Le sujet Notions et repères du programme : sujet - subjectif/objectif - essentiel/accidentel. 1 Remarques Préliminaires sur le programme Officiel. On constate facilement que le programme de philosophie est principalement fondé sur l’examen de notions. Les notions doivent être questionnées pour dégager et structurer les di↵érents problèmes que nous devons traiter. Cette problématisation concerne la structure même du programme officiel : nous pouvons relever trois termes ⌧ sujet , ⌧ conscience , ⌧ esprit . Ces trois termes ne sont pas synonymes, et pourtant il se réfère à un même domaine de réalité. Prenons un exemple chez Descartes : celui-ci utilise le terme esprit pour désigner ce qui en l’homme pense. Pour Descartes, l’esprit est une chose immatérielle. Dans le cours sur la conscience, nous nous référerons à Descartes, mais Descartes n’emploie pas ce terme. Le terme ⌧ conscience est bien substantif désignant une réalité chez Hegel et chez les phénoménologues comme Sartre. Mais c’est plutôt un adjectif dans la philosophie analytique anglo-saxonne, qui elle emploie le terme ⌧ esprit mais cela n’implique pas que cet esprit soit immatériel. ⌧ Pour achever cette présentation, le terme ⌧ sujet est rarement employé sauf par ceux qui critiquent la prééminence du sujet. L’emploi le plus fréquent est le terme ⌧ je ou ego. Conclusion : il faut comprendre quelle est la fonction du sujet, comprendre pourquoi l’analyse précédente recèle des illusions, et naviguer entre les cartésiens, les philosophes allemands et leurs disciples français, mais aussi ne pas négliger la philosophie anglo-saxonne : les concepteurs du programme n’ont pas voulu, n’ont pas su, n’ont pas pu trancher... d’où l’impression de confusion dans l’articulation de ce programme. Enfin, toutes les rubriques suivantes participent de l’identité du sujet : le sujet se déploie dans la culture, et donc dans le politique 1/4 Imprimé le 16 septembre 2014 Le sujet et la morale. Avec les deux notions ⌧ sujet et ⌧ réel , nous pourrions presque traiter l’ensemble du programme, mais cette dernière remarque est plutôt ironique. 2 Les di↵érents emplois du terme jet dans la langue française ⌧ su- Étymologie : Ce terme vient du latin subjectum du verbe sub-jicio, qui signifie ⌧ placer dessous , et donc aussi ⌧ soumettre . Voyons quelques emplois du terme sujet dans des contextes qui ne sont pas uniquement philosophiques : 1. Dans un régime monarchique, on parle d’un sujet pour désigner un être humain qui est soumis à l’autorité du monarque. 2. Le grammairien (et le logicien) distingue d’une part le sujet de la proposition et d’autre par l’attribut du sujet réuni par celui-ci par la copule est : ⌧ le chat est noir . 3. Un objet, c’est habituellement ce qui existe matériellement indépendamment des points de vue subjectifs que l’on peut avoir sur cet objet. 4. ⌧ Je pense que le ciel est bleu. Il faut maintenant organiser l’analyse : Le sens 1 ouvre la voie à la réflexion morale, politique.On pourrait faire un parallèle avec la loi morale ou les normes légales. On pourrait alors réfléchir sur la distinction entre contrainte et obligation en reprenant l’étymologie du concept d’autonomie. Le sens 2 se réfère donc à la grammaire, mais de manière plus ancienne à la philosophie aristotélicienne, nous le développerons ultérieurement. Un objet désignerait plutôt la chose qui existe réellement. Subjectif serait le point du sujet pensant (subjectif a la même racine étymologique que sujet). Enfin, dans la phrase ⌧ je pense que le ciel est bleu , le sujet grammatical, c’est le je, ciel sera l’objet. C’est ce je qui historiquement devient fondamental dans la réflexion philosophique avec Descartes. On comprend alors pourquoi le sens 3 n’est pas clair : il n’y a pas de connaissance objective sans l’activité d’un sujet pensant... S’il n’y a pas de sujet, il n’y a pas de pensée, pas de connaissance. 2/4 Imprimé le 16 septembre 2014 Le sujet 3 Signification philosophique de la notion ⌧ sujet Le sujet [ŒpokeimËnon] 1 , c’est ce dont tout le reste s’affirme, et qui n’est plus lui-même affirmé d’autre chose [...]. Aussi est-ce lui dont il convient de fixer tout d’abord la notion, étant donné que, dans l’opinion courante, c’est le sujet premier d’une chose qui constitue le plus véritablement sa substance. Aristote, Métaphysique, Z, 1028 b 36 - 1029 a 1 À définir plus tard. Le sujet, c’est donc ce qui est placé dessous, c’est-à-dire la substance, qui sub-siste malgré la modifications des accidents, les accidents ce sont les attributs secondaires par exemple (le noir du chat). Un (ou plusieurs attributs) attribut essentiel permettra de déterminer l’essence de la chose. Cette analyse est évidemment problématique : 1. Comment justifier le parallèle entre la structure logico-grammaticale et la réalité. Il faudra revenir sur cette notion. 2. qu’est-ce qu’une substance ? Nous verrons dans le cours sur la conscience comment Descartes intègre cette catégorie (substance) à l’analyse du sujet pensant. Une citation de Descartes permet d’indiquer la direction. C’est cet usage qui est important Il est certain que la pensée ne peut pas être sans une chose qui pense, et en général aucun accident ou aucun acte ne peut être sans une substance de laquelle il soit l’acte. Mais, d’autant que nous ne connaissons pas la substance immédiatement par elle-même, mais seulement parce qu’elle est le sujet de quelques actes, il est fort convenable à la raison, et l’usage même le requiert, que nous appelions de divers noms ces substances 2 que nous connaissons être les sujets de plusieurs actes ou accidents entièrement di↵érents. 1. Prononciation : upokeimenon. 2. Ces di↵érentes substances sont le corps et l’esprit. L’acte de penser n’est pas l’acte de se promener. 3/4 Imprimé le 16 septembre 2014 Le sujet Descartes, Réponses aux troisièmes objections, dans Descartes, Œuvres philosophiques, Garnier, 1967, volume 2, p. 605 Nous pouvons conclure provisoirement que dans les textes philosophiques le terme ⌧ sujet peut se référer aux di↵érents emplois énumérés plus haut de la langue française. En revanche, l’expression ⌧ philosophie du sujet signifie habituellement la (ou les) doctrine philosophique qui accordent une place fondamentale au je pensant. 4/4 Imprimé le 16 septembre 2014