utah et pénètrent à l’intérieur des terres.
Mais sur Omaha, c’est une toute autre histoire. Là, ils débarquent devant des fortifications allemandes intactes.
C’est une tuerie : 1,000 morts et 2,000 blessés. Mais, à la fin de la journée, on a toutefois réussi à avancer 3
kilomètres.
Vers 7 h 30, ce sont les Britanniques qui débarquent sur la plage Gold, longue de 30 kilomètres, sur
la gauche des Américains. Là, les défenses allemandes ont été affaiblies par les bombardements et, en fin de
journée, les soldats anglais ont progressé de près de 10 kilomètres.
A la même heure, les Anglais et un commando français débarquent sur la plage Sword à l’extrémité
est de la zone d’invasion. Peu après 13 h, des Britanniques venus de cette plage rejoignent les troupes arrivées
en planeur au pont de Bénouville.
Entre Gold et Sword, c’est la zone réservée aux Canadiens, la plage JUNO.
La plage JUNO : les Canadiens arrivent
Le secteur affecté aux trois brigades de la 3e Division canadienne d’infanterie s’étend sur 7 kilomètres
de St-Aubin-sur-Mer, à l’Est, jusqu’à Vaux, à l’Ouest. Il est 7 h 45 quand les premières vagues de Canadiens
atteignent la côte.
Leur débarquement est précédé de tirs d’artillerie provenant de chalands surmontés de canons et de
lance-roquettes. L’épaisse couche de fumée laissée par les bombardements empêche les Allemands de
découvrir l’étendue de la force attaquante.
La 7e Brigade - Une compagnie du régiment Canadian Scottish est une des premières unités
canadiennes à atteindre la plage entre Vaux et Sainte-Croix. Sur leur gauche, deux compagnies des Royal
Winnipeg Rifles et les chars amphibies du 1st Hussars débarquent devant Graye-sur-Mer. Ils subissent
d’importantes pertes avant d’atteindre la dune où ils se mettent à l’abri. Les deux autres compagnies des
Winnipeg Rifles réussissent à contourner l’ennemi et à prendre deux villages derrière la côte. Il est 8 h quand
l’autre régiment de la 7e brigade, le Regina Rifles, arrive devant Courseulles-sur-Mer, la localité la plus
fortifiée de la zone canadienne. Accompagné des chars du 1st Hussars, il leur faut plusieurs heures pour
nettoyer le village, mais, à la fin de la journée, ils ont progressé de 9 kilomètres.
La 8e Brigade - Il n’y a que 2 kilomètres séparant Courseulles et Bernières-sur-Mer. Les Allemands
avaient semé 14,000 mines dans ce secteur. Les soldats du Queen’s Own Rifles of Canada arrivent devant
Bernières vers 8 h. Il leur faut une heure pour prendre un blockhaus allemand. A 8 h 30, c’est le régiment de
la Chaudière qui débarque. Après avoir nettoyé ce qui reste de l’ennemi, les deux régiments marchent vers
l’intérieur des terres. Le Queen’s Own avance une dizaine de kilomètres et le Chaudière prend Bény-sur-Mer.
A l’extrémité gauche de la plage Juno, à St-Aubin-sur-Mer, ce sont les hommes du régiment North
Shore (Nouveau-Brunswick.) qui donnent l’assaut également vers 8 h. Avec l’aide des tanks du Fort Garry
Horse, ils maîtrisent les points forts ennemis et le village est libéré avant que ne sonne midi. Ils poursuivent
leur avance vers Tailleville (à 3 kilomètres) où ils font 60 prisonniers après de violents combats contre le
quartier général d’un bataillon de grenadiers allemands. Le North Shore compte 33 morts et 89 blessés avant
la tombée du jour.
Une unité britannique, le 48 Royal Marine Commando, débarquée avec le North Shore, ne réussit
cependant pas à faire la jonction avec les Anglais de la plage Sword sur la gauche.
La 9e Brigade, l’unité de réserve - Lorsque les hommes des North Nova Scotia Highlanders, du
Highland Light Infantry et du Stormont, Dundas and Glengarry Highlanders ainsi que les tanks des Fusiliers
de Sherbrooke débarquent à Bernières vers midi, ils sont confrontés à un embouteillage monstre. Il est 18 h
avant que ces unités ne soient en position pour entreprendre l’assaut de leurs objectifs. De toutes les unités
alliées débarquées, ce sont les North Novas qui avancent le plus loin le 6 juin, mais ils sont encore à 8
kilomètres de leur objectif du Jour J, l’aérodrome de Carpiquet, en banlieu de Caen.
Les pertes canadiennes le 6 juin ne sont que la moitié de ce que l’on avait craint avant l’invasion. Les
pertes officielles sont de 340 tués, 574 blessés et 47 prisonniers de guerre (Anciens combattants Canada).
Environ 155,000 soldats alliés, dont 15,000 Canadiens, ont débarqué le Jour J.
La Bataille de Normandie dure deux mois et demi et, de part et d’autre, on ne fait pas de quartier.
Le débarquement du 6 juin en Norrmandie est la première phase de la Bataille de Normandie qui
prend seulement fin le 22 août avec la destruction des forces allemandes et la fermeture de la “poche de
Falaise” à 30 kilomètres au sud-ouest de Caen.
Les Alliés ont défoncé la porte de la Forteresse Europe d’Hitler, mais de long mois de combats
sanglants restent à venir avant la capitulation de l’Allemagne le 7 mai 1945.
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