Fonctions génératrices en géométrie symplectique

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Fonctions génératrices en géométrie symplectique
Cours de Master Avancé 2, ENS Lyon
Marco Mazzucchelli
janvier-mars 2016
Ces notes sont celles d’un cours d’introduction aux fonctions génératrices en
géométrie symplectique donné par Marco Mazzucchelli à l’ENS Lyon. Elles ont
été rédigées par Matthieu Dussaule et Benoit Joly. Les auteurs ont essayé le plus
possible d’avoir des notations cohérentes mais il se peut qu’il subsiste des différences légères. Ils s’excusent d’avance auprès du lecteur. Il va également de soi
que les erreurs qui se trouvent dans ce polycopié ne sont pas du fait de Marco
Mazzucchelli.
Dans un premier temps on dégagera des propriétés essentielles pour la suite du
cours qui concernent la théorie du point critique, notamment la théorie de Lyusternik et Schnirelmann. On s’intéressera ensuite à plusieurs conjectures d’Arnol’d
dans le cadre de ce qu’on appelle les phénomènes de rigidité symplectique. C’est à
ce moment qu’on introduira la notion de fonction génératrice. On se servira alors
de cette notion pour étudier les points fixes et plus généralement les points périodiques de difféomorphismes hamiltoniens. On définira enfin quelques invariants
symplectiques, notamment la capacité symplectique de Viterbo, l’objectif final du
cours étant de prouver le théorème de non-tassement de Gromov. En guise de
compléments, on étudie dans une dernière partie quelques propriétés de base de
l’équation de Hamilton-Jacobi.
Il n’y a pas de référence particulière pour ce cours dont on se soit servi systématiquement mais on peut donner beaucoup de conseils de lecture. Tout d’abord,
pour un lecteur qui n’aurait pas suivi de cours d’introduction à la géométrie symplectique, on réfère aux deux ouvrages [1] et [3]. On pourra d’ailleurs y trouver
également une introduction aux fonctions génératrices. Les quelques lectures suivantes sont plus avancées : [5], [4], [6]. Le troisième article peut-être trouvé sur la
page web de Claude Viterbo. On conseille également la lecture des autres articles
sur cette page, notamment pour la preuve des quelques propriétés non démontrées
dans ce cours dans le quatrième chapitre : Invariants Symplectiques.
1
Table des matières
1 Théorie du point critique
1.1 Cadre général . . . . . . . . . . . . .
1.2 Théorie locale . . . . . . . . . . . . .
1.3 Théorie Globale . . . . . . . . . . . .
1.4 Théorie de Lyusternik - Schnirelmann
.
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3
3
4
6
9
2 Phénomène de rigidité symplectique
2.1 Lagrangiens exacts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2.2 Familles Génératrices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2.3 Points fixes des difféomorphismes hamiltoniens . . . . . . . . . . . .
14
14
17
19
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3 Indices de Morse de familles génératrices et points périodiques de difféomorphismes hamiltoniens
25
3.1 Points périodiques de difféomorphismes hamiltoniens . . . . . . . . 25
3.2 Indices de Morse des fonctions génératrices . . . . . . . . . . . . . . 27
4 Invariants Symplectiques
30
4.1 Valeurs spectrales et sous-variétés lagrangiennes . . . . . . . . . . . 30
4.2 Valeurs spectrales de graphes de difféomorphismes hamiltoniens . . 33
4.3 Capacités symplectiques de Viterbo . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
5 Compléments
41
5.1 Équation de Hamilton-Jacobi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
5.2 Ordonabilité du groupe Hamc pR2n q . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42
2
1 Théorie du point critique
1.1 Cadre général
C8
On considère dans toute cette section une fonction F : M Ñ R où M est une
variété. Comme F est à valeurs réelles, un point x P M est un point critique de F
si et seulement si dF pxq “ 0.
La philosophie de la théorie du point critique est de comprendre le lien entre
la topologie de M et l’ensemble des points critiques de F . La connaissance de la
topologie de M donne des informations sur CritpF q. Cette étude a été initiée par
Marston Morse à partir des années 20, mais en un certain sens, le premier résultat
dans ce sens est celui de Weirestrass (sur M compacte, F a un maximum et un
minimum). Réciproquement, la connaissance de CritpF q permet de comprendre
la topologie de M . Cette approche a été développée en premier par René Thom
et Stephen Smale, elle est plus récente. Dorénavant, on fera les quatre hypothèses
suivantes :
1. La variété riemanniene pM, gq est complète (ou hilbertienne en dimension infinie, mais dans le cadre de ce cours, on se limitera aux variétés de dimension
finie puisque le but est d’étudier les variétés symplectiques).
2. La fonction F est lisse. (On pourrait supposer moins de régularité, C 2 ou
C 3 suffirait. À nouveau, dans la perspective d’appliquer cette théorie aux
fonctions génératrices en géométrie symplectique, on ne considère que des
applications C 8 ).
3. L’ensemble CritpF q des points critiques de F est discret.
4. On suppose la condition suivante vérifiée, dite condition de Palais-Smale
(abrégée en PS dorénavant) : Pour toute suite xn à valeurs dans M , telle
que F pxn q converge vers c P R et |∇F pxn q| converge vers 0, il existe une
sous-suite convergente xnk vers un point critique de F .
On donne quelques exemples. Si M est une variété fermée (compacte sans bord),
alors toute fonction vérifie PS. Par contre, si M “ R et F “ x ÞÑ e´x , F ne vérifie
pas PS. En fait, la condition PS se reformule informellement en "ne pas avoir de
point critique à l’infini".
Remarque 1.1. Parfois, la complétude et PS sont des conditions qui jouent l’une
contre de l’autre. Par exemple, soit F une fonction qui vérifie PS sur une variété M
fermée et soit x un point critique isolé. On considère F : M ztxu Ñ R. La variété
M ztxu n’est plus complète car les suites qui convergeaient vers x sont encore
de Cauchy après avoir retiré le point. Mais on peut la compléter en modifiant
la métrique au voisinage de x. En faisant ça, on modifie le gradient de F au
voisinage de x. On peut toutefois modifier la métrique et conserver la propriété
3
que |∇F pyq| ÝÑ 0 au voisinage de x (exercice) de sorte que F ne vérifie plus PS
sur M ztxu.
On peut déjà tirer quelques conséquences de la condition PS. L’intersection de
CritpF q avec un niveau F ´1 pcq est compact ou vide (donc fini car CritpF q est
supposé discret). D’autre part, si U Ă M est un ouvert tel que U X CritpF q “ H
et F pU q est borné, alors |∇pF q| ě cste ą 0.
1.2 Théorie locale
On étudie maitenant une application F au voisinage d’un point critique. Comme
l’étude est locale, on se place d’emblée dans le cadre d’un ouvert de Rn . On
C8
considère donc F : U Ñ R, où U est un ouvert de Rn contenant 0 et 0 est un
point critique isolé de F . Alors d2 F p0q est une forme bilinéaire, donc on l’écrit
d2 F p0qpv, wq “ă Av, w ą où A est une application linéaire auto-adjointe. On
identifie T0 U à Rn qu’on décompose en Rn “ KerpAq ‘ KerpAqK . Comme A est
autoadjointe, KerpAqK “ ImpAq.
Définition 1.1. Si KerpAq “ 0, le point critique x est dit non dégénéré.
Lemme 1.1 (Morse-Gromoll-Meyer). Avec les hypothèses ci-dessus, il existe un
voisinage ouvert V de 0 dans Rn et il existe φ : V Ñ U difféomorphisme sur son
image, tel que ϕp0q “ 0 et dϕp0q préserve la décomposition de l’espace tangent
Rn “ KerpAq ‘ KerpAqK et il existe F0 : V X KerpAq Ñ R telle que dF0 p0q “ 0
et d2 F0 p0q “ 0, tels que
1
F ˝ φpx0 , x1 q “ xAx1 |x1 y ` F0 px0 q.
2
Remarque 1.2. Dans le cas où x est non dégénéré, on obtient le lemme de Morse
classique F ˝ φpxq “ 12 xAx|xy ` cste.
Démonstration. Tout d’abord, Bx21 ,x1 F p0, 0q “ A|KerpAqK donc est un isomorphisme.
Le théorème des fonctions implicite donne alors une fonction ψ définie sur un voisinage ouvert U0 de 0 dans KerpAq à valeurs dans un voisinage ouvert U1 de
0 dans KerpAqK tel que ψp0q “ 0 et Bx1 F px0 , ψpx0 qq “ 0 pour tout x0 P U0 .
Dérivant cette expression par rapport à x0 puis l’évaluant en 0, on obtient l’égalité Bx20 ,x1 F p0q ` A|KerpAqK ˝ dψp0q “ 0. Puisque Bx20 ,x1 F p0q “ 0 et A|KerpAqK est
un isomorphisme, on obtient dψp0q “ 0. On fait le changement de coordonnées
px0 , x1 q ÞÑ px0 , x1 ` ψpx0 qq. Comme dψp0q “ 0, c’est bien localement un changement de coordonnées, et la hessienne en 0 ne change pas. Avec ce changement de
coordonnées, la restriction de F à tx0 uˆKerpAqK a un point critique non dégénéré
en l’origine.
4
On pose Gt px0 , x1 q “ tF px0 , x1 q ` p1 ´ tqpF px0 , 0q ` 21 xAx1 |x1 ąyq et on va
maintenant appliquer la méthode de Moser qui consiste à chercher une isotopie
ϕt telle que Gt ˝ ϕt “ G0 et ϕt p0q “ 0. On note Vt le champ de vecteur associé
à l’isotopie ϕt . En dérivant, l’équation devient Bt Gt ` dGt pVt q “ 0. Puisqu’à x0
fixé, 0 est un point critique de F , i.e. Bx1 F px0 , 0q “ 0, par le lemme de division
d’Hadamard, on peut écrire F px0 , x1 q “ F px0 , 0q ` 21 xHpx0 , x1 qx1 |x1 y au voisinage
de 0. L’équation devient alors dGt pVt q “ 21 xpHpx0 , x1 ´ Aqx1 |x1 y.
On cherche à présent Vt sous la forme p0, Wt q P KerpAq ‘ KerpAqK . L’équation se réécrit Bx1 Gt px0 , x1 qpWt px0 , x1 qq “ 21 xpHpx0 , x1 q ´ Aqx1 |x1 y. À nouveau,
Bx1 Gt px0 , 0q “ 0 et ce pour tout x0 , donc par le lemme d’Hadamard (à l’ordre 1
cette fois), on écrit Bx1 Gt pX ´ 0, x1 “ Kt px0 , x1 qx1 (Kt est une matrice appliquée
au vecteur x1 dans cette écriture). En dérivant puis en appliquant l’expression en
0, on obtient Kt p0, 0q “ Bx21 ,x1 Gt p0, 0q “ A|KerpAqK . Ainsi Kt est inversible en 0
donc au voisinage de 0 donc on peut trouver un tel champ de vecteur Wt .
Nous allons voir à présent comment caractériser un point critique à l’aide d’invariants locaux. On garde les mêmes notations et on note x le point critique de F
(ou 0 dans une carte).
Un premier invariant est la dimension de E´ , l’espace négatif de A. C’est le
dimension maximale d’une sous-espace stable sur lequel A est définie négative.
Comme A est diagonalisable, c’est aussi le nombre de valeurs propres strictement
négatives. On l’appelle indice de Morse et on le note indpF, xq. Le lemme de MorseGromoll-Meyer dit que x est non dégénéré et i “ indpF, xq, alors il existe une carte
ϕ telle que F ˝ ϕpx, x1 q “ 12 |x|2 ´ 12 |x1 |2 , où x P Rn´i et x1 P Ri .
Un autre invariant est la dimension du noyau de A. On l’appelle nullité et
on le note nulpF, xq. La nullité et l’indice de Morse décrivent complètement à
changement de base près la Hessienne A de F en 0. Mais on n’a pas une description
complète de F0 donc de F non plus au voisinage de 0.
Un autre invariant est l’homologie locale. On considère le sous-niveau tF ă cu
et on définit h˚ pF, xq “ H˚ ptF ă cu Y txu, tF ă cuq où c est la valeur critique
de F en 0. A priori, l’homologie locale n’est pas un invariant local car le sousniveau tF ă cu n’est pas dans un voisinage quelconque de x. En fait, si V est
un voisinage de x et W :“ tF ă cuzV , alors W Ă tF ă cu, donc par excision,
h˚ pF, xq “ H˚ pptF ă cu Y txuq X V, tF ă cu X V q. Ainsi l’homologie locale ne
dépend que du germe de F en 0.
Exemple 1.1. Si 0 est un minimum local strict, alors par excision on peut supposer
que le sous-niveau est vide, donc h˚ pF, 0q est l’homologie d’un point. C’est Z si le
degré est nul et 0 sinon.
Plus généralement, si 0 est un point critique non dégénéré de F , on note i
son indice de Morse. Alors F px, x1 q “ 12 |x|2 ´ 12 |x1 |2 , où x P Rn´i et x1 P Ri . Alors
5
tF ă cuY0 se rétracte par déformation sur Ri et tF ă cu sur Ri zt0u. On représente
le sous-niveau vu du dessus et en dimension 2 et vu en tranche en dimension 3 :
F
Ri
Rn´i
x
c
Ainsi h˚ pF, xq “ H˚ pB i , B i zt0uq “ H˚ pB i , Si´1 q. Donc l’homologie locale est Z
si le degré est i est 0 sinon. Elle ne donne donc pas plus d’information que l’indice
de Morse quand le point critique est non dégénéré.
L’homologie locale peut être nulle. Par exemple, si M “ R et F “ x ÞÑ x3 ,
alors h˚ pF, 0q “ H˚ ps ´ 8, 0s, s ´ 8, 0rq “ 0.
Théorème 1.1 (Gromoll, Mayer.). Soit une application F : U Ñ R où U est un
ouvert de Rn , 0 P CritpF q isolé et telle que F px0 , x1 q “ F0 px0 q ` 12 xAx1 |x1 y avec
A définie par la hessienne de F comme précédement et px0 , x1 q une décomposition
de Rn associée. Si on note F1 px1 q “ 21 xAx1 |x1 y et i “ indpF1 , 0q, alors
h˚ pF, 0q “ h˚´i pF0 , 0q
Exercice 1.1. Démontrer le résultat lorsque A est définie positive.
1.3 Théorie Globale
Cadre : Soit F : pM, gq Ñ R telle vérifiant les conditions 1 à 4.
Objectif : Comparer tF ă au et tF ă bu et si a<b calculer H˚ ptF ă bu, tF ă auq.
Lemme 1.2 (Lemme de déformation). Supposons que l’intervalle compact ra, bs
ne contient pas de valeur critique de F , alors
1) tF ă bu – tF ă au
2) {F<a} est un retract par déformation forte de {F<b}
6
Démonstration. Par la condition PS on sait qu’il existe a0 ă a tel que l’intersection
F ´1 pra0 , bsq X CritpF q soit vide. On en déduit qu’il existe ε ą 0 tel que |∇F | ą ε
sur F ´1 pra0 , bsq.
C0
On considère une application χ : M Ñ R telle que χ “ 0 sur tF ă a0 u, χ “ 1
∇F pxq
définie au moins sur tF ă bu
sur ta ď F ă bu. On pose alors Vt pxq “ ´χpxq |∇F
pxq|2
et soit φt son flot.
