Communication de Janssen (Pharmaceutical companies of J&J) Breaking the Chains of Stigma Award: contre la stigmatisation en psychiatrie Le Breaking the Chains of Stigma Award a été décerné le 10 octobre – Journée mondiale de la santé mentale – au Psychiatrisch Centrum Dr. Guislain à Gand. Ce prix d’un montant de 50.000 dollars est une initiative du Museum Dr. Guislain et de Janssen Research & Development. Le jury, qui a dû choisir parmi plus de 60 envois, était constitué d’un groupe de personnalités de renommée internationale issues de milieux très diversifiés. La Belgique y était représentée par le Professeur Bernard Sabbe (Universiteit Antwerpen). Le prix a finalement été remis à Bagus Utomo, qui a lancé en Indonésie un projet visant à déstigmatiser les patients schizophrènes. Un entretien avec le Professeur Bernard Sabbe, le Frère René Stockman (conservateur du Museum Dr. Guislain), le Docteur Husseini Manji (responsable neuroscience de Janssen Research and Development) et, naturellement, Bagus Utomo, le lauréat du prix. Stigmate? Pr Sabbe: Les recherches scientifiques sur le phénomène de la stigmatisation en psychiatrie restent en fait relativement limitées à ce jour. Des études menées dans différentes parties du monde suggèrent que la stigmatisation se manifeste partout et constitue un problème majeur, mais que ses formes d’expression peuvent varier. Il est difficile de donner une définition correcte du terme «stigmate», qui est issu de la culture gréco-romaine et fait référence à une marque jadis imprimée au fer rouge sur le corps de certains esclaves afin de les distinguer des citoyens libres. Les stigmates externes sont liés aux conséquences sociales négatives et à la discrimination engendrées par les stéréotypes sur les personnes présentant des troubles psychiatriques. Les malades psychiatriques sont par exemple considérés comme responsables de leur pathologie. Les troubles psychiatriques peuvent aussi être attribués à une faiblesse de caractère. D’aucuns pensent alors que le patient devrait être traité de manière plus agressive ou que les malades psychiatriques sont rebelles à tout traitement. Il peut arriver que les patients eux-mêmes adoptent ces préjugés, ce qui se solde par un stigmate interne, à la suite duquel les malades éprouvent de la honte, ne recherchent aucune aide, NC485F De gauche à droite: Pr Bernard Sabbe, Bagus Utomo, F. René Stockman et Dr Husseini Manji. n’osent pas parler de leur trouble ou suivent moins bien leur traitement. Les études sur les moyens efficaces de lutter contre la stigmatisation restent aujourd’hui insuffisantes. Or nous disposons peut-être d’un éventail de possibilités. Des recherches mettent notamment en évidence l’utilité des contacts personnels avec les patients afin de parler ouvertement des difficultés rencontrées. Le problème de la stigmatisation est basé sur trois domaines: les connaissances, les préjugés et les comportements. Les connaissances liées aux maladies psychiatriques sont très limitées dans de nombreux groupes de population, y compris chez les jeunes. La probabilité de souffrir de problèmes psychiatriques est également sous-estimée et les symptômes de schizophrénie sont à peine connus. Internet nous offre cependant de nouvelles perspectives pour entrer en contact avec divers groupes et personnes et mettre sur pied des campagnes de sensibilisation. La lutte contre les préjugés revêt aussi une importance cruciale. La plupart d’entre eux ne reposent sur aucun fondement scientifique. Les personnes atteintes de troubles psychiatriques ne sont habituellement pas plus dangereuses que les autres et la majorité des maladies peuvent être correctement traitées, en général aussi bien que les pathologies dans d’autres domaines. Les malades ne sont en aucun cas responsables de leur pathologie, la sensibilité à une maladie psychiatrique ne dépendant générale- ment pas de facteurs susceptibles d’être individuellement contrôlés. En ce qui concerne les comportements, le secteur médical et la société doivent faire des efforts considérables pour lutter contre la discrimination. Il existe habituellement un cadre légal, auquel nous ne recourons pas suffisamment à mon avis. Nous devons également, en tant que médecins, veiller au renforcement de la responsabilisation («empowerment») afin de défendre les droits des patients. Enfin, les patients devraient pouvoir être réintégrés plus facilement dans le circuit professionnel, un aspect qui nécessite aussi une approche spécifique. Pourquoi un prix? Dr Manji: Notre objectif est de soutenir l’éducation sur les troubles psychiatriques graves et de faire comprendre qu’il s’agit effectivement de maladies du cerveau, tout aussi réelles que le diabète, le cancer