C0
On a alors φt : tF ă bu Ñ tF ă bu et @t ě 0
żt
d
F pφs pxqqds
F pφt pxqq ´ F pxq “
0 ds
żt
“ dF pφs pxqqrVs pφs pxqqs
0
żt
“ ´ χpφs pxqqds
0
ď0
Donc, si pour tout s P r0, ts, φs pxq P F ´1 ra, bs alors F pφt pxqq ´ F pxq “ ´t et
donc φb´a : tF ă bu Ñ tF ă au est un difféomorphisme, ce qui clot la démonstration de 1).
Pour obtenir 2) on va construire la retractation forte par déformation à l’aide
de l’application suivante :
τ : tF ă bu Ñ
r0, `8r
x
Ñ maxt0, F pxq ´ au
Il suffit maintenant de poser rt pxq “ φtτ pxq pxq et on obtient 2).
On peut obtenir un résultat plus fort que l’on ne démontre pas dans ce cours
sous la forme du lemme suivant.
Lemme 1.3 (Deuxième lemme de déformation). On suppose cette fois que l’intervalle borné sa, br est régulier par F , alors tF ď au est une rétraction par déformation forte du sous niveau tF ă bu
Corollaire 1.1. On déduit du lemme précédent que H˚ ptF ă bu, tF ď auq “ 0
Supposons que l’intervalle ra, br contient une seule valeur critique c de F . On
suppose l’homologie à coefficients dans un corps, par exemple Q. On pose K “
CritpF q X F ´1 pcq, on a alors
H˚ ptF ă bu, tF ă auq –H˚ ptF ă bu, tF ă auq
–H˚ ptF ă cu Y K, tF ă cuq
à
–
h˚ pF, xq
xPK
7
La première égalité est obtenue par déformation et la dernière par excision. Ce
résultat montre l’existence du lien entre H˚ ptF ă bu, tF ă auq et l’homologie
locale des points critiques de F de valeur incluse dans l’intervalle ra, br. Le théorème
suivant précise encore plus ce lien.
Théorème 1.2 (Inégalités de Morse). Dans les conditions habituelles sur F et
pour a ă b, on a pour tout entier n les inégalités
n
ÿ
n´i
p´1q
rang Hi ptF ă bu, tF ă auq ď
i“0
n
ÿ
p´1qn´i
i“0
ÿ
rang hi pF, xq
xPCritpF q
F pxqPra,br
Avant d’exposer la preuve, faisons quelques remarques sur ces inégalités. Pour
une meilleure
lisibilité dans la suite, on note βi “ rang Hi ptF ă bu, tF ă auq et
ř
λi “
rang hi pF, xq.
xPCritpF q
F pxqPra,br
Corollaire 1.2. 1) Si βi “ 0 pour tout i ě i0 alors pour tout n ą i0 on a égalité.
2) Pour tout i, βi ď λi
3) Si F est une fonction de Morse, alors
λi “ #tx P CritpF q X F ´1 ra, br | indpF, xq “ iu.
Remarque 1.3. Si on note de plus τi “ minp# genérateurs de torsion de H˚ ptF ă
bu, tF ă auqq alors λi ě βi ` τi ` τi´1 .
Faisons un peu d’algèbre homologique,
X,Y des espaces topologique tels
řn soientn´i
rangHi pX, Y q. Alors on a la
que Y Ă X. On définit σn pX, Y q “ i“0 p´1q
proriété suivante
Proposition 1.1. Soient X,Y,Z des espaces topologiques tels que Y Ă Z Ă X
alors σn pX, Y q ď σn pX, Zq ` σn pZ, Y q
Démonstration. Si on l’on note les inclusions i : Z Ñ X et j : Y Ñ Z, on a la
suite longue exacte en homologie suivante
Bd`1
j
i
B
d
d
... Ñ Hd pZ, Y q Ñ
Hd pX, Y q Ñ
Hd pX, Zq Ñd ...
on note βi pX, Y q “ rangHi pX, Y q et on obtient le système
βd pX, Y q “ rangpImpid qq ` rangpImpjd qq
βd pX, Zq “ rangpImpjd qq ` rangpImpBd qq
βd pZ, Y q “ rangpImpBd`1 qq ` rangpImpid qq
8
En combinant les équations précédentes on a
βd pX, Zq ` βd pZ, Y q ´ βd pX, Y q “ rangpImpBd qq ` rangpImpBd`1 qq.
Puisque rangpImpB0 qq “ 0, en calculant la somme alternée, on obtient finalement
σd pX, Zq ` σd pZ, Y q ´ σd pX, Y q “ rangpImpBn`1 qq ` p´1qn rangpImpB0 qq ě 0.
Avec cette propriété, nous sommes en mesure de démontrer les inégalités de
Morse sans trop d’efforts.
Démonstration des inégalités de Morse. On se place sous les hypothèses du théorème. On commence par remarquer que les points critiques de la fonction F sont
isolés par PS. D’où il existe un k-uplet de réels ai tels que a “ a1 ă a2 ă ... ă ak “ b
et rai , ai`1 r contient une seule valeur critique ci de la fonction F où l’on note
Ki “ F X F ´1 pci q. La propriété précédente donne les inégalités suivantes
řk´1
σn ptF ă bu, tF ă auq ď
i“1 σn ptF ă ai`1 u, tF ă ai uq
řk´1
ď
i“1 σn ptF ă ci u Y Ki , tF ă ci uq
1.4 Théorie de Lyusternik - Schnirelmann
On garde le même cadre que précédemment, à savoir on considère une fonction
F : M Ñ R vérifiant les propriétés 1) à 4). Soit h ‰ 0 dans Hd ptF ă bu, tF ă auq.
L’existence d’un tel h implique l’existence d’une valeur critique c P ra, br de F ,
d’après ce qui précède. Dans cette section, on s’intéresse à une valeur critique particulière, qu’on notera cpF, hq, directement déterminée par h. On peut commencer
par énoncer une première propriété relative à ce phénomène.
Proposition 1.2. Avec les mêmes notations, on définit
cpF, hq :“ inf
sup F pxq.
σ,rσs“h xPsupppσq
C’est aussi l’infimum
inftc P ra, br, h P Impi˚ : H˚ ptF ă cu, tF ă auq Ñ H˚ ptF ă bu, tF ă auqqu.
Alors cpF, hq est une valeur critique de F .
9
Lemme 1.4 (Lemme de minimax). Soit F Ă 2M une famille de sous-ensembles
de M tel que ϕt pY q P F si Y P F, où ϕt est le flot du champ de vecteur gradient
normalisé ´ ? ∇F 2 . Alors si cpF, Fq “ inf supF pxq est un nombre réel fini, c’est
1`|∇F |
Y PF xPY
une valeur critique de F . (On fait toujours les hypothèses 1 à 4 sur F ).
Démonstration. On désigne par c le nombre cpF, Fq qu’on suppose fini. Supposons
qu’il existe , η ą 0, tels que |∇F | ą dans la préimage F ´1 prc ´ η, c ` ηsq. Si x est
fixé, rappelons que F décroit le long de ϕt pxq. Pour x P F ´1 prc´η,żc`ηsq et t ą 0 tel
t
d
F pϕs pxqqds.
que ϕt pxq P F ´1 prc ´ η, c ` ηsq, on a c ´ η ď F pϕt pxqq “ F pxq `
0 ds
żt
|∇F pϕs pxqq|2
a
ds. Or la
Puis en dérivant F pϕs pxqq, F pϕt pxqq “ F pxq `
1 ` |∇F pϕs pxqq|2
0
2
2
fonction ? y 2 est croissante donc F pϕt pxqq ď F pxq ´ t ?1`
2 donc finalement
1`y
?
2
2
2η 1`
on obtient c ´ η ď c ` η ´ t ?1`
. En particulier le temps
2 , et donc t ď
2
est borné et comme le champ de gradient est normalisé, son flot est défini?pour
2
,
tout temps. Soit alors X P F tel que suppF q ď c ` η, alors pour t ą 2η 1`
2
X
ϕt pXq Ă tF ă c ´ ηu, donc sup pF q est strictement inférieur à c. Ceci contredit la
ϕt pXq
stabilité de F par ϕt ou la minimalité de c.
On peut donc supposer que pour tout ą 0, il existe x P F ´1 prc ´ , c ` sq tel
que |∇F px q| ď . Alors en prenant une suite n qui tend vers 0, on obtient une
suite xn , telle que F pxn q ÝÑ c et |∇F pxn q| ÝÑ 0, de sorte que par PS, on peut
trouver une sous-suite convergente vers un point critique. En particulier, cpF, Fq
est une valeur critique.
Remarque 1.4. Si F : M Ñ R est une fonction de Morse, alors les homologies
locales des points critiques sont de rang 1 comme on l’a déjà vu. Il suffit donc de
trouver h1 et h2 deux classes de cohomologie de H ˚ptF ă bu, tF ă auq linéairement
indépendantes pour trouver deux points critiques distincts. Pour autant, il est
facile de trouver des fonctions dont l’homologie locale est de rang plus grand que 1,
comme le montre l’exemple suivant. On ne peut pas alors appliquer cette technique
pour trouver plusieurs points critiques.
Exemple 1.2. On considère la fonction sur R2
F :
R2 Ñ
R
2
2
px, yq ÞÑ py ´ 2x qpy ´ x qpy ` x2 qpy ` 2x2 q
qui a comme unique point critique p0, 0q. On a |∇F | ě cste ą 0 en dehors d’un
compact, par exemple si |x|2 `|y|2 ą R ą 0 de sorte que F vérifie PS. Les propriétés
1 à 4 habituelles sont donc vérifiées. Pour déterminer le domaine sur lequel F est
10
négative, il suffit d’étudier le demi-plan y ą 0 par symétrie. Quand y ą 2x2 ou
y ă x2 , F ą 0, et quand 2x2 ą y ą x2 , F ă 0. On résume ceci sur le dessin
ci-dessous, où la partie tF ă 0u est grisée :
Ainsi, la région tF ă 0u est constituée de quatre composantes connexes toutes
contractiles et se rétracte par déformation sur quatre points, tandis que la région
tF ă 0u Y t0u se rétracte sur l’union de deux droites qui s’intersectent en 0.
Alors, l’homologie locale est nulle en degrés plus grand que 2 et en degré 0. Pour
calculer l’homologie locale en degré 1, on écrit la suite exacte associée à la paire
ptF ă u, tF ă 0uq :
0 Ñ H1 ptF ă u, tF ă 0uq Ñ H0 ptF ă 0uq Ñ H0 ptF ă uq Ñ 0.
En effet, tF ă u est contractile, donc son homologie en degré non nul est triviale. D’autre part, H0 ptF ă 0uq » Z4 et H0 ptF ă uq » Z, puisque le rang de
l’homologie en degré 0 est le nombre de composantes connexes. On en déduit que
H1 ptF ă u, tF ă 0uq » Z3 . Or par le lemme de déformation, tF ă u se rétracte
sur tF ă 0u Y t0u donc finalement h1 pF, 0q » Z3 .
On fait à présent quelques rappels sur le cup-produit et sur l’ordre partiel
défini sur les classes de cohomologie. Soient h une classe d’homologie relative,
i
h P Hd pX, Y q et K est une classe de cohomologie, K P Hř
pXq. Soit σ qui représente
h, h “ rσs et ω qui représente K, K “ rωs. On écrit σ “ σj où σj : ∆d Ñ X est un
řj
simplexe singulier. On définit alors la chaîne σ X ω “ ωppσj q|re0 ,...,ei s qpσj q|rei ,...,ed s .
j
C’est par définition la restriction des simplexes singuliers de σ à la i-face arrière,
avec comme coefficient la cochaîne ω évaluée en la restriction à la i-face avant. La
classe d’homologie de cette nouvelle chaîne ne dépend pas du choix de σ et ω. On
a donc défini un élément de Hd´i pX, Y q. On l’appelle cap-produit de h et K et on
le note h X K.
1
Si K 1 est une autre cochaîne, K 1 P H i pXq, représentée par ω 1 , on définit la
pi ` i1 q-cochaîne ω Y ω 1 par son action sur un simplexe-singulier et par linéarité :
ω Y ω 1 pσq “ ωpσ|re0 ,...,ei s qω 1 pσ|rei ,...,ei`i1 s q. C’est la cochaîne ω restreinte à la i-face
avant d’un simplexe multipliée par la cochaîne ω restreinte à la i1 -face arrière.
11
À nouveau cette définition ne dépend pas des choix de ω et ω 1 et on a donc un
1
élément de H i`i pXq qu’on appelle cup-produit de K et K 1 et qu’on note K Y K 1 .
Par définition, K 1 ph X Kq “ pK Y K 1 qphq et ph X Kq X K 1 “ h X pK Y K 1 q.
Définition 1.2. Soient h1 , h2 P H˚ pX, Y q deux classes d’homologie relatives. On
dit que h1 est plus petite que h2 , ce qu’on note h1 ă h2 s’il existe une classe de
cohomologie K en degré non nul, K P H ˚ą1 pXq, telle que h1 “ h2 X K.
On vérifie que l’on munit H˚ pX, Y q d’un ordre partiel en définissant h1 ď h2 si
h1 ă h2 ou h1 “ h2 . On vérifie également que si h1 ă h2 , il existe un représentant
σ1 et h1 et un représentant σ2 de h2 tels que le support de σ1 soit inclus dans celui
de σ2 . Mieux, si σ2 est un représentant donné de h2 , il existe un représentant σ1
de h1 dont le support est inclus dans celui de σ2 .
Si h1 ă h2 P H˚ ptF ă bu, tF ă auq, alors les points critiques définis précédemment vérifient cpF, h1 q ď cpF, h2 q. En fait avec nos hypothèses sur M et F , on a
mieux d’après le théorème suivant :
Théorème 1.3 (Lyusternik-Schnirelmann). Soit F : M Ñ R vérifiant les hypothèses 1 à 4. Si h1 ă h2 P H˚ ptF ă bu, tF ă auq, alors cpF, h1 q ă cpF, h2 q.
Avant de prouver ce théorème, on rappelle le résultat suivant :
Lemme 1.5. Si X est une variété recouverte par deux ouverts X1 et X2 , et si Y
est une sous-variété, alors pour toute classe d’homologie relative h P H˚ pX, Y q, on
peut trouver deux chaînes relatives σ1 , σ2 P C˚ pX, Y q telles que h “ rσ1 ` σ2 s avec
le support de σ1 inclus dans X1 et le support de σ2 inclus dans X2 .
On prouve ce résultat à l’aide d’un de Lebesgue associé au recouvrement
σ ´1 pXq “ σ ´1 pX1 qYσ ´1 pX2 q. On démontre maintenant le théorème de Lyusternik
et Schnirelmann.
Démonstration. On désigne par c1 et c2 les nombres cpF, h1 q et cpF, h2 q. Comme
on l’a déjà vu, d’après la condition PS et le fait que les points critiques sont isolés,
les valeurs critiques sont isolées aussi. Donc il existe ą 0 tel que sc2 , c2 ` s
soit un intervalle régulier inclus dans sc, br. Par définition de c2 comme borne
inférieure, il existe un cycle σ tel que h2 “ rσs avec le support de σ inclus dans
tF ă c2 ` u. On note alors K “ CritpF q X F ´1 pc2 q. Par le lemme de déformation,
on a ptF ă c2 ` u, tF ă auq » ptF ă c2 u Y K, tF ă auq et par excision on peut
supposer que le support de σ est contenu dans tF ă c2 u Y V où V est un voisinage
de K. On applique ceci à un voisinage constitué de boules disjointes B1 , ..., Bn
contenant chacunes un unique point de K.
On applique alors le lemme en décomposant σ en deux chaînes σ1 ` σ2 avec le
support de σ1 inclus dans tF ă c2 u et le support de σ2 inclus dans V . D’autre part,
12
puisque h1 ă h2 , il existe une cochaîne ω P H i ptF ă buq telle que h1 “ h2 X rωs.
On peut choisir ω qui s’annule sur V . En effet, V est une réunion finie de boules
contractiles, donc en écrivant la suite longue exacte associée à la paire ptF ă bu, V q,
on obtient H i ptF ă buq » H i ptF ă bu, V q. Il faut faire attention au fait que σ1
et σ2 sont des chaînes, et a priori pas des cycles, donc on ne peut parler de leur
classe d’homologie. Cependant, il reste vrai que rσ1 ` σ2 s X rωs “ rσ1 X ω ` σ2 X ωs.
Comme σ2 X ω “ 0, on obtient finalement h1 “ rσ1 X ωs, donc h1 est représentée
par un cycle à support dans tF ă c2 u. Comme le support d’un cycle est compact,
maxpF|supppσ1 Xωq q ă c2 , de sorte que c1 ă c2 en passant à la borne inférieure.
Remarque 1.5. En adaptant un peu la preuve au cas où les points critiques ne
sont pas isolés, on a montré que si h1 ă h2 , h1 “ h2 X rωs par exemple, mais
cpF, h1 q “ cpF, h2 q “ c, alors pour tout voisinage V de CritpF q X F ´1 pcq, ω|V ‰ 0.
En particulier, informellement, F ´1 pcq a obligatoirement de la topologie.
On note 1 ` CLpX, Y q “ maxtk P N, Dh1 ă ... ă hk P H˚ pX, Y qu. On obtient
l’inégalité CardpCritpF q X F ´1 ra, brq ě 1 ` CLptF ă bu, tF ă auq comme corollaire du résultat précédent. Si M est une variété fermée, F est bornée et alors
CardpCritpF qq ě 1 ` CLpM q, ce qui reste encore vrai simplement si F ě cste en
faisant tendre b vers l’infini.
13
2 Phénomène de rigidité symplectique
2.1 Lagrangiens exacts
On considère une variété fermée M
ř de dimension n. On munit son cotangent
T ˚ M de la forme de Liouville λ “
pi dqi “ pdq, ou plutôt de la forme symplectique ω “ ´dλ. Une sous-variété L de T ˚ M est dite lagrangienne si L est de
dimension n (la dimension de M ) et si ω|L “ 0. C’est équivalent à demander que
λ|L soit fermée et fournisse donc une classe de cohomologie dans H ˚ pLq. On dit
que L est exacte si rλ|L s “ 0 P H ˚ pLq i.e. si λ est exacte sur L. On s’intéressera
essentiellement aux lagrangiens fermés dans la suite du cours. On en donne deux
exemples importants.
Exemple 2.1. Le premier exemple est donné par les 1-formes exactes. Soit µ une
1-forme sur M . Son graphe L “ tpq, µq q, q P M u est lagrangien si et seulement si
dµ “ 0. En effet, la propriété caractéristique de la forme de Liouville λ est que si
µ est une 1-forme, on peut la voir comme une section de M dans T ˚ M , et alors le
tiré en arrière de λ par µ redonne µ : µ˚ pλq “ µ. Ainsi, µ˚ pωq “ dµ et µ˚ pωq “ 0
est la condition que ω soit nulle sur L. Plus généralement d’ailleurs, on définit les
lagrangiens immergés par cette propriété : si i : L Ñ M est une immersion, on
dit que L est lagrangien si i˚ pωq est fermée, exact si i˚ pωq est exacte. Revenant au
graphe d’une 1-forme, L est exact si et seulement si µ est exacte. On écrit alors
µ “ dF où F : M Ñ R. On dit que F est une fonction génératrice de L. Par
exemple, le graphe de la section nulle, qu’on notera dorénavant 0 ´ sect est un
lagrangien exact. On constate par ailleurs que L intersecte la section nulle lorsque
µq “ 0 donc lorsque dF pqq “ 0, i.e. lorsque q est un point critique de F . Grâce à la
théorie de Morse qu’on a détaillé dans le chapitre précédent, on peut affirmer que le
lagrangien L intersecte le graphe de la section nulle en au moins 1`CLpM q points.
Si F est une fonction de Morse, on a mieux : CardpL X 0 ´ sectq ě rangpH˚ pM qq.
Le fait que F soit de Morse se traduit par le fait que L intersecte la section nulle
de manière transverse (exercice). En particulier si l’intersection est transverse, les
points critiques sont isolés.
On étudie comme deuxième exemple les lagrangiens du cotangent de S1 . Comme
ω est alternée, elle est nulle sur toute sous-variété de dimension 1. Or T ˚ S1 est de
dimension 2, donc les lagrangiens sont exactement les courbes. On s’intéresse dans
cet exemple aux lagrangiens fermés, donc aux courbes fermées. Soit donc L une
courbe fermée. On la suppose transverse à la section nulle. Elle l’intersecte donc en
un nombre fini de points par compacité. On rappelle que S1 est parallélisable, donc
L est simplement une courbe fermée tracée sur un cyclindre. Entre chaque point
d’intersection avec la section nulle, la courbe est au-dessus ou en-dessous de 0 ce
qui délimite un nombre fini de régions R1 , ..., Rn . Alors L est exacte si et seulement
si la somme algébrique des volumes des Ri est nulle. En effet, L est exacte si et
14
ż
seulement si λ|L est exacte, si et seulement si
λ “ 0 car L est de dimension 1. Or
ż
λ. Comme λ est nulle
par le théorème de Stokes, le volume de Ri est juste ´
BRi
ż
sur 0 ´ sect, la somme algébrique des volumes des Ri donne donc ´ λ. Ainsi, si
L
L
la courbe intersecte la section nulle, elle l’intersecte en au moins deux points. Sur
le dessin ci-dessous, S1 est représenté par le segment r0, 1s sur lequel on identifie
les points 0 et 1. Les droites verticales représentent les fibres de T ˚ S1 .
0
‚
R3
R1
R1
‚
R4
1
R2
On considère une variété symplectique pW 2d , ωq. Un hamiltonien est une application H : r0, 1s ˆ W Ñ R. On notera aussi Ht pzq pour Hpt, zq. Un hamiltonien
définit un champ de vecteur XHt par la formule ωpXHt , .q “ dHt . En intégrant ce
champ de vecteur on obtient un flot, noté φtH . On rappelle qu’un difféomorphisme
qui préserve la structure symplectique est appelé aussi symplectomorphisme. Le
flot d’un hamiltonien est un symplectmorphisme, i.e. pour tout t, pφtH q˚ ω “ ω.
En fait, un hamiltonien est défini sur R ˆ W mais on peut toujours supposer qu’il
est 1-périodique. On peut également quitte à perturber H supposer que le flot est
défini au temps 1. On appelle également hamiltonien tout difféomorphisme qui est
le temps 1 d’un flot associé à une fonction hamiltonienne H. Il faut donc faire
attention à la terminologie. On appellera plutôt hamiltonien la fonction H et on
parlera de difféomorphisme hamiltonien pour désigner φ1H .
Soient H et K deux hamiltoniens sur r0, 1s ˆ W . Alors on a les propriétés
suivantes :
1. Pour tout t tel que les flots soient définis, φtH ˝ φtK “ φtH7K , où l’hamiltonien
H7K est défini par H7Kpt, zq “ Ht pzq ` Kt ppφtH q´1 pzqq.
t
, où l’hamiltonien H est
2. Pour tout t tel que le flot soit défini, pφtH q´1 “ φH
t
défini par Hpt, zq “ ´HpφH pzqq.
3. Si ψ est un symplectomorphisme, alors pour tout t tel que le flot est défini,
ψ˝φtH ˝ψ ´1 “ φtHψ , où l’hamiltonien Hψ est défini par Hψ pt, zq “ Ht pψ ´1 pzqq.
15
En particulier, l’ensemble des difféomorphismes hamiltoniens est un groupe,
qui plus est distingué dans celui des symplectomorphismes.
Conjecture 2.1 (Conjecture d’Arnol’d). Si M est une variété fermée, la conjecture d’Arnol’d s’intéresse aux sous-variétés lagrangiennes exactes de T ˚ M . Plus
précisement
tLargrangiennes exactes de T ˚ M u “ tφp0 ´ sectq, φ P Hamc pT ˚ M qu.
Ce résultat est vrai si M “ S1 . La démonstration est laissée en excercice. Le
cas M “ S2 est déjà bien plus compliqué à traité. La conjecture reste vraie et la
démonstration est due à Hind (2004).
Remarque 2.1. On sait déjà que l’inclusion de droite à gauche est vraie. Pour en
faire la démonstration, on va avoir besoin d’une propriété préliminaire.
Proposition 2.1. Soient pW, wq une variété symplectique exacte avec w “ dλ et φt
une isotopie de difféomrphismes symplectique de pW, dλq avec φ0 “ id. Alors tφt u
est hamiltonien si et seulement si pour tout t on a φ˚t λ ´ λ “ dAt où At : W Ñ R
est une fonction C 8 .
Démonstration. On considère le champ de vecteur Xt associé à l’isotopie φt , pour
obtenir le résultat demandé on va construire un hamiltonien associé à Xt .Pour cela
on applique la formule des Cartan à dtd φ˚t λ , ce qui donne
d ˚
φ λ “ φ˚t LXt “ φ˚t pιXt ˝ dλ ` dpλpXt qqq “ dA9 t .
dt t
De la dernière égalité on déduit l’équation
ιXt ˝ dλ “ dpA9 t ´ φ˚t λpXt qq.
Ainsi il suffit de prendre Ht “ A9 t ´ φ˚t λpXt q et Ht définit bien un hamiltonien
associé à Xt .
Réciproquement, on se donne un hamiltonien Ht associé
ż 1 aux champs de vecteurs Xt de flot φt , alors on vérifie que l’application At pzq “ pλpXt q`Ht q˝φt pzqdt
0
convient.
On peut maintenant démontrer l’inclusion de droite à gauche de la conjecture
d’Arnol’d, ce qui se trduit sous la forme de la proposition suivante.
Proposition 2.2. Quelque soit le flot hamiltonien φ de la variété symplectique
pT ˚ M, ´dλq, alors le lagrangien L “ φp0 ´ sectq est un lagragien exacte.
16
Démonstration. On sait déjà que L est une sous-variété lagrangienne, il suffit donc
de vérifier qu’elle est exacte. Par la proposition précédente, on a l’existence d’une
application A telle que φ˚ λ ´ λ “ dA et si on note ψ “ φ|0´sect : M Ñ L alors
ψ ˚ pλ|L q “ λ|0´sect ` dA|0´sect “ dA|0´sect .
L’égalité précédente implique que λ|L “ dpA˝ψ ´1 c’est à dire que L est exacte.
2.2 Familles Génératrices
Dans cette section, on considère des variétés M n fermées. On va chercher à
caractériser les lagrangiens exacts par des fonctions de la forme F : M ˆ RN Ñ R
(où l’on considèrera les coordonnées pq, ξq de M ˆRN ) vérifiant les deux conditions
suivantes :
1. La valeur 0 est une valeur régulière de Bξ F : M ˆ RN Ñ RN .
2. La fonction F est quadratique à l’infini, c’est à dire qu’il existe une forme
quadratique Q : RN Ñ R de la forme Qpξq “ă Aξ|xi ą avec A une matrice
symétrique inversible et F pq, ξq “ Qpξq en dehors d’un compact.
On remarque tout d’abord que la sous variété de M ˆ RN définie par
Σ “ pBξ F q´1 p0q “ tpq, ξq P M ˆ RN , Bξ F pq, ξq “ 0u
est de dimension dimpM q. Elle est compacte d’après la deuxième condition.
On définit l’application
i:
Σ Ñ
T ˚M
q, ξ ÞÑ pq, dq F pq, ξqq
Proposition 2.3. l’application i est une immersion.
Démonstration.
La première ˘condition se traduit par le fait que l’application li` 2
2
F pq, ξq Bξξ
F pq, ξq est surjective pour tout couple pq, ξq de Σ. On a
néaire Bqξ
ˆ 2
˙
Bξq F pq, ξq
donc que l’application
est injective pour tout couple pq, ξq de Σ.
2
Bξξ
F pq, ξq
2
On décrit le noyau de di par kerpdiq “ tp0, ηq P Tpq,ξq Σ|Bξq
F pq, ξqpηq “ 0u. C’est
2
2
donc aussi l’ensemble tp0, ηq P |η P RN , Bξξ
F pq, ξqpηq “ 0, Bξq
F pq, ξqpηq “ 0u.
Donc par ce qui précède, ce noyau est nul.
Proposition 2.4. On note L l’image de Σ par l’application i. Alors L est une
sous variété lagrangienne immergée et exacte dans pT ˚ M, dλq.
17
Démonstration. Il suffit de vérifier l’exactitude de L. Pour cela on calcul le tiré en
arrière par i de la forme de Liouville, soit
ÿ
ÿ
i˚ λ “ i˚ p pj dqj q “
Bqj F dq “ dq F “ dF.
j
j
La dernière égalité provient de la défintion de Σ.
Exercice 2.1. On peut remplacer la deuxième par condition par une un peu plus
faible : F pq, ξq “ Qpξq ` Bpq, ξq pour tout couple pq, ξq P M ˆ RN où B est
C 1 -bornée.
Définition 2.1. Soit F une application vérifiant les deux conditions précédentes
et L “ ipΣq le lagrangien associé. Alors on dit que F est une famille génératrice
de L (noté f.g.)
Théorème 2.1 (Laudenbach-Sikorav, 1985). Pour tout difféomorphisme hamiltonien φ à support compact de T ˚ M , le lagrangien φp0 ´ sectq admet une f.g.
On admet ce théorème. On pourra consulter l’article de Jean-Claude Sikorav [5].
Corollaire 2.1. Pour tout difféomorphisme hamiltonien φ à support compact de
T ˚ M , on obtient la minoration suivante :
Cardpφp0 ´ sectq X 0 ´ sectq ě CLpM q ` 1.
Si l’image de la section nulle par φ est transverse à la section nulle on a mieux :
Cardpφp0 ´ sectq X 0 ´ sectq ě rangpH˚ pM qq.
Démonstration. Par le théorème de Laudenbach-Sikorav on peut considérer F une
f.g. de φp0 ´ sectq, or F étant quadratique à l’infini (égale à Q hors d’un compact)
on remarque que pour b assez grand tF ă bu “ M ˆ tQ ă bu et de même
tF ă ´bu “ M ˆ tQ ă ´bu.
De plus, F vérifie PS car en dehors d’un compact,
|∇pF pq, ξq| “ |∇pQpξqq| “ |Aξ| ě |A|´1 |ξ| ą constante ą 0.
Les points d’intersection entre la section nulle et son image par φ sont en correspondance bijective avec les points critiques de F .