ou les maladies auto-immunes. Un des problèmes des maladies telles que la schizophrénie et les troubles bipolaires tient au fait qu’elles sont à la fois associées à des souffrances majeures pour la personne concernée et sa famille et stigmatisées par la société, ce qui entrave l’accès aux soins et se traduit par une limitation du budget disponible pour la recherche scientifique. Nous devons donc favoriser une prise de conscience de la population à cet égard. Des rapports indiquent que les maladies mentales entraîneront un coût social plus élevé, à l’échelle mondiale, que le cancer, le diabète et les maladies pulmonaires réunis. Toutes ces maladies sont naturellement importantes, mais les troubles psychiatriques graves ne sont pas rares chez des personnes jeunes, qui devront vivre tout au long de leur existence avec leur pathologie. Grâce à ce prix, nous voulions, avec d’autres intervenants, braquer les projecteurs sur des personnes qui s’impliquent de manière héroïque pour éliminer les stigmates et souligner ainsi que nous avons besoin d’aide pour lutter contre ces «vraies» maladies. stigmate reste un problème majeur en psychiatrie. Les patients souffrent à la fois de leur maladie et, parfois davantage encore, du stigmate associé. Nous avons vu des projets magnifiques dans le monde entier, à l’échelle locale, nationale ou internationale. Dans l’ensemble, cela n’a vraiment pas été difficile d’aller au-delà des différences culturelles. La stigmatisation est un problème mondial. Nous avons finalement choisi un projet indonésien, mis en œuvre à l’initiative de Bagus Utomo, un membre de la famille d’un patient, qui a eu un retentissement majeur dans ce pays. Bagus Utomo: En 1995, nous avons dû faire face, ma famille et moi, à la schizophrénie de mon frère. A l’époque, nous n’avons pu trouver que très peu d’informations sur cette maladie et un grand nombre de nos questions sont restées sans réponse. Dans un pays aussi étendu et peuplé que l’Indonésie, il existe très peu de psychiatres assurant le traitement de la schizophrénie. Après plusieurs années de traitements infructueux, cela a été pour moi une véritable révélation lorsque j’ai pu trouver davantage d’informations en ligne sur la maladie. Cela m’a incité à créer un groupe Facebook afin de lancer ce projet. Nous avons ainsi pu entrer en contact rapidement avec plusieurs milliers de personnes à la recherche de renseignements complémentaires. Nous avons aussi pu mettre sur pied une organisation à but non lucratif, la KPSI (Komunitas Peduli Skizofrenia Indonesia), un point de contact central pour tous les intéressés et un centre d’information sur le traitement de la maladie en Indonésie. Cela nous a permis d’améliorer les connaissances relatives au traitement de la schizophrénie et aux conséquences négatives de la stigmatisation. De plus, des patients ont désormais accès à des groupes de soutien, des ateliers sur la santé psychique et des activités thérapeutiques telles que la peinture, le sport et la vidéo. Je suis très reconnaissant au jury qui m’a décerné le prix. Le montant sera notamment utilisé pour l’élaboration d’un site web et le développement de nos activités. Le prix est remis à… Pr Sabbe: Le nombre de nominations reçues pour le prix montre à quel point le ©Janssen-Cilag NV/SA – PHBE/PSY/1012/0088 – vu/er Erik Present, Antwerpseweg 15-17, 2340 Beerse Pourquoi la remise du prix a-t-elle été organisée au Psychiatrisch Centrum Dr. Guislain? Br. Stockman: «Le PC Dr. Guislain est un lieu historique. C’est en 1815, dans les caves du Château de Gérard le Diable (Gerard de Duivelsteen) à Gand, que furent littéralement brisés les fers de patients psychiatriques, qui y étaient emprisonnés et enchaînés, par les Frères et les Sœurs de la Charité, un ordre fondé par le chanoine Triest. Cet acte fut dicté par de nouveaux principes révolutionnaires sur les maladies psychiatriques, alors appliqués en France et en Angleterre. Auparavant, les patients n’étaient pas considérés comme des malades, mais comme des possédés, qui devaient être écartés de la société. Les soins furent d’abord assurés par des religieux à Gand, qui comprirent rapidement la nécessité d’une assistance médicale professionnelle, ce qui aboutit à la fondation de l’actuel PC Dr. Guislain, nommé d’après le premier médecin ayant pris en charge les soins aux patients. Il s’agissait à l’époque de l’institution modèle en Europe occidentale pour le traitement des maladies mentales. L’objectif du Museum Dr. Guislain, fondé en 1986, consistait, entre autres, à contribuer à la déstigmatisation des maladies psychiatriques grâce à l’organisation d’expositions sur ce thème. Le choix du lieu où le prix a été décerné n’est donc pas le fruit du hasard.»