En utilisant la formule de Künneth, on vérifie que
à
Hp pM q b H˚´p ptQ ă bu, tQ ă ´bu.
H˚ pM ˆ tQ ă bu, M ˆ tQ ă ´buq “
pPZ
18
Or Hd´p ptQ ă bu, tQ ă ´bu est de rang 1 si d ´ p “ indpQq et de rang nul
sinon. D’où on obtient au final que H˚ ptF ă bu, tF ă ´buq “ H˚´indpQq pM q.
Par le corolaire du théorème de Lyusternik-Schnirelmann appliqué à F on a bien
Cardpφp0 ´ sectq X 0 ´ sectq “ CardpCritpF qq ě CLpM q ` 1.
De plus, si F est une fonction de Morse, CardpCritpF qq ě rangpH˚ pM q. Il suffit
donc de montrer que la condition de transversalité implique F de Morse. Soit pq, ξq
un point critique de f , on considère la hessienne de F en ce point :
˙
ˆ 2
2
Bqq F pq, ξq Bqξ
F pq, ξq
2
.
d F pq, ξq “
2
2
Bξq
F pq, ξq Bξξ
F pq, ξq
La non transversalité de l’intersection φp0´sectqX0´sect au point pq, 0q équivaut
2
2
à l’existence d’un point pν, ηq P Tpq,ξq Σ non nul tel que Bqq
F pq, ξqν`Bξq
F pq, ξqη “ 0.
N
Ceci se réécrit alors pν, ηq P Tq M ˆ R est non nul et vérifie les deux conditions
2
2
2
2
Bqq
F pq, ξqν ` Bξq
F pq, ξqη “ 0 et Bξξ
F pqξqν ` Bξq
F pξqqη “ 0. C’est-à-dire que pν, ηq
2
est dans le noyau de d F pq, ξq. On trouve donc comme condition équivalente que
le point critique est dégénéré.
2.3 Points fixes des difféomorphismes hamiltoniens
On considère dans tout ce paragraphe une variété symplectique fermée pW, ωq.
Soit φ P symppW, ωq. Le graphe de φ, noté graphpφq :“ tpx, φpxqq, x P W u est
une sous-variété lagrangienne de pW ˆ W, ω a ωq. En fait, si φ est un difféomorphisme, son graphe est lagrangien pour la forme ω a ω si et seulement si c’est
un symplectomorphisme. On remarque que pour la même raison, la diagonale
∆ :“ tpx, xq, x P W u est lagrangienne. Par définition, un point fixe de φ est un
point d’intersection entre graphpφq et ∆.
Supposons à présent que φ est C 1 -proche de l’identité. Puisque ∆ est lagrangien,
le théorème du voisinage tubulaire de Weinstein nous dit qu’il existe un voisinage U
de ∆ dans W ˆ W et une application ψ : U Ñ T ˚ ∆ qui est un difféomorphisme sur
son image, qui envoie ∆ sur la section nulle et qui envoie la forme ωaω sur la forme
´dλ. Comme φ est C 1 -proche de l’identité, ψpgraphpφqq est C 1 -proche de la section
nulle, c’est donc le graphe d’une 1-forme µ sur ∆. Puisque ψ préserve les structures
symplectiques et que graphpφq est lagrangien, le graphe de µ est lagrangien. Comme
on l’a vu précédemment, ceci équivaut à dire que µ est fermée. Supposons alors
C8
que H 1 pW, Rq “ 0. Alors en particulier µ est exacte. Soit F : ∆ Ñ R telle que
µ “ dF . Les points fixes de φ sont en correspondance bijective avec l’intersection
du graphe de µ avec la section nulle, puisque ψ est un difféomorphisme, donc ils
sont aussi en correspondance bijective avec les points critiques de F . En particulier,
puisque ∆ est difféomorphe à W , CardpFixpφqq ě 1 ` CLpW q ` 1 et si F est une
fonction de Morse, CardpFixpφqq ě rangpH˚ pW qq. Traduisons le fait que F soit une
19
fonction de Morse. Comme on l’a vu précédemment, cela équivaut à demander que
le graphe de dF “ µ intersecte transversalement la section nulle, ou bien puisque ψ
est un difféomorphisme, que graphpφq intersecte transversalement ∆. C’est encore
équivalent à demander que pour tout point fixe z de φ et tout vecteur non-nul v
de Tz W , dφpzqv ‰ v ou bien que 1 n’est pas dans le spectre de dφpzq En effet,
Tpz,zq ∆ “ tpv, vq, v P Tz W u et Tpz,φpzqq graphpφq “ tpv, dφpzqvq, v P Tz W u.
Définition 2.2. Soit ψ : M Ñ M un difféomorphisme et z un point fixe de ψ. On
dit que z est non-dégénéré si 1 n’est pas dans le spectre de dψpzq.
Exercice 2.2. Montrer que pour U un voisinage de z et φ un difféomorphisme
C 1 -proche de ψ, Fixpφq X U ‰ H.
Une autre conjecture d’Arnol’d énonce que si φ est un difféomorphisme hamiltonien de pW, ωq, alors CardpFixpφqq ě CLpW q ` 1 (ě rangpH˚ pW qq si tout point
fixe est non dégénéré), sans supposer que φ est C 1 -proche de l’identité.
Cette conjecture ressemble à celles qu’on a énoncées au paragraphe précédent
mais concerne cette fois les variétés symplectiques compactes plutôt que les cotangents. Elle a été positivement dans plusieurs cas, par exemple lorsque la variété
pW, ωq ne possède pas de
ż sphère symplectique, i.e. lorsque pour toute application
lisse u : S2 Ñ W , on a
u˚ ω “ 0. Elle a aussi été résolue dans le cas des tores :
S2
Théorème 2.2 (Conley-Zehnder,1983). On considère le tore T2n muni de la forme
sympletique standard ω0 (la forme symplectique standard de R2n qui passe bien
au quotient). Alors tout difféomorphisme hamiltonien φ de T2n possède au moins
CLpT2n q ` 1 p“ 2n ` 1q points fixes et en possède au moins rangpH˚ pT2n qq p“ 22n q
si tous les points fixes sont non dégénérés.
On donne ici la preuve simplifiée de Marc Chaperon. Elle est un peu différente
de la preuve originale de Conley et Zehnder qu’on trouve dans [2]. C’est dans cette
preuve qu’est introduite essentiellement la notion de famille génératrice, notion
qui simplifie beaucoup les arguments d’analyse donnés par Conley et Zehnder. On
pourrait adapter cette preuve pour démontrer le théorème de Laudenbach-Sikorav.
Démonstration. Soit φ P HampT2n q. On écrit φ “ φ1H où φtH est le flot hamiltonien
associé à l’hamiltonien Ht : T2n Ñ R. Soit ą 0. Alors il existe un entier k
pj`1q{k
j{k
suffisamment grand tel que φj :“ φH
˝ pφH q´1 soit -proche de l’identité en
topologie C 1 . On peut donc trouver une décomposition φ “ φk´1 ˝ φk´2 ˝ ... ˝ φ0 ,
avec φj qui est C 1 -proche de l’identité.
On relève alors φj en un difféomorphisme hamiltonien φ̃j de pR2n , ω0 q qui reste
C 1 -proche de l’identité. Une manière de faire cela est de relever l’hamiltonien Ht
pj`1q{k
j{k
˝ pφH̃ q´1 . Alors, le
en un hamiltonien H̃t et R2n puis de poser φ̃j “ φH̃
20
difféomorphisme hamiltonien φ̃ :“ φ̃k´1 ˝ ... ˝ φ̃0 relève φ. Il vérifie que pour z P R2n
et w P Z2n , φ̃pz ` wq “ φ̃pzq ` w. Jusqu’à la fin de la preuve, on adoptera les
notations suivantes. Si z P R2n , z “ pz1 , ..., zn q avec zj P R2 , alors z “ px, yq où
x “ px1 , ..., xn q, y “ py1 , ..., yn q et zj “ pxj , yj q, i.e. x, y P Rn . De même avec pour
Z “ pX, Y q lorsque l’on aura besoin de majuscules.
On applique le théorème du voisinage tubulaire de Weinstein. En fait on définit
explicitement
ψ : pR2n ˆ R2n , ω0 a ω0 q Ñ
pT ˚ R2n , ´dλq
px, y, X, Y q
ÞÑ pX, y, y ´ Y, X ´ xq
ce qui nous simplifiera la tâche. On vérifie par un calcul que ψ envoie la diagonale de
R2n ˆ R2n sur la section nulle de T ˚ R2n et préserve les structures symplectiques (ce
qui assure d’ailleurs directement que ψ est un difféomorphisme). En appliquant ce
qu’on a vu précédemment et en remarquant que le premier groupe de cohomologie
de R2n est nul, on obtient que ψpgraphpφ̃j qq est le graphe d’une 1-forme exacte
C8
dfj avec fj : R2n Ñ R. On a montré que φ̃j px, yq “ pX, Y q si et seulement si
X ´ x “ By fj pX, yq et Y ´ y “ ´Bx fj pX, yq. On peut intepréter ce système
d’équations comme une discrétisation du système d’équations hamiltonien. On a
aussi montré que Fixpφ̃j q “ Critpfj q.
En fait on peut choisir fj périodique en toutes les variables. En effet, comme
φ̃j est un difféomorphisme hamiltonien, il possède une action qu’on note A. On
note φ̃j px0 , y0 q “ px1 , y1 q et plus généralement φ̃tj px0 , y0 q “ pxt , yt q pour plus de
lisibilité. Onż a alors y1 dx1 ´ y0 dx0 “ dA par définition de A. On rappelle que
1
pyt x9 t ` Ht pxt , yt qqdt. En retranchant et ajoutant y0 dx1 , on obtient
Apx0 , y0 q “
0
dA “ py1 ´ y0 qdx1 ` y0 pdx1 ´ dx0 q “ py1 ´ y0 qdx1 ` px0 ´ x1 qdy0 ` dpxy0 , x1 ´ x0 yq
ce qu’on réécrit
dA “ ´Bx1 f px1 , y0 qdx1 ´ By0 f px1 , y0 qdx0 ` dpă y0 , x1 ´ x0 ąq.
Comme φ̃j est C 1 -proche de l’identité, px1 , y0 q est un système de coordonnées. On
note θ : px0 , y0 q ÞÑ px1 , y0 q le difféomorphisme en question. Alors
fj px1 , y0 q “ xy0 , x1 ´ x0 y ´ A ˝ θ´1 ` cste.
On choisit cette constante nulle. Alors si w P Z2n ,
A ˝ θ´1 px1 ` w, y0 q “ Apθ´1 px1 , y0 q ` pw, 0qq “ Apθ´1 px1 , y0 qq,
donc fj px1 ` w, y0 q “ fj px1 , y0 q et
A ˝ θ´1 px1 , y0 ` wq “ A ˝ θ´1 px1 , y0 q ` xw, x1 ´ x0 y
21
donc fj px1 , y0 ` wq “ fj px1 , y0 q. Ainsi fj est bien invariante par translation par
Z2n .
On a donc prouvé que Fixpφj : T2n Ñ T2n q “ Critpfj : T2n Ñ R2n q, mais cela
ne permet pas encore de conclure pour le difféomorphisme φ. L’idée de Chaperon
est d’introduire le produit R2n ˆ ... ˆ R2n » R2nk et de considérer
F̃ : R2n ˆ ... ˆ R2n Ñ
pz0 , ..., zk´1 q ÞÑ
R
pxyj , xj ´ xj`1 ąy ` f˜j pxj`1 , yj qq
ř
j mod k
dont les points critiques constituent des points fixes de φ. En effet, pz0 , ..., zk´1 q est
un point critique de F̃ si et seulement si pour tout j mod k, φ̃j pzj q “ zj`1 . Pour
voir cela, on constate simplement que z P CritpF̃ q si et seulement si pour tout j,
Byi F̃ “ Bxj F̃ “ 0, ce qui se réécrit
xj ´ xj`1 ` Byj f˜j pxj`1 , yj q “ 0,
yj`1 ´ yj ` Bxj f˜j pxj`1 , yj q “ 0.
On retrouve donc le système hamiltonien discret qui définit fj et comme annoncé
plus haut dans la preuve, ceci équivaut à φ̃j pxj , yj q “ pxj`1 , yj`1 q. D’autre part,
2d
2d
Ñ R, où l’action de Z2d est
F̃ passe au quotient en une fonction F : R ˆ...ˆR
Z2d
définie par w.pz0 , ..., zk´1 q “ pz0 ` w, ..., zk´1 ` wq. En effet dans la définition de
F̃ , les termes en f˜j sont bien périodiques. Puis, si l’on
ř ajoute un même vecteur
d
w P Z à toutes les composantes
xj , on ne change pas xyj , xj ´xj`1 y, mais comme
ř
cette somme se réécrit xyj ´ yj´1 , xj y, on ne la modifie pas non plus en ajoutant
un même vecteur w P Zd à toutes les composantes yj . Comme dF̃ pzq “ dF pzq,
les points critiques de F fournissent donc des points critiques de F̃ et puisqu’il
y a une correspondance bijective entre les points critiques de F̃ et les ensembles
pz0 , φ0 pz0 q, φ1 ˝ φ0 pz0 q..., φk´2 ˝ ... ˝ φ0 pz0 qq avec z0 un point fixe de φ donc entre les
points critiques de F̃ est les points fixes de φ, les points critiques de F fournissent
des points fixes de φ. En fait ce sont des points fixes contractiles (c’est-à-dire dont
l’orbite correspondante est un lacet contractile) puisqu’ils se relèvent en points fixes
de φ̃ mais ce n’est pas un problème, au contraire on cherche à minorer l’ensembles
des points critiques. On pose
ÿ
Qpzq “
xyj , xj ´ xj`1 y
j mod k
Bpzq “
ÿ
j mod k
22
fj pxj`1 , yj q
de sorte que F “ Q ` B. En fait, on peut voir l’espace
trivial sur le tore. Précisément, on considère
α:
R2n ˆ...ˆR2n
Z2n
comme un fibré
R2n ˆ...ˆR2n
Z2n
Ñ
T2n ˆ pR2n ˆ ... ˆ R2n q
pk ´ 1 facteursq
rz0 , ..., zk´1 s Ñ
Þ
prz0 s, z1 ´ z0 , ..., zk´1 ´ zk´2 q
et pour plus de lisibilité, ζj désignera pour la suite zj ´zj´1 et on écrira ζj “ pχj , νj q.
On définit alors Q1 pz0 , ζq :“ Q ˝ α´1 pz0 , ζq. En fait Q1 ne dépend pas de z0 donc
on peut noter aussi Q1 pz0 , ζq “ Q2 pζq. Il s’agit maintenant de déterminer la nullité
et l’indice de Morse de Q1 (ou Q2 )
Notons que l’on peut majorer la nullité de Q1 en 0 par 2n puisque Q1 pz0 , 0q est
toujours nul. D’autre part, sur l’espace px0 “ 0, xj P Rn , yj “ ´pxj ´ xj´1 qq, Q1
est définie négative. Donc on peut majorer l’indice de Morse de Q1 par npk ´ 1q.
De même, en imposant yj “ `pxj ´ xj´1 q, Q1 est définie positive sur un espace de
dimension npk ´ 1q. Comme la somme npk ´ 1q ` npk ´ 1q ` 2n fait la dimension de
l’espace sur lequel Q1 est défini, ces majorations sont en fait des égalités. Autrement
dit Q2 est non dégénérée et son indice de Morse est npk ´ 1q.
On constate alors que F ˝ α´1 pz0 , ζq s’écrit Q2 pζq ` B ˝ α´1 pz0 , ζq avec B ˝ α´1
8
C -bornée, puisque les fonctions fj sont 1-périodiques. On en déduit que les points
critiques de F ˝ α´1 sont contenus dans un compact du domaine. En fait, puisque
∇Q2 pζq ÝÑ 8, on peut majorer |∇F ˝α´1 | par une constante strictement positive
ζÑ8
en dehors d’un compact de sorte que F ˝ α´1 vérifie PS. Soit b ą 0, alors il existe
a ą 0 suffisamment grand pour que
1. si |F ˝ α´1 pz0 , ζq| ě a, alors |∇Q2 pζq| ą |∇pB ˝ α´1 pz0 , ζq|,
2. T2n ˆ tQ2 ă bu Ă tF ˝ α´1 ă au,
3. tF ˝ α´1 ă ´au Ă T2n ˆ tQ2 ă ´bu.
En effet, dans les trois cas, il s’agit de voir que B ˝ α´1 et son grandient sont
uniformément bornés. Montrons que ces deux inclusions sont en fait des équivalences d’homotopie. On note pour cela ϕt le flot de ´∇Q2 et pour plus de lisibilité,
F 1 “ F ˝ α´1 . Alors, pour pz0 , ζq P F 1´1 paq, on a la majoration suivante :
dF 1 pz0 , ζq∇Q2 pζq “ |∇Q2 |2 ` dpB ˝ α´1 q∇Q2 ě |∇Q2 |2 ´ |∇B ˝ α´1 ||∇Q2 | ą 0.
Définissons Φt pz0 , ζq “ pz0 , ϕt pζqq. Alors Φt ptF 1 ă auq Ă tF 1 ă au puisque
dF 1 pz0 , ζqpϕ9 t pζqq ă 0. D’autre part, comme Q2 décroit le long de ϕt , si t ą 0
est assez grand, alors Φt ptF 1 ă auq Ă T2n ˆ tQ2 ă bu. Ceci permet de conclure
pour la première inclusion et on procède de même pour la deuxième.
Ainsi on a l’égalité
Hd ptF ă au, tF ă ´auq » Hd pT2n ˆ tQ2 ă bu, T2n ˆ tQ2 ă ´buq.
23
Par la formule de Künneth on peut réécrire ceci
Hd ptF ă au, tF ă ´auq » ‘ Hi pT2n q b Hj ptQ2 ă bu, tQ2 ă ´bu
i`j“d
et comme Q2 est non dégénérée en 0 et que c’est son seul point critique, finalement
Hd ptF ă au, tF ă ´auq » Hd´npk´1q pT2n q.
On peut maintenant appliquer la théorie de Lyusternik-Schnirelmann pour
conclure que CardpFixpφqq ě CLpT2n q ` 1 “ 2n ` 1. En fait comme annoncé
plus haut, on a même majorer seulement une partie des points fixes, ceux qui
sont contractiles. On notera Fixc pφq l’ensemble de ces points critiques. On a donc
montré que CardpFixc pφqq ě CLpT2n q ` 1 “ 2n ` 1.
Pour conclure, il nous reste à examiner les points critiques non dégénérés. Si
F est une fonction de Morse, alors CardpCritF q ě 22n “ rangpH˚ pT2n qq puisque
l’on a l’isomorphisme Hd ptF ă au, tF ă ´auq » Hd´npk´1q pT2n q. Or on montre à
présent qu’un point critique z de F est non dégénéré si et seulement si le point
fixe z0 correspondant de φ est non dégénéré. En effet écrivons la hessienne de F :
1
q, Zj1 “ pXj1 , Yj1 q.
HesspF qrZ, Z 2 s “ă HZ, Z 2 ą et notons HZ “ Z 1 “ pZ01 , ..., Zk´1
Alors, un calcul explicite de la dérivée seconde de F nous donne
Xj1 “ Yj ´ Yj´1 ` Bx,x fj´1 Xj ` By,x fj´1 Yj´1 ,
Yj1 “ Xj ´ Xj`1 ` Bx,y fj Xj`1 ` By,y fj Yj .
Or si l’on dérive les équations qui définissent fj , on trouve dφj pzj qZj “ Zj`1 si et
seulement si
Xj`1 ´ Xj “ Bx,y fj Xj`1 ` By,y fj Yj ,
Yj`1 ´ Yj “ ´Bxx fj Xj`1 ´ By,x fj Yj .
Ainsi Z P KerH si et seulement si dφj pzj qZj “ Zj`1 pour tout j et donc en
particulier dφpz0 qZ0 “ Z0 . Donc si tous les points fixes sont non dégénérés, en
particulier ceux qui définissent des points critiques de F le sont aussi et donc tous
les points critiques de F sont non dégénérés. On en déduit la deuxième partie de
la preuve. On remarque qu’on a montré que la nullité de F en z est égale à la
dimension du noyau de dφpzq ´ I. Cela nous resservira plus tard.
24
3 Indices de Morse de familles génératrices et points périodiques de difféomorphismes hamiltoniens
3.1 Points périodiques de difféomorphismes hamiltoniens
Dans toute cette section, on considère une variété symplectique pW, ωq fermée,et φ un difféomorphisme hamiltonien de pW, ωq. On écrit φ “ φ1H où H est un
t
1 k
hamiltonien. On étend alors φ sur R en définissant : φt`k
H :“ φH ˝ pφH q pour tout
entier relatif k.
On s’intéresse dans cette partie
des points périodiques de φ que
Ť a l’ensemble
l’on note Perpφq et qui désigne
Fixpφp q. On s’interessera plus particulièrement
pPZ
aux points fixes contractiles des itérés de φ. On notera Per
des
Ťc pφq l’ensemble
p
points périodiques contractiles. Il s’agit donc de l’ensemble
Fixc pφ q.
pPZ
Exemple 3.1. On considère la sphère pS2 , wrond q où wrond est la forme d’air sur la
θ
n’est pas rationnel est un difféomorphisme
sphère. La rotation φ d’angle θ, où 2π
hamiltonien et si l’on note N (respectivement S) le pôle nord (respectivement le
pôle sud) de la sphère alors on a Perpφq “ Fixpφq “ tN, Su. Donc il peut y avoir
très peu de points périodiques.
On peut quand même dire quelque chose dans le cas de la sphère. La conjecture
suivante concerne CP n et a été démontrée pour n “ 1 par Franks et Hondel. (On
rappelle que CP 1 est difféomorphe à la sphère S2 ). On désigne par ωF S la forme
de Fubini-Study.
Conjecture 3.1. Tout difféomorphisme hamiltonien de pCP n , ωF S q ayant au moins
n ` 2 points fixes possède une infinité de points périodiques.
Une conjecture de Conley énonce que sur le tore T2n , tout difféomorphisme
hamiltonien a une infinité de points périodiques. La conjecture a été résolue par
Hingston en 2006. Elle a été généralisé à d’autres variétés fermées et résolue pour
les variétés symplectiques pW, ωq telle que ω|π2 pW q “ pc1 q|π2 pM q “ 0 (c1 désigne la
première classe de Chern).
On donne ici une preuve générique de la conjecture. Plus précisément on a le
théorème suivant.
Théorème 3.1 (Conley-Zehnder). Soit φ un difféomorphisme hamiltonien du tore
T2n tel que chaque point fixe est non dégénéré. Alors φ a une infinité de points
périodiques. En fait, pour tout entier p premier suffisamment grand, il existe un
point fixe (contractile) de φp et c’est un point périodique de φ de période p.
Démonstration. Soit p P N. On décompose φ comme dans la preuve précédente :
φ “ φk´1 ˝ ... ˝ φ0 , avec φi C 1 -proche de l’identité. Alors φi est engendré par la
25
fonction génératrice fi : T2n Ñ R, c’est-à-dire que φi px, yq “ pX, Y q si et seulement
si X ´ x “ By fi pX, yq et Y ´ y “ ´Bx fi pX, yq.
On se place cette fois-ci dans pR2n qpk et on définit
Fp :
pR2n qpk {Z2n Ñ
pz0 , ..., zkp´1 q ÞÑ
ř
R
pxyi , xi ´ xi`1 y ` fi mod k pxi`1 , yi qq
i mod kp
et on montre à nouveau que l’ensemble des points critiques de Fp est en correspondance bijective avec l’ensemble des points fixes contractiles de φp . En fait,
si pz0 , ..., zkp´1 q est un point critique de Fp , alors pour tout i modulo pk, on a
φi mod k pzi q “ zi`1 . Pour un réel b ą 0 assez grand, on montre encore que
H˚ ptFp ă bu, tFp ă ´buq “ H˚´pnkp´nq pT2n q.
En particulier, Hnkp´n ptFp ă bu, tFp ă ´buq ‰ 0 et d’après les inégalités de Morse,
il existe un point critique de Fp , qu’on note z “ zppq dont l’homologie locale est
non nulle en degré nkp ´ n : hnkp´n pFp , zq ‰ 0. Alors, étant donné la définition de
l’homologie locale, on obtient
indpFp , zq ď nkp ´ n ď indpFp , zq ` nulpFp , zq.
Notons alors zppq “ pz0 ppq, ..., zkp´1 ppqq. On a montré que pour tout p P N,
z0 ppq est un point fixe de φp . Cependant, il se peut que pour deux entiers p1 et
p2 , les points fixes correspondants z0 pp1 q et z0 pp2 q coïncident. Typiquement, si d
divise le plus grand diviseur commun de p1 et p2 et si z “ z0 pdq, alors z est aussi un
point fixe de φp1 et φp2 . Par contre, si on se restreint aux entiers premiers p, deux
points fixes ainsi trouvés ne peuvent être égaux que s’ils proviennent d’un point
fixe de φ, c’est-à-dire qu’il existe z̃0 P Fixc pφq tel que z0 ppq “ z̃0 . Pour conclure, il
suffit donc de montrer que pour tout point fixe z̃0 de φ, z̃0 ‰ z0 ppq pour p assez
grand.
Remarque 3.1. L’ensemble des points fixes contractiles de φ est fini puisqu’ils correspondent à des points critiques non dégénérés de Fp qui est quadratique à l’infini.
Si zppq provient d’un point fixe z de φ, alors zppq s’écrit z p “ pz, ..., zq. On
restreint notre attention à ce type de point fixe à présent. La première chose que
l’on remarque est que si p est assez grand, z p est un point critique de Fp non
dégénéré. En effet, rappelons qu’un point fixe x d’une application f est dit non
dégénéré si df pxq ne possède pas 1 comme valeur propre. Ici, il s’agit d’étudier
l’endomorphisme dφp pz̃0 q. Comme les points fixes de φ sont eux-mêmes non dégénérés, 1 n’est pas valeur propre de dφpz̃0 q. Un lemme d’algébre linéaire énonce que
si M est une matrice carré n ˆ n, alors
ÿ
dimKerpM p ´ λIq “
dimKerpM ´ µIq.
µp “λ
26
2ikπ
Si p est assez grand, e p n’est pas une valeur propre de M pour k ‰ 0 mod p
(par exemple pour p plus grand que le plus grand nombre premier divisant les
2iπα
dénominateurs β dans les valeurs propres e β de M ).
On procède alors par l’absurde. Supposons qu’il existe z̃0 point fixe de φ tel
que z0 ppq “ z̃0 pour une infinité de nombres premiers p. Alors on peut supposer
que zppq est non dégénéré pour ces entiers premiers p, donc l’indice de Morse de Fp
en zppq est nkp ´ n. Ceci est impossible, d’après le théorème suivant, qu’on admet
provisoirement.
Théorème 3.2 (Bott, 1950, Inégalités d’itération). Soit z un point critique de
F et z p “ pz, ..., zq un point critique de Fp . Si nulpFp , z p q “ 0, alors, en notant
p
indpzq :“ lim indpFpp ,z q , on a
pÑ8
|indpFp , z p q ´ p.indpzq| ă n.
En fait, dans le théorème, il y a déjà l’existence de la limite. Dans notre situation, indpzq “ nk et donc |indpFp , z p q ´ p.indpzq| “ n, ce qui est en contradiction
avec le théorème.
3.2 Indices de Morse des fonctions génératrices
Avec les mêmes notations qu’au paragraphe précédent, si z “ pz0 , ..., zk´1 q est
un point critique de F , alors z p “ pz, ..., zq est un point critiquede Fp . Comme on
l’a vu dans la preuve du théorème de Conley et Zehnder (théorème 2.2), la matrice
hessienne de Fp s’écrit ainsi : Notons d2 Fp pz p qrZ, Z 2 s “ xHp Z, Z 2 y et pour plus de
lisibilité Hp Z “ Z 1 . Alors
Xi1 “ Yi ´ Yi´1 ` Bx,x fpi´1q mod k Xi ` By,x fpi´1q mod k Yi´1 ,
Yi1 “ Xi ´ Xi`1 ` Bx,y fi mod k Xi`1 ` By,y fi mod k Yi .
ř
dimKerpHp ´ λIq et nulpFp , z p q “ dimKerpHp q.
Par définition, indpFp , z p q “
λă0
Afin d’étudier plus précisément Hp considérons l’espace
Vp “ tpZi qiPZ , Zi`pk “ Zi @iu
et voyons Hp comme un opérateur discret du deuxième ordre agissant sur Vp . Dans
l’optique d’utiliser quelque chose qui ressemble à la théorie de Fourier, Raoul Bott
a l’idée de complexifier l’espace Vp , c’est-à-dire d’étudier Vp b C. Définissons plus
généralement, pour p P N et α P S1 Ă C,
Vp,α “ tpZi qiPZ , Zi`pk “ αZi @iu
27
où cette fois les vecteurs Zj sont à valeurs dans C2n . En fait Vp,1 est exactement
Vp bC. L’opérateur Hp définit alors un opérateur hermitien sur Vp,α pour le produit
kp´1
ř 1 2
ă xpZj1 qj , pZj2 qj y “
Zj Zj (en définissant Hp pZj q “ Hp pRepZj qq ` iHp pImpZj qq).
j“0
On notera plutôt Hp,α pour évoquer l’espace Vp,α .
On introduit les fonctions de Bott I et N associées à un point critique z. Elles
sont définies sur S1 et à valeurs dans Z :
ÿ
Ipαq “
dimC KerpH1,α ´ λIq,
λă0
N pαq “ dimC KerpH1,α q.
Par définition, Ip1q “ indpF1 , zq et N p1q “ nulpF1 , zq. Ces fonctions jouissent
de quelques propriétés : Tout d’abord, comme on l’a vu à la fin de la preuve du
théorème de Conley et Zehnder (théorème 2.2), N p1q est aussi la dimension du
noyau de dφpz0 q ´ I. En fait, plus généralement, N pαq “ dimC Kerpdφpz0 q ´ αIq
(exercice). D’autre part, Ipαq “ Ipαq et N pαq “ N pαq. En effet, on constate que
V1,α “ V1,α et via cette identification, H1,α “ H1,α , ce qui conclut pour I. Pour
N , il s’agit de constater que dφ est symplectique donc α est une valeur propre
si et seulement si α en est une. De plus, le support de N , c’est-à-dire l’ensemble
des nombres α P S1 tels que N pαq ‰ 0, noté supppN q n’est rien d’autre que
l’intersection entre le spectre de dφpz0 q et S1 . La fonction I est localement constante
sur S1 zsupppN q. Si α0 P supppN q et que U est un voisinage de α0 dans S1 qui ne
contient que α0 comme valeur propre de dφpz0 q, on a les inégalités suivantes, pour
α P U ztα0 u :
0 ď Ipαq ´ Ipα0 q ď N pα0 q.
En effet, la différence Ipαq ´ Ipα0 q est exactement le nombre de valeurs propres
strictement négatives qui deviennent nulles en α0 . Enfin, on dispose des formules
de Bott :
ÿ
1q nulpFp , z p q “
N pαq.
αp “1
2q indpFp , z p q “
ÿ
Ipαq.
αp “1
Démonstration.
L’espace vectoriel Vp,β admet une décomposition en somme directe
À
Vp,β “ αp “β V1,α . Soit une suite Z “ pZj q de V1,β , on notera Zα “ pZα,j qjPZ la
suite de V1,α correspondante. Soit Z P V1,α et Z 1 P V1,α1 avec α ‰ α1 . On calcule le
produit hermitien de Z et Z 1 (dans Vp,β ) :
1
xZ, Z yVp,β “
kp´1
ÿ
j“0
Zj .Zj1
p´1
ÿ
1
Zj .Zj p αh .α1h q
j“0
h“0
k´1
ÿ
“
28
“ 0.
Ainsi la somme est en fait orthogonale. Il suffit alors de remarquer en plus que
xHp,β Z, Z 1 yVp,β “ xH1,α Z, Z 1 yVp,β “ 0 par stabilité de V1,α (par H1,α ). On en déduit
le résultat.
On obtient alors la seconde formule de Bott en sommant l’égalité démontré sur
tous les λ strictement négatifs. Pour obtenir la première il suffit de remarquer que
par définition on a les égalités : nulpFp , z p q “ dimKerpHp q “ dimC KerpHp,1 q.
On est en mesure de démontrer l’inégalité d’itération de Bott utilisée dans la
preuve du théorème de Conley-Zenhder.
Démonstration. On montre en premier que l’indice moyen de z, noté indpzq a bien
1 ÿ
indpFp , z p q
“
Ip αq. On
un sens. En effet par les formules de Bott, on a
p
p αp “1
reconnait une somme de Riemann et donc, on obtient par semi-continuité
ż
ż
indpFp , z p q
1 2π
1 π
iθ
lim
“
Ipe qdθ “
Ipeiθ qdθ.
pÑ8
p
2π 0
π 0
On se ramène maintenant au cas où p “ 1 dans le théorème. En effet, remarindpz pq q
quons que p ˆ indpzq “ indpz p q “ lim
. Par hypothèse, on a a l’existence
qÑ8
q
d’un ą 0 tel que pour tout nombre complexe α de module 1 et d’argument
compris entre ´ et `, N pαq “ 0. Pour tout argument réel θ P r0, πr, on pose
σθ :“ tα P supppN q{argpαq P r0, θru. On définit alors la fonction
ÿ
pIpα` q ´ Ipα´ qq.
f pθq “
αPσθ
Si eiθ n’est pas dans le support de N alors Ipeiθ q ´ Ip1q “ f pθq. Ainsi, en faisant
la moyenne sur le demi cercle supérieur on obtient :
ż
ż
ż
1 π
1 π
1 π
iθ
pIpe q ´ Ip1qqdθ “
f pθqdθ “
f pθqdθ.
π 0
π 0
π `
´
Or pour tout α,
ř |Ipα q ´ Ipα q| ď N pαq, donc pour tout θ Ps0, πr, on a
l’inégalité |f pθq| ď βPs0,πr dimKerpdφpz0 q ´ βIq ď n.
En remplaçant l’intégrale de Ipeiθ q par indpzq et l’intégrale de Ip1q par indpzq
on obtient finalement l’inégalité : |indpzq ´ indpzq| ď π´
ă n, d’où le résultat.
π
On pourrait aller plus loin d’en l’étude des orbites périodiques. Notamment, on
n’a pas introduit l’indice de Maslov, ce serait l’étape suivante. On réfère à [4] pour
plus de détails. On poursuit ce cours par la définition d’iinvariants symplectiques.
29
4 Invariants Symplectiques
4.1 Valeurs spectrales et sous-variétés lagrangiennes
On va considérer dans cette section des variétés fermées M et des difféomorphismes hamiltoniens φ dans le cotangent T ˚ M . On rappelle que le lagrangien
L “ φp0 ´ sectq admet une f.g. F : M ˆ RN Ñ R. Il n’y a pas nécessairement
unicité car les opérations suivantes produisent de nouvelles f.g. pour L :
1. On peut ajouter une constante : F 1 “ F ` c .
2. On peut composer avec un difféomorphisme ψ de M ˆ RN qui préserve les
fibres et tel que F ˝ ψ “ F 1 soit toujours quadratique à l’infini.
1
3. On peut ajouter une forme quadratique : F 1 : M ˆ RN `N Ñ R telle que
F 1 pq, ξ, ξ 1 q “ F pq, ξq ` Qpξ 1 q où Q est une forme quadratique non dégénérée.
On a quand même le résultat d’unicité suivant :
Théorème 4.1 (Viterbo, Théret, 1992). La fonction génératrice d’un lagrangien
est unique à opérations 1. 2. 3. près.
Si L est un lagrangiende f.g. F , l’opposé de L est défini par
´L :“ tpq, ´pq{pq, pq P Lu,
c’est un lagrangien (en effet pq, pq ÞÑ pq, ´pq est anti-symplectique) de f.g. ´F .
Si L1 et L2 sont deux lagrangiens de f.g. F1 et F2 , on définit leur somme par
L1 ` L2 :“ tpq, p1 ` p2 q{pq, p1 q P L1 , pq, p2 q P L2 u.
Ce n’est pas un lagrangien mais on a une correspondance entre les points critiques
de F1 ` F2 et l’intersection entre L1 ` L2 et la section nulle. (En fait ce n’est même
pas une variété en général, mais c’est un espace qu’on appellera par la suite espace
singulier).
On va démontrer la deuxième assertion.
Démonstration. Soit pq, 0q un point d’intersection entre la somme L1 ` L2 et la
section nulle. Alors il existe p P Tq˚ M tel que pq, pq soit un élément de L1 et pq, ´pq
soit un élément de L2 . Ainsi, en notant Fi : M ˆ RNi raR les fonctions génératrices
de Li , il existe ξ1 P RN1 et ξ2 P RN2 tels que Bξ1 F1 pq, ξ1 q “ 0 “ Bξ2 F2 pq, ξ2 q et
Bq F1 pq, ξ1 q “ p “ ´Bq F2 pq, ξ2 q, d’où le résultat.
On a vu que pour b assez grand H˚ ptF ă bu, tF ă ´buq – H˚´i8 pM q. Pour tout
a Ps ´ b, br on dispose de l’application ia : H˚ ptF ă au, tF ă ´buq Ñ H˚´i8 pM q
induite par l’inclusion. Pour tout h P H˚´i8 pM q, on définit la valeur spectrale
cpF, hq :“ infta P R, h P Impia qu. C’est une valeur critique de F .
30
On peut également définir un équivalent en cohomologie. On a l’application
Ja : H ˚´i8 pM q Ñ H ˚ ptF ă au, tF ă ´buq et pour tout élément α P H ˚´i8 pM q,
on définit la valeur spectrale cpF, αq :“ infta P R, Ja α ‰ 0u.
On peut reformuler le théorème de Lyusternik Schnirelmann de la façon suivante :
Théorème 4.2. En homologie, soient h1 , h2 des éléments de H˚ pM q. Si h1 ă h2
alors cpF, h1 q ď cpF, h2 q. En cohomologie, soient α, β P H ˚ pLM q tels que αYβ ‰ 0.
Alors cpF, αq ď cpF, α Y βq. De plus si on a égalité alors pour tout voisinage
U Ă M ˆ RN de CritpF q X F ´1 pcpF, αqq, la restriction de β à l’ouvert U est non
nulle dans H ˚ pU q.
Énonçons à présent quelques propriétés concernant les valeurs spectrale.
‚ On considère un élément 1 (respectivement µ) générateur de H 0 pM q (respectivement de H dimpM q pM q). On a alors 1 Y µ “ µ et donc cpF, 1q ď cpF, µq. De plus
on a égalité si et seulement si L est la section nulle.
Preuve On note iF : Σ Ñ L {iF pq, ξq “ Bq F pq, ξq. S’l existe un point pq, 0q n’appartenant pas à L, alors H dimpM q pL X 0 ´ sectq “ 0. Soit un voisinage tubulaire U de
˚
˚
dimpM q
pU q “ 0,
i´1
F p0´sectq, on a l’isomorphisme H pU q – H pLX0´sectq. D’où H
on conclut par le théorème précédent.
‚ Il y a continuité de la valeur spectrale cpF, αq par rapport à la fonction F . Plus
précisément, soient deux f.g. F1 , F2 : M ˆ RN Ñ R. Alors pour toute classe non
nulle de cohomologie α P H ˚ pM qzt0u, |cpF1 , αq ´ cpF2 , αq| ď }F1 ´ F2 }C 0 .
Preuve Soit a P R. Notons δ “ }F1 ´F2 }C 0 pour simplifier. On démontre facilement
les inclusions suivantes : tF1 ă a ´ δu Ă tF2 ă au Ă tF1 ă a ` δu. On rappelle que
H ˚ pM q » H ˚´i8 ptF2 ă bu, tF2 ă ´buq. Dans cette preuve, pour α P H ˚ pM q, on
r la classe correspondante dans H ˚´i8 ptF2 ă bu, tF2 ă ´buq. Supposons
notera α
r ‰ 0 P H ˚´i8 ptF2 ă au, tF2 ă ´buq.
que cpF2 , αq ă a, ce qui revient à dire que α
Notons qu’on peut supposer que les indices de Morse de Q1 et Q2 (qui représentent
F1 et F2 hors d’un compact) sont les mêmes, i.e. i8 “ j8 avec les notations qui
précèdent. En effet, si ce n’est pas le cas }F1 ´ F2 }C 0 “ δ “ 8. Puisque b est choisi
arbitrairement grand, on suppose également que a ` δ ă b. D’autre part, notons
b “ b ´ δ. On peut également supposer que b est suffisamment grand pour que
H ˚ pM q » H ˚´j8 ptF1 ă bu, tF1 ă ´buq. On a alors la factorisation suivante :
H ˚´i8 ptF2 ă bu, tF2 ă ´buq ÝÝÝÑ H ˚´i8 pF1 ă a ` δu, tF1 ă ´b ` δuq
§
§
đ
H ˚´i8 ptF2 ă au, tF2 ă ´b ` 2δuq
Or, H ˚´i8 ptF2 ă au, tF2 ă ´b ` 2δuq » H ˚´i8 ptF2 ă au, tF2 ă ´buq puisque b est
r est non nulle
suffisamment grand (par lemme de déformation). Donc la classe α
31
dans H ˚´i8 pF1 ă a ` δu, tF1 ă ´b ` δuq. On a donc prouvé que cpF1 , αq ď a ` δ.
En passant aux bornes inférieures, on a démontré l’inégalité voulue.
‚ Dualité de Poincaré Les coefficients sont ici pris dans un corps K. On dispose
„
de l’isomorphisme de dualité de Poincaré : DP : H˚ pM q Ñ H dimpM q´˚ pM q. Si h
est une classe non nulle de cohomologie, on a cpF, hq “ ´cp´F, DP phqq.
On laisse la preuve en exercice. On pourra utiliser la dualité d’Alexander qu’on
énonce à présent, plus générale que la dualité de Poincaré.
Théorème. Soit N une variété différentielle de dimension n, soit A Ă N un
compact et soit B Ă A un fermé. Alors,
H˚ pN Ă B, N Ă Aq “
lim
ÝÑ
pU,V q
H n´˚ pU, V q.
vois.depA,Bq
Corollaire 4.1. On note 1 (respectivement µ) un générateur de H 0 pM q (respectivement de H dimpM q pM q). Alors, cp´F, 1q “ ´cpF, µq.
Il s’agit simplement d’utiliser la dualité de Poincaré en remarquant qu’en degrés
0 et dimpM q, être dans l’image de Ja signifie exactement que Ja est non nulle.
‚ Inégalité triangulaire Soit F1 : M ˆRN1 Ñ R et F2 : M ˆRN2 Ñ R. On définit
alors F : M ˆ RN1 `N2 Ñ R par F pq, ξ1 , ξ2 q “ F1 pq, ξ1 q ` F2 pq, ξ2 q. On rappelle que
si F1 engendre le lagrangien L1 et F2 le lagrangien L2 , F est la f.g. qui engendre
l’espace singulier L1 ` L2 . Soient α et β deux classes de cohomologie telles que
α Y β ‰ 0. Alors cpF, α Y βq ě cpF1 , αq ` cpF2 , βq. On ne prouve pas non plus cet
énoncé.
Avant de passer au prochain résultat, définissons un autre invariant symplectique. Soient L1 et L2 deux lagrangiens de T ˚ M , de f.g. F1 et F2 respectivement
et soient z1 et z2 deux points d’intersection entre L1 et L2 . On choisit deux chemins γ1 : r0, 1s Ñ L1 et γ2 : r0, 1s Ñ L2 tels que γi p0q ż“ z1 et γi p1q “ z2 . Alors
λ. On rappelle que
on définit la longueur symplectique lpL1 , L2 , z1 , z2 q “
γ1 ˚γ 2
λ désigne la forme de Liouville sur T ˚ M et on note γ 2 le chemin γ2 parcouru à
rebrousse-chemin. On peut exprimer différemment cette quantité :
ż
ż
ż
ż
lpL1 , L2 , z1 , z2 q “
λ´
λ“
dF1 ´
dF2 .
γ1
γ2
i´1
F pγ1
1
i´1
F pγ2
2
En effet, iF1 pq, ξq “ pq, Bq F1 pq, ξqq et λ “ pdq, donc i˚F1 λ “ Bq F1 pq, ξqdq “ dF1 pq, ξq
puisque par définition, Bξ F1 “ 0 sur ΣF1 . On a donc finalement
´1
´1
´1
lpL1 , L2 , z1 , z2 q “ F1 pi´1
F1 pz2 q ´ F1 piF1 pz1 q ´ F2 piF2 pz2 q ` F2 piF2 pz1 q.
32
On constate par ailleurs que cette nouvelle expression prouve l’indépendance de
lpL1 , L2 , z1 , z2 q par rapport aux chemins γ1 et γ2 choisis. D’autre part, si ψt est
une isotopie hamiltonienne de T ˚ M , alors
ż
ψt˚ λ.
lpψt pL1 q, ψt pL2 q, ψt pz1 q, ψt pz2 qq “
γ1 ˚γ 2
Or comme l’isotopie est hamiltonienne, on a vu que ψt˚ λ “ λ ` dAt . Donc
ż
lpψt pL1 q, ψt pL2 q, ψt pz1 q, ψt pz2 qq “
λ “ lpL1 , L2 , z1 , z2 q.
γ1 ˚γ 2
On note ΛpLq “ tlpL, 0 ´ sect, z1 , z2 q, z1 , z2 P L X 0 ´ sectu. C’est un ensemble
´1
de mesure nulle. En effet, lpL, 0 ´ sect, z1 , z2 q “ F pi´1
F pz2 qq ´ F piF pz1 qq. Or, si on
définit Frpq1 , q2 , ξ1 , ξ2 q “ F pq1 , ξ1 q´F pq2 , ξ2 q, on vérifit que CritF ´CritF Ă CritFr.
Il suffit donc d’appliquer le lemme de Sard à Fr.
‚ Soit L Ă T ˚ M un lagrangien qui est l’image de la section nulle par un un difféomorphisme hamiltonien (ou plus généralement qui admet une fonction génératrice).
Soit ψt une isotopie hamiltonienne. Soit pq, 0q un point d’intersection entre L et la
section nulle. On suppose que pour tout t P r0, 1s, ψt fixe pq, 0q. Soit F la fonction
génératrice de ψ1 pLq et G celle de L ´ ψ1´1 p0 ´ sectq (qui n’est pas un lagrangien
mais un espace singulier, comme on vient de le rappeler). On peut normaliser F
par F pi´1
F pq, 0qq “ 0, (où iF est l’immersion iF : ΣF Ñ L) par exemple par l’ajout
d’une constante. On normalise également G par Gpi´1
G pq, 0qq “ 0. Alors, pour toute
classe non nulle de cohomologie α, on a cpF, αq “ cpG, αq.
Preuve On définit Lt “ ψt´1 pψ1 pLqq ´ ψt´1 p0 ´ sectq. Alors on a L0 “ ψ1 pLq et
L1 “ L ´ ψ1´1 p0 ´ sectq. On note At (respectivement Bt ) une f.g. pour ψt´1 pψ1 pLqq
(respectivement pour ψt´1 p0´sectq). On peut normaliser ces fonctions de sorte que
´1
At pi´1
At pq, 0qq “ Bt piBt pq, 0qq. On dispose aussi de Ft “ At ´ Bt , f.g. de Lt . Par le
théorème de Viterbo-Théret, on peut supposer que F0 “ F et F1 “ G. Montrons
que la fonction t ÞÑ cpFt , αq est constante. En effet, pour tout t P r0, 1s, il existe
pqt , ξt , ηt q P CritpFt q tels que cpFt , αq “ Ft pqt , ξt , ηt q. Alors, par définition de Ft , on a
aussi cpFt , αq “ At pqt , ξt q´Bt pqt , ηt q “ lpψt´1 pψ1 pLqq, ψt´1 p0´sectq, pqt , pt q, pq, 0qq et
donc cpFt , αq “ lpψ1 pLq, 0´sect, ψt pqt , pt q, pq, 0qq P Λpψ1 pLqq et ce dernier ensemble
est de mesure nulle.
4.2 Valeurs spectrales de graphes de difféomorphismes hamiltoniens
On fixe dans cette partie une identification entre R2n ˆ R2n et T ˚ R2n :
τ : pR2n ˆ R2n , ω0 a ω0 q Ñ
pT ˚ R2n , ´dλq
x`X y`Y
px, y, X, Y q
ÞÑ p 2 , 2 , y ´ Y, X ´ xq
33
Alors, τ envoie le graphe de l’identité, ∆ sur la section nulle et le graphe d’un
difféomorphisme φ sur un ensemble qu’on notera Γφ . Si en particulier φ est un
difféomorphisme hamiltonien, qui provient d’un hamiltonien à support compact,
alors Γφ est la section nulle en dehors d’un compact. Considérons une compactification R2n Y t8u » S2n . On peut alors voir Γφ comme un lagrangien fermé dans
T ˚ S2n . Si on note Fφ la fonction génératrice de φ dans R2n , (Fφ : R2n ˆ RN Ñ R),
alors on peut la normaliser en choisissant Fφ pz, 0q “ 0 pour z assez grand. Alors
dz F “ 0 hors d’un compact et F peut être étendue à S2n elle aussi. On remarque
qu’avec l’identification τ , Fφ´1 “ ´Fφ . Définissons les valeurs spectrales de φ.
Définition 4.1. Soit 1 (respectivement µ) un générateur de H 0 pS2n q (respectivement H 2n pS2n q). On note alors c´ pφq “ ´cpFφ , µq, c` pφq “ ´cpFφ , 1q et
γpφq “ c` pφq ´ c´ pφq. On appelle ces quantités les valeurs spectrales de φ.
Énonçons quelques propriétés relatvies aux valeurs spectrales d’un difféomorphisme symplectique φ.
‚ On a l’égalité c´ pφq “ ´c` pφ´1 q
Preuve La dualité de Poincaré donne
c´ pφq “ ´cpFφ , µq “ cp´Fφ , 1q “ cpFφ´1 , 1q “ ´c` pφ´1 q.
‚ On a les inégalités c´ pφq ď 0 ď c` pφq. A fortiori γpφq ě 0.
Preuve D’après la propriété précédente, il suffit de démontrer une seule inégalité.
Prouvons l’inégalité c` pφq ě 0, c’est à dire cpFφ , 1q ď 0. On note i8 l’indice de
Morse de la forme quadratique Q telle que la f.g. Fφ : S2n ˆ RN Ñ R coïncide
avec Q à l’infini. Alors on rappelle que pour b assez grand on a l’isomorphisme
„
H 0 pS2n q “ K Ñ H i8 ptF ă bu, tF ă ´buq. On se ramène donc à montrer que le
morphisme J : H i8 ptF ă bu, tF ă ´buq Ñ H i8 ptF ď 0u, tF ă ´buq est non nul.
Or par construction, on a que Fφ pz, 0q “ 0 dès que le module de z est assez grand.
On obtient le diagramme commutatif suivant :
„
H 0 pS2n q ÝÝÝÝÝÑ
§
§
„đ
J
H i8 ptF ă bu, tF ă ´buq
§
§
„đ
ÝÝÝÝÝÑ
H i8 ptF ď 0u, tF ă ´buq
§
§
đ
H 0 ptzuq ÝÝÝÝÝÑ H i8 ptzu ˆ tQ ă bu, tzu ˆ tQ ă ´buq ÝÝÝÝÝÑ H i8 ptzu ˆ tQ ď 0u, tzu ˆ tQ ă ´buq
„
„
Ainsi, J n’est pas nulle, et donc cpFφ , 1q ď 0.
‚ On a l’équivalence entre γpφq “ 0 et φ est l’identité.
Preuve Si φ est l’identité, alors la f.g. coïncide avec une forme quadratique non
dégénéré sur tout son espace de définition. La seule valeur critique de cette f.g. est
donc 0. D’où c´ pφq “ c` pφq “ 0.
Réciproquement, si γpφq “ 0 alors cpFφ , µq “ cpFφ , 1q et par le théorème de
Lyusternik Schnirelmann, on a égalité si et seulement si Γφ est la section nulle et
donc φ est l’identité.
34
‚ Soit ψ un autre difféomorphisme symplectique de R2n . On a les trois inégalités
suivantes :
c` pφ ˝ ψq ď c` pφq ` c` pψq
c´ pφ ˝ ψq ě c´ pφq ` c´ pψq
γ` pφ ˝ ψq ď γ` pφq ` γ` pψq
Preuve On considère le diagramme commutatif suivant :
τ
R2n ˆ R2n ÝÝÝÑ T ˚ R2n
„
§
§
§
§
σφ đ
pId,φqđ
„
R2n ˆ R2n ÝÝÝÑ T ˚ R2n
τ
On a Γφ “ σφ p0 ´ sectq, σφ´1 “ σφ´1 et Γφ˝ψ “ σφ pΓψ q. On note cpΓφ , αq “ cpFφ , αq
et on a les égalités (et inégalités) suivantes :
c´ pψq “ ´ cpΓψ , µq
“ ´ cpσφ´1 ˝ φpΓψ q, µq
“ ´ cpσφ´1 pΓφ˝ψ q, µq
“ ´ cpΓφ˝ψ ´ σφ p0 ´ sectq, µ Y 1q
“ ´ cpΓφ˝ψ ´ Γφ , µ Y 1q
ď ´ cpΓφ˝ψ , µq ´ cpΓφ , 1q
ď ´ c´ pφq ´ c´ pφ ˝ ψq.
‚ Soit un famille φt de difféomorphismes de R2n telle que φ0 “ id. On dit qu’elle
est conformément symplectique s’il existe une fonction lisse λt qui ne s’annule pas
et telle que pour tout t on a φ˚t w0 “ λptqw0 . Si de plus ψ est un hamiltonien de
R2n à support compact, alors le conjugué de psi par φt est un hamiltonien de R2n
à support compact. Avec les mêmes notations que précédement, on a la propriété
suivante : c˘ pφt ˝ ψ ˝ φ´1
t q “ λptqc˘ pψq. Avant de démontrer ceci, on a besoin du
résultat suivant.
‚ On considère l’application τ : R2n ˆR2n Ñ T ˚ R2n défini dans la preuve précédente
(via le diagramme commutatif), alors si α “ 21 pydx ´ xdyq est une primitive de
´ω0 , on a τ ˚ λ “ α a α ` dpXy ´ xY q. Considérons maintenant φ un hamiltonien
à support compact de R2n et z un point fixe de φ. Alors pour tout point z0 qui
n’appartient pas au support de φ on a
ż
´1
´1
Fφ piFφ pz, 0qq “ Fφ piFφ pz0 , 0qq ` dFφ ˝ i´1
Fφ
γ
35
où γ est un chemin reliant z0 à z. Or le premier terme est nul. Reste à calculer le
deuxième : En tirant en arrière, on a
ż
ż
´1
dFφ ˝ iFφ “ dfφ
γ̃
γ
où γ̃ “ τ ˝ pid, φq ˝ γ. C’est à dire que γ̃ptq “ τ pγptq, φpγptqqq, c’est donc un chemin
dans Γφ . On peut donc écrire l’équation précédente :
ż
´1
Fφ piFφ pz, 0qq “ λ
żγ̃
“
α ´ α ` dpXy ´ xY q
pγ,φpγqq
ż
ż
pγp1q,φpγp1qqq
“ α ´ φ˚ α ` pXy ´ xY q|pγp0q,φpγp0qqq
γ
żγ
“
α
γ˚φpγq
.
‚ On peut revenir à la preuve de l’égalité c˘ pφt ˝ ψ ˝ φt´1 q “ λptqc˘ pψq. On pose
ψt “ φt ˝ ψ ˝ φ´1
et on a Fixpψt q “ φt pFixpψqq. Soit z un point fixe de ψ, z˚
t
n’appartenant pas au support de ψ et γ un chemin reliant z˚ à z. On pose γt :“ φt ˝γ
et zt :“ φt pzq qui est pour tout t un point fixe de φt ˝ ψ ˝ φ´1
t . Prenons aussi
´1
des points pzt , ξt q “ iFψ pzt , 0q et des compacts At p“ φt pA0 qq tels que leurs bord
t
coïncident avec γt ˚ ψt pγptqq. On peut donc écrire :
ż
ż
ż
ż
Fψt pzt , ξt q “
α“´
w´0“´
w0 “
γt ˚ψt pγptqq
At
φt pA0 q
ż
φ˚t w0
w0
“ ´λptq
A0
A0
Finalement, Fψt pzt , ξt q “ λptqFψ0 pz0 , ξ0 q. D’où t λ1 c, c P CritpFψt qu Ă CritpFψ q.
Or l’ensemble des valeurs critique est de mesure nulle d’après le théorème de Sard.
Ainsi comme t Ñ λ1 c˘ pψt q est une application continue, elle est constante. D’où le
résultat.
2n
‚ Soit une isotopie hamiltonienne
Ť φt de R à support compact telle que φ0 “ id.
On définit le compact K :“ tPr0,1s supppφt q. On considère également un difféomorphisme hamiltonien ψ de R2n à support compact qui déplace K (c’est-à-dire
tel que ψpKq X K “ H). On a le résultat suivant :
c˘ pψ ˝ φt q “ c˘ pψq.
Preuve Soit z un point fixe de ψ, z˚ n’appartenant pas au support de ψ et γ un
c
chemin reliant z˚ à z. On remarque
que pourżtout t, Fixpψq
ż “ Fixpψ ˝ φt q Ă K .
ż
On a alors Fψ˝φt pi´1
Fψ˝φ pz, 0qq “
t
α“
γ˚ψ˝φt pγq
36
α`
γ˚ψpγq
α.
ψpγ˚φt pγqq
Si on montre que la deuxième intégrale est nulle on obtient :
´1
Fψ˝φt pi´1
Fψ˝φ pz, 0qq “ Fψ piFψ˝φ pz, 0qq
t
t
et on a le résultat. On calcule la deuxième intégrale :
ż
ż
żt
d
p
α “
αq
ψpγ˚φt pγqq
0 ds ψpγ˚φs pγqq
ż
żt
d
p
ψ ˚ αq
“
ds
¯
γ˚φs pγq
0
żt
ż
d
“´
αq
p
0 ds φs pγq
żt
ż
d
“´
p φ˚s αq
0 ds γ
żtż
d ˚
“´
pφs αq
0 γ ds
żtż
“´
pφ˚s pdpαpXs qq ` dαpXs qq
0
γ
żt
“´
0
pαpXs q ´ Hs q ˝ φs q|zz˚ ds “ 0
Avec les mêmes notations, on a aussi c` pφt q ď γpψq et c´ pφt q ě ´γpψq. En
effet, c` pφt q “ c` pψ ´1 ˝ ψ ˝ φt q ď c` pψ ´1 q ` c` pψ ˝ φt q “ ´c´ pψq ` c` pψq “ γpψq.
On procède de même pour c´ .
4.3 Capacités symplectiques de Viterbo
On donne deux définitions. Soit K Ă R2n un compact et U Ă R2n un ouvert.
Définition 4.2. On définit cpKq comme la borne supérieure des nombres c` pφq,
pour φ “ φ1 , où φt est une isotopie hamiltonienne de support inclus dans K(i.e.
pour tout t P r0, 1s, supppφt q Ă Kq. On définit également γpKq comme la borne
inférieure des nombres γpψq, pour ψ un difféomorphisme hamiltonien à support
compact qui sépare K (i.e. tel que ψpKq X K “ H). On rappelle qu’un difféomorphisme hamiltonien à support compact provient d’un hamiltonien à support
compact, i.e. ψ “ Id hors d’un compact.
Remarquons dès à présent que cpKq ď γpKq ă 8.
Définition 4.3. On définit cpU q comme la borne supérieure des cpKq pour K un
compact inclus dans U et γpU q comme la borne supérieure des γpKq pour K un
37
compact inclus dans U . On appelle ces deux nombres les capacité symplectiques
(de Viterbo) de U .
Ces capacités symplectiques vérifient plusieurs propriétés :
‚ Invariance symplectique. Pour tout difféomorphisme symplectique ψ de R2n
et pour tout ouvert U , cpψpU qq “ cpU q et γpψpU qq “ γpU q.
Preuve. Si le support de φt est inclus dans K, compact de U , alors le support de
ψ ˝ φt ˝ ψ ´1 est inclus dans ψpKq Ă ψpU q et c˘ pψ ˝ φt ˝ ψ ´1 q “ c˘ pφt q.
‚ Monotonie. Si U1 Ă U2 , alors cpU1 q ď cpU2 q et γpU1 q ď γpU2 q.
‚ Corollaire. Si ψ est un difféomorphisme symplectique de R2n à support compact
(i.e. ψ “ Id hors d’un compact) et tel que ψpU q Ă V , alors cpU q ď cpV q et
γpU q ď γpV q.
‚ Conformalité. Soit r ą 0. Alors cprU q “ r2 cpU q et γprU q “ r2 γpU q.
Preuve. Soit ρt : R2n Ñ R2n défini par ρt pzq “ ptr ` p1 ´ tqqz. C’est une isotopie
conformément symplectique, avec ρ˚t ω0 “ ptr ` p1 ´ tqq2 ω0 et ρ0 “ Id. Si φt est
une isotopie hamiltonienne à support compact de R2n , alors son support est inclus
dans un compact K Ă U si et seulement si le support de ρ1 ˝ φt ˝ ρ´1
1 est inclus
´1
2
dans rK Ă rU . Or, on a vu précédemment que c˘ pρ1 ˝ φt ˝ ρ1 q “ r c˘ pφt q.
Nous nous intéressons maintenant à deux variétés symplectiques particulières,
la boule ouverte B 2n “ tz P R2n , |z|2 ă 1u et le cylindre ouvert Z 2n “ B 2 ˆ R2n´2 .
Théorème 4.3. On a cpB 2n q “ γpB 2n q “ cpZ 2n q “ γpZ 2n q “ π.
Démonstration. On a cpB 2n q ď γpB 2n q ď γpZ 2n q et cpB 2n q ď cpZ 2n q ď γpZ 2n q,
donc il suffit de prouver que cpB 2n q ě π et γpZ 2n q ď π.
‚ Soit ą 0 petit. On considère une fonction h : r0, `8rÑ R qui vérifie que
´π ă h1 pzq ă 0 pour tout z dans l’intérieur de suppphq. Typiquement, h est une
fonction comme celle représentée ci-dessous.
π´
1
38
On définit alors H : R2n Ñ R par Hpzq “ hp|z|2 q. En identifiant R2n à Cn , le
1
2
flot hamiltonien associé est alors défini par φtH pzq “ e2ih p|z| qt z. Son support est
inclus dans B 2n et Fixpφ1H q “ t0u Y pR2n zsupppHqq. On considère une fonction
génératrice F de φ1H normalisée par F pz, 0q “ 0 en dehors d’un compact, de sorte
2n
que F pi´1
F pz, 0qq “ 0 si z P R zsupppHq.
ż
On a vu précédemment que F pi´1
F pz, 0qq “
γ˚φ1H pγq
α, où α “ 21 pydx ´ xdyq est
une primitive de
ż 1ω0 et
ż γ est un chemin entre z0 R supppHq et 0. On réécrit alors
d
F pi´1
αdt et on utilise la formule des Cartans pour obtenir
F pz, 0qq “
0 dt γ˚φtH pγq
F pi´1
F pz, 0qq “ αpXh p0qq´αpXH pz0 qq`Hp0q´Hpz0 q. Or tous ces termes sont nuls,
sauf Hp0q qui vaut π ´ . Les deux valeurs spectrales possible sont donc π ´ et
0. On sait d’autre part que Γφ est différent de la section nulle, et donc γpφ1h q ‰ 0.
On en déduit que c` pφ1H q “ π ´ donc cpB 2n q ě π.
‚ On note B k prq “ tz P Rk , |z|2 ă r2 u. On considère alors le cylindre,
cette fois
Ť
2
2n´2
Z1{k “ Z 2n est
p1{q, pour ą 0. On a alors
fini, Z :“ B p1 ´ q ˆ B
kPN
l’union est croissante. Soit ψ1 un difféomorphisme symplectique
de R2 qui envoie
?
la boule B 2 p1 ´ q sur l’ensemble B` :“ tpx, yq P B 2 p 2q, y ą 0u. Alors on définit
le difféomorphisme symplectique ψpz1 , z 1 q “ pψ1 pz1 q, z 1 q. Par définition, ψ envoie
le cylindre Z dans l’ensemble B` ˆ B 2n´2 p1{q, donc γpZ q ď γpB` ˆ B 2n´2 p1{qq.
Considérons alors une fonction h : r0, `8rÑ R à support compact telle que
1
h pzq “ ´π{2 pour z P r0, 2s, h1 pzq P r´π{2, 0s pour tout z et hp0q “ π ` Typiquement, h est une fonction comme celle représentée ci-dessous.
π`
2
On considère également une fonction plateau χ : R2n´2 Ñ r0, 1s telle que
χpzq “ 1 pour z P B 2n´2 p1{q et χ soit à support compact.?On définit alors
H : R2n Ñ R par Hpz1 , z 1 q “ hp|z1 |2 qχpz 1 q. Sur l’ensemble B 2 p 2q ˆ B 2n´2 p1{q,
on a φtH pz1 , z 1 q “ peiπt z1 , z 1 q. Donc, φ1H pB` ˆB 2n´2 p1{qqXB` ˆB 2n´2 p1{q “ H et
39
par le même argument que précédemment, c` pφ1H q “ Hp0q “ π ` et c´ pφ1H q “ 0.
Alors, γpB` ˆ B 2n´2 p1{qq ď γpφ1H q ď π ` . Or, pour tout compact K Ă Z2n , il
existe ą 0 tel que K Ă Z , donc γpZ 2n “ limγpZ q ď π.
Ñ0
Corollaire 4.2 (Non-tassement de Gromov, 1984). Il existe un difféomorphisme
symplectique ψ : pB 2n prq, ω0 q Ñ pZ 2n pRq, ω0 q si et seulement si r ď R.
On peut définir une autre capacité symplectique à l’aide de ce théorème, qu’on
appelle largeur de Gromov et qu’on note wpM, ωq (w pour width) qui est la borne
supérieure des nombres πr2 tel qu’il existe un plongement symplectique de B 2n prq
dans pM, ωq.
40
5 Compléments
L’objectif du cours était le théorème de non tassement de Gromov. On donne
à présent quelques pistes pour aller plus loin.
5.1 Équation de Hamilton-Jacobi
On considère un hamiltonien non autonome Ht : T ˚ M Ñ R, t P r0, 1s tel que
pour tout t P r0, 1s, Ht soit à support compact. On pose Lt l’image de la section
nulle par le flot φt associé à Ht . On a que pour t assez petit, Lt et une section exacte
et il existe une fonction Ft : M Ñ R lisse en t telle que Lt “ tpq, dFt pqqq, q P M u.
On a alors le résultat suivant.
Proposition 5.1. Avec les notations précédentes, Ft est solution de l’équation de
Hamilton-Jacobi, c’est-à-dire qu’il existe une fonction c : r0, 1s Ñ R telle que
Bt Ft pqq ` Ht pq, dFt pqqq “ cptq.
Démonstration. Soit λ la forme de Liouville sur le cotangent de M , on a vu que
pour tout t la forme φ˚Ht λ ´ λ est exacte, il existe donc une application (appellée
action) At : T ˚ M Ñ R telle que
φ˚Ht λ ´ λ “ dAt . p1q
żt
żt
d s ˚
pφH q λds “ pφsH q˚ p´wpXHs q ` dpλpXHs qqqds. D’où
Or on a dAt pq, pq “
ds
0
0
żt
At “ pλpXHs q ´ Hs q ˝ φH pq, pqds ` f ptq.
0
Si l’on note φtH pq, 0q “ pqt , pt q, l’équation (1) en pq, 0q devient par hypothèse :
dAt pq, 0q “ pt pqqdqt pqq
“ DFt pqt , 0q ˝ dqt pqq
“ dFt ˝ qt pqq.
żt
D’où Ft ˝ qt pqq “
dFs pqs pqqqBs qs pqq ´ Hs pqs pqq, dFs pqq pqqqds ` gptq. Ainsi, en
0
dérivant par rapport à t on obtient
9
Bt Ft ˝ qt pqq ` dFt pqt pqqBt qt pqq “ dFt pqt pqqBt qt pqq ´ Ht pqt pqq, dFt pqt pqqq ` gptq,
soit encore
9
Bt Ft ˝ qt pqq ` Ht pqt pqq, dFt pqt pqqq “ gptq.
Remarque 5.1. Dans le cas où M “ R2n , on peut supposer que Ft pqq “ 0 en dehors
d’un compact par normalisation et donc que cptq “ 0 dans l’aquation précédente.
41
5.2 Ordonabilité du groupe Hamc pR2n q
Définition 5.1. Soit φ1 et φ2 deux difféomorphismes hamiltoniens de R2n à support compact, on dit que φ1 ď φ2 s’il existe un hamiltonien H à support compact
1
tel que φ2 ˝ φ´1
1 “ φH et H ě 0.
Il est immédiat de constater qu’on a ainsi défini un ordre sur le groupe Hamc pR2n q.
Proposition 5.2. Si φ1 ď φ2 , alors il existe une f.g. normalisée F1 : R2n ˆRN Ñ R
qui engendre φ1 et une f.g. normalisée F2 : R2n ˆRN Ñ R qui engendre φ2 vérifiant
F1 ď F2 .
Démonstration. On considère la composition de φ2 avec φ´1
1 et l’hamiltonien H
1
donné par la défnition. On décompose φH comme dans la preuve du théorème de
j`1
j
Conley et Zendher (Théorème 2.2). Il existe un entier k tel que ψj :“ φHk ˝ pφHk q´1
est C 1 -proche de l’identité et on a φ1H “ ψk´1 ˝ ... ˝ ψ0 . Pour chaque j, il existe
ne f.g. fj : R2n Ñ R de Γψj à support compact. On va montrer que fj ě 0. On
1
ne fait la preuve que pour f0 . Soit ψ0 “ φHk . Considérons la f.g. Gt : R2n Ñ R qui
engendre Γ kt , normalisée à support compact. On utilise le diagramme commutatif
suivant :
φH
τ
R2n ˆ R2n ÝÝÝÑ T ˚ R2n
„
§
§
§
§
σψ đ
pId,ψqđ
„
R2n ˆ R2n ÝÝÝÑ T ˚ R2n
τ
φtH pz1 , z2 q
pid, φtH qpz1 , z2 q
´1
On définit
“
où H̃t pz1 , z2 q “ ´Ht pz2 q. On a σφtH “
t
φH̃˝τ ´1 et par construction H̃ ˝ τ ě 0. On observe ensuite que Gt satisfait l’équation Bt Gt pqq ` H̃t ˝ τ ´1 pq, dGt pqqq “ 0. Or le deuxième terme étant négatif, le
premier doit être positif. Ainsi comme G0 “ 0 on a que pour tout t, Gt ě 0 et
f0 “ G 1 .
k
On considère maintenant une f.g. normalisée G1 : R2n ˆ RN Ñ R de Γφ1 , on
définit F2 : R2n ˆ pR2n qk ˆ RN Ñ R par
F2 px0 , y0 , ..., xk , yk , ξq “ G1 px1 , y0 , ξq ` f0 px2 , y1 q ` ... ` fk´1 px0 , yk q `
ÿ
xyj , xj ´ xj`1 y.
jPZ{kZ
C’est une f.g. normalisée de φ2 et si l’on définit F1 : R2n ˆ pR2n qk ˆ RN Ñ R par
ÿ
F1 px0 , y0 , ..., xk , yk , ξq “ G1 px1 , y0 , ξq `
xyj , xj ´ xj`1 y,
jPZ{kZ
on obtient une f.g. normalisée qui engendre φ1 . Ainsi en comparant les deux fonctions, F1 ď F2 .
42
Corollaire 5.1. ‚ Si φ1 ď φ2 , alors c˘ pφ1 q ě c˘ pφ2 q.
‚ Si φ ě id, alors c` pφq “ 0.
Démonstration. Pour le premier point, on considère F1 et F2 des f.g. pour φ1 et
φ2 vérifiant les hypothèses de la proposition.
Alors pour tout réel b, tF2 ď bu Ă tF1 ď bu d’où en particulier pour toute
forme α, on a cpF1 , αq ď cpF2 , αq. Pour le second point, il suffit de remarquer que
c˘ pidq “ 0 et l’encadrement 0 ď c` pφq ď c` pIdq donne le résultat.
Proposition 5.3. L’ordre est compatible avec la structure de groupe.
Démonstration. Il est évident que si φ ě Id, alors φ´1 ď Id. D’autre part, si
´1
φ1 ď φ2 et ψ1 ď ψ2 , il suffit d’écrire φ2 ψ2 ˝ pφ1 ψ1 q´1 “ φ2 ψ2 ψ1´1 φ´1
2 ˝ φ2 φ1 pour
vérifier que φ1 ψ1 ď φ2 ψ2 .
Théorème 5.1 (Viterbo). On considère un difféomorphisme hamiltonien φ de R2n
à support compact et on suppose que φ ě id et que pour tout k ą 0, φk ‰ id. Alors
˝
CardpPerpφq Y supppφqq “ 8.
Démonstration. On considère la f.g. normalisée Fk de φk . Supposons qu’un point
fixe z de φk soit un point fixe de φkh pour tout h positif. On considère un chemin
γ reliant un point z0 en dehors du support, on a alors
ż
h´1
ÿż
´1
α.
α“
Fkh piFkh pz, 0qq “
γ˚φkh¯pγq
j“0
¯ pγq
φkj pγ˚φkpj`1q
L’intégrale dans la somme se réécrit :
ż
ż
¯
kpj`1q
pγ ˚ φ
pγqα “
pφkj q˚ α
¯
kj
k
φ
γ˚φ pγq
ż
“
α
γ˚φk¯pγq
la dernière égalité venant du fait que pφkj q˚ α ´ α est exacte. On a donc
´1
Fkh pi´1
Fkh pz, 0qq “ hFk piFk pz, 0qq.
Pour tout k, il existe un point fixe zk de φk tel que
c´ pφk q “ ´Fk pi´1
Fk pzk , 0qq ă 0.
On obtient donc une suite tzk {k P Nu de points periodique de φ. De plus, si zk “ zj
alors k1 c´ pφk q “ 1j c´ pφj q. Supposons maintenant qu’il existe un sous ensemble infini
K de N tel que pour tout k P K, zk “ z̃. On a alors pour k0 P K,
k
kÑ8
c´ pφk q “ c´ pφk0 q Ñ ´8,
k0
et ceci nous donne une contradiction.
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Références
[1] V. I. Arnol’d. Mathematicals Methods of Classical Mechanics. Graduate
Texts in Mathematics. Springer-Verlag, 1989.
[2] E. J. Zehnder C. C. Conley. « The Birkhoff-Lewis Theorem and a Conjecture of V. I. Arnol’d ». In : Inventiones Mathematicae 73 (1983), p. 33–49.
[3] D. Salamon D. Mc Duff. Introduction to Symplecic Topology. Oxford Mathematical Monographs. Oxford Science Publications, 1998.
[4] M. Mazzucchelli. « Symplectically degenerate maxima via generating functions ». In : Math. Z. 275 (2016), p. 715–739.
[5] J.-C. Sikorav. « Un problème de disjonction par isotopie symplectique dans
un fibré cotangent ». In : Comment. math. Helv. 62 (1987), p. 62–73.
[6] C. Viterbo. « Symplectic topology as the geometry of generating functions ».
In : Mathematische Annalen 292 (1992), p. 685–710.